Vilfredo Pareto, TraitÉ de sociologie gÉnÉrale, vol. 1b (notes) (1917)

Vilfredo Pareto (1848-1923)  
[Created: 31 Aug. 2022]
[Updated: November 30, 2022 ]

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Pareto's Treatise was originally published in Italian in 1916, and then in a revised edition in French in 1917. It was later translated into English in 1935.

Vilfredo Pareto, Traité de sociologie générale. Édition française par Pierre Boven. Revue par l’auteur. Volume I (Paris: Librairie Payot, 1917). Volume II (Paris: Librairie Payot, 1919).

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Table des matières

Volume 1a (le texte) [a separate file]

TABLE DES CHAPITRES

Dedication

Les chapitres

Volume 1b (les notes) [this file]

 


 

Note du Chapitre I. Préliminaires (§1 à §144), vol. 1, pp. 1-64

[FN: § 3-1]

Dans le premier chapitre du Manuel, on trouvera exposés, spécialement au point de vue de l'économie politique, certains sujets touchés ici à propos de la sociologie.

[FN: § 6-1]

Pour plus de détails, voir : GUIDO SENSINI : La teoria della Rendita. – PIERRE BOVEN : Les applications mathématiques à l'économie politique.

[FN: § 8-1]

Cette classification, à peine ébauchée ici, sera amplement étudiée dans les chapitres suivants.

[FN: § 13-1]

Il y a des théories qui n'ont que l'apparence logico-expérimentale, mais dont le fond ne possède pas ce caractère. Voir § 407 et sv., un exemple particulier et très important de ces théories pseudo-logico- expérimentales. Proprement, elles ont leur place parmi les théories non logico-expérimentales.

[FN: § 16-1]

Manuel, I, 36 et sv.

[FN: § 16-2]

Manuel, I, 41 : « Il est absurde d'affirmer, comme certains le font, que leur foi est plus scientifique que celle d'autrui. La science et la foi n'ont rien de commun, et celle-ci ne peut pas contenir plus ou moins de celle-là. »

[FN: § 19-1]

A. VERA : Introduction à la philosophie de Hegel.

[FN: § 23-1]

Manuel, I, 33.

[FN: § 35-1]

Manuel, III, 228.

[FN: § 38-1]

Manuel, III, 226 ; Systèmes, t. I, p. 338 et sv.

[FN: § 49-1]

CIC. ; De div., 1, 85 (77) : Quo tempore, cum signifer primi hastati signum non posset movere loco, nec quidquam proficeretur, plures cum accederent, Flaminius, re nuntiata, suo more neglexit. Itaque tribus bis horis concisus exercitus, atque ipse interfectus est.

[FN: § 49-2]

MICHAUD ; Hist. des croisades, t. !, 1. III « (p. 356) Beaucoup de croisés attribuèrent la victoire remportée sur les Sarrasins à la découverte de la sainte lance. Raymond d'Agiles atteste que les ennemis n'osaient approcher des bataillons au milieu desquels brillait l'arme miraculeuse. » En note : « Raymond d'Agiles ajoute qu'aucun de ceux qui combattaient autour de la sainte lance, ne fut blessé. Si quelqu'un me dit, ajoute-t-il, que le comte d'Héraclé, porte-étendard de l'évêque, fut blessé, c'est qu'il avait remis l'étendard à un autre et qu'il s'était un peu éloigné. »

[FN: § 50-1]

Manuel, I, 45, 51.

[FN: § 50-2]

L'expérience règne jusque dans la mathématique. Il est en effet bien connu que l'analyse moderne a démenti plusieurs théories tenues pour certaines, à cause de l'intuition de l'espace.

[FN: § 51-1]

Systèmes socialistes, II, p. 71 et sv. Manuel, p. 35, note 1 ; p. 14, note 1.

[FN: § 58-1]

Par exemple, à propos d'Héraclite, ZELLER, Phil. der Griech., I, p. 658, note justement que lorsque ce philosophe est conduit à des hypothèses qui sont en contradiction avec les résultats connus par nos sens, il ne reconnaît pas la fausseté de ces hypothèses, comme aurait fait un empirique, mais déclare que les sens nous trompent, et que la raison seule nous donne des connaissances certaines.

[FN: § 61-1]

P. BOVEN ; Les appl. math. à L’éc. pol.: « (p. 106) D'abord quelques définitions [de Walras]. Celle de la valeur est intéressante : « La valeur d'échange est la propriété qu'ont certaines choses de n'être pas obtenues ni cédées gratuitement, mais d'être achetées ou vendues, reçues et données en certaines proportions de quantité contre d'autres choses. » (p. 107). Cette « propriété qu'ont certaines choses » parait être du domaine de la physique ou de la métaphysique. Ce n'est pas la même chose que le prix…. On sent que l'auteur est embarrassé de nous dire ce que c'est que cette propriété ; il tourne autour de la chose, la qualifie, la classe, indique les conditions dans lesquelles on la rencontre et comment elle se comporte ; mais il ne nous la montre que sous un verre dépoli. »

[FN: § 62-1]

V. PARETO : L'Économie et la Sociologie, dans Rivista di Scienza, 1907, n. 2 : « Ce terme [valeur] a fini par indiquer une entité métaphysique, mystique, qui peut tout signifier, parce qu'elle ne signifie plus rien du tout. Déjà Stanley Jevons, voyant les équivoques sans nombre auxquelles donnait lieu ce terme, avait proposé de le bannir de la science. Depuis lors le dégât est encore devenu plus grand, si c'est possible, * et l'usage de ce terme pourrait peut-être à l'avenir servir à distinguer les ouvrages d'économie politique non scientifiques, des ouvrages scientifiques. »

« Nous avons trouvé dans un traité d'économie politique publié récemment que « le prix est une manifestation concrète de la valeur ». Nous connaissions déjà les incarnations du Bouddha ; il faut y ajouter les incarnations de la valeur. Avec cette admirable phraséologie, on pourra dire que le chat est la manifestation concrète de la félinité, et l'eau la manifestation concrète du principe liquide. Mais qu'est le principe liquide ? Hélas! nous l'ignorons. »

[FN: § 65-1]

La façon dont Boèce, traduisant Porphyre, pose le problème, est très connue : Mox de generibus et speciebus, illud quidem sive subsistant, sive in solis undis intellectibus posita sint, sive subsistentia corporalia sint an incorporalia, et utrum separata a sensibilibus an in sensibilibus posita et circa haec consistentia dicer recusabo.

[FN: § 67-1]

Voir ce raisonnement au § 485.

[FN: § 69-1]

Manuel, I, 39, 40, pp. 26-27.

[FN: § 69-2]

Manuel, I, 42-48.

[FN: § 69-3]

Manuel, I, 4 et sv.

[FN: § 69-4]

Comme toujours, nous employons les termes : précision, précis, dans le sens indiqué aux § 108 et 119-1]; c'est-à-dire qu'ils expriment une désignation aussi exacte que possible des choses. Par exemple, le chimiste ne refuse pas d'employer le mot eau pour désigner l'eau pure, comme il est possible de l'obtenir avec les moyens aujourd'hui en notre pouvoir ; mais il refuserait d'en user pour désigner l'eau de mer. Le mathématicien sait fort bien qu'il n'y a aucun nombre qui, multiplié par lui-même, donne deux, c'est-à-dire qui soit racine de deux ; mais il se sert sans scrupules d'une valeur approchée autant que l'exige son calcul, par exemple 1,414214 ; cependant il refuserait d'employer la valeur 5, pour le même calcul. Les mathématiciens ont longtemps raisonné comme s'il existait un nombre dont le carré soit 2 (en général un nombre irrationnel) ; aujourd'hui, ils ont reconnu la nécessité de recourir à deux classes de nombres réels ; la première comprend tous les nombres rationnels dont le carré est plus petit que deux : la seconde, tous les nombres rationnels dont le carré est plus grand que deux. Cet exemple est remarquable pour deux raisons : 1° Il montre le continuel devenir de la science, faisant voir que dans une discipline pourtant déjà si parfaite, comme est la mathématique, on a pu maintenant atteindre une perfection et une précision plus grande encore. Il y a des exemples analogues pour les séries et pour un très grand nombre de démonstrations. 2° C'est un exemple d'approximations successives, c'est-à-dire atteignant toujours une plus grande précision. Les mathématiciens anciens firent bien de ne pas s'égarer dans ces subtilités, et les modernes ont eu raison de s'en occuper ; les premiers préparèrent la voie aux seconds, et ceux-ci la préparent à leurs successeurs. Hipparque, Kepler, Newton, Laplace, Gauss, Poincaré nous donnent en mécanique céleste des approximations succes- sives. Hegel, au contraire, trouve du premier coup l'absolu ; mais il y a cette différence entre ses élucubrations et les théories des savants, qu'avec les premières on ne peut calculer, même très en gros, la position d'un astre ; on est dans le cas de celui qui donnerait 100 pour racine de 2 ; tandis qu'avec les secondes, on peut calculer ces positions avec une approximation croissante ; c'est le cas de celui qui donne à 2 pour racine une valeur comme 1,414214. En sociologie, nous tâcherons de parcourir le chemin suivi par les astronomes, les physiciens, les chimistes, les géologues, les botanistes, les zoologistes, les physiologistes et, en somme, par tous ceux qui cultivent les sciences naturelles modernes, et de fuir, autant qu'il est en notre pouvoir, la route qui amena les Pères de l'Église à nier les antipodes, et Hegel à arguer à propos de mécanique, de chimie et d'autres sciences semblables ; route suivie en général par les métaphysiciens, les théologiens, les littérateurs, dans une étude qu'ils disent être des faits naturels et qui n'est autre qu'un vain discours sur des sentiments.

[FN: § 69-5]

Manuel, I, 14, 30. J'ai donné de nombreux exemples de cette méthode des approximations successives, dans le Cours et le Manuel. Pour la sociologie, on en trouvera un bon, dans : MARIE KOLABINSKA ; La circulation des élites en France. L'auteur a eu le mérite de ne s'occuper que des parties principales du phénomène, en laissant de côté les secondaires. C'est la seule façon dont on peut construire une théorie scientifique, au mépris des divagations faciles de la littérature éthique, qu'on persiste à nommer Sociologie. On trouvera beaucoup d'autres exemples d'approximations successives, dans le présent ouvrage.

[FN: § 70-1]

Par conséquent, nous nous abstenons de porter aucun jugement sur la discussion engagée entre l'orthodoxie catholique et les modernistes, au sujet de cette inspiration. C'est une chose qui sort du domaine expérimental où nous voulons rester. Nous devons seulement observer que l'interprétation des modernistes ne saurait être rattachée aux sciences positives.

[FN: § 75-1]

Je fais ici une seule exception ; elle est d'ailleurs plus apparente que réelle, puisque, tel un exemple, elle vise à mieux expliquer le fait objectif relevé. Il m'arrivera de dire du mal, beaucoup de mal, de certains actes des démagogues athéniens. Je crois qu'il importe fort peu au lecteur de savoir ce que je pense de cette république ancienne ; mais s'il m'est permis de l'exprimer, je dirai que personne, je crois, ne l'admire plus que moi et n'aime davantage l'esprit grec. De même, je me moquerai de la Sainte Science ; ce qui ne m'empêche pas d'avoir consacré ma vie à la science expérimentale. On peut rire de l'humanitarisme démo- cratique de certains politiciens français, et avoir un grand respect pour les savants de ce pays ; penser même que la république est peut-être le régime qui lui convient le mieux. On peut relever la liberté de mœurs de certaines femmes émancipées, des États-Unis, et avoir un grand respect pour les excellentes mères de famille que l'on trouve dans ce pays. Railler les hypocrisies des dominicains de la vertu, en Allemagne, se concilie très bien avec l'admiration pour cette puissante nation et le respect de la science allemande. J'estime superflu de faire des distinctions semblables pour l'Italie et d'autres pays. En voilà assez : le lecteur voudra bien se rappeler que cette exception restera unique, et il se gardera de chercher dans cet ouvrage ce qui n'y est pas, c'est-à-dire l'expression des sentiments de l'auteur ; mais exclusivement des relations objectives entre des choses, des faits et des uniformités expérimentales.

[FN: § 77-1]

Cours, t. I, 198, p.102.

[FN: § 77-2]

Cours, t. I, 196, p. 100 : « il est donc bien évident que la population des trois états considérés ne saurait continuer à croître indéfiniment avec le taux actuel. » Les trois états dont on parle sont la Norvège, l'Angleterre avec le Pays de Galles et l'Allemagne. Pour le premier, la raison annuelle d'accroissement géométrique, qui était de 13,9 0/00, de 1861 à 1880, est tombée à 5,7 0/00, de 1905 à 1910. Pour l'Angleterre avec le Pays de Galles et l'Allemagne, on a les nombres suivants :

Années

Angleterre et

Pays de Galles

Allemagne

1880-1885…………

11,1

7,1

1885-1890…………

13,4

10,7

1890-1895…………

11,5

11,3

1895-1900…………

11,5

15,2

1900-1905…………

10,6

14,7

1905-1910…………

10,4

13,7

On voit qu'après avoir atteint son maximum entre 1895 et 1900, l'accroissement (le la population allemande est maintenant en baisse.

Le phénomène prévu, du ralentissement dans l'accroissement de la population ressort encore mieux, à l'examen des naissances annuelles par mille individus :

Années

Norvège

Angleterre

et Pays de Galles

Allemagne

1875

31,2

35,4

40,6

1885

31,3

32,9

37,0

1895

30,5

30,3

36,1

1900

29,9

28,7

35,6

1905

27,4

27,3

33,0

1910

26,1

25,1

31,1

Le fait du ralentissement dans l'accroissement de la population allemande est surtout remarquable dans les grandes villes, où la richesse s'est beaucoup accrue.

Nombre de naissances

pour 100 habitants

1902

1912

Munich

35,1

21,9

Leipzig

31,5

22,1

Dresde

31,5

20,3

Cologne

37,8

26,7

Magdebour

g

29,2

22,8

Stettin

35,3

22,7

Danzig

34,7

27,6

Cela confirme ce qui est dit dans le Cours, t. I, 198, p. 102 : « Il est donc évident que des forces limitant l'accroissement de la population ont dû s'opposer à la force génésique dans le passé, ou s'y opposeront dans l'avenir. »

[FN: § 77-3]

Cours, t. I, 211[FN: § 1] , p. 111. Si P est la population dans l'année t, comptée depuis 1801, on a :

log P = 6,96324 + 0,005637 t.

Cette formule nous donne la loi théorique de la population, de 1801 à 1891. Les chiffres suivants sont donnés dans le Cours :

Années

Population

(millions

réelle

calculée

différences

1811

1821

1831

1841

1851

1861

1871

1881

1891

8. 892

10. 164

12. 000

13. 897

15. 914

17. 928

20. 066

22. 712

25. 975

29. 001

9. 188

10. 294

11. 912

13. 563

15. 443

17. 583

20. 020

22. 795

25. 953

29. 551

+0,296

+ 0,130

-0,088

-0,334

-0,471

-0,345

-0,046

+0,083

-0,022

+0,550

La plus grande différence, c'est-à-dire l'erreur maximale de la formule, est 0,550. Si l'on calcule la population de 1910 au moyen de cette formule, on trouve 37,816 ; tandis que la population réelle est de ; 35,796. La différence est 2,020, beaucoup plus grande que l'erreur la plus forte. Il est donc démontré que la population ne suit plus la loi observée de 1801 à 1891, et qu'elle augmente moins.

[FN: § 77-4]

Cours, t. I, 211-2, p. 111. Il convient de tenir compte de ce qui est dit plus haut : « (179... (p. 92) les mouvements de la transformation des capitaux personnels dépendent en partie du mouvement économique. (180) Il faut faire attention que nous n'avons pas démontré (p. 93) qu'ils dépendent explicitement de l'état économique, mais seulement de ses variations... » En note : « Si l'état économique est caractérisé par une fonction F d'un nombre quelconque de variables qui sont fonction du temps t ; nous avons démontré que les nombres des mariages, des naissances, et jusqu'à un certain point des décès, sont fonction de dF/dt; mais nous n'avons pas démontré que ces nombres sont des fonctions explicites de t…»

[FN: § 77-5]

Cours, t. II, 965, pp. 322-323.

[FN: § 77-6]

La définition de la « diminution de l'inégalité des revenus » est donnée dans le Cours, t. II, 965-1, p. 320. Voir en outre Manuel, p. 389 et sv. – G. SENSINI ; La teoria della Rendita p. 342 à 353 et spécialement la note 185-4, p. 350.

[FN: § 77-7]

Édition italienne du Manuel.

[FN: § 85-1]

Voir à ce propos Le mythe vertuiste.

[FN: § 86-1]

Allant contre le courant général des sciences sociales actuelles, ce livre sera sévèrement blâmé par tous ceux qui, habitués à suivre ce courant, ferment leur esprit aux innovations. Ces personnes jugent une théorie en se posant cette question : « Est-elle d'accord avec les doctrines que je tiens pour bonnes ? » Si oui, elles la placent, elle aussi, parmi les bonnes ; sinon parmi les mauvaises. Il est donc manifeste que le présent ouvrage, étant en plein désaccord avec leurs théories, est certainement mauvais. Il trouvera peut-être plus d'indulgence parmi les jeunes gens qui n'ont pas encore l'esprit encombré des préjugés de la science officielle, et chez ceux qui jugent une théorie en se posant la question : « Est-elle d'accord avec les faits ? »

Je crois m'être assez clairement exprimé pour que le lecteur sache désormais que je recherche exclusivement cet accord, et que je ne m'occupe pas d'autre chose, ni de près ni de loin.

[FN: § 87-1]

Le prof. Charles Gide, qui avait sous les yeux le Manuel, publié en 1906, imprimait ce qui suit, en 1909. Histoire des doctrines économiques : « (p. 623) Mais les hédonistes [parmi lesquels l'auteur place V. Pareto. Pourquoi ? Dites-le moi] sont très réservés en ce qui concerne les possibilités de réalisation de leur monde économique, ils sont au contraire très affirmatifs, un peu trop même, en ce qui concerne les vertus de leur méthode et ne sont pas exempts sur ce point d'un orgueil dogmatique qui rappelle celui des socialistes utopistes. On croit entendre Fourier quand on lit que « ce que l'on a déjà trouvé en économie politique n'est rien à côte de ce que l'on pourra découvrir dans la suite » – entendez par la méthode mathématique – » Et en note : « V. PARETO. Giornale degli economisti. septembre 1901. »

Encore si la citation était exacte, M. Gide aurait au moins pu remarquer que l'auteur avait changé d'avis, et avait adopté celui qu'on voit clairement exprimé dans le Manuel. Mais la citation n'est pas exacte, parce que M. Gide applique à la pratique ce que l'auteur dit seulement de la théorie pure! On dirait vraiment que M. Gide n'a pas lu l'article qu'il cite. On y trouve les passages suivants : « (p. 239) Or le caractère principal des nouvelles théories économiques est seulement de nous avoir donné, jusqu'à présent, une image générale du phénomène complexe ; cette image n'est qu'approximative, comme le serait celle d'une sphère, comparée au globe terrestre ; mais en attendant nous ne connaissons rien de mieux. »

« (p. 241) Les équations de l’économie pure. » Il est bien entendu qu'elles servent seulement d'instrument d'étude, au même titre qu'il est, par exemple, utile de connaître les dimensions de l'ellipsoïde terrestre. « (p. 242)... on peut dire qu'elle [l'économie pure], a bien trouvé l'instrument nécessaire à ses recherches, mais que c'est à peine si elle l'a employé : il y a presque tout à faire, dans cette voie sur laquelle devraient se mettre les économistes qui veulent vraiment faire progresser la science. » Il s'agit de science et de science pure, non de pratique, comme on voudrait l'insinuer par la comparaison avec Fourier ! Voici la conclusion de la citation que M. Gide a séparée du reste de l'article, en la tronquant par-dessus le marché : « (p. 252) Là encore, il convient de répéter que nous ne sommes qu'aux débuts de la science nouvelle et que ce qu'elle a déjà trouvé n'est rien en comparaison de ce qu'elle pourra découvrir dans la suite. On ne peut même pas comparer l'état actuel de l'économie pure à celui de l'astronomie après la publication des Principia de Newton. » On remarquera la comparaison avec une science abstraite comme l'astronomie et non avec une science con- crète. Dans la suite de son ouvrage, le prof. Charles Gide, continue à me gratifier d'opinions et de théories qui ne m'ont jamais appartenu, que souvent même j'ai combattu, parce qu'elles étaient tout à fait contraires à celles qui sont effectivement les miennes. Pour d'autres détails, voir V. PARETO; Économie mathématique, dans l'Encyclopédie des Sciences mathématiques.

[FN: § 89-1]

Un savant personnage demandait à l'un de mes élèves si ma scienceétait démocratique ! On a dit et écrit qu'elle était socialiste ; un autre a prétendu qu'elle était réactionnaire. La science qui recherche seulement les uniformités (lois) des faits n'est rien de tout cela : elle n'a aucune épithète ; elle se contente de rechercher ces uniformités et rien d'autre. Personnellement, j'ai été partisan de la liberté économique, dans le Cours ; mais dans le Manuel, j'ai abandonné cette attitude et m'en abstiens, quand je m'occupe de science.

[FN: § 99-1]

Manuel1, 20.

[FN: § 101-1]

Il y a encore des professeurs d'économie politique qui répètent comme des perroquets que les lois physiques n'ont pas d'exceptions, tandis que les lois économiques en ont. Telle est leur ignorance ! Et, comme par un fait exprès, il y en a qui, en disant que les lois physiques sont dépourvues d'exceptions, citent celle des corps qui diminuent de volume en se refroidissant !

[FN: § 104-1]

C'est une des nombreuses formes de la méthode des approximations successives (§ 69-9°, 540).

[FN: § 104-2]

Manuel, III, 29, 30 (p. 156 et sv.) ; .35 (p. 159).

[FN: § 106-2]

Manuel, p. 10. On pourrait dire, pour contenter les hégéliens : on a observé que de nouveaux concepts s'ajoutent sans cesse à celui que les hommes se créent d'un phénomène, à un moment donné et cette série paraît, autant qu'on peut le connaître, devoir être indéfinie.

[FN: § 108-1]

Cette empreinte, à vrai dire très peu nette, des faits dans notre esprit, constitue tout ce qu'il y a de vrai (expérimentalement) dans les théories qui attribuent une valeur scientifique à l'intuition. Elle sert à connaître la réalité, comme une mauvaise, parfois une très mauvaise photographie peut servir à connaître un endroit quelconque. Quelquefois, au lieu d'une photographie, même très mal faite, on n'a qu'une image fantaisiste.

[FN: § 112-1]

Premiers Principes, II, chap. III, § 46: « Troisièmement, la pensée n'étant possible que sous relation, la réalité relative ne peut être conçue comme telle qu'en connexion avec une réalité absolue ; et la connexion de ces deux réalités étant également persistante dans la conscience, est réelle au même sens que les termes qu'elle unit sont réels. » Toute l'œuvre de Spencer est pleine de semblables concepts.

[FN: § 112-2]

Voici un exemple pris au hasard. Premiers Principes, II, chap. III, § 48 : « Si telle est notre connaissance de la réalité relative, qu'avons-nous à dire de l'absolue ? Une seule chose : c'est qu'elle est un mode de l'Inconnaissable uni à la matière par la relation de cause à effet. » Il y a des gens qui croient comprendre cela.

[FN: § 118-1]

J'ai fait voir dans le Manuel que l'on peut aussi exposer les théories économiques sans employer les mots : valeur, prix, capital, etc. Les économistes littéraires ne peuvent comprendre cela. Ils ont raison, à un certain point de vue ; parce que pour eux, par exemple, capital ne désigne pas une chose, mais bien un ensemble de sentiments ; et il est naturel qu'ils veuillent conserver un nom pour le désigner. Pour leur faire plaisir, on pourrait appeler capital objectif, la chose et capital subjectif, l'ensemble de sentiments. On pourrait dire alors : Celles des théories économiques qui se bornent à la recherche des rapports existant entre les faits économiques n'ont que faire de la notion de capital subjectif, elles peuvent, selon le cas, admettre ou non celle de capital objectif. Les théories économiques dont le but est de persuader autrui en vue d'un résultat pratique, tirent grand profit de la notion de capital subjectif, car c'est par les sentiments qu'on persuade autrui. C'est pourquoi il leur est utile de créer une confusion entre le capital objectif et le capital subjectif, afin que le raisonnement scientifique ne s'oppose pas au raisonnement de sentiment. Sur quelques points, ces théories s'approchent plus du cas concret que celles de l'économie pure, parce que dans la notion de capital subjectif, elles introduisent des notions de sociologie qui ne trouvent pas place en économie scientifique. Elles ont cependant un énorme défaut : celui du manque de précision. Pour approcher la réalité, au lien d'employer implicitement et presque à la dérobée, des notions sociologiques, il vaut mieux les adopter ouvertement, ce qui force à donner au moins quelque précision au discours. On se rendra mieux compte de tout cela dans GUIDO SENSINI ; La teoria della Rendita. La notion de capital subjectif est la plus importante pour la sociologie, qui étudie justement les sentiments que ces mots expriment. Comme le phénomène concret est à la fois économique et sociologique, si on l'étudie en économie appliquée, on rencontre des notions analogues à celle du capital subjectif. C'est pourquoi, dans le Manuel, j'ai étudié les phénomènes concrets, non seulement sous leur aspect économique et intrinsèque, mais aussi au point de vue de la manière dont ils sont compris parles hommes qui s'y trouvent mêlés. (Voir dans l'index du Manuel : Vue subjective.)

[FN: § 118-2]

Au point de vue historique pur, cela a lieu seulement pour les choses nouvelles. Pour celles qui ressemblent déjà plus ou moins à des choses déjà connues, on choisit le plus souvent le nom de ces choses, en se contentant de lui donner un sens plus précis, qui peut souvent différer considérablement du sens admis par le langage vulgaire.

[FN: § 119-1]

On voudra bien se rappeler ce qui a été dit déjà au § 108. Il n'y a rien d'absolu dans la science logico- expérimentale, et le terme précis signifie ici: avec la plus petite erreur possible. La science s'efforce de rendre la théorie aussi proche que possible des faits, tout en se rendant compte qu'on ne peut obtenir une coïncidence absolue. Si, parce qu’elle est irréalisable, quelqu'un repousse aussi la coïncidence approxima- tive, il n'a qu'à émigrer de ce monde concret, où tout n'est qu'approximatif.

[FN: § 119-2]

Manuel,édit. franc., p. 556, note 1.

[FN: § 119-3]

Sur d'autres erreurs nées du défaut de précision des mots et sur les logomachies de l’économie littéraire, voir Manuel, p. 219, note 1 (III, 178) – p. 246 (III, 227) – p. 329, note 1 (V, 70) – p. 333, note 1 (V, 81) – p. 391, note 1 (VII, 24), – p. 414 (VII, 79) – p. 439, note 1 (VIII, 11) – p. 544, note 1 (Appendice, 6) – p. 636, note 1 (Appendice, 108) – p. 638, note 1 (Appendice, 108). – Mais voir surtout GUIDO SENSINI; La teoria della Rendita ; et PIERRE BOVEN ; Les applications mathématiques à l'Économie politique.

[FN: § 131-1]

Le mot condition a donc ici un sens différent et plus étendu que celui qu'il avait au § 126.

[FN: § 144-1]

Nous emploierons toujours les termes qualité, quantité, qualitatif, quantitatif, dans un sens qui n'a rien de métaphysique ; c'est tout simplement celui qui est adopté en chimie, quand on oppose l'analyse qualitative à l'analyse quantitative. La première nous fait connaître, par exemple, qu'un corps donné est un alliage d'or et de cuivre : la seconde nous apprend quel poids d'or et quel poids de cuivre se trouvent dans un poids donné de cet alliage. Quand nous indiquerons un certain élément, dans un phénomène sociologique, nous dirons que notre proposition est qualitative; quand nous pourrons indiquer la quantité de cette chose, même d'une façon très grossière, nous dirons que c'est une proposition quantitative. Malheureusement, nous manquons de balances capables de poser les choses dont traite la sociologie, et nous devrons, en général, nous contenter d'en indiquer la quantité, au moyen de certains indices qui croissent ou diminuent avec la chose elle-même. En économie politique, nous avons un exemple remarquable de cet usage, à propos de l'ophélimité (Manuel, Appendice).

 


 

Notes du Chapitre II. Les actions non-logiques (§145 à §248), vol. 1, pp. 65-149

[FN: § 145-1]

Ce chapitre, écrit une première fois en français, fut en partie traduit en italien par une autre personne, et publié dans la Rivista italiana di Sociologia, maggio-agosto, 1910.

[FN: § 154-1]

HÉSIODE ; Op. et dies, 757-758.

[FN: § 155-1]

E. BLANCHARD ; Hist. des insectes., v. I. Mais il y a plus. J.-H. Fabre qui a fait d’intéressantes observations sur ces insectes et d’autres semblables, a pu voir que le nombre des eumènes préparés pour nourrir la larve, varie de cinq à dix, selon que celle-ci deviendra mâle ou femelle. Puisque l’œuf est pondu après que les provisions ont été rassemblées, Fabre croit que la mère sait à l'avance le sexe de l'œuf qu'elle pondra (Souvenirs entomologiques, 2e série, p. 69). Il revient sur la question du sexe de l'œuf de certains insectes, dans la 3e série (p. 387 et sv.). Il a pu observer comment se nourrissait la larve de l'eumène. (Souv. ent., 2e série) : « p. 74) L'œuf n'est pas déposé sur les vivres, il est suspendu au sommet du dôme par un filament qui rivalise de finesse avec celui d'une toile d'araignée. » Puis : « (p. 74) La larve est éclose et déjà grandelette. Comme l'œuf, elle est suspendue suivant la verticale, par l'arrière, au plafond du logis... le ver est attablé : la tête en bas, il fouille le ventre flasque de l'une des chenilles. Avec un fétu de paille, je touche un peu le gibier encore intact. Les chenilles s'agitent. Aussitôt le ver se retire de la mêlée. » Il rentre dans une espèce de fourreau. « (p. 75) La dépouille de l'œuf, conservée cylindrique et prolongée peut-être par un travail spécial du nouveau-né, forme ce canal de refuge. Au moindre signe de péril dans le tas des chenilles, la larve fait retraite dans sa gaine et remonte au plafond, où la cohue grouillante ne peut l'atteindre. » Quand, plus tard, le ver est plus fort et les chenilles plus faibles, le ver se laisse tomber.

[FN: § 155-2]

J.-H. FABRE; Souven. entom., 1re série, pp. 67-79. Un autre exemple vraiment extraordinaire est donné dans la 4e série. Le calicurgue donne la chasse aux araignées appelées épeires. L'épeire « (p. 253) a sous la gorge deux poignards acérés, avec goutte de venin à la pointe ; le Calicurgue est perdu si l'aranéide le mord. Cependant son opération d'anesthésie réclame une parfaite sûreté de bistouri. Que faire en ce péril qui troublerait le chirurgien le mieux affermi ? Il faut d'abord désarmer le patient, et puis l'opérer. Voici qu’en effet le dard du Calicurgue, dirigé, d'arrière en avant, plonge dans la bouche de l'Épeire avec précautions minutieuses et persistance accentuée. Dès l'instant, les crochets venimeux se referment inertes et la proie redoutable est dans l'impuissance de nuire. L’abdomen de l'hyménoptère détend alors son arc et va plonger l'aiguillon en arrière de la quatrième paire de pattes, sur la ligne médiane, presque à la jonction du ventre et du céphalothorax... Les noyaux nerveux, foyer du mouvement des pattes, sont situés un peu plus haut que le point blessé, mais la direction de l'arme d'arrière en avant permet de les atteindre. De (p. 254) ce dernier coup résulte la paralysie de huit pattes à la fois... Tout d'abord, comme sauvegarde de l'opérateur, un coup dans la bouche, ce point terriblement armé, redoutable entre tous ; puis, comme sauvegarde de la larve, un second coup, dans les centres nerveux du thorax, pour abolir les mouvements. »

[FN: § 156-1]

J.-H. FABRE; Souv. ent., 1re série.

[FN: § 156-2]

J.-H. FABRE; Souv. ent., 4e série.

[FN: § 157-1]

J.-H. FABRE, Souv. ent., 1re série.

[FN: § 158-1]

ALBERT DAUZAT : La lang. franç. d'auj., dit très bien : « (p. 238) Un principe auquel se rallient aujourd'hui la grande majorité des linguistes, domine toute la matière : c'est l’inconscience (les phénomènes linguistiques. [Il exprime ainsi en d'autres termes la même idée que nous émettons sous le nom d'actions non-logiques]. Accepté à peu près univer- sellement dans le domaine de la phonétique – on a renoncé depuis longtemps à expliquer les transformations des sons par des fantaisies individuelles – ce principe rencontre, au contraire, en sémantique, les mêmes oppositions que soulevaient tout à l’heure les lois. M. Bréal fait intervenir très nettement la volonté dans l'évolution sémantique... Cette théorie, qui, il y a cinquante ans, n'aurait guère rencontré d'adversaires, est aujourd'hui repoussée par la presque totalité des linguistes, qui souscrivent volontiers à l'axiome suivant posé par V. Henry : « (p. 239) Toute explication d'un phénomène linguistique qui présuppose, à un degré quelconque, l'exercice de l'activité consciente d'un sujet parlant, doit a priori être écartée et tenue comme non avenue. » Mais cela est exagéré. La terminologie scientifique est presque toujours l'effet de l'activité consciente ; et certains termes du langage ordinaire peuvent avoir une origine semblable. D'autre part, l'objection de Bréal n'empêche pas qu'un grand nombre de phénomènes soient conscients seulement en apparence, parce que l'activité du sujet se résout en actions non-logiques du 2e genre et surtout du 4e. A. DARMESTETER ; La vie des mots : « (p. 86) Au fond, partout dans ces changements [du sens des mots] on retrouve deux éléments intellectuels coexistants : l'un principal, l'autre accessoire. À la longue, par un détour inconscient, l'esprit perd de vue le premier, et ne considère que le second... Sous le couvert d'un même fait physiologique – le mot – l'esprit passe ainsi d'une idée à une autre. Or cette marche inconsciente, qui transporte le fait dominant du détail principal au détail accessoire, est la loi même des transformations dans le monde moral ». Plus loin, il ajoute : « (p. 133) Ainsi, malgré les liens de famille que le développement de la langue peut établir entre les mots, le plus souvent ils vivent chacun de leur vie propre, et suivent isolément leur destinée, parce que les hommes en parlant ne font point d'étymologie ». Rien de plus vrai. C'est pourquoi l'on tombe si souvent dans l’erreur, quand on veut déduire le sens d'un mot, de son étymologie ; ou bien, ce qui est pire, quand on prétend reconstruire par l'étymologie, l'histoire inconnue d'un lointain passé.

[FN: § 159-1]

MOMMSEN : Le dr. pub. rom., t. I.

[FN: § 159-2]

Cours, 719, t. II, p. 88: « Il suit de là que, tandis que les entrepreneurs s'efforcent de réduire les prix de revient, ils obtiennent, sans le vouloir, l'autre effet de réduire le prix de vente [cela n'arrive pas sous le régime du monopole], puisque la concurrence ramène toujours l'égalité entre ces deux prix. » Cfr. 151, 718. Manuel V, 11, p. 277; V, 74 : « (p. 315) De cette façon les entreprises concurrentes aboutissent là où elles ne se proposaient nullement d'aller (§ 11). Chacune d'elles ne recherchait que son propre avantage, et ne se souciait des consommateurs que dans la mesure où elle pouvait les exploiter, et, au contraire, par suite de toutes ces adaptations et réadaptations successives imposées par la concurrence, toute cette activité des entreprises tourne au profit des consommateurs. »

[FN: § 160-1]

Op. et dies, 735-739.

[FN: § 160-2]

Op. et dies, 778-779.

[FN: § 160-3]

CIC. ; De Leg., II, 12, 31: Quid enim maius est, si de iure quaerimus, quam posse a summis imperiis et summis potestatibus comitiatus et concilia vel instituta dimittere, vel habita rescindere ? Quid gravius, quam rem susceptam dirimi, si unus augur alio die dixerit ?

[FN: § 167-1]

Manuel II, 108 ; IX, 62.

[FN: § 174-1]

CIC. ; De nat. deor., III, 2, 5.

[FN: § 175-1]

E. DESCHAMPS ; Au pays des Veddas. En Grèce aussi et à Rome, on faisait dépendre la majeure partie des actions, d'oracles, de présages, etc. Avec le temps, bon nombre de ces pratiques devinrent de simples formalités. CIC. De div.; I, 16, 28 : Nihil fere quondam maioris rei, nisi atiApicato, ne privatim, quideni. gerebatur: quod etiarn nunc nuptiarum auspices declarant, qui, re omissa, nomen tanturn lenent. Nam ut nunc extis (quanquam id ipsum aliquando minus, quani olim), sic tain- avibus magnie res impetriri solebant.

[FN: § 175-2]

H.-C.-P. BELL; Superstitions ceremonies connected with the cultivation of alvi or hill paddy. Cité de E. DESCHAMPS.

[FN: § 176-1]

Elles existent encore chez des peuples presque civilisés, comme les Chinois, et n'ont pas complètement disparu chez nous.

MATIGNON: Superst. crim. et misère en Chine: « (p. 4) La superstition, telle que je vais essayer de la décrire, n'a rien à faire avec la religion... » L'auteur explique l'entité mystérieuse dont parlent les Chinois, sous le nom de Fong-Choué (littéralement vent et eau). (p. 7) « On pourrait, d'une façon générale, le considérer comme une sorte de superstition topographique. Pour les Chinois, un point quelconque de l'Empire du Milieu est un centre de forces, d'influences spirituelles, sur la nature desquelles ils n'ont que des idées vagues, mal définies, peu ou pas comprises, d'autant plus craintes et respectées. » L'auteur cherche à expliquer les faits par les croyances, et n'y réussit pas, parce que les faits ne sont pas conséquence des croyances (actions logiques), mais les croyances, des faits (actions non-logiques). « (p. 8) Le fong-choué nous paraît donc quelque chose de vague, de mystérieux, d'obscur, d'une interprétation difficile, pour ne pas dire impossible [comme l'était la divination, en Grèce et à Rome]. Et cependant, pour les Chinois, cette fantaisie devient la science ». C'est-à-dire que c'est simplement le vernis logique répandu abondamment sur leurs actions non-logiques. Ailleurs: « (p. 11) il faut que l'astrologue ait fixé un jour heureux pour les funérailles, et que surtout, par de longues et sagaces recherches, il ait pénétré à fond la question palpitante du fong-choué ». – « (p. 18) Le Chinois qui fait bâtir n'a pas seulement à tenir compte du fong- choué de ses voisins. Il doit aussi se préoccuper de celui de sa maison. Une meule, un puits, un coin de mur, l'intersection de deux rues ne devront pas se trouver devant la porte principale... Ce n'est pas tout. Si l'emplacement convient au fong-choué, la destination de l'immeuble lui agréera-t-elle ? X bâtit une maison avec l’intention d'en faire une boutique de riz. Le capricieux fong-choué aurait préféré qu'on y vendît du thé. Pas de doute. Les affaires de X ne pourront que péricliter ». – « (p. 19 Cette superstition du fong-choué est extrêmement tenace [simplement parce qu'elle n'est autre chose que la manifestation de l'état psychique chinois]. C'est la dernière qui résiste au christianisme. Et encore, quels sont les Chinois, considéré comme bons chrétiens, qui ont totalement renoncé à leur croyance ?»

Le fait est général (§ 1002 et sv.).

[FN: § 176-2]

PRELLER ; Les dieux de l'anc. Rome.

MARQUARDT ; Le culte chez les Romains, t. I, donne une liste de dieux qui ne peut être que très incomplète, car un grand nombre de ces noms ne sont certainement pas parvenus jusqu'à nous. Voir au § 1339 quelques-uns de ces dieux : citons ici, à titre d'exemple : « (p. 17) Potina et Educa, qui apprennent à l'enfant à manger et à boire ; Cuba qui protège l'enfant transporté du berceau dans le lit: Ossipago, quae durat et solidat infantibus parvis ossa ; Carna, qui fortifie les chairs ; Levana quae levet de terra; Statanus, Statilinus, dea Statina, qui enseignent à l'enfant à se tenir debout, Abeona et Adeona, qui soutiennent ses premiers pas : Farimus, Fabulinus, qui l'aident à parler ». L'auteur continue en énumérant les divinités de l'adolescence, les dieux du mariage, les divinités protectrices dans les diverses circonstances de la vie, et ajoute : « (p. 19) Les dieux que nous venons d'indiquer avaient pour mission de protéger les personnes ; il y avait une autre série de dieux qui veillaient aux diverses occupations des hommes et aux lieux qui en étaient le théâtre... » Marquardt a tort, quand il affirme que : «( p. 23) À l'origine du moins, comme l'a démontré Ambrosch, ces milliers de noms qui figuraient dans les indigitamenta n'ont fait que désigner les diverses fonctions (potestates) d'un petit nombre de divinités ». Nous sommes encore dans l'abstrac- tion. Les preuves qu'on en tire ne peuvent être acceptées. Les voici, d'après Marquardt : « (p. 23) 1° Le fait d'indigitare consistait dans une prière adressée à un ou plusieurs dieux non pas d'une manière vague, mais avec indication de ceux de leurs pouvoirs dont on attendait des secours ; on invoquait un dieu à plusieurs reprises et en joignant à son nom divers attributs ». Ces différents attributs correspondent parfois à divers dieux qui se sont confondus en une seule personnalité : d'autres fois ce peut être des aspects différents d'un même dieu ; mais cela ne prouve pas que Potina, Educa, Cuba, par exemple, soient des puissances abstraites d'une même personne divine. (p. 211) «2° En second lieu, il n'était pas permis par le droit pontifical d'offrir une seule et même victime à deux dieux en même temps ». Brissaud, traducteur de Marquardt, démontre lui aussi que ce motif n'est pas fondé. (p. 24) « 3° Enfin on ne doutait pas non plus qu'une partie des noms rapportés ci-dessus ne fussent des surnoms de dieux connus. » Le fait que quelques dieux recevaient certains surnoms, n'implique pas que tous les dieux des indigitamenta ne fussent que des surnoms et encore moins que, comme il est dit en marge (loc. cit. p. 23), « on désignait par là divers attributs de la providence divine ». Autrement il faudrait conclure que les surnoms des empereurs romains indiquaient les divers attributs d'une même personnalité.

[FN: § 176-3]

PLINE: Natur. hist., II 5, 3 (7) Quamobrem maior caelitum populus etiarn quain hominuin intelligi potest, cum singuli quoque ex semetipsis totidem deos faciant, lunones Geniosque adoptando sibi, gentes vero quaedam animalia, et aliqua etiarn obscena, pro diis habeant, ac multa dictu magis pudenda, per fcetidas caepas, alia et similia iurantes.

[FN: § 177-1]

Nous ne pouvons accepter ce que dit Marquardt, loc. cit. (176 2) : « (p. 8) Leurs divinités [des Romains] n'étaient que des « abstractions ; ils adoraient en elles ces forces de la nature, dans la dépendance desquelles l'homme se sent à chaque instant, mais qu'il peut s'assujettir en observant ponctuellement les prescriptions d'ordre extérieur établies par l'État, pour honorer les dieux ». Il est nécessaire d'intervertir les termes. Pour réussir dans leurs entreprises, les Romains observaient exactement certaines règles qui, spontanées tout d'abord, furent ensuite employées par l'État. Quand plus tard on voulut expliquer ces règles, on y vit une adoration des forces naturelles. D'autre part, le même Marquardt relève le rôle prépondérant des actes matériels et la menue importance des abstractions : « (p. 9) La pratique de la religion n'exigeait qu'un appareil matériel des plus simples, mais en revanche les rites étaient hérissés de difficultés et de complications : la moindre irrégularité dans une cérémonie enlevait à celle-ci toute son efficacité ».

[FN: § 177-2]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Il est facile de s'en rendre compte chez les enfants. Or l'embryologie et la physiologie admettent que l'ontogénie répète la phylogénie ; autrement dit que le développement de l'individu répète celui de son espèce.

[FN: § 177-3]

ANTOINE ; Syntaxe de la langue latine: « (p. 125) La faculté d'employer les adjectifs substantivement est beaucoup plus restreinte en latin qu'en grec et même qu'en français. Le latin évite le substantif même là où il existe, et le remplace volontiers par une périphrase, p. ex. : animi eorum qui audiunt, au lieu de auditorum. Il faut, pour qu'on puisse ainsi faire de l'adjectif un substantif, qu’il ressorte clairement de la disposition des mots et de l'ensemble de la phrase que l'adjectif représente bien, non la qualité, mais une personne ou une chose douée de cette qualité ». C'est juste le contraire de ce qu'on imagine par la transformation des petits dieux en abstractions qualificatives. – RIEMANN et GŒLZER ; Grammaire comparée du grec et du latin, p. 741, notent : « L’adjectif n'était pas à l'origine distinct du substantif... ; le substantif est sorti de l'adjectif : avant d'atteindre la substance on n'a d'abord vu dans tout objet que ses modes, que ses qualités apparentes et frappantes :    c'est « le vivant », animal c'est « le doué de vie », etc. C'est seulement assez tard et dans un état de civilisation avancée que, devenu capable de concevoir l'idée de l'être indépendamment de ses modes, l'esprit a distingué les substantifs des adjectifs... ». On ne saurait donc admettre le contraire ; à savoir qu'on ait d'abord conçu des êtres abstraits : la providence, etc..., et qu'on ait ensuite imaginé les formes sous lesquelles ces êtres se manifestaient. L'observation démontre au contraire qu'on est remonté des formes aux êtres, la plupart du temps imaginaires.

[FN: § 177-4]

D. AUG. : VI, 9 «... Si quelqu'un assignait au petit enfant deux nourrices dont l'une ne lui donnerait qu'à manger et l'autre qu'à boire, de même que deux déesses, Educa et Potina, furent préposées à cet office, ne dirait-on pas que cet homme est fou, et qu'il agit en sa maison comme un mime ? On prétend que Liberus tire son nom de liberare, quod mares in coeundo per eius beneficium. emissis seminibus liberentur ; et que Libera fait de même pour la femme. Ils supposent aussi que Libera est Vénus, quod et ipsas perhibeant semina emittere ; et Ob hoc Libero eamdem virilem corporis partem in templo poni, femineam Liberae... Quand le mari et la femme s'unissent, c'est le Dieu Iugatinus qui préside. Soit. Mais il s'agit de conduire l'épouse à la maison [de l'époux] ; à cela préside le dieu Domiducus ; pour que l'épouse reste dans la maison, intervient le dieu Domitius ; pour qu'elle reste avec le mari, intervient la déesse Manturna. Que faut-il encore ? Qu'on épargne la pudeur humaine ; que la concupiscence de la chair et du sang fassent le reste gouvernées secrètement par la pudeur. Pourquoi remplir la chambre à coucher d'une foule de dieux, quand, même les paranymphes se sont retirés ? On la remplit ainsi, non pour que l'idée de leur présence rende plus grand le souci de la pudicité, mais afin que grâce a leur coopération, la jeune fille, craignant l'inconnu, à cause de la faiblesse de son sexe, perdît sa virginité sans difficulté. Dans ce but interviennent la déesse Virginensis et le dieu père Subigo et la déesse mère Prema et la déesse Pertunda et Vénus et Priape. Qu'est-ce que cela ? Si l'époux avait besoin d'être aidé par les dieux, en toute entreprise, un seul parmi les dieux ou une seule parmi les déesses ne suffisaient-ils pas ? N'était-ce pas assez de Vénus seule, appelée à l'aide, dit-on, parce que, sans son intervention, aucune femme ne peut cesser d'être vierge ?... Et en vérité si la déesse Virginensis est présente, afin que la ceinture de la vierge soit déliée, si le dieu Subigo est présent, ut viro subigatur, si la déesse Prema est présente, ut subacta. ne se commoveat comprimatur, qu'est-ce que la déesse Pertunda fait là ? Qu'elle ait honte, qu'elle sorte et que le mari fasse aussi quelque chose. Valde inhonestum est, ut quod vocatur illa, impleat quisquam nisi ille. Mais peut-être tolère-t-on cela parce qu'on dit que c'est une déesse et non un dieu ; car si on croyait que c'est un mâle, et qu'il s'appelât Pertundus, le mari appellerait à l'aide contre lui, pour protéger la pudeur de sa femme, encore plus que la femme en couches, contre Sylvain. Sed quid hoc dicam, cum ibi sit et Priapus ni nimius masculus, super cuius immanissimum et turpissimum. facinum. sedere nova nupta iubebatur, more honestissimo et religiosissimo matronarum ? ». Saint Augustin a des raisons à revendre, si l'on veut juger ces actions au point de vue logique ; mais il ne dit pas qu'à l'origine, c'étaient des actions non-logiques, des formalités mécaniques, qui jouèrent ensuite un rôle parmi les actes du culte divin.

[FN: § 177-5]

D. AUG., ; loc. cit. (§ 177-3).

[FN: § 178-1]

G. BOISSIER: La religion rom.,t. I

[FN: § 179-1]

Tout cela n'est pas entièrement hypothétique. Cette fameuse plante a toute une littérature ! EUSTATHE (Odyss., éd. Rom. p. 1658 éd. Bâle, p. 397) nous offre le choix entre deux interprétations. L'une est mythologique. Le géant , fuyant après la bataille contre Zeus, débarqua dans l'île de Circé et attaqua Circé. Le Soleil accourut au secours de sa fille et tua le géant. Du sang qui coula à terre, naquit une plante qu'on appela , à cause du terrible combat soutenu par le géant. La fleur est semblable au lait, à cause de l'éclat du soleil ; la racine est noire par l'effet du sang noir du géant ou de la frayeur de Circé. – Ephestion raconte à peu près la même histoire. Si cette interprétation ne vous plaît pas, Eusthate vous en offre une autre qui est allégorique : est l'instruction ; la racine est noire à cause des ténèbres de l'ignorance ; les fleurs sont blanches par l'effet de la splendeur de la science. La plante est difficile à arracher, parce qu'il est difficile de posséder la science. – Il ne manque plus qu'un disciple de Max Müller, pour nous dire que cette plante à racine noire, à fleurs blanches, que les hommes ne peuvent arracher et qui a des effets bienfaisants, c'est le soleil qui sort des ténèbres de la nuit, resplendit au-dessus des hommes, échappe à leur pouvoir et donne la vie à la terre.

PLIN. : Nat. hist., XXV, 8, (4). Trad. LITTRÉ : «La plante la plus célèbre est, d'après Homère, celle qu'il croit être appelée moly (allium magicum, L.) par les dieux : ce poète en attribue la découverte à Mercure, et il en signale l'efficacité contre les plus puissants maléfices (Odyss., X, 302). Aujourd'hui, dit-on, elle croît aux environs du lac Phénée, et dans la contrée de Cyllène en Arcadie. Elle est semblable à la description d'Homère ; elle a la racine ronde et noire, la grosseur d'un oignon et la feuille de la seille, on a de la peine à l'arracher. Les auteurs grecs nous en peignent la fleur tirant sur le jaune, tandis qu'Homère a dit qu'elle était blanche. J'ai rencontré un médecin habile dans la connaissance des herbes, qui m'a assuré que cette plante croissait en Italie, et qui m'en a fait apporter quelques jours après, de la Campanie, un échantillon qu'on avait tiré à grand'peine des difficultés d'un terrain pierreux. La racine avait trente pieds de long, et encore elle n'était pas entière ; elle s'était cassée ».

THEOPHR. : Hist. plant., IX, 15, 7, dit de cette plante : : « Le moly se trouve à Phénée et dans la contrée de Gyllène ; on dit aussi qu'il est semblable à celui dont parle Homère. Il a la racine ronde, semblable à l'oignon ; ses feuilles sont semblables à celles de la seille. On l'emploie comme contrepoison et dans les opérations magiques. Il n'est pas si difficile-à arracher que le dit Homère ». Tous ces auteurs croient à la réalité de la plante appelée par Homère. Au moyen âge, nous voyons que la mandragore jouit d'un grand crédit. Mercure a disparu, mais Satan le remplace.

O'REILLY ; Les deux procès de condamnation, les enquêtes et la sentence de réhabi- litation de Jeanne d'Arc, t. II « p. 164) Art. 7. Jeanne avait l'habitude de porter sur elle une mandragore, espérant par là se procurer fortune et richesse en ce monde : elle croit en effet que la mandragore a la vertu de procurer fortune. –D. Qu'avez-vous à dire sur la man- dragore ? – R. Je nie entièrement. (p. 165) (Extr. des interr. se rapp. à l'art. 7) – Le jeudi le 1er mars, interrogée sur ce qu'elle a fait de sa mandragore – A répondu qu'elle n'en eut jamais, mais qu'elle a entendu dire qu'il y en avait une près de sa maison, sans l'avoir jamais vue ; c'est, lui a-t-on dit, chose dangereuse et mauvaise à garder – elle ne sait à quoi cela peut servir. – Interrogée sur l'endroit où serait celle dont elle a entendu parler ? – A répondu avoir entendu dire qu'elle était en terre, près d'un arbre, mais elle n'en sait la place : elle a entendu dire qu'au-dessus était un coudrier ».

[FN: § 180-1]

BOISSIER ; La religion rom., v. 1.

[FN: § 182-1]

Ici, l'induction nous met en présence d'un phénomène qui sera longuement étudié au chap. VI, et que nous rencontrerons ailleurs encore. D'autres cas semblables, que nous nous abstenons de citer, se trouveront dans ce chapitre. Parcourons en tout sens notre champ d'investigations ; nous achèverons dans les chapitres suivants, des études que nous ne faisons qu'effleurer ici.

[FN: § 182-2]

PLINE ; Nat. hist., XXVIII, 3, 1,12). Trad. LITTRÉ. Cette citation nous servira ailleurs aussi ; c'est pourquoi nous la donnons avec une certaine ampleur.

[FN: § 182-3]

Texte: In universurn vero omnibus horis credit vita, nec sentit. Dalechamps : Credit vulgi opinio valere verba, nec certa cognitione et rerum sensu id persuasum habet. Cicéron, lui aussi, exclut le raisonnement. Cic. ; De div., 1, 3, 4 : Atque haec, ut ego arbitror, veteres, rerum magis eventis moniti, quam ratione docti, probaverunt.

[FN: § 182-4]

Texte : Quippe victimas caedi sine precatione non videtur referre, nec deos rite consuli. La difficulté réside dans le verbe referre. GRONOVIUS dit fort bien : Sine precatione non videtur referre, (id est, nihil iuvare putatur, nihil. prodesse vulgo creditur) caedi victimas, nec videtur deos rite consuli. Quo significat necessario preces adhibendas.

[FN: § 182-5]

Texte : Praeterea alia sunt verba impetritis, alia depulsoriis, alia commentationis. Com- mentationis id est : commendationis. Impetritum est un terme augural et désigne une demande faite aux dieux, selon le rite. Cic. ; De div., II, 15, 31): qui evenit, ut is, qui impetrire velit, convenientem. hostiam rebus suis immolet ? « ... comment se fait-il que celui qui veut obtenir [quelque chose des dieux] sacrifie une victime appropriée à ses fins ?» VAL. MAX.; I, 1 : Maiores nostri statas solennesque caerimonias pontificum. scientia, bene gerendarum rerum auctoritates augurum observatione. Apollinis praedictiones vatum libris, portentorum depulsiones Etrusca disciplina [éloigner les mauvais présages par la science des Étrusques] explicari voluerant. Prisco etiam instituto rebus divinis opera datur, cum aliquid commendandum est praecatione ; cum exposcendum, voto ; cum solvendum, gratulatione ; cum inquirendum vel extis vel sortibus, impetrito [par une demande, c'est-à-dire en prenant les augures], cum solemni ritu peragendum, sacrificio : quo etiam ostentorum ac fulgurum. denuntiationes procurantur.

[FN: § 182-6]

Cfr. Liv. VIII, 9 et X, 28.

[FN: § 182-7]

Texte : Confitendum sit de tota coniectione. Gronovius : Perinde est ac si dixisset, de tota lite, de tota quaestione.

[FN: § 182-8]

Voir plus loin (§ 960 et suiv.) quelques-unes des nombreuses élucubrations sur les nombres. Notez la tentative de justifier par la logique, l'observation des jours de fièvre, l'imagination non-logique.

[FN: § 182-9]

Voir en outre : CIC. ; De div., 1, 45, 102 : Neque solum deorum voces Pythagorei observaverunt, sed etiam hominum, quae vocant omina. Quae maiores nostri quia valere censebant, idcirco omnibus rebus agendis, « Quod bonum, faustum, felix, fortunatumque esset », praefabantur ; rebusque divinis, quae publice fierent, ut « faverent linguis », imperabatur ; inque feriis imperandis, « ut litibus et iurgiis se abstinerent». Itemque in lustranda colonia, ab eo, qui eam deduceret, et cum imperator exercitum, censor populum lustraret, bonis nominibus, qui hostias ducerent, eligebantur : quod idem in delectu consules observant, ut primus miles fiat bono nomine.

[FN: § 184-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] Un exemple entre beaucoup d'autres. On peut entendre des protestants invoquer saint Antoine de Padoue, pour qu'il leur fasse retrouver un objet perdu. Ces mêmes personnes ont une profonde pitié pour les catholiques qui croient aux saints.

[FN: § 184-2]

THÉOCR.; Idyll., II, 17. Il y a, tant qu'on veut, des exemples de ce genre, chez tous les peuples ; on n'a que l'embarras du choix. Ainsi les incantations qu'enseigne Caton ne semblent avoir aucun rapport avec les dieux; elles agissent par leur vertu propre. CAT. ; De re rust., 160. Luxum si quod est, hac cantione sanum fiet. Harundinem prende tibi viridem. P. IV, aut V, longam. Mediam diffinde, et duo homines teneant ad coxendices. Incipe cantare in alio. s. f. motas vaeta, daries dardaries astataries dissunapiter, usque dum coeant. Ferrum insuper iactato. Ubi coierint et altera alterant tetigerit, id manu prende, et dextra sinistra praecide. Ad luxum, aut ad fracturam alliga, sanum fiet. Pline rappelle cette recette magique donnée par Caton, et en ajoute d'autres. PLIN.; Nat. hist., XXVIII, 4, 7, (2) : Cato prodidit luxatis membris carmen auxiliare ; M. Varro podagris. Caesarem dictatorem post unum ancipitem vehiculi casum, ferunt semper, ut primum consedisset, id quod plerosque nunc facere scimus, carmine ter repetito securitatem itinerum. aucupari solitum.

[FN: § 184-3]

Luc.; Philopseudes, 14 : Un magicien hyperboréen, pour complaire à Glaucus, amoureux de Chrysis, fait venir celle-ci. « Enfin l'Hyperboréen forma un petit amour de terre glaise. « Va – lui dit-il – et amène Chrysis ». La figurine de terre glaise s'envola. Bientôt après, frappant à la porte, Chrysis se présenta et, étant entrée, elle embrassa Glaucus comme folle d'amour et demeura avec lui jusqu'à ce que nous entendîmes le chant du coq. Alors la lune s'envola au ciel, Hécate s'enfonça sous terre, les autres fantômes s'évanouirent, et nous renvoyâmes Chrysis, quand commençait à poindre l'aurore. (15) Si tu avais vu ces faits, Tichiade, tu ne nierais plus qu'il y a beaucoup de choses utiles dans les enchantements. – Tu as raison – dis-je – je les croirais si je les voyais ; mais actuellement j'estime être digne d'excuse, si je n'ai pas, pour ces choses, la vue aussi perçante que la vôtre. Je connais bien la Chrysis dont tu parles ; c'est une femme amoureuse et facile. Je ne vois pas pourquoi vous aviez besoin de lui envoyer un ambassadeur de terre glaise, un magicien hyperboréen et la lune même, quand avec vingt drachmes on peut l'amener jusqu'aux Hyperboréens. Car c'est grâce à ces enchantements que cette femme se livre entièrement ; et elle éprouve des impressions toutes contraires à celles des fantômes ; car, si ceux-ci entendent le bruit du bronze ou du fer, ils s'enfuient – du moins c'est vous qui le dites – mais elle, si elle entend sonner de l'argent, elle accourt au bruit. »

[FN: § 185-1]

HÉS. Op. et dies, 346.

[FN: § 185-2]

PLIN. Nat. hist., XXVIII, 4, 3 : Qui fruges excantassit... Qui malum, carmen incantassit. Voir en outre SENEC. ; Nat. quaest., IV, 6-7 (§ 194).

[FN: § 185-3]

Maintenant encore on compose des philtres amoureux, par des procédés qui ne diffèrent guère de ceux employés anciennement. Un arrêt du tribunal de Lucera, commenté par l'avocat VITTORIO PASOTTI – Monitore dei Tribunati, Milano, 9 août 1913 – nous apprend que trois femmes avaient pris dans un cimetière des os humains, pour en composer un philtre qui devait induire un homme à épouser une certaine femme.

[FN: § 188-1]

PALL.; I, 35 : Contra grandinem multa dicuntur. Panne, roseo mola cooperitur. Item cruentae secures contra caelum minaciter levantur. Item omne horti spatium alba vite praecingitur : vel noctua pennis patentibus extensa suffigitur : vel ferramental quibus operandum est, sevo unguntur ursino. Aliqui ursi adipem cum oleo tusum reservant, et falces hoc, cum putaturi sunt, ungunt. Sed hoc in occulto debet esse remedium, ut nullus putator intelligat, cuius vis tanta esse perhibetur, ut neque nebula neque aliquo animali possit noceri. Interest etiam ut res profanata non valeat ». PLIN. Nat. hist., XXVIII, 23 : Iam primum abigi grandines turbinesque contra fulgura, ipsa in mense connudata, sic averti violentiam caeli : in navigando quidem tempestates etiam sine menstruis.

[FN: § 188-2]

CLEMENT. ALEX. ; Stromat., VI, 8, p. 758-755, éd. Potter ; 630-631, éd. Paris. Cet auteur raconte d'autres faits encore. La Grèce souffrant d'une grande sécheresse, la Pythie prescrivit d'avoir recours aux prières d'Éaque. Celui-ci alla sur une montagne et pria. Il ne tarda pas à pleuvoir abondamment. On peut encore voir, sur ce point, le scoliaste de Pindare : Nem., V, 17 ; DIOD. SIC, VI, 61 : PAUS., I, 44. À ce propos, l'auteur rappelle le cas de Samuel (I Rois, 12, 18), qui lui aussi a fait pleuvoir. Puis Clément revient aux Grecs et raconte comment Aristée, à Céos, obtint de Jupiter, des vents qui tempérèrent l'ardeur de la canicule. HYGIN.; Poet. astron, II, 4, rappelle aussi ce fait. Il n'oublie pas que la Pythie prescrivit aux Grecs d'apaiser les vents, au temps de l'invasion perse (HÉROD.; VII, 178). Il vient ensuite à parler d'Empédocle, puis revient à la Bible et cite Psaume 83; Deut., X, 16, 17; ISA., XL, 26. Il fait cette remarque : « Certains disent que la peste, la grêle, les tempêtes et autres semblables calamités sont occasionnées non seulement par des perturbations naturelles, mais aussi par certains démons ou par la colère de mauvais anges. » Suit l'histoire de ceux qui, à Kléones, doivent éloigner la grêle ; et l'on nous parle des sacrifices qu'on fait dans ce but (§ 194) ; on nous rappelle la purification d'Athènes par Épiménide et autres histoires semblables.

[FN: § 189-1]

MELA ; III, 6. Sena in Britannico mari, Osismicis adversa litoribus, Gallici numinis oraculo insignis est : cuius antistites, perpetua virginitate sanctae, numero novem esse traduntur : Barrigenas [Gallicenas ?] vocant, putantque ingeniis singularibus praeditas, maria ac ventos concitare carminibus, seque in quae velint animalia vertere, sanare quae apud alios insanabilia sunt, scire ventura et praedicare, sed nonnisi deditas navigantibus et in id tantum, ut se consulerent profectis.

REINACH s'est occupé de ce texte (Cultes, Mythes et religions, t. I). Il croit que Méla a reproduit des informations trouvées dans des textes grecs. « Quelle que soit la source immédiate de Méla dans ce qu'il dit de l'île de Sena, on a lieu de supposer que le fond de son récit est fort ancien. Je crois en trouver l'origine dans l'Odyssée même, ce prototype, comme le disait déjà Lucien, de tous les romans géographiques de l'antiquité ». Il se peut qu'il en soit ainsi ; il se peut aussi que les fables de l’Odyssée et les autres aient une origine commune dans l'idée qu'on peut agir sur les vents ; idée qu'on a plus tard expliquée et sur laquelle on a brodé.

[FN: § 190-1]

Dans le monde latin, on a des inscriptions contenant des invocations aux vents, C. 1. L. VIII, 2609, 2610. ORELLI, 1271. Iovi O. M. tempestatium divinarum potenti leg. III. Aug. dedicante... A. MAURY ; Hist. des relig. de la Gr., t. I « (p. 166) Les vents furent aussi adorés par les populations primitives de la Grèce mais leur culte, qui joue un si grand rôle dans le Rig-Véda, s'était singulièrement affaibli chez les Hellènes. Ils continuent sans doute à être personnifiés, mais on ne les invoque plus que par occasion et en (p. 167) certaines localités spéciales ». Plus loin, en note : « (p. 169 (2) Le culte des vents et des montagnes était associé chez les Chinois à celui des cours d'eau (Tcheou-li, trad. édit, Biot, t. II, p. 86). Lorsque l’empereur passait en char sur une montagne, le cocher faisait un sacrifice au génie de la montagne (Ibid. t. II, p. 249). – (3) Les anciens Finnois invoquaient aussi les vents comme des dieux, surtout ceux du sud et du nord. Ils adressaient aux vents froids des formules déprécatoires... »

[FN: § 191-1]

MATTH. ; 8, 23-91. Surpris de voir cesser la tempête, les disciples s'écrient : « (27) « Quel est celui à qui obéissent même les vents et la mer ? »

[FN: § 192-1]

VIRG. ; Aen., III :.

(115) Placemus ventos, et Gnosia regna petamus.
……………………………………………………………
(118) Sic fatus, meritos aris mactavit honores,
Taurum Neptuno, taurum tibi, pulcher Apollo ;
Nigram Hiemi pecudem, Zephyris felicibus albam.

SERVIUS note : meritos honores] Unicuique aptos... Ratio enim victimarum sit pro qualitate numinum : nam aut hae immolantur, quae obsunt eorum muneribus, ut porcus Cereri ; quia obest frugibus : hircus Libero ; quia vitibus nocet. Aut certe ad similitudinem : ut inferis nigras pecudes ; superis albas immolent : tempestati atras ; candidas serenitati. Nigram Hiemi, etc.] Bono usus est ordine, ut prius averteret mala, sic conciliaret optanda. – ARISTHOPHANE ; Gren., 847-848, plaisante sur cet usage et demande qu'on immole un agneau noir pour éloigner la tempête qui menace Eschyle et sa critique d'Euripide. Le scoliaste note : « un agneau noir]. Parce qu'il s'agit d'un sacrifice au cyclone [Typhon], pour faire cesser l'ouragan – un agneau noir]. Puisqu'on en sacrifie un à Typhon, quand le vent souffle en cyclone... Noir à juste titre et non blanc, parce que le Typhon est noir. »

[FN: § 193-1]

HÉRODOTE ; VII, 178.

[FN: § 193-2]

HÉRODOTE ; VII, 189. À une époque postérieure, on trouve une interprétation qui enlève au fait son caractère surnaturel, qui l'explique logiquement. Ç'est là un cas particulier d'un fait général. Scholia in Apollonii Argonaut., 1, v. 211. « Chez les Mégariens, Eragora dit que Borée, qui enleva Orestie, était fils de Strimon et non pas un vent ». Il reste à trouver des interprétations analogues pour des cas semblables, dans lesquels, au dire des Athéniens, Borée leur fut favorable ; mais c'est très facile : il y aura eu autant d'autres individus du nom de Borée.

[FN: § 193-3]

AEL. ; Var. hist., XII, 61.

[FN: § 193-4]

PAUS.; VIII, 36.

[FN: § 193-5]

Hérodote manifeste aussi quelque doute à propos du secours que Borée porta aux Athéniens ; il observe qu'il ne saurait dire si ce fut vraiment grâce aux prières des Athéniens, que Borée frappa la flotte des Barbares mais, dit-il, les Athéniens affirment que Borée les secourut à cette occasion comme avant. HÉRODOTE ; VII, 189, 3: ... « Les Athéniens affirment que Borée les a secourus à cette occasion comme avant et qu'il a fait cela... »

[FN: § 194-1]

Par exemple : TIBULLE ; I, 2. L'auteur, parlant d'une magicienne, dit qu'elle dissipe les nuages du ciel et fait tomber la neige en été, selon son caprice.

(51) Cum libet, haec tristi depellit nubila caelo,
Cum libet, aestivo convocat orbe nives.

OVID. Amorum, 1, 8 :

(5) Illa magasartes Aeaeaque carmina, novit,
..........
(9) Cum voluit, toto glomerantur nubila coelo,
Cum voluit, puro fulget in orbe dies.

Idem ; Metam., VII. C'est Médée qui parle :

(201) ... nubila pello,
Nubilaque induco ; ventos abigoque vocoque,

SENECA ; Med. :

(754) Et evocavi nubibus siccis aqua ;
.....
(765) Sonuere fluctus, tumuit insanum mare T
acente vento…

Idem ; Hercul. Oet., 452 et sv.

LUCAIN ; Phars., VI, décrit longuement les opérations magiques de la femme thessalienne. Il convient de remarquer qu'elles agissent non par la faveur des dieux, mais contre leur volonté, en les forçant. En Thessalie :

(440) ... Ibi plurima surgunt
Vim factura Deis...

À la voix de la magicienne :

(461) Cessavere vices rerum ; dilataque longa
Haesit nocte dies : legi non paruit aether,
Torpuit et praeceps, audito carmine. mundus,
Axibus et rapidis impulsos Iupiter urgens
Miratur non ire polos. Nunc omnia complent
Imbribus, et calido producunt nubila Phoebo ;
Et tonat ignaro caelum Iove : vocibus isdem
Humentes late nebulas, nimbosque solutis
Excussere comis. Ventis cessantibus, aequor
Intumuit ; rursus vetitum sentire procellas
Conticuit, turbante Noto, etc.

PHILOSTR. ; Vit. Apoll., III, 14 (p. 53. Didot). Arrivés à l'endroit où étaient les Bracmanes, Apollonius et ses compagnons « virent deux cuves de pierre noire, l'une pour la pluie, l'autre pour les vents. Si l'Inde souffre de la sécheresse, on ouvre celle qui contient la pluie ; aussitôt elle envoie des nuages et des pluies à toute la terre. S'il pleut trop, on la ferme et la pluie cesse. Je crois qu'on emploie la cuve des vents comme l'outre d'Éole ; car si on l'ouvre, il en sort un des vents qui souffle où il faut, et la terre se dessèche ».

[FN: § 194-2]

SENECA ; Nat. quaest., IV, 6-7. (6) Non tempero mihi, quo minus omnes nostrorum ineptias proferam. Quosdam peritos observandarum nubium esse affirmant, et praedicere, cum grando futura sit, et hoc intelligere usu ipso, cum colorem nubium notassent, quam grando toties insequebatur. Illud incredibile, Cleonis fuisse publice praepositos [mot grec] speculatores futurae grandinis, etc.

[FN: § 195-1]

SUIDA S.; s. r. [mot grec]

[FN: § 195-2]

Proprement : démons; mais il faut prendre garde au double sens du [mot grec], païen et du démon chrétien (§ 1613).

[FN: § 195-3]

CLAUD.; De VI cons. Honor.

(369)... nam flammeus imber in hostem
Decidit ...
(374) Tunc contenta polo mortalis nescia teli
Pugna fuit ; Chaldaea mago seu carmina ritu
Armavere Deos ; seu, quod reor, omne Tonantis
Obsequium Marci mores potuere mereri.

Notez la transformation morale. Borée intervient uniquement à cause de ses liens de parenté avec les Athéniens. Jupiter Tonnant intervient, non pour favoriser Mare Aurèle, mais à cause de ses vertus. De semblables transformations sont générales.

[FN: § 194-4]

M. Anton. Phil., 24.

[FN: § 195-5]

DAVIS ; La Chine, t. II. L'auteur transcrit un passage de l'Histoire des trois royaumes : « (p. 66) Liou-peï saisit l'occasion de fondre sur Tchang-pao avec toutes ses forces. Ce dernier, pour le repousser, monta sur son coursier, les cheveux en désordre et agitant l'épée qu'il tenait à la main ; puis il se livra à des opérations magiques. Alors le vent s'éleva, le tonnerre gronda avec fracas, et il descendit du haut des cieux un nuage noir dans lequel on voyait aux prises une multitude d'hommes armés. Liou-peï battit aussitôt en retraite et alla consulter Tchou-tsien qui lui dit : Laissez-le recourir encore aux sortilèges ; je vais préparer du sang de truie, de mouton et de chien... Le lendemain Tchang-pao s'avança. pour offrir le combat. Liou-peï alla à sa rencontre, mais à peine l'avait-il atteint, que Tchang-pao eut de nouveau recours à ses enchantements ; le vent souffla, le tonnerre se fit entendre un nuage sombre obscurcit le firmament, et l'on crut voir descendre des escadrons de cavaliers. Liou- peï tout aussitôt fit semblant de fuir, et Tchang-pao s'élança à sa poursuite ; mais il n'avait pas encore tourné la colline, que les troupes qui étaient cachées sortirent de leur embuscade, et lancèrent sur leurs ennemis l'impur liquide qu'ils avaient tenu en réserve. L'air parut aussitôt rempli d'hommes et de chevaux de papier ou de paille qui tombèrent à terre pêle- mêle ; le vent s'apaisa et le tonnerre cessa ».

[FN: § 195-6]

Heliog., Cum Marcomannis bellum inferre vellet, quos Antoninus pulcherrime profligaverat, dictum est a quibusdam, per Chaldaeos et magos Autoninum Marcum id egisse, ut Marcomanni P. R. semper devoti essent atque amici, idque factis carminibus et consecratione : cum quaereret quae illa essent, vel ubi essent, suppressum est. Constabat enim illum ob hoc consecrationent quaerere ut eam dissiparet spe belli concitandi...

[FN: § 195-7]

DIO CASS. ; LXXI, 9.

[FN: § 195-8]

D. IUST., Apol., I, 71. L'empereur écrit au Sénat ; et le faussaire imagine que Marc- Aurèle dit des chrétiens : « Ils prièrent un dieu que je ne connaissais pas ; aussitôt l'eau du ciel tomba sur nous, très fraîche, tandis qu'une grêle de feu s'abattait sur les ennemis des Romains ». Voyez comment le miracle croît et embellit ! TERTULL. ; Apolog., 5 et EUSÈBE ; Eccl. hist., V, 1-6, rappellent le fait et la fameuse lettre. Eusèbe ne parle pas de la demande que Marc-Aurèle aurait adressée aux chrétiens pour qu'ils se missent en prière. Ceux-ci s'agenouillent spontanément et prient avant le combat. Les ennemis en furent étonnés ; mais il arriva quelque chose de plus merveilleux : un ouragan mit en fuite les ennemis, tandis qu'une pluie bienfaisante réconfortait les Romains. ZONAR.; Ann. XII, 2, répète au contraire à peu près l'histoire du pseudo-Justin. OROS. ;VII, 15 : ...Nam cum insurrexissent gentes inmanitate barbarae, multitudine innumerabiles, hoc est Marcomanni, Quadi, Vandali, Sarmatae, Suebi, atque omnis paene Germania, et in Quadorum usque fines progressus exercitus, circumventusque ab hostibus, propter aquarum penuriam praesentius sitis quant liostis periculum sustineret : ad invocationem nominis Christi, quam subito magna fidei constantia quidam milites effusi in preces palam fecerunt, tanla vis pluviae effusa est, ut Romanos quidem largissime ne sine iniuria refecerit, barbaros autem crebris fulminum ictibus perterritos, praesertim cum plurimi eorum occiderentur, in fugam coegerit. Voir en outre : NICEPH. ; IV, 12. CEDR.; I.–GREGOR. NYSS. ; Or. II in laud. s. XL Martyrun.

[FN: § 196-1]

TERTULL. Ad Scopulam, 4 : Marcus quoque Aurelius in Germanica expeditione Christianorum militum orationibus ad deum factis imbres in siti illa impetravit. Quando non geniculationibus et ieiunationibus nostris etiam siccitates sunt depulsae ?

[FN: § 196-2]

PAUS.; VIII, Arcad., 38: L'auteur fait mention de la fontaine Hagno, sur le mont Lycée. « Lorsque la sécheresse a duré longtemps, et qu'en conséquence les semences confiées à la terre et les arbres se dessèchent, alors le prêtre du dieu Lycéen, après avoir adressé une prière à la fontaine et lui avoir sacrifié selon les rites, touche, avec une branche de chêne, l'eau de la fontaine, à la surface et non au fond. L'eau étant remuée, il s'élève une vapeur semblable à un brouillard ; peu après elle devient un nuage qui, attirant à lui les autres nuages, fait tomber la pluie sur la terre de l'Arcadie. » Nous verrons plus loin (§ 203) que les sorcières, par des procédés exactement semblables, faisaient pleuvoir et grêler. Les différences sont les suivantes : l° Au lieu de la divinité de la fontaine, des païens, c'est le démon des chrétiens qui intervient. Il est naturel que chaque peuple fasse intervenir les êtres divinisés de sa religion. 2° Chez Pausanias, l'opération est essentiellement bienfaisante ; chez les chrétiens, elle peut l'être aussi, mais en général elle est malfaisante. Il est naturel aussi que les êtres divinisés agissent chacun selon son propre caractère, et le démon est essentiellement malfaisant. Cet exemple nous montre un même fait imaginaire, expliqué de façons différentes. Ce sont évidemment les sentiments correspondant à ce fait imaginaire qui sont la partie constante du phénomène, tandis que les explications en donnent la partie variable. – SCHWAB ; Le Talmud de Jérusalem, t. VI. La Mischnâ rapporte comment, par la prière, on fit venir la pluie. « (p. 171). En général, pour toute calamité que l'on voudrait voir détournée du public, on sonne du cor, sauf en cas d'excédent de pluie (causant des peines inutiles). Il est arrivé que l'on pria Honi, le faiseur de cercles, d'intercéder auprès de Dieu pour obtenir de la pluie. Allez, dit-il, faites rentrer les fours servant à rôtir l'agneau pascal... qu'ils ne fondent pas sous l'eau (tant il était certain du succès) ; mais malgré sa prière, la pluie ne tomba pas. Il traça alors un cercle, se plaça au milieu et dit : " Maître de l'univers, tes enfants ont mis leur confiance en moi, jugeant que je suis un de tes familiers ; je jure par ton grand nom que je ne sortirai pas d'ici jusqu'à ce que tu aies pitié de tes enfants ". Des gouttes de pluie commencèrent alors à tomber. "Ce n'est pas là ce que j'ai demandé, s'écria-t-il, mais de quoi remplir des puits, des citernes et des grottes". La pluie tomba alors à torrents. "Ce n'est pas ainsi que je la désire, dit-il, mais une pluie agréable, de bénédiction et de faveur". La pluie tomba alors régulièrement, en telle quantité que les Israélites durent se rendre de Jérusalem à la montagne du Temple pour échapper à l'inondation. "Comme tu as prié pour que la pluie vienne, lui dit-on alors, supplie qu'elle cesse". "Allez voir, leur répondit-il, si la pierre des Toïm a disparu sous l'eau (elle reparaîtra)". Le commentaire explique que cela est impossible. « (p. 173) "Or, leur dit-il, comme il est impossible que cette pierre disparaisse du monde, de même il est impossible de solliciter que la pluie s'en aille ; mais allez et apportez-moi un taureau pour être offert en action de grâce". Ceci fut fait, et Honi lui ayant imposé les deux mains, s'écria : "Maître de l'univers, lorsque tes enfants ont souffert d'un mal (de la sécheresse), ils n'ont pas pu le supporter ; et lorsque tu leur as envoyé le bienfait (la pluie), ils n'ont pas pu non plus le supporter ; qu'il te plaise donc de leur procurer un soulagement". Aussitôt, le vent souffla, les nuages furent dispersés, le soleil brilla, la terre devint sèche, et les habitants étant sortis trouvèrent la campagne couverte de champignons. » Les champignons font défaut dans le miracle de la légion de Marc-Aurèle.

[FN: § 197-1]

CLÉMENT. ALEX.; Strom., VI, p. 755, éd. Pott.; p. 681, éd. Paris.

[FN: § 197-2]

Les auteurs du Malleus dissertent doctement et longuement pour savoir si le démon peut opérer sans le magicien, ou le magicien sans le démon. Prima pars, secunda quaestio : An catholicum sit, asserere quod ad effectum maleficialem semper habeat daemon cum malefico, concurrere, vel quod unus sine altero, ut daemon sine malefico, vel e converso talent, effectum possit producere. Il y a de graves problèmes à résoudre. Par exemple, pour prouver que l'homme peut opérer sans l'aide du démon – ou, plus généralement, la « force inférieure » sans l'aide de la « force supérieure », – on cite d'après Albert le fait que la sauge, putréfiée d'une certaine manière et jetée dans un puits, excite la tempête. Le Malleus ne met aucunement en doute un fait aussi certain, mais il l'explique. Il distingue d'abord les effets en : ministeriales, noxiales, maleficiales et naturales. Les premiers sont le fait des bons anges ; les seconds, des mauvais ; les troisièmes, du démon, par le moyen des magiciens ; les derniers ont lieu grâce à l'influence des corps célestes. Cela posé, il est facile de comprendre que le fait de la sauge a lieu sans l'intervention des démons : Et ad tetertium de salvia putrefacta et in puteum proiecta dicitur. Quid licet sequatur effectus noxialis absque auxilio daemonis ; licet non absque influentia corporis coelestis.

[FN: § 197-3]

D. GREGOR. TUR. ; vitae patrum, c. XVII ; De sancto Nicetio Treverorum episcopo, 5. Saint Grégoire de Tours raconte une histoire arrivée à Saint Nicaise. Un homme vint un jour le remercier de l'avoir sauvé d’un grand péril en mer. Voici comment c'était arrivé : « Il y a peu de temps, m'étant embarqué pour gagner l'Italie, je me trouvai en compagnie d'une foule de païens, au milieu desquels j'étais seul chrétien, parmi cette multitude de campagnards. Une tempête s'étant levée, je me mis à invoquer le nom de Dieu, et à lui demander qu'il la fît cesser par son intercession. D'autre part, les païens invoquaient leurs dieux : tel appelait à grands cris Jupiter, tel autre Mercure ; d'autres imploraient le secours de Minerve, d'autres encore de Vénus. Comme nous nous trouvions déjà dans un péril de mort extrême, je leur dis : «Braves gens! n'invoquez donc pas ces dieux, car ils ne sont pas des dieux, mais des démons. Si vous voulez maintenant vous sauver du désastre présent, invoquez Saint Nicaise, afin qu'il obtienne de la miséricorde de Dieu, que vous soyez sauvés ». Comme ils s'écriaient d'une seule voix et avec clameur : « Dieu de Nicaise, sauve-nous ! », aussitôt la mer s'apaisa ; les vents cessèrent ; le soleil reparut, et le navire alla où nous voulûmes ».

[FN: § 198-1]

Corpus iuris canonici ; Decret. Grat, II, 26, 5,12. Episcopi. Le sabbat des sorcières est traité de songe : Quapropter Sacerdotes per Ecclesias sibi commissas populo Dei omni instantia praedicare debent, ut noverint haec omnino falsa esse, et non a divino, sed a maligne spiritu talia phantasmata mentibus fidelium irrogari... Quis enim non in somniis, et nocturnis visionibus extra se educitur, et multa videt dormiendo, quae nunquam viderat vigilando ? Quis vero tant stultus, et hebes sit, qui haec omnia, quae in solo spiritu fiunt, etiam in corpore accidere arbitretur ? Ce décret est pris dans RÉGINON ; De ecclesiasticis disciplinis et religione christiana, 1. II, c. 364 ; et c'est peut-être un fragment d'un capitulaire de Charles le Chauve, BARONII ; Annales, ann. 382-XX. Il dit du pape Damas : Nec non etiam excom- municandos esse omnes maleficiis, auguriis, sortilegiis, omnibusque aliis superstitionibus vacantes : qua sententia praesertim feminas illas plectendas esse, quae illusae a daemone, se putant noctu super animalia ferri, atque una cum Herodiade circumvagari.

[FN: § 198-2]

S. AGOBARDI... lib. de Grandine et Tronitruis, p. 147-148 (Migne). Baluzi note : Tempestuarios etiam vocat Herardus archiepiscopus Turonensis in capite 3 suorum Capitulorum : « De maleficis, incantatoribus, divinis, sortilegis, sommariis, tempestuariis, et brevibus pro frigoribus, et de mulieribus veneficis, et quae diversa fingunt portenta, ut probibeantur, et publicae poenitentiae multentur. » Ce scepticisme de Saint Agobard lui a nui auprès d'écrivains ecclésiastiques, qui ont coloré leur hostilité de différents prétextes. GUILLON ; Biblioth. chois. des Pères de l'Église, t. XXV ; « (p. 255) S'il est difficile d'échapper à une sorte d'enthousiasme que produit naturellement l'admiration des belles actions chez un homme d'un grand talent, il ne l'est pas moins de se défendre d'un certain chagrin, qui résulte de l'aspect de mauvaises actions chez des hommes élevés à une grande fortune avec un esprit médiocre. Telle est l'impression qui résulte d'elle-même de ce qui nous est raconté au sujet de l'archevêque de Lyon, Agobard. On l'a mis au nombre des saints ; nouveau problème qui se présente à la surprise des lecteurs. »

[FN: § 200-1]

EUNAP. ; Vit.; Aedesius, (p. 462-463, Didot). L'auteur raconte comment il arriva qu'une année, le vent favorable venant à faire défaut, les navires ne purent amener du blé à Byzance. Rassemblé au théâtre, le peuple qui souffrait de la faim cria à l'empereur Constantin que le philosophe Sôpater était cause du mal ; car « il avait lié les vents par sa science transcendante ». Persuadé de ce fait, l'empereur Constantin ordonna de tuer cet homme. – SUIDAS , s. r. sopater Apamensis, dit que ce philosophe fut tué par Constantin, « afin de rendre évident qu'il [Constantin] n'appartenait plus à la religion hellénique ». Ce récit concorde avec le premier, et ce passage de Suidas explique la « persuasion » dont parle Eunapius. – Theod. Cod., IX, 16, 5 : Multi magicis artibus ausi elementa turbare, vitas insontium labefactare non dubitant, et manibus accitis audent ventilare, ut quisque suos conficiat malis artibus inimicos: Hos, quoniarn naturae peregrini sunt, feralis pestis absumat. La même loi, dans Iust. Cod., IX, 18, 6. – Leg. Wisig., VI, 2, 3: Malefici et immissores tempestatum, qui quibusdam incantationibus grandinem in vineas messesque mittere perhibentur, et hi qui per invocationem daemonum mentes hominum conturbant... ubicumque a iudice, vel actore, vel procuratore loci reperti fuerint vel detecti, ducentenis flagellis publice verberentur, et decalvati deformiter decem convicinas possessiones circuire cogantur inviti, ut eorum alii corrigantur exemplis. – Capitul. sec. anni 805, 25 : De incantatoribus vel tempestariis. De incantationibus, auguriis, vel divinationibus, et de his qui tempestates vel alia maleticia faciunt, placuit sancto Concilio ut ubicunque deprehensi fuerint, videat Archipresbyter diocesis illius, ut diligentissime examinatione constrigantur si forte confiteantur malorum quae gesserunt...

[FN: § 201-1]

D. AGOB.; De grand. et tonit. : (15) Haec stultitia est portio non minima infidelitatis; et in tantum malum. istud iam adolevit, ut in plerisque locis sint homines miserrimi, qui dicant se non equidem nosse immittere tempestates, sed nosse tamen defendere a tempestate habitatores loci. His habent statutum quantum de frugibus suis donent, et appellant hoc canonicum. Multi vero sunt qui sponte sacerdotibus decimam nunquam donant, viduis et orphanis caeterisque indigentibus eleemosynas non tribuunt, quae illis frequenter praedicantur, crebro leguntur, subinde ad haec exhortantur, et non acquiescunt. Canonicum. autem quem dicunt, suis defensoribus (a quibus se defendi credunt a tempestate) nullo praedicante nullo admonente, vel exhortante, sponte persolvunt, diabolo inliciente.

[FN: § 201-2]

Capitulare Francofordiense ... anno Christi DCCXCIV, 23 : ... Et omnis homo ex sua proprietate legitimam decimam ad Ecclesiam conferat. Experimento enim didicimus, in anno quo illa valida fames irrepsit, ebullire vacuas annonas a daemonibus devoratas, et voces exprobrationi auditas. Exorcisé sur les reliques des saints Marcelin et Pierre, un de ces méchants démons, qui possédait une fillette, explique clairement le fait : «Je suis – dit-il – satellite et disciple de Satan. Longtemps je fus portier de l'enfer ; mais il y a plusieurs années qu'avec onze de mes compagnons, je dévaste le royaume des Francs. Comme cela nous avait été ordonné c'est nous qui avons détruit le blé, le vin et tous les autres fruits qui naissent de la terre pour l'usage de l'homme ». Cet intelligent démon explique longuement les causes de cette dévastation : Propter malitiam, inquit, populi huius, et multimodas iniquitates eorum qui super eum constituti sunt. Et, montrant le bout de l'oreille, il n'oublie pas les dîmes : Rari sunt qui fideliter ac devote decimas dent. EINHARDI hist. transl. beat. Christi martyr. Marcell. et Petri, 50.

[FN: § 203-1]

Malleus maleficarum. Secunda pars, quaest 1, cap. 15. Super modum quo grandines et tempestates concitare ac etiam fulgura super homines el iumenta rulminare solent.

[FN: § 203-2]

Malleus maleficarum. Secunda pars, quaest. 1, cap. 13, in fine. Super modum quo obstetrices maleficae maiora damna inferunt, dum infantes aut interimunt, aut daemonibus execrando offerunt. Cap. XIII, in fine.

[FN: § 203-3]

DELRIO ; Disq. mag., 1. II, q. 11, t. I, p. 155 : Recentiora exempla nuperi scriptores protulerunt [En marge: Spranger in Malleo, Remigius li. I daemonola., c. 25]. Addam duo, unum lepidum [il appelle plaisant un récit qui se termine par renvoi d'une femme au bûcher !] horrendum alterum. In ditione Trevirensi rusticus fuit, qui com filiola sua octenni, caules plantabat in horto, : filiolam forte collaudavit, quod apte hoc munus obiret. Illa, sexu et aetate garrula, se nosse alia facere, magis stupenda iactat. Pater, quid id foret sciscitatur, secede paullum, inquit, et in quam voles horti partem subitum imbrem dabo. Miratus ille : age secedam, ait : quo recedente, scrobem puella fodit, in eam de pedibus (ut coin Hebraeis loquar pudentius) aquam fondit, eamque bacillo turbidat nescio quid submurmurans. Et ecce tibi subito pluviam de nubibus in conditum locum. Quis (inquam obstupefactus Pater) te hoc docuit ? Mater, respondet, huius et aliorum similium peritissima. Zelo incitatus agricola, post paucos dies, invitatum se ad nuptias simulans, uxorem cum gnata, festive nuptiali modo exornatas in currum imponit, in vicinum oppidum devehit, et iudici tradit maleficii crimen supplicio expiaturas. Hoc, mihi fide dignissimorum virorum narratio suggessit. Ubi notandus modus scrobiculam faciendi, et quod in eam ieceris bacillo confutandi. Voici, comme terme de comparaison, le passage du texte du Malleus, qui raconte la manière dont la pluie fut provoquée : Tunc pater puellam per manum ad torrentem deduxit. Fac, inquit, sed tantummodo super agrum nostrum. Tunc puella manum in aquam misit, et in nomine sui magistri, iuxta doctrinam matris movit. Et ecce tantummodo pluvia agrum illum perfudit, quod cernens pater, fac, inquit, et grandinem, sed tantummodo super unum ex agris nostris, etc. L'autre exemple rapporté par Delrio est celui cité de Pontanus, d'une ville assiégée par le roi de Naples, qui manquait d'eau et en obtint par la pluie, provoquée au moyen d'opérations magiques et sacrilèges. Il est probable que Delrio avait en vue d'autres passages du Fourmilier ou du Malleus. Par exemple, pour ce dernier, le fait rapporté secunda pars, cap. tertium : super modum. quo de loco ad locum corporaliter transferuntur. Une sorcière n'avait pas été invitée à une noce ; elle invoque l'aide du démon qui, à la vue de certains bergers, la transporte sur une montagne. Là, manquant d'eau, elle emploie son urine, et fait grêler sur les gens de la noce : ipsa indignata, vindicare se aestimans, daemonem advocat, et suae tristitiae causam aperuit, ut graridinem excitare vellet, et cunctos de chorea dispergere petiit, quo annuente, ipsam sublevavit, et per aëra ad montem prope oppidum, videntibus certis pastoribus transvexit, et ut postmodum fassa fuerat, aqua sibi deesset ad fundendam in foveam, quem modum ut patebit, ubi grandines excitant, observant, ipsa in foveam quam parvam fecerat, urinam loco aquae immisit, et cum digito, more suo, astante daemone movit, et daemon subito illum humorem sursum elevans, grandinem vehementem in lap - dibus super chorisantes [sic] tantummodo et oppidanos immisit. Unde ipsis dispersis, et de causa illius mutuo conferentibus, malefica oppidum postea ingreditur, unde suspitio magis aggravatur. At vero cum. pastores ea quae viderant recitassent, suspitio vehemens in violentam crevit. Nous rions de ces absurdités, mais les sentiments qu'elles expriment ont causé bien des souffrances et des morts. La pauvre femme dont il vient d'être question fut brûlée. Unde capta, et fassa quod ea de causa, nimirum quia invitata non fuerat, talia perpetrasset, ob multis etiam aliis maleficiis [peut-être tout aussi certains] ab ea perpetratis, incinerata fuit. Voyez aussi : NICOLAI REMIGII... daemonolatreiae libri tres, lib. I, cap. 25.

[FN: § 204-1]

DELRIO ; Disquis. mag., 1, V, s. 16 – t. III, p. 99; 1. 11, q. 11 – t. I, p. 152 : Tertio... possunt Magi tempestates sedare, possant excitare fulgura et tonitrua, grandines, et imbres et similia meteorologica ciere, et in agros quos volunt immittere.... Il reprend ceux qui n'y croient pas, et qui disent que Dieu seul peut le faire : (p. 153) Sed nimirum, Deus haec omnia facit, ut causa efficiens principalis, independens, et universalis : creaturae vero, ut causae efficientes, particulares, dependentes, ac minus principales. Quare sequenda communis, quam proposui, sententia theologorum et iurisconsultorum. Probatur primo, ex S. S., nam ibi Satanas facit ignem de caelo decidere et absumere servos ac Pecua, Iobi ; excitat quoque ventum, vehementem, ...Deinde grandinem qua Aegyptii puniti, expresse S. S. dicit per malos angelos immissam... Denique cur ab Apostolo toties vocantur daemones, principes aeris huius ? Potissimum (p. 151) propter magnam in aerem potestatem. Hoc confirmat non modo lex vetus XII tabularum... sed et Imperatoriae, et Pontificiae sanctiones. Confirmant et ii quos citavi Patres omnes... Quarto probatur historiis et exemplis. De ventis et tempestate sedata a Magis tempore Xerxis, testis est Herodotus. [Notez qu'il ne parle pas du doute manifesté par Hérodote (§ 193)]. De Finnis et Lapponibus sic scribit Olaus : « olim mercatoribus ventos venales exhibebant, tres nodos ma gica arte sacratos offerentes, quorum primo soluto placidos ventos, secundo vehementiores, tertio vehementissimos sint habituri ». Auparavant (l. II, q. 9, p. 137), il rapporte la fable d'après laquelle un roi faisait venir le vent du côté où il tournait son chapeau : Ericus rex Gotthorum quocumque verteret pileum, inde ventum prosperum eliciebat. C'est pourquoi on appelait ce roi (152) Piteus ventosus.

[FN: § 205-1]

GODELMANN ; De Magis venificis et Lamiis, II, 6, 21, p. 68.

[FN: § 206-1]

WIER; Histoires..., I. III, c. 16, t. I : « (p. 357) Davantage ces pauvres vieilles sont subtilement trompées par le Diable : car incontinent qu'il a conu et preveu selon le mouvement des elemens, et le cours de nature (ce qu'il faict plustot et plus facilement que ne scauroyent faire les hommes) les mutations de l'air et les tempestes, ou alors qu'il a entendu que quelcun doit recevoir une playe par l'oculte volonté de Dieu, de laquelle il est en cela executeur, il tormente les esprits de ces femmelettes, il les remplit de diverses imaginations, et leur donne des diverses (p. 358) occasions : comme si pour se venger de leur ennemy elles devoyent troubler l'air, esmouvoir des tempestes, et faire tomber la gresle ». Le brave Bodin oppose de sérieuses objections, à ce propos.

BODIN ; De la demonomanie. réfutations- des opinions de Jean Wier : « (235 b) Quant à ce que dit Wier que les sorcieres ne peuvent de soy-mesmes faire tonner ni gresler, je l'accorde, et peut [sic] aussi tuer et faire mourir les hommes par le moyen des images de cire et paroles : Mais on ne peut nier, et Wier en demeure d'accord, que Sathan ne fasse mourir, et hommes, et bestes, et fruicts, si Dieu ne l'en garde, et ce par le moyen des sacrifices, voeuz, et prieres des sorciers, et par une iuste permission de Dieu, qui se venge de ses ennemis par ses ennemis ».

[FN: § 206-2]

TARTAROTTI; Del congr. nott. delle Lamie, c. XVI : « (p. 189) Il semble qu'il y ait plus de force démonstrative dans le fait que ces personnes s'étant vantées, par exemple, de faire naître une tempête ou de donner la mort à celui-ci ou celui-là, le fait s'est accompli avec les circonstances précises qui avaient été prédites; et il y en a des témoins dignes de foi. Cependant, dans l'hypothèse de l'illusion, ce cas aussi s'explique facilement, si l'on répond que le démon, afin d'inculquer à ses adeptes une haute opinion de son pouvoir, aime à s'attribuer les événements naturels, prévoit toute chose, incite les sorcières à les produire, et que ces événements s'accomplissent ainsi, non grâce à sa puissance, et encore moins à celle des sorcières, mais parce qu’ils étaient dans l'ordre naturel des choses ».

[FN: § 208-1]

BODIN ; De la demonomanie..., réfutation des opinions de Jean Wier. « (p. 240 b) Il faut donc condamner toute l'antiquité d'erreur et d'ignorance, il faut rayer toutes les histoires et bifer les loix divines et humaines comme faulses et illusoires, et fondees sur faux principes : et contre tout cela opposer l'opinion de Wier, et de quelques autres sorciers, qui se tiennent la main pour establir et asseurer le regne de Sathan (p. 241 a) : ce que Wier ne peut nier, s'il n'a perdu toute honte... ».

[FN: § 209-1]

DUVAL; Procès de sorciers à Viry : « (p. 88) Marguerite... faiet plaincte et partye criminelle par devant nous, Claude Dupuis, chastellain dicelle baronnye, en la meilleure force et forme que dénunce se peut faire, contre [suivent les noms de trois femmes], occasion de ce que le vingt-neuviesme jour dapvril, à heure de midy, ladicte Marguerite, venant des champs de monder des febves, estant au curtil caillant des herbes, survindrent lesdictes susnomméez tenantz une chascune delles un pan (pieu) de bois en leurs mains, luy disant semblables (p. 89) parolles : faulse hyrige (sorcière), il te fault aller à Viry ; et commençarent à frapper la dicte dénunceante sur son corps de leur pouvoir et aussy luy attacharent ses bras de une corde, de sorte qu'elle ne se povoit remuer. » On interroge les femmes dénoncées, lesquelles : « (p. 91) ... declarent ne sçavoir rien et navoir aulcunement batu ladicte Marguerite ny le vouldroit avoir faict. Confesse toutteffois luy avoir dict et appellée hyrige en sa propre présence pourceque plusieurs aultres ainssi la y appeloient et quasi tous ceulx qui la cognoissent pour ce spéciallement que despuis la mort du filz de Pierre Testu dict Grangier, ladicte Marguerite sen est fuye à cause quon disoit quelle lavoit tué... ». Suit le procès, et le châtelain entend plusieurs témoins. Une partie ignore, une autre confirme que Marguerite a été frappée ; mais le châtelain, ses jurés et les femmes accusées de l'agression n'en demeurent pas convaincus. Cependant puisque : « (p. 102) ont confessé avoir dict et reproché à ladicte Marguerite quelle estoit hiryge, chose qui importe grande diffamation », ils ordonnèrent de procéder au criminel, pour connaître la vérité de cette accusation. Ainsi, de plaignante, Marguerite devient accusée. On interroge plusieurs témoins, qui parlent d'enfants morts, à ce qu'ils disent, par la faute de cette Marguerite. L'un d'eux raconte comment celle-ci s'était disputée avec une certaine femme du nom d'Andrée, « (p. 106) et ung peu après mouroit un sien enfant aussy celuy de Claude son frère de mort estrange ». Aujourd'hui, on aurait recherché si elle leur avait donné du poison. Alors, on croyait qu'un tel moyen matériel n'était pas nécessaire pour donner la mort. « (p. 106) ... avant la maladie desdictz enfantz ladicte Marguerite vinct en la maison du dict tesmoingz et sen alla asseoir au milieu et entre les deux bris (berceaux) desditz enfants demandant à ladicte Andrée quelle luy donnast place pour reposer certain chenevas... a laquelle demande ladicte Andrée ne voullu accorder dont ladicte Marguerite feust marrye et couroucée et incontinentz apprès les dictz enfantz tombarent malades et consequemment se moururent ». D'autres faits semblables sont mis à sa charge. Un témoin dépose « (p. 108) que la fame et renommée est audict villaige de Vers et partout là où lon la cognoist et que plusieurs gens luy ont dict et impétré en sa face quelle estoit hiryge sans ce quelle en aye fait aucun contre ny instance... »

[FN: § 211-1]

LEA; Hist. de 1’inq., trad. Reinach, t. III, p. 434 de l'édition originale. PERTILE est aussi de cet avis. PERTILE ; Stor. del dir. ital., t. V : « (p. 1147) Et l'Église procédait avec douceur, excommuniant ceux qui pratiquaient la magie, les soumettant aux pénitences canoniques... Elle ne se désista pas de ce système, même plus tard, quand, au XIIIe siècle, la foi s'étant affaiblie par un retour vers le paganisme, et par la diffusion d'un nouveau manichéisme dans les sectes des cathares et des patarins, les anciennes superstitions surgirent de nouveau, plus fortes que jamais ». Mais ici, l'auteur, qui écrit pourtant de nos jours, croit devoir justifier ces croyances qu'il appelle superstitions : « (p. 447) Lesquelles étaient vraiment tout à fait honteuses ; (p. 448) elles consistaient non seulement dans la persuasion d'avoir commerce avec le diable, de pactiser avec lui, en lui donnant son âme, et d'agir par son intermédiaire en l'invoquant, en se consacrant à lui et en l'adorant, mais, ce qui est pire, dans l'abus des choses les plus saintes... ». Brave homme, ce que tu appelles honteux, d'autres le considèrent comme ridicule, objectivement, et comme pathologique, subjectivement ! Voyez quel pouvoir a le préjugé. Voici un auteur laïque qui écrivait vers la fin du XIXe, siècle, et qui paraît croire à la réalité des pactes avec le diable, très honteux, selon lui, tandis que les théologiens modernes manifestent tout au moins de nombreux doutes. Dict. encycl. de la théol. cath., s. r, Magie, t. XIV : « (p. 100) La principale question... est de savoir s'il est possible que les démons entrent au service spécial d'un homme... On ne peut a priori répondre négativement à la question posée... Une seconde question est de savoir de quelle manière s'établit cette relation de service entre le démon et l'homme. La foi populaire répond en admettant que le diable peut être conjuré et être obligé par là à servir l'homme. Mais cette imagination populaire est inadmissible... Les histoires par lesquelles on s'abusait volontiers autrefois à cet égard... ont sans aucun doute, leur source dans la fanfaronnade ou l'imagination maladive des prétendus possesseurs, et aucune ne mérite la moindre croyance. Une autre opinion, admise par beaucoup de théologiens, et qui joua un rôle important dans la période des procès de sorcellerie, est celle qui prétend que l'homme peut contracter un pacte avec le diable et le contraindre ainsi à lui rendre certains services. La conclusion d'un pareil pacte est considérée comme un procédé tantôt objectif et réel, tantôt subjectif mais réel encore, tantôt implicite, tantôt explicite. Quant à la réalité objective, on peut concevoir ce pacte comme ayant été contracté par l'homme en santé ou dans l'état maladif de l'extatique... (p. 101) Quant à admettre un commerce direct avec le diable..., cette opinion est tellement grossière que nous pensons pouvoir ne pas nous y arrêter plus longtemps ». L'auteur admet le pacte dans l'état extatique : « Mais on voit facilement qu'il ne peut être question d'un pacte que dans un sens impropre. ...En outre il se peut que le prétendu pacte ne soit autre chose qu'un phénomène subjectif : c'est le cas des malades d'esprit qu'on appelle démonomanes. Dans ce cas le malade s'imagine avoir conclu un pacte avec le diable, et son imagination n'a absolument rien qui lui corresponde dans la réalité... Quant au moyen par lequel un démon peut être lié au service d'un homme pour l'aider à exercer un pouvoir magique, nous affirmons qu'il n'existe pas, et que si le démon se met au service de l'homme, il le fait librement attiré qu'il est par l'affinité élective qui existe entre sa méchanceté et celle de l'homme... ». En outre : « ... le démon n'est pas au-dessus des lois de la nature,... lui aussi ne peut produire que ce qui est naturellement possible en soi ».

[FN: § 212-1]

CAUZONS ; La magie et la sorc., t. III : « (p. 64)... l'ouvrage de Delrio est un des ouvrages catholiques auxquels on dut le plus de victimes... Nous disons « des ouvrages catholiques », parce que les Réformés eurent une large part aux procès de sorcellerie. S'il est difficile de prouver qu'ils brûlèrent plus de sorciers que les catholiques, il est tout aussi difficile de démontrer qu'ils en brûlèrent moins. Ce (p. 65) qui est bien certain, c'est que la persécution des malheureux magiciens sévit intense en Allemagne et en Angleterre, bien plus sérieuse qu'en Espagne, qu'en Italie et même qu'en France, où cependant les bûchers flambèrent nombreux, surtout à certaines époques et dans certains districts ».

[NOTE DU TRADUCTEUR]. il semble bien que les protestants se soient souvent montrés plus impitoyables que les catholiques envers les sorciers. Ils n'admettaient pas qu'une sincère pénitence du coupable pût effacer sa faute. Voici deux exemples pris presque au hasard, dans la riche collection qu'en possèdent les Archives cantonales vaudoises à Lausanne. (Procès criminel de Anthoyne Cuender [femme], originelle de Mesire [Mézières] ...detenue au chasteau de Lausanne, 21 déc. 1620). « De tous lesquelz malefices et forfaictz par ladicte detenue confessez, icelle comme bien penitente et repentante, en demande mercy et pardon a Dieu, a nosditz Seigneurs et a la noble Justice, declairant vouloir vivre et mourrir en sesdictes confessions, lesquelles elle a soustenues a la corde [au supplice de la corde] veritables. – Sur ce s'est présenté le Prénommé Procureur fi[s]cal..., lequel a demandé, pour s'estre ladicte detenue de tant desnaturée et oubliée, que d'avoir renoncé Dieu son Createur pour prendre le Diable ennemy du genre humain pour son maistre, ayant de luy recues graisses et demoniaque pour affliger et faire mourir gens et bestes. Ce quelle auroit faict en plusieurs et diverses personnes et bestes qui seroyent actes et faicts exorbitantz et dignes de mort exemplaire, mesmes contrariant aux loix divines et humaines icelle detenue debvoir estre pourtant remise entre les mains de l'Executeur de la Haulte Justice, lequel lui ayant lié les mains et mis une corde au col, la doibgt mener et conduyre au lieu accoustumé supplicier semblables delinquants. Et illec montée sus ung eschauffault de bois et attachée a une eschelle icelle renversée, doibgt mettre le feu aux quattre boutz d'iceluy, entant que l'ame de ladicte, detenue soit separée de son corps, et iceluy reduict en cendres, et ce pour chastiment de sesdictz malefices et forfaictz, et estre en exemple a semblables malfaicteurs, ses biens commis et confisquez... ». Les juges admettent les conclusions du Procureur fiscal.– Le 29 janvier 1610, Jaques Pasquier d’Escublens, puni une fois déjà du collier, est condamné à Lausanne, pour sorcellerie. Il a spontanément fait confession de son hommage au Diable, et reconnu avoir fait mourir plusieurs personnes en complicité avec d'autres sorciers. Sa propre femme aurait été sa victime. Le jugement porte : « Iceluy detenu debvoir estre remys entre les mains de lexecuteur de la haulte Justice, lequel après lui avoir lié les mains et mis une corde au col le doibgt conduire au lieu accoustumé d'executer tels malfaiteurs et delinquants, Et illec le mettre à la renverse sus des congruyns [bâtis] de bois attachez en terre, Et la briser les os de ses membres avecques une roue, Et dela trainer le dict delinquant tout vif sus un eschauffault de bois, ou l'ayant attachez en une eschelle, et renversée contre terre doibge mettre le feu audict eschauffault et le faire consumer avec le corps dudict delinquant, en sorte qu'il soyt reduict en cendre, et l'ame separee d'iceluy,... ». (Pièce non classée.) Les conclusions du Procureur fiscal sont admises par les juges.

[FN: § 213-1]

D. AUG. ; De divinatione daemonum, c. 3, 7 : Daemonum ea est natura, ut aerii corporis sensu terrenorum corporum sensum facile praecedant ; celeritate etiam propter eiusdem aerii corporis superiorem mobilitatem non solum cursus quorumlibet hominum vel ferarum, verum etiam volatus avium incomparabiliter vincant. Quibus duabus rebus quantum ad aerium corpus attinet praediti, hoc est, acrimonia sensus et celeritate motus, multa ante cognita praenunciant vel nuntiant, quae homines pro sensus terreni tarditate mirentur. Accessit etiam daemonibus per tam longum tempus quo eorum, vita protenditur, rerum longe maior experientia, quam potest hominibus propter brevitatem vitae provenire... – c. 5, 9: Quae cuni ita sint, primuni sciendum est, quoniam de divinations daemonum questio est, illos, ea plerumque praenuntiare quae ipsi facturi sunt... Comme le médecin prévoit le cours de la maladie, grâce aux signes extérieurs, sic daemon in aeris affectione atque ordinatione sibi nota, nobis ignota, futuras praevidet tempestates. – TERTULL.; Apolog., 22 ...Habent de incolatu aëris et de vicinia siderum et de commercio nubium caelestes sapere paraturas, ut et pluvias, quam iam sentiunt, repromittant.

[FN: § 213-2]

D. AUG. ; De civ. dei, XXI, 6, 1. – D. THOM.; Summa theol., 1a, 115, 6.

[FN: § 214-1]

Theod. Cod., IX, 16, 3: De incantamentis, quatenus ea prohibita sint vel permissa. Costantini M. Lex – Eorum est scientia punienda, et severissimis merito legibus vindicanda, qui magicis accincti artibus, aut contra hominum moliti salutem, aut pudicos ad libidinem deflexisse animos detegentur : Nullis vero criminationibus implicanda sunt remedia humanis quaesita corporibus, aut in agrestibtis locis, ne maturis vindemiis metuerentur imbres, aut ruentis grandinis lapidatione quaterentur, innocenter adhibita suffragia, quibus non cuiusque salus, aut existimatio laederetur, sed quorum proficerent actus, ne divina munera et labores hominum sternerentur. – La même loi se trouve dans : Iust. Cod., IX, 18, 4. Cette constitution fut abrogée par l'empereur Léon, Novell.65, Ad Stylianum, de incantatorum poena.

[FN: § 215-1]

Malleus malef., Pars II, quaest. 2, cap. 7 : Super remedia contra grandines et fulmina, ac etiam super iumenta maleficiata. Mais il y a encore d'autres remèdes. Le juge demande à une sorcière an per aliquem modum tempestates a maleficis concitatae sedari possent. Respondit, possunt, per hoc, videlicet : Adiuro vos grandines, et ventos, per quinque vulnera Christi, et per tres clavos, qui eius manus et pedes perforarunt, et per quatuor evangelistas sanctos, Mathaeum, Marcum, Lucam et Ioannem, ut in aquam resoluti descendatis. L'auteur traite aussi de l'usage fort ancien de sonner les cloches. Aujourd'hui, on y a substitué, avec des résultats pas très différents, les canons paragrêles.

[FN: § 221-1]

PLAT.; Euthyphr., p. 14-17: C'était en somme l'opinion d'un grand nombre de Grecs. Il convient de rappeler ce que nous avons dit à propos de la différence existant entre Athènes et Rome, à savoir qu'elle réside plus dans l'intensité de certains sentiments que dans leur nature.

[FN: § 221-2]

MACROB. Satur., III, 9 : « On sait que toutes les villes sont protégées par des dieux particuliers ; et c'était une coutume antique des Romains, inconnue de beaucoup, que lorsqu'ils assiégeaient une ville ennemie, et pensaient être sur le point de la prendre, ils en invoquaient les dieux tutélaires par une certaine incantation ; car autrement ils ne croyaient pas pouvoir prendre la ville ; ou, s'ils l'avaient pu, ils estimaient impie d'avoir fait prisonniers les dieux. Pour la même raison, les Romains voulurent que le nom du dieu qui protégeait Rome et le nom latin, lui-même, de la ville, restassent inconnus ».

Macrobe donne ensuite une formule pour invoquer les dieux d'une ville assiégée, et une autre pour consacrer les villes et les armées, après en avoir invoqué les dieux. Mais il avertit que seuls les dictateurs et les empereurs pouvaient s'en servir : Dis pater, Veiovis, Manes, sive vos quo alio nomine fas est nominare... Il faut que les paroles de la formule soient accompagnées de gestes déterminés : Cum Tellurem dicit, manibus terram tangit, cum Iovem dicit, manus ad coelum tollit. Cum votum recipere dicit, manibus pectus tangit. S'il ne s'agissait que de se faire comprendre des dieux, ce serait ridicule ; au contraire, c'est raisonnable, si les paroles et les gestes ont une vertu propre. –- VIRG.; Aeneid., II, 351 : Excessere omnes adytis arisque relictis Di. – SERVIUS note : Quia ante expugnationem evocabantur ab hostibus numina, propter vitanda sacrilegia. Inde est quod Romani celatum esse voluerunt, in cuius dei tutela Urbs Roma sit : et iure Pontificum cautum est, ne suis nominibus dii Romani appellarentur, ne exaugurari possint. Et in Capitolio fuit clypeus consecratus, cui scriptum erat : Genio Urbis Romae sive mas sive foemina. Et Pontifices ita precabantur : Iupiter optime maxime, sive quo alio nomine te appellari volueris ; nam et ipse ait : Sequimur te, sancte deorum, quisquis es (Aeneid., IV, 576-577).

[FN: § 222-1]

GELLIUS; II, 28.

[FN: § 223-1]

ARNOB. ; Adv. Gent., VII, 31. – ORELLI fait la remarque suivante : Veteres, cum aliquid consecrabant, caute et accurate loquebantur legesque semper et conditiones expresse addebant, ne qua se tacita religione obligarent ; quod ex pluribus, inscriptionibus patet. Et il en donne un exemple.

[FN: § 223-2]

PLIN.; N. H., XXVIII, 4, 3, (2). – CICERON ne comprend plus ces associations d'idées : De Divin., II, 36; parlant de M. Marcellus : Et quidem ille dicebat, si quando rem agere vellet, ne impediretur auspiciis, lectica operta facere iter se solere. Huic simile est, quod nos augures praecipimus, ne iuge auspicium obveniat, ut iumenta iubeant diiungere.

[FN: § 224-1]

BOUCHÉ-LECLERCQ; Hist. de la divin. dans l'ant., t. IV.

[FN: § 225-1]

BOUCHÉ-LECLERCQ; loc. cit. Le même auteur, p. 170, traduit ainsi le rituel d’Iguvium. : « Que celui qui va observer les oiseaux propose ainsi de (p. 171) son siège à l'auspiciant : « Je stipule que tu observes l'épervier à droite, la corneille à droite, le pic à gauche, la pie à gauche, les oiseaux volants de gauche et les oiseaux chantants de gauche étant favorables ». Que l'auspiciant stipule ainsi : « Je les observe, l'épervier à droite, la corneille à droite, le pic à gauche, les oiseaux volants de gauche et les oiseaux chantants de gauche étant favorables pour moi, pour le peuple Iguvien, dans ce temple déterminé ». – CIC. ; De div., II, 38, 71 : Etenim, ut sint auspicia, quae nulla sunt ; haec certe, quibus utimur, sive tripudio, sive de coelo, simulacra sunt auspiciorum, auspicia nulle modo. – 34, 71 : « Q. Fabi, te mihi in auspicio esse volo ». Respondet, « audivi ». Hie apud maiores nostros adhibebatur peritus, nunc quilibet. Peritum autem esse necesse est eum, qui, silentium quid sit, intelligat : id enim silentium dicimus in auspiciis, quod omni vitio caret : (72) hoc intelligere perfecti auguris est. Illi autem, qui in auspicium adhibetur, cum ita imperavit is, qui auspicatur, « Dicito, si silentium esse videbitur ; » nec suspicit, nec circumspicit ; statim respondet : «Silentium esse videri ». Tum ille, «Dicito, si pascuntur Pascuntur ». – Voir dans TITE-LIVE, X, 40, l'histoire d'un auspice qui, bien qu'inventé, est favorable par le seul fait qu'il est annoncé. Le consul Papirius répond à celui qui l'avertit que l'auspice est inventé : Tu quidem macte virtute diligentiaque esto : ceterum qui auspicio adest, si quid falsi nuntiat, in semet ipsum religionem recipit. Mihi quidem tripudium nuntiatum, populo romano exercituique egregium auspicium est.

[FN: § 226-1]

GROTE ; Hist. de la Grèce, trad. franç., t. VI. – Les Argiens abusaient de ces dispositions de leurs voisins, les Spartiates. Au temps de la guerre contre Épidaure, tandis que les Spartiates restaient inactifs pendant tout le mois Karneios, les Argiens abrégèrent arbitrairement ce mois, de quatre jours, et commencèrent les hostilités. Thucyd., V, 54. Dans d'autres occasions, au contraire, ils créaient un mois Karneios fictif, pour obtenir une trêve des Lacédémoniens. C'est pourquoi Agésipolis, sachant qu'il devait diriger son armée contre Argos, commença par aller demander, à Olympie et à Delphes, s'il devait accorder cette trêve et il lui fut répondu d'une façon concordante qu'il pouvait la refuser. XÉNOPH. Hell., IV, 7.

[FN: § 226-2]

SERV.; Ad Aeneid., IX, 53 : Post tertium autem et trigesimum diem, quam res repetissent ab hostibus, Feciales hastam mittebant. Denique cum Pyrrhi temporibus adversum transmarinum hostem bellum Romani gesturi essent, nec invenirent locum, ubi hanc solennitatem per Feciales indicendi belli celebrarent, dederunt operam, ut unus de Pyrrhi militibus caperetur, quem fecerunt in Circo Flaminio locum emere, ut quasi in hostili loco ius belli indicendi implerent: denique in eo loco ante pedem Bellonae consecrata est columna. Le chef d'une armée devait régulariser ses auspices ; et cela ne pouvait avoir lieu qu'au Capitole. Comment faire, quand l'armée se trouvait dans des pays lointains ? La chose est très simple. On construisait un Capitole fictif, sur le sol étranger, et l'on y prenait les auspices. – SERV. ; Ad Aeneid., II, 178 : Tabernacula aut eligebantur ad captanda auspicia ; sed hoc servatum a ducibus Romanis, donec ab his in Italia pugnatum est, propter vicinitatem ; postquam vero imperium longius prolatum est, ne dux ab exercitu diutius abesset, si Romain ad renovanda auspicia de longinquo revertissent, constitutum, ut unus locus de captivo agro Romanus fieret in ea provincia, in qua bellabatur, ad quem, si renovari opus esset auspicia, dux rediret.

[FN: § 227-1]

IHERING. ; Espr. du dr. rom., t. III.

[FN: § 227-2]

BEAUCHET ; Hist. du dr. priv. de la Rép. Athén., t. III.

[FN: § 228-1]

F. GIRARD; Manuel élém. de dr. rom.

[FN: § 228-2]

L'auteur cite CIC. ; Pro Mur., 12, 26.

[FN: § 228-3]

Ici l'auteur fait allusion à une controverse que nous n'avons pas besoin de résoudre, étant donné notre but qui est seulement de montrer, sans entrer dans les détails, la partie presque mécanique, exécutée par le magistrat.

[FN: § 230-1]

MOMMSEN ; Hist. rom., trad. franç., II, p. 5 : « Partout : et à Rome, et chez les Latins, et chez les Sabeliens, les Étrusques et les Apuliens, dans toutes les cités italiques enfin, comme dans les cités grecques, des magistrats annuels remplacent tôt ou tard les magistrats à vie ». Parmi les cités grecques, il faut naturellement excepter Sparte. Il convient de remarquer que Rome et les cités italiennes n'ont pas eu la période des tyrans, comme la Grèce ; et il est probable que l'absence de cette période, en Italie,, est due précisément, au moins en partie, à l'état psychique des populations italiennes ; état psychique que nous trouvons spécialement à Rome. À Sparte, les deux rois devaient la dignité royale à la succession ; ils présidaient les conseils, administraient la justice, commandaient l'armée et servaient d'intermédiaires entre Sparte et les dieux.

[FN: § 230-2]

La tradition est unanime à montrer que les consuls héritent presque de tous les pouvoirs des rois. Liv.; II, 1 : Libertatis autem originem inde magis, quia annuum imperium consulare factum est, quam quod deminutum quidquam sit ex regia potestate, numeres. Omnia iura, omnia insignia primi consules tenuere... – CIC. ; De rep., II, 32 : Tenuit igitur hoc in statu senatus rempublicain temporibus illis ... , atque uti consules potestatem haberent tempore dumtaxat annuam, genere ipso ac iure regiam. DIONYS., IV, 73, 74, 75.

Peu importe, étant donné notre but, que ces traditions soient plus ou moins authentiques. De toute façon, elles nous révèlent l'état d'âme de ceux qui les ont arrangées ou partiellement inventées ; et c'est justement cet état d'âme que nous voulons remarquer.

[FN: § 230-3]

MOMMSEN ; Le droit publ. rom., t. I.

[FN: § 231-1]

MOMMSEN ; Le droit publ. rom., t. II.

[FN: § 231-2]

VAL. MAX.; III, 8,3, nous raconte comment C. Pison se refusa à « renuntiare » M. Palicanus, homme fort séditieux, qu'il estimait indigne du consulat : In hoc miserando pariter et erubescendo statu civitatis, tantum non manibus tribunorum pro rostris Piso collocatus, cum hinc atque illinc eum ambissent, et : An Palicanum suffragiis _populi consulem creatum, renuntiaturus esset, interrogaretur, primo respondit : Non existimare se, tantis tenebris offusam esse rempublicam, ut huc indignitatis veniretur. Deinde, cum perseveranter instarent, ac dicerent : Age, si ventum fuerit ? – Non renuntiabo, inquit. – GELL. ; VI, 9 : At aedilis, qui comitia habebat, negat accipere ; neque sibi placere, qui scriptum faceret, eum aedilem fieri. – Le même fait se trouve dans LIV. ; IX, 46. Il y a du reste de nombreux autres exemples de ce genre. LIV. ; XXXIX, 39 : L. Porcius consul primo in ea sententia esse, ne nomen eius acciperet...

La Lex Iul. mun., I, 132, défend expressément de « renuntiare » certains individus réputés indignes : ... neve, quis eius rationem comitieis ; conciliove habeto, neive quis quem, sei adversus ea comitieis conciliore creatum est, renuntiato ;... (les mots imprimés en italique sont une reconstitution de Mommsen).

[FN: § 233-1]

CIC.; Philipp., II, 34. – DION.; XLIV, 1-3. – VELLEIUS ; 56 : Cui magnam invidiam conciliarat M. Antonius omnibus audendis paratissimus, consulatus collega, imponendo capiti eius Lupercalibus sedentis pro rostris insigne regium, quod ab eo ita repulsum erat, ut non offensus videretur.

[FN: § 233-2]

Reconstitution de I. Franzius : In consulatu sexto et septimo [postquam bella civili]a extinxeram, per consensum universorum [civium mihi tradita]m rempublicam ex mea potestate in Senatu[s populique Romani a]rbitrium transtuli, quo pro merito meo Sena[tus consulto Augustus appel]l[at]u[s] sum, et laureis postes aedium mearum v[inctae sunt p]u[bli]c[e] su[pe]rque eas ad ianuam meam. e[x] qu[erna fronde co]r[o]n[a ci]v[ic]a posi[ta ob servatos cive]s, qu[ique es]se[t pe]r [inscriptione]m [t]e[stis meae] virtutis, clementiae, iustitiae pietatis, est p[osit]us clupe[us aureus in curia a Senatu populoque R]o[mano quo]d, quamquam dignitate omnibus praestarem, potestatem tamen nih[ilo] amplio[rem haberem quam] con[l]e[gae mei.

[FN: § 234-1]

MOMMSEN ; Le droit publ. rom., t. V.

[FN: § 233-3]

VELL. ; II, 89 : Restituta vis legibus, iudiciis auctoritas, senatui maiestas, imperium magistratuum ad pristinum redactum modum.

[FN: § 235-1]

GAIUS ; 1, 5 : Constitutio principis est, quod imperator decreto vel edicto vel epistula constituit. Nec unquam dubitatum est, quin id legis vicem obtineat, cum ipse imperator per legem imperium accipiat. – ULP. : Dig., 1, 4, 1 : Quod principi placuit, legis habet vigorem : utpote cum lege regia, quae de imperio eius lata est, populus ei et in eum omne suum imperium et potestatem conferat.

Les Institutes de Justinien (1, 2, 6) répètent la même chose. En ces temps-là, c'était vraiment de l'archéologie.

[FN: § 235-2]

HIST. AUG. ; Caracall., 10 : Interest scire quemadmodum novercam suam Iuliam uxorem duxisse dicatur. Quae cum esset pulcherrima, et quasi per negligentiam se maxima corporis parte nudasset, dixissetque Antoninus : Vellem, si liceret, respondisse fertur : Si libet, licet. An nescis te imperatorem esse, et leges dare, non accipere ?

AUR. VICT.; De Caesar., XXI : Il dit de Caracalla : ... pari fortuna, et eodem matrimonio, quo pater. Namque Iuliam novercam, cuius facinora supra memoravi, forma captus, coniugem adfectavit ; cum illa factiosior adspectui adolescentis, praesentiae quasi ignara, semet dedisset intecto corpore adferentique, vellem, si liceret, uti : petulantius multo (quippe quae pudorem velamento exuerat) respondisset : libet ? plane licet.

Sous cette forme, l'histoire doit avoir été inventée. Julie était mère, non belle-mère de Caracalla.

[FN: § 236-1]

BREAL et BAILLY, Dict. étym. latin, s. r. lego, dérivent religio de lego : « (p. 157) Religio signifiait « le scrupule », et particulièrement « le scrupule pieux ». LIV. VIII, 17 : Religio deinde incessit, vitio eos creatos. TER.; Andr., V, 4, 38... CIC. Caec., 38... Id. Div., 1, 35 : Nec eam rem habuit religioni. TER.; Heaut., II, 1, 16 Hoc facere religio est. De ce premier sens sont dérivés tous les autres du mot religio ». Or cette étymologie n'est plus acceptée ; mais cela importe peu, puisque, ni maintenant ni jamais, nous ne voulons déduire les propriétés des choses, de l'étymologie de leurs noms. – FORCELLINI est dans l'erreur, quand il donne comme dérivé un sens qui est plutôt primitif ; mais il exprime bien ce sens, s. r. Religio, en disant : (10) Translate est minuta et scrupulosa diligentia et cura : exactitude. – CIC.; Brut., 82 : Eius oratio nimia religione attenuata. Id., Orat. : Atheniensium semper fuit prudens sincerumque iudicium, nihil ut possent, nisi incorruptum audire et elegans, quorum religioni cum serviret orator, nullum verbum insolens, nullum odiosum ponere audebat : délicatesse. (11) Item iusta muneris funetio : ponctualité. Id., 5, Ven, 1... – il convient de noter que la signification primitive de ( superstitio » n'est pas du tout celle que nous exprimons par « superstition », mais simplement un excès de religion, quelque chose qui sort de l'ordre, de la régularité qu'aimaient les Romains. GELL., IV, 9, cite un vers d'un poème ancien : « Roligentem oportet esse ; religiosum nefas ». Cela signifie, explique-t-il, qu'on doit être religieux, non pas superstitieux. À ce propos il cite Nigidius : Hoc, inquit, inclinamentum semper huiuscemodi verborum ; ut : vinosus, mulierosus, religiosus, nummosus, significat copiam quamdam immodicam rei, super qua dicitur. Quocirea religiosus is appellabatur, qui nimia et superstitiosa religione sese alligaverat, eaque res vitio assignabatur. Sed praeter ista, quae Nigidius dicit, alio quodam diverticulo significationis religiosus pro casto atque observanti cohibentique sese certis legibus finibusque dici captas.

[FN: § 237-1]

LIV. ; II, 82 : Et primo agitatum dicitur de consulum caede, ut solverentur sacramento ; doctos deinde, nullam scelere religionem exsolvi, Sicinio quodam auctore, iniussu consulum in Sacrum montem secessisse...

[FN: § 238-1]

CIC.; Verr., I, 23, 60, explique « qu'on a entendu dire qu'un homme n'a pas tenu de registres. On l’a dit faussement d'Antoine, car il les a tenus très exactement. Il y a pourtant quelque exemple de cette conduite blâmable. Nous avons entendu dire que d'autres ne les ont tenus qu'à partir d’une certaine époque. Il y a des motifs qui justifient cette conduite. Mais ce qui est nouveau et ridicule, c'est ce qu'il [Verrès] nous a répondu, quand nous lui avons demandé ses registres : qu'il les avait tenus jusqu'au consulat de M. Terentius et de C. Cassius, puis avait cessé de les tenir ». À propos de ce passage, Asconius observe « Moris autem fuit, unumquenque domesticam rationem sibi totius vitae suae per dies singulos scribere, ex quo appareret, quid quisque de redditibus sais, quid de arte, foenore, lucrove seposuisset quoque die, et quid item sumptus damnive fecisset... ». – On avait demandé à M. Celius, ses registres. Cicéron répond, pro Al. Coelio, 7, 17 : Tabulus, qui in patris potestate est, nullas conficit.

[FN: § 239-1]

DION HAL. ; II, 19, dit que « chez les Romains, on n'entend pas parler d'Uranus émasculé par ses propres fils, de Saturne qui dévore ses enfants, de Jupiter qui chasse Saturne et le fait prisonnier, ni de guerre ni de blessures ni de chaînes mises aux dieux, ni de leur esclavage chez les hommes... » D'après notre auteur, le culte aussi était plus moral à Rome qu'en Grèce.

[FN: § 239-2]

ESCH. ; Choeph. 71-74 :

Bota traduit, suivant le scoliaste : « Ner vero expugnatori virginalium thalamorum remedium est, et si omnes ex uno loco fontes confluerent ad abluendum, qui manus occisoris polluit, sanguinem, frustra lavaret ». – Le scoliaste note : (71) . « De même que celui qui entre dans le lit d'une vierge n'a aucun moyen de rendre à la jeune fille sa virginité, ainsi le meurtrier n'a aucun moyen d'effacer l'homicide ». (72) SOPH. ; Oed. rex, 1227-1228 : « Je ne crois pas que les eaux de l'Ister et du Phase pourraient laver les délits commis dans ce palais. Une épigramme de l'Ant. Palat., XIV, 71, nous donne un oracle de la Pythie : « Étranger, entre avec une âme pure dans un temple pur, après avoir touché l'eau des Nymphes ; car une gouttelette suffit aux hommes vertueux ; mais l'homme pervers ne pourrait se laver avec tout l'Océan ».

[FN: § 239-3]

POLYBE ; VI, 56, 13.

[FN: § 239-4]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. On peut faire la même observation, au sujet de la colonisation espagnole en Amérique. D'un côté, une Population sauvage et incapable de saisir les finesses de la morale chrétienne, mais brave et d'une loyauté que ses ennemis ont toujours vantée ; de l'autre, des hommes civilisés, très catholiques, ennemis mais d'une brutalité au moins égale à celle des sauvages, et d'une mauvaise foi consommée. L'histoire des colonisations est riche de faits semblables.

[FN: § 240-1]

Il convient de noter que, selon Plutarque (Nicias, 23, 3), Anaxagore ne faisait connaître ses théories sur les éclipses qu'à un petit nombre de personnes. Mais alors, de telles investigations n'étaient pas tolérées à Athènes. « Protagoras fut exilé, Anaxagore mis en prison et relâché avec peine par Périclès, et Socrate, bien qu'il ne s'occupât pas de physique, fut mis à mort à cause de sa philosophie ». PLUT. ; Périclès, 32, 2 : « Une loi proposée par Diopétès met au nombre des délits tombant sous le coup d'une action publique, le fait de nier l'existence des dieux et de discuter sur les choses célestes ; ce qui jetait le soupçon sur Périclès, à cause d'Anaxagore ». DIOG. LAERCE (II, 12, Anax.) dit qu'Anaxagore fut accusé d'impiété par Cléon, pour avoir dit que le soleil était une masse incandescente. PLAT. (Apol., p. 26) suppose que Mélitos accuse Socrate d'avoir dit que le soleil est une pierre et la lune une terre. À quoi Socrate répond : « Tu crois accuser Anaxagore, ami Mélitos ».

[FN: § 240-2]

PLUT. ; Cat. mai., 22, 6 :

[FN: § 240-3]

C'est l'hérésie des Ariens.

[FN: § 241-1]

Sir HENRY SUMNER MAINE ; Ancient Law.

[FN: § 241-2]

IHERING, ; L'espr. du dr. rom., t. I.

[FN: § 243-1]

THUCID.; II, 35 et sv.

[FN: § 243-2]

CIC.; De harusp. resp., IX, 19: Quam volumus licet, patres conscripti, ipsi nos amemus : tamen nec numero Hispanos, nec robore Gallos, nec calliditate Poenos, nec artibus Graecos, nec denique hoc ipso huius gentis ac terrae domestico, nativoque sensu, Italos ipsos ac Latinos, sed pietate ac religione, atque hac una sapientia, quod deorum immortalium numine omnia regi gubernarique perspeximus, omnes gentes nationesque superavimus. Dans le De nat. deor., II, 3, 8, Cicéron fait dire à Balbus : Et, si conferre volumus nostra cum externis, ceteris rebus aut pares, aut etiam inferiores reperiemur : religione, id est cultu Deorum, multo superiores. – Notez qu'il explique que la religion est le culte des dieux.

[FN: § 243-3]

CIC.; De harusp. resp., IX, 18 : ...qui statas solemnesque caerimonias, pontificatu ; rerum bene gerendarum auctoritates, augurio ; fatorum veteres praedictiones Apollinis, vatum, libris ; portentorum explanationes, Etruscorum disciplina contineri putarunt...

[FN: § 244-1]

Cette restriction est nécessaire ; car après la première décade du XXe siècle, le gouvernement de l'Angleterre a été confié à des Gallois et à des Irlandais fanatiques. Si cela indique un changement dans la nature du pays entier, si ce n'est pas un phénomène temporaire, l'Angleterre de l'avenir ne ressemblera pas à l'Angleterre du passé. C'est de cette dernière, qui, seule, nous est encore bien connue aujourd'hui, que nous voulons parler, quand nous nommons l’Angleterre.

[FN: § 246-1]

Il ne faut pas chercher à déduire le sens de ce terme, de son étymologie. Il sera défini au chapitre XII.

[FN: § 247-1]

VELL. PATERC., II, 4 : ... et cum omnis concio adclamasset, « Hostium – – inquit – armatorum totiens clamore non territus, qui possum vestro moveri, quorum noverca est Italia ? »

 


 

Notes du Chapitre III. Les actions non-logiques dans l’histoire des doctrines (§249 à §367), vol. 1, pp. 150-204

[FN: § 256-1]

Les recherches sur les origines sont en grande partie hypothétiques. Nous acceptons les données de Sumner Maine à titre d'hypothèses, sans vouloir les examiner ici.

[FN: § 256-2]

Sir HENRY SUMNER MAINE; Ancient Law, c. V : (p. 126) It is so framed as to be adjusted to a system, of small independent corporations. Courcelle Seneuil traduit adjusted par conçu, ce qui implique l'idée des actions logiques. COURCELLE, SENEUIL ; L'ancien Droit : « (p. 119) Ce droit est conçu pour un système de petites corporations indépendantes ».

[FN: § 256-3]

Loc. cit. §256-1, c. VI : (p. 183) Men are regarded and treated, not as individuals, but always as members of a particular group.

[FN: § 256-4]

Loc. cit. §256-2, c. V.

[FN: § 256-5]

Sur les rives du Léman, on peut voir des groupes de cygnes, qui occupent chacun un espace différent de la surface du lac. Si un cygne de l'un des groupes tente d'envahir l'endroit occupé par un autre groupe, il est assailli, frappé, repoussé. Les vieux cygnes meurent, les jeunes naissent et grandissent, et le groupe demeure comme unité.

[FN: § 257-1]

DURUV ; Hist. des Rom., t. III.

[FN: § 263-1]

Manuel, III, 1.

[FN: § 270-1]

ARIST.; Polit ., I, 1, 1.

[FN: § 271-1]

ARIST.; Polit ., I, 1, 4 :

[FN: § 271-2]

ARIST.; Polit ., I, 1, 8 :

[FN: § 273-1]

ARIST.; Polit., I, 1, 10 :

[FN: § 274-1]

CIC.; De lege agraria, II, 35, 95. Pour combattre la loi agraire, Cicéron voulait persuader à ses concitoyens qu'une colonie fondée à Capoue aurait pu devenir dangereuse pour Rome ; donc il se peut qu'il ne crût pas plus que cela à l'argument dont il usait. Mais nous n'avons pas à nous en préoccuper, puisque nous recherchons, non pas la pensée de Cicéron, mais bien les opinions qui avaient cours en son temps ; et s'il employait cet argument, cela veut dire qu'il correspondait, d'après lui, à l'opinion d'une partie – importante ou non, – de ses concitoyens.

[FN: § 275-1]

ARIST.; Rhetor., II, 12 et sv. On peut aussi trouver une certaine idée des actions non-logiques, dans le fait qu'Aristote attribue à la partie non raisonnable de l'homme, les vertus ; c'est-à-dire la tempérance, la justice, le courage, etc. ARIST. ; Magn. moral., I, 5, 1 : « Dans la partie [de l'âme] qui est raisonnable, naissent la prudence, l'intelligence, la sagesse, la facilité d'apprendre, la mémoire et autres choses semblables. Dans la partie non raisonnable se trouve ce qu'on appelle les vertus : la tempérance, la justice, l'énergie et toutes les autres vertus morales qui paraissent dignes de louange.

[FN: § 275-2]

La doctrine d'Aristote sur la nature logique ou non-logique des actions en général n'était peut-être pas très précise ; d'ailleurs les doctrines semblables ne le sont généralement pas. Toutefois il semble que l'auteur reconnaissait des éléments non-logiques, auxquels il ajoutait des éléments logiques, en subordonnant les premiers aux seconds. Dans la Politique, VII, 12, 6, il dit que trois choses rendent l'homme bon et vertueux : « la nature, l'habitude, la raison ». Quant à la partie non-logique, Aristote admet que les hommes agissent, au moins en partie, sous l'influence de circonstances extérieures, telles que le climat, le sol, etc. Dans la Politique, VII, 6, il met clairement en rapport les actions des hommes avec ces circonstances; et dans le livre De part. an., II, 4, il dit estimer que ce rapport existe en général pour les êtres vivants. L'auteur (Aristote ?) des Problèmes, XIV, ajoute de nouvelles considérations au sujet du dit rapport.

Jusqu'ici, nous sommes donc dans le domaine des actions non-logiques. Mais l'auteur les élimine bientôt par un procédé qui est général, et qui consiste à les subordonner aux actions logiques : elles deviennent les matériaux que la raison met en œuvre. Magn. moral., I, 11, 3 :

« Le jugement, la volonté et tout ce qui est selon la raison constituent le principe de l'action, soit bonne soit mauvaise ». Il ne s'aperçoit pas qu'il contredit ainsi ce qu'il avait affirmé, en disant, par exemple dans le passage cité tout à l'heure, de la Politique, que les hommes qui habitent un pays froid sont courageux. Dans ce cas, le «principe » de l'action courageuse, c'est-à-dire la « délibération et la volonté » de s'exposer au péril, est déterminé – selon Aristote – par le climat et non par la « raison ». Il croit se tirer d'embarras, en disant, Magn. moral, I, 11, 5, qu'il faut tout d'abord le secours de la nature, puis la volonté. Mais en laissant de côté la question métaphysique du libre arbitre, dont nous n'avons pas l'intention de nous occuper, le problème primitif de savoir si ces deux choses qu'il suppose indépendantes le sont effectivement, puis en quelle proportion elles se trouvent dans une action concrète, ce problème n'en subsiste pas moins. Et justement, en l'étudiant, on voit qu'il y a des actions où le premier élément (actions non-logiques) prévaut, et d'autres où c'est le second (actions logiques).

Aristote fut détourné de la voie scientifique, non seulement par des considérations métaphysiques, mais encore par le grand ennemi de toute science sociale : la manie de faire œuvre pratique. Dans la Morale à Nicomaque, II, 2, 1, il dit qu'il ne veut pas seulement s'occuper de théorie :

« Car ce n'est pas pour savoir ce qu'est la vertu, que nous étudions, mais afin de devenir bons, puisque autrement cette étude ne serait utile en rien ». Aristote n'avait à sa disposition aucun autre moyen d'agir sur autrui, que le raisonnement ; par conséquent il était et devait être poussé à le faire prévaloir dans les actions humaines.

[FN: § 278-1]

PLAT.; De leg.. IV, p. 705. De même ARIST., Polit., VII, 5, traite des avantages et des inconvénients du voisinage de la mer.

[FN: § 278-2]

PLAT., De Rep., III, p. 415. Systèmes, t. I, p. 276.

[FN: § 280-1]

RITTER ; Hist. de la phil. anc. trad. fr., tome III: « (p. 248) Socrate plus porté à la dialectique qu'à la physique, avait en conséquence cherché le principe de toute moralité dans la dialectique seulement ; ainsi la vertu n'était fondée à ses yeux que sur la raison et la science. Mais déjà Platon avait trouvé que le courage et la modération, comme deux côtés nécessaires de la vertu, doivent préexister dans la nature de l'homme, dont l'appétit est dans le cœur, mais pas dans la raison. Aristote (p. 249) alla plus loin dans la même direction, et s'attacha plus étroitement encore à la physique, porté qu'il y était naturellement. Il ne considère pas la raison comme le premier principe de la vertu, mais bien l'impulsion naturelle et les états passionnés de l'âme ».

ZELLER ; La phil. chez les Grecs, tr. fr., tome III « (p. 130) la science à ses yeux [de Socrate] n'est pas seulement une condition indispensable et un auxiliaire de la vraie moralité, mais (p. 131) elle est immédiatement la moralité tout entière, et là où la science fait défaut, il ne se contente pas de reconnaître simplement une vertu imparfaite, il ne voit plus du tout de vertu. Nous ne trouverons que plus tard, chez Platon et plus complètement chez Aristote, des corrections apportées à cette forme étroite de la doctrine socratique de la vertu » (p. 118, éd. allem.).

[FN: § 282-1]

Summa theol., Ia, IIae, q. 55, a. IV : Virtus est bona qualitas, seu habitus mentis, qua recte vivitur, et qua nullus male utitur ; et quam Deus in nobis sine nobis operatur. On découvre encore mieux la nature des actions non-logiques dans l'observation suivante, faite au même endroit, par le saint docteur : Sed notandum quod habituum operativorum aliqui sunt semper ad malum, sicut habitus vitiosi ; aliqui vero quandoque ad bonum, et quandoque ad malum, sicut opinio se habet ad verum et falsum.

[FN: § 284-1]

Auguste COMTE ; Cours de phil. pos., t. I.

[FN: § 285-1]

H. SPENCER ; Class. des scienc.

[FN: § 286-1]

A. COMTE; Syst. de polit. pos., t. IV.

[FN: § 286-2]

Lui-même aperçoit, jusqu'à un certain point, une évolution semblable. Syst. de pol .poss, t. III : « (p. VII) En comparant ce volume avec la partie historique de mon traité fondamental, on trouvera que la coordination générale y devient plus profonde et plus complète, tandis que les explications spéciales y sont moins développées. Sous ce dernier aspect, cette cons- truction définitive de ma philosophie de l'histoire contredit mes anciennes annonces, qui promettaient ici plus de détails et de preuves que dans la première ébauche, à laquelle je dois, au contraire, renvoyer maintenant pour cela. Appréciant mieux les vraies conditions du régime philosophique, j'ai senti que les assertions coordonnées, où je voyais d'abord un mode purement provisoire, devaient constituer l'état normal de toute exposition vraiment systé- matique. Mes progrès accomplis et l'autorité qu'ils m'ont procurée permettent à ma maturité de suivre la marche libre et rapide de mes principaux ancêtres, Aristote, Descartes et Leibnitz, qui se bornaient à formuler leurs pensées, en laissant au public la vérification et (p. VIII) le développement. Cette répartition du commerce mental est à la fois la plus honorable pour les initiés et la plus profitable aux initiateurs ». Dans cette dernière observation, il a vraiment raison. il est très avantageux de pouvoir obtenir créance, sans avoir l'ennui de donner aucune preuve.

[FN: § 287-1]

A. COMTE; Syst. de polit. posit., t. IV : « (p. 377) Pour modifier la vie publique, il lui suffit [au Sacerdoce de l'humanité] que la situation ait fait surgir une volonté prépondérante et responsable. Cette condition se trouve assez remplie, en France, depuis l'avènement de la dictature, qui dispense la doctrine organique de se soumettre à des assemblées toujours disposées à perpétuer l'état révolutionnaire, même quand elles sont rétrogrades ». Ibidem :

« (p. 878), Sans convertir ni le public ni ses chefs, le positivisme peut donc, en vertu de sa réalité fondamentale et de sa pleine opportunité, conquérir assez d'ascendant partiel pour instituer la transition finale, à l'insu même des principaux coopérateurs d’un tel mouve- ment ». Une action qui a lieu à l'insu de celui qui l'accomplit appartient évidemment au genre des actions non-logiques.

[FN: § 289-1]

Herbert SPENCER ; Sociologie, t. I, p. 145.

[FN: §289- 2]

Cf. § 701, 711.

[FN: § 295-1]

J. S. MILL : Aug. Comte et le posit.

[FN: § 296-1]

STAT.; Theb., III, 661, ou Pétrone. Le scoliaste Lactance note, à propos de ce vers de Stace : Primus in orbe deos fecit timor negat deos ulla re alia celebrari nisi timore mortalium. Ut Lucanus (1, 486) : « quae finxere timent » et Petronius Arbiter istum secutus (fragm. XXVII, 1 B) : « primus in orbe deos fecit timor ». (Sic et Mintanor musicus : «deum, doloris quem prima compunctio humani finxit generis ».)

[FN: § 296-2]

D’HOLBACH ; Syst. de la nat., t. I, ch. XVIII «... (p. 448) C'est dans le sein de l'ignorance, des alarmes et des calamités que les hommes ont toujours puisé leurs premières notions sur la divinité... (p. 456) La première théologie de l'homme lui fit d'abord craindre et adorer les éléments mêmes, des objets matériels et grossiers... ».

[FN: § 296-3]

Cicéron exprimait déjà l'opinion que les pratiques de la divination avaient été acceptées par les anciens, comme faits plutôt que comme conséquences de raisonnements. De div., I, 3, 4 : Atque haec, ut ego arbitror, veteres, rerum magis eventis moniti, quam ratione docti probaverunt. Cela arrive très souvent ; le fait, l'action non-logique précède ; puis vient l’explication du fait, le vernis logique.

[FN: § 298-1]

J. S. MILL; La Liberté. Les restrictions dont parle le texte se rapportent à l'usage de termes peu précis, comme : intérêts légitimes ou illégitimes. Mais on ne saurait en rejeter la faute spécialement sur Mill, car c'est celle de presque tous les auteurs qui traitent de cette matière.

[FN: § 299-1]

Cette bonne âme de Mill ajoute : « Pour justifier cela, il faudrait que la conduite qu'on veut détourner cet homme de tenir, eût pour effet de nuire à quelque autre ». Il ne savait pas que les sophismes ne manquent jamais, pour démontrer qu'autrui est lésé. Voyez, par exemple, ce qui arrive dans les pays où l'on veut imposer la tempérance et la vertu, au nom du très saint « Progrès ». Giornale d'Italia, 19 mars 1912 : Atlanta (Géorgie), 2 mars. – Hier soir, le comm. Alexandre Bonci, de passage ici pour ses occupations artistiques, sa femme, son secrétaire et son pianiste, furent arrêtés au Georgian Terrace Hotel de cette ville, pour contravention à la loi de tempérance. Il paraît que M. Bonci et ses amis, en bons Italiens qui boivent du vin au moins à déjeuner et à dîner, adoptèrent un ingénieux moyen pour échapper à la loi qui défend l'usage du vin et des liqueurs, dans l'État de Géorgie. Depuis quelques jours, la direction de l’hôtel avait remarqué que les époux Bonci et leurs amis avaient l'habitude vers le milieu du repas, de mettre sur la table quatre de ces petits flacons dont se servent les pharmaciens, munis d'étiquettes, où étaient écrites les instructions sur l'usage des prétendues médecines. La régularité avec laquelle les Bonci et leurs amis avalaient le contenu des petites bouteilles, deux fois par jour, comme si chaque membre de la société était affecté de la même maladie et avait besoin de la même cure, finit par éveiller les soupçons de l'house detective (policier spécial) de l'hôtel. Il en parla à un zélé policeman, qui, hier soir, juste au moment de la... cure, séquestra les petites bouteilles. Elles se trouvèrent être chacune de la capacité d'un verre, et ne contenir rien d'autre que d'excellent Chianti, dont le commandeur est, paraît-il, bien fourni dans ses voyages, afin de faire face aux... surprises de la loi américaine. Malgré les vives protestations de M. Bonci, les quatre contrevenants furent mis dans une automobile et conduits à la Court House, où le magistrat Ralendorf, après un interrogatoire sommaire, renvoya la cause à ce matin, en ordonnant de ne laisser les inculpés en liberté que sous caution de 2000 dollars. Et alors arriva le plus beau ou plutôt le pire ; car la perspective de passer la nuit en prison commençait à ennuyer le célèbre ténor, qui, en ce moment-là, n'avait pas plus de 150 dollars en poche… » Il est probable que si M. Bonci s'était souvenu des merveilleux effets que l'on obtient en graissant la patte aux vertuistes américains, comme il convenait de la graisser aux vertueux inquisiteurs, il aurait évité les ennuis qu'il éprouva.

D'une façon générale : vous passez, dans un vagon qui sert de restaurant, sur le territoire de l'un des états abstinents des États-Unis d'Amérique, et l'on enlève de votre table le verre de vin que vous alliez boire. « Quel tort fais-je à autrui – dites-vous – en buvant ce verre de vin ? » La réponse ne se fait pas attendre : « Vous donnez le mauvais exemple». Et les bon- nes gens qui imposent ainsi leur volonté parlent avec indignation des catholiques espagnols, qui, justement afin qu'on ne donne pas le mauvais exemple, ne veulent tolérer aucun culte public non catholique.

[FN: § 301-1]

CONDORCET; Esq. d'un tab. hist. des pr. de l'esp. hum. – 9e époque.

[FN: § 302-1]

CONDORCET ; loc. cit. – 9e époque.

[FN: § 301-2]

CONDORCET; loc. cit. – 10e époque.

[FN: § 303-1]

D'HOLBACH ; Syst. de la Nat., t. I, c. XVI : « (p. 398) [titre du chapitre] Les erreurs des hommes sur ce qui constitue le bonheur sont la vraie source de leurs maux. Des vains remèdes qu'on leur a voulu appliquer ». « ... (p. 406) Si nous consultons l'expérience, nous verrons que c'est dans les illusions et les opinions sacrées que nous devons chercher la source véritable de cette foule de maux, dont nous voyons partout le genre humain accablé. L'ignorance des causes naturelles lui créa des dieux ; l'imposture les rendit terribles ; leur idée funeste poursuivit l'homme sans le rendre meilleur, le fit trembler sans fruit, remplit son esprit de chimères, s'opposa au progrès de sa raison, l’empêcha de chercher son bonheur. Ses craintes le rendirent esclave de ceux qui le trompèrent sous prétexte de son bien... Des préjugés non moins dangereux ont aveuglé les hommes sur leurs gouvernements... (p. 407) Nous trouvons le même aveuglement dans la science des mœurs... (p. 409) C'est ainsi que la somme des malheurs du genre humain ne fut point diminuée, mais s'accrut au contraire par ses religions, par ses gouvernements, par son éducation, par ses opinions, en un mot par toutes les institutions qu'on [qui est ce on qu'on oppose, et qui est par conséquent distinct du genre humain?] lui fit adopter, sous prétexte de rendre son sort plus doux. L'on ne peut trop le répéter ; c'est dans l'erreur que nous trouverons la vraie source des maux dont la race humaine est affligée : ce n'est point la nature (p. 410) qui la rendit malheureuse, ce n'est point un dieu irrité qui voulut qu'elle vécut dans les larmes ; ce n'est point une dépravation héréditaire qui a rendu les mortels méchants et malheureux, c'est uniquement à l'erreur que sont dus ces effets déplorables ».

[FN: § 303-2]

ELIE RECLUS ; Les prim. « (p. 161) Puisque la moralité, au moins dans ses lignes générales, se mesure au développement de l'intelligence, on ne s'étonnera pas de la trouver ici [chez les Peaux-Rouges] à ses rudiments ».

[FN: § 306-1]

On indique ici par principe la cause attribuée aux actions.

[FN: § 307-1]

Phaedr., p. 229.

[FN: § 307-2]

Cela est aussi rappelé par le Socrate de Xénophon. XÉNOPH. ; Memorab., IV, 3, 16 :

« Puisque tu vois que le dieu de Delphes, lorsqu'on lui demande comment être agréable aux dieux, répond : En suivant l'usage de sa cité ».

CIC. ; De leg., II, 16, 40: Deinceps in lege est, de ritibus patriis colantur optimi : de quo cum consulerent Athenienses Apollinem Pythium, quas potissimum religiones tenerent, oraculum editurn est, eas, quae essent in more maiorum. Quo cum iterum venissent, maiorumque morem dixissent saepe esse mutatum, quaesivissentque, quem morem potissimum sequerentur e variis ; respondit, optimum. Cicéron ajoute ici un motif logique qui n'a pas la moindre valeur : Et profecto ita est, ut id habendum sit antiquissimum et Deo proximum, quod sit optimum.

[FN: § 308-1]

CIC. ; De nat. deor., III, 2, 6. CIC. ; De div., II, 12, 28 : Ut ordiar ab aruspicina, quam ego reipublicae causa, communisque religionis, colendam censeo ; (sed soli sumus ; licet verum exquirere sine invidia, mihi praesertim de plerisque dubitanti).

[FN: § 308-2]

Principe signifie ici : cause attribuée aux actions.

[FN: § 310-1]

VOLTAIRE; t. V: Remarques pour servir de supplément à l'Essai sur les mœurs et l'esprit des nations. – IV. Des usages méprisables ne supposent pas toujours une nation méprisable. Parmi tant d'erreurs, notons les suivantes :

1° Lé traité De divinatione fut écrit après la mort de César. Mais cela importe peu ; car si l'on peut supposer que César envoya des ambassadeurs en Chine, on peut supposer aussi qu'il vivait quand Cicéron écrivit De divinatione. 2° Le Panthéon chinois est beaucoup plus riche que celui de Rome ; mais Voltaire est excusable de cette erreur, que partageaient tous les philosophes, ses contemporains. Il pouvait, au contraire, éviter sans grand’peine les erreurs suivantes : 3° Volontairement ou non, Voltaire confond la divination romaine avec celle des Étrusques. Tagès n'appartient qu'à cette dernière. 4° Iupiter optimus maximus n'est pas du tout un dieu unique, dans le culte officiel. 5° Les Pénates ne sont pas le moins du monde les dieux des « bonnes femmes » : Pénates sunt omnes dii, qui domi coluntur (SERV. ; Ad Aen., II 514). Rome, elle-même, avait ses Pénates. Cicéron, que Voltaire voudrait opposer aux bonnes femmes, les invoque : Quamobrem vos, du patrii ac PENATES, qui huic urbi atque huic imperio praesidetis, qui hoc imperium, qui hanc libertatem, populumque romanum, qui haec tecta atque templa, me consule, vestro numine auxilioque servastis, testor, integro me animo ac libero, P. Sullae causam defendere (Pro P. Sulla, XXXI, 86). Voir aussi In. L. Catil., IV, 9, 18. 6° Que César y crût on non, il consultait les devins. On y fait allusion même dans De div. (I, 52, 119 ; II, 16, 36), que cite Voltaire. De plus : DIO CASS. ; XLIV, 17-18 ; PLUTARCH. ; Caes., 63-64; SUET.; Caes., 81. PLINE ; Nat. hist., XXVIII, 4, nous rapporte une superstition de César, qui, lorsqu'il allait en voiture, récitait une certaine formule, pour être en sécurité pendant le trajet. 7° Cicéron ne songe pas à tourner tous les auspices en ridicule. Lui-même était augure, et parle des auspices avec le plus grand respect : Maximum autem et praestantissimum in republica ius est augurum, et cum auctoritate coniunctum. Neque vero hoc, quia sum ipse augur, ita sentio, sed quia sic existimare nos est necesse (De 1eg. ; II, 12, 31). Il ne croyait que peu ou pas du tout à leur vertu intrinsèque ; mais il les estimait utiles à la république, et par conséquent ne les tournait pas en ridicule. (Cf. les citations § 313 1). 8° Caton ne traite pas des augures, mais des aruspices : Vetus autem illud Catonis admodum scitum est, qui mirari se aiebat, quod non rideret aruspex, aruspicem cum vidisset (CIC ; De div., II 24, 51). D'ailleurs beaucoup commettent l'erreur de confondre la divination romaine des augures avec la divination étrusque des aruspices. Ce n'est que quand ils ne pouvaient s'en passer que les Romains recouraient à la divination des Étrusques. Le père des Gracques leur adressait ces paroles : Ego non iustus, qui et consul rogavi, et augur, et auspicato ? An vos Tusci, ac barbari, auspiciorum populi Romani ius tenetis, et interpretes esse comitiorum potestis ? Itaque tum illos exire iussit (De nat. deor., II. 4, 11).

[FN: § 311-1]

Cette observation et la suivante sont à la vérité étrangères au présent chapitre, et n'ont d'autre fin que de combattre l'habitude de supposer ce que l'auteur ne dit pas (§ 41, 74 et sv.).

[FN: § 312-1]

Les termes utile, utilité sont pris, ici et dans la suite, au sens qu'ils ont ordinairement. Une chose utile à une société sera celle qui est apte à accroître la prospérité économique et politique, de cette société. Plus loin, au chapitre XII, nous reviendrons sur ce sujet.

[FN: § 313-1]

POLYB.: VI, 56. Après avoir remarqué que la religion est toute puissante à Rome, il ajoute : «Cela paraîtra étrange à beaucoup de personnes. Quant à moi, j'estime que ce fut établi en vue de la foule. En effet, si la cité pouvait ne renfermer que des hommes sages, cette institution pourrait n'avoir pas été nécessaire. Mais toute foule étant légère et pleine de passions déréglées, de colères déraisonnables, de désirs violents, il ne reste qu'à la contenir par des terreurs mystérieuses et de semblables craintes tragiques. C'est pourquoi il me semble que les anciens n'ont pas introduit ces croyances aux dieux et aux enfers, sans de puissants motifs ni par hasard ». – STRABO ; I, 2, 8 :

Puisqu'on ne peut persuader ni la multitude des femmes ni toute la foule du vulgaire, par des discours philosophiques, ni l'exhorter à la piété, à la religion et à la foi, mais qu'on doit employer la superstition »...

... « Telle étant la manière d'employer des mythes tournant au profit de la société, de la vie civile et de la réalité,... Cf. PLUTARCH. : Ad Colot., 31. LIV. ; I, 19. Parlant de Numa Pompilius : ...omnium primum, rem ad multitudinem imperitam, et illis seculis rudem, efficacissimam, deorum metum iniiciendum ratus est... Ici, nous sommes entièrement dans le domaine des actions logiques, auquel on est conduit par artifice. CIC. ; De leg., II, 13, 32. Atticus dit des deux augures Marcellus et Appius : nam eorum ego in libros incidi : cum alteri placeat, auspicia ista ad utilitatem esse reipublicae composita ; alteri disciplina vestra quasi divinare videatur prorsus posse. CIC. ; De div., II, 18, 43. Itaque in nostris commentariis scriptum habemus : « Jove tonante, fulgurante, comitia populi habere nefas ». Hoc fortasse reipublicae causa constitutum est. Comitiorum enim non habendorum causas esse voluerunt. CIC. ; De div. ; II, 33, 70 : Et tarMen credo, Romulum, qui urbem auspicato condidit, habuisse opinionem, esse in providendis rebus augurandi scientiam. Errabat enim multis in rebus antiquitas ; quam vel usu iam, vel doctrina, vel vetustate immutatam videmus. Retinetur autem, et ad opinionem vulgi, et ad magnas utilitates reipublicae, mos, religio, disciplina, ius augurum, collegii auctoritas. Peu après, II, 35, 75, il ajoute « qu'il estime que le droit augural fut constitué d'abord sous l'influence de la croyance à la divination, ensuite conservé et maintenu par raison d'État ».

Cela paraît être exactement le fond de l'opinion de Cicéron ; elle s'approche d'ailleurs de la vérité. Les actions non-logiques, nées spontanément, peuvent être ensuite conservées soit par tradition, soit pour l'utilité qu'elles apportent. On comprend que l'origine logique, œuvre de Romulus, est une simple fable. ARIST. ; Métaph. (XI, 8, 13, p. 1074, numérot. Didot). Après avoir traité de la divinité des astres, il ajoute :

« Le reste a été ajouté fabuleusement, pour persuader le grand nombre, et pour les lois et l'utilité commune ». Voir aussi : PLUTARCH. ; De plac. philosoph., I, 7, 2. SEXT. EMP. ; I. IX, Adversus physicos ; de diis, 14 à 16, p. 551.

[FN: § 313-2]

POLYB.; VI, 11. Il compare la république de Lycurgue à celle des Romains. Il croit que Lycurgue est un personnage réel, et qu'il a institué sa république avec un but prédéterminé. Puis il ajoute : « Les Romains ont atteint le même but en constituant leur république. Ce ne fut pas par des raisonnements mais instruits par de nombreuses luttes et les événements, qu'ils atteignirent le même but que Lycurgue, en choisissant toujours le mieux, et qu'ils constituèrent la meilleure de nos républiques ».

[FN: § 314-1]

MONTESQ. ; Dissertation sur la politique des Romains dans la religion, lue à l'académie de Bordeaux le 18 juin 1716 ; dans Grand. et déc. des Rom., Lettres pers. et œuvres choisies. Firmin Didot, Paris, 1866.

[FN: § 316-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR] Telle est l'idée fondamentale des théories anarchistes. PIERRE KROPOTKINE ; L'Anarchie, p. 16 : « En effet, il est certain qu'à mesure que le cerveau humain s'affranchit des idées qui lui furent inculquées par les minorités de prêtres, de chefs militaires, de (p. 17) juges tenant à asseoir leur domination et de savants payés pour la perpétuer, – une conception de la société surgit, dans laquelle il ne reste plus de place pour ces minorités dominatrices ». De même ELISÉE RECLUS ; L'Évolution, la Révolution et l'Idéal anarchique, ne voit guère dans les phénomènes religieux, du moins dans les phéno- mènes religieux contemporains, que les actions logiques de gens intéressés, dupant les ignorants et les simples d'esprit. Il dit : « (p. 212) Mais si l'Église catholique a pu faire des progrès apparents, si la France des encyclopédistes et des révolutionnaires (p. 213) s'est laissé « vouer au Sacré Cœur » par une assemblée d'affolés, si les pontifes du culte ont très habilement profité, de l'apeurement général des conservateurs politiques, pour leur vanter la panacée de la foi corn me le grand remède social ; si la bourgeoisie européenne, naguère

composée de sceptiques frondeurs, de voltairiens n'ayant d'autre religion qu'un vague déisme, a cru prudent d'aller régulièrement à la messe et de pousser même jusqu'au confessionnal ; si le Quirinal et le Vatican, l'État et l'Église mettent tant de bonne grâce à régler les anciennes disputes, ce n'est pas que la croyance au miracle ait pris un plus grand empire sur les âmes dans la partie active et vivante de la société. Elle n'a gagné que des peureux, des fatigués de la vie, et l'hypocrite adhésion de complices intéressés. En effet, ceux qui veulent à tout prix maintenir la société privilégiée doivent se rattacher au dogme qui en est la clef de voûte... ».

[FN: § 322-1]

S. REINACH; Cultes, mythes et relig., t. I.

[FN: § 323-1]

W. MARSDEN ; Hist. de Sumat., t. II

[FN: § 325-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. C'est l'argument le plus commun et le plus persuasif en matière de mode. C'est celui que les hommes donneraient à un grand nombre de leurs actions, si on leur en demandait les motifs.

[FN: § 327-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Les préceptes hygiéniques, par exemple, sont souvent exprimés sous cette forme. Parfois ils appartiennent au premier cas (propositions scientifiques), parfois au second (propositions pseudo-scientifique).

[FN: § 333-1]

Odyss. ; VI, 207-208 :

[FN: § 336-1]

PIEPENBRING; Théol. de l'anc. test. « (p. 98) La sainteté de Dieu est dans un rapport intime avec sa jalousie, sa colère et sa vengeance... (p. 99) Dans le vieux cantique, Ex. 15, le poète, parlant à Jéhova, s'écrie : « Par la grandeur de ta majesté tu renverses tes adversaires ; tu déchaînes ta colère : elle les consume comme du chaume » [Les abstractions des néo- chrétiens ont-elles ce pouvoir ?] ... La colère de Dieu éclate donc chaque fois que sa volonté rencontre de l'opposition, qu'elle est méconnue et transgressée, et elle se manifeste par des châtiments sévères » Les néo-chrétiens inclinent à croire que tout est changé depuis la venue de Christ ; il n'en est rien. Les Pères des premiers siècles de l'Église insistent, et avec énergie, sur les châtiments qui frapperont les mécréants.

[FN: § 336-2]

Parmi les nombreux passages qu'on pourrait citer, nous nous contenterons d'en mentionner un : Ad. Cor. I, X, 8 : « Ne forniquons point comme quelques-uns d'entre eux forniquèrent, de sorte qu'il en tomba vingt-trois mille en un seul jour. [Voir Nombr. XXV, 1-9] L'abstraction qui résulté de la pseudo-expérience des néo- chrétiens, a-t-elle la puissance d'en faire autant ? Non. En ce cas, seul celui qui admet déjà cette abstraction lui obéira ; seul celui qui en est déjà persuadé le sera. Mais c'est là le caractère essentiel des principes des actions non-logiques (§ 308-2). L'apôtre continue : « (9) Ne tentons point le Seigneur, comme le tentèrent quelques-uns d'entre eux [des Israélites] qui périrent par les serpents ». [Voir Nombr., XXI, 4-9 ; « (10) Ne murmurez point, comme murmurèrent quelques-uns d'entre eux qui périrent par l'exterminateur [Voir Nombr., XI, XVI]. Plus loin : « (22) – Voulons-nous rivaliser avec le Seigneur ? Sommes-nous plus forts que lui ? » Tout homme raisonnable répondra non, s'il s'agit du Seigneur tout puissant ; mais beaucoup de personnes raisonnables répondront oui, s'il s'agit d'une abstraction que quelques personnes tirent de leur propre sentiment.

[FN: § 337-1]

AUGUSTE SABATIER ; Les relig. d'aut. et la relig. de l'esprit : « (p. 440) La lettre, le signe alphabétique, caractérise la religion mosaïque d'après la forme de son apparition historique, son mode d'être et d'agir... La lettre tue. L'Esprit caractérise la religion évangé- lique d'après la nature même du rapport intérieur et moral qu'elle institue entre Dieu et l'homme, d'après le mode d'être de l'Évangile et le principe de son action... Il me semble dès lors que vous devez entendre ce qu'est la religion de l'Esprit. C'est le rapport religieux réalisé dans la pure spiritualité. C'est Dieu et l'homme conçus l'un et l'autre sous la catégorie de l'Esprit et se pénétrant l'un l'autre, pour arriver à une pleine communion. Par définition, les corps sont impénétrables les uns aux autres... Tout autres sont les relations des esprits. Leur tendance intime est de vivre la vie les uns des autres et de s'unir dans une vie supérieure commune. Ce que la loi de gravitation est dans le monde physique pour y maintenir l'harmonie, l'amour l'est et l'opère dans le monde spirituel et moral ». [Dieu sait ce que l'auteur se figure être la loi de gravitation !] « (p. 441) Force ultime du développement moral de l'être humain, l'esprit de Dieu ne le contraint plus du dehors ; il le détermine, l'anime du dedans et le fait vivre... L'accomplissement des devoirs naturels, l'exercice régulier de toutes les facultés humaines, le progrès de la culture comme de la justice, voilà la perfection de la vie chrétienne. Devenu réalité intérieure, fait de conscience, le christianisme n'est plus que la conscience élevée à sa plus haute puissance ».

[FN: § 346-1]

A. BRACHET : Gramm. hist. de la lang. franç. : « (p. 293) Avant d'atteindre le degré de précision qu'elle possède aujourd'hui, l'étymologie, – comme toute science et peut-être plus qu'aucune autre, – a traversé une longue période d'enfance, de tâtonnements, et d'efforts incertains, durant laquelle les rapprochements arbitraires, les analogies superficielles, et les combinaisons hasardées constituaient à peu près tout son avoir ». Ici l'auteur cite RÉVILLE ; Les ancêtres des Européens : « Les rêveries de Platon dans le Cratyle, les étymologies absurdes de Varron et de Quintilien chez les Romains, en France les fantaisies philologiques de Ménage au dix-septième siècle, sont restées célèbres. On ne voyait par exemple aucune difficulté à rattacher jeune à jeune sous prétexte (p. 294) que la jeunesse est le matin de la vie et qu'on est à jeun quand on se lève. Le plus souvent on tirait l'un de l'autre deux mots d'une forme toute différente, – et pour combler l'abîme qui les séparait, on inventait des intermédiaires fictifs. C'est ainsi que Ménage tirait le mot rat du latin mus : « on avait du dire d'abord mus, puis muratus, puis ratus, enfin rat ». N'alla-t-on pas jusqu'à supposer qu'un objet pouvait tirer son nom d'une qualité contraire à celle qu'il possédait, parce que l'affirmation provoque la négation, et à soutenir que le latin lucus (bois sacré), venait de non lucere (ne pas luire), – sous prétexte que lorsqu'on est entré dans un bois, on n'y voit plus clair ? ». L'auteur continue : « (p. 294) Comment de cet amas d'aberrations érudites a-t-il pu sortir à la longue une science capitale aujourd'hui ? Par la découverte et l'application de la méthode comparative, qui est celle des sciences naturelles ». Et qui est aussi celle que nous devons adopter.

[FN: § 351-1]

MAX MULLER; Ess. sur la myth. comp. ... J’ai rétabli la forme grecque des noms que le texte donne transcrits en lettres latines.

[FN: § 354-1]

BUCKLE ; Hist. de la civil. en Angl., t. I.

[FN: § 354-2]

L'auteur cite à l'appui : James Mackintosh, Condorcet, Kant.

[FN: § 355-1]

Manuel, I, 18, p. 15.

[FN: § 356-1]

Buckle, lui-même, finit par faire allusion, ici et là, aux actions non-logiques, du moins implicitement. Par exemple, quand il cherche les causes de la différence entre la révolution anglaise et la Fronde, en France, il croit : « (III, p. 7) qu'en Angleterre, une guerre pour la liberté était aussi une guerre de castes, tandis qu'en France, il n'y avait pas trace de guerre entre les diverses classes de la société ». En outre, il dit que les nobles français « (p. 20) ne cherchaient que de nouvelles sources de plaisirs propres à satisfaire cette vanité personnelle qui a acquis de tous temps à la noblesse une si grande notoriété ». Or, quel que soit le moyen qu'on veuille tenter pour unir ces faits à des déductions logiques du principe intellectuel, il est certain que les faits indiqués tout à l'heure dépendent d'inclinations naturelles, qui ne peuvent être, prises pour conséquence d'une différence des connaissances scientifiques et intellectuelles entre l’Angleterre et la France de ce temps-là ; car cette différence n'existait pas.

[FN: § 358-1]

BAYLE; Pensées diverses... à l'occ. de la Comète.

[FN: § 360-1]

BAYLE; Cont. des pensées diverses...

[FN: § 363-1]

MONTESQ. ; L'espr. des lois, liv. XXIV, ch. II – Paradoxe de Bayle.

Montesquieu a raison de dire: « Pour diminuer l'horreur de l'athéisme, on charge trop l'idolâtrie »; mais il aurait dû reconnaître l'artifice employé là, car il s'en sert lui-même dans d'autres occasions.

[FN: § 365-1]

SUMNER MAINE ; L'ancien droit, trad. COURCELLE SENEUIL.

 


 

Notes du Chapitre IV. Les théories qui dépassent l’expérience (§368 à §632), pp. 205-344

[FN: § 383-1]

S. REINACH ; Orpheus: «p. 4)... je, propose de définir la religion : un ensemble de scrupules qui font obstacle au libre exercice de nos facultés... Les scrupules dont il est question, dans la définition que j'ai proposée, sont d'une nature particulière... je les appellerai des tabous... ». Il ajoute que le scrupule du tabou « n'est jamais fondé sur une raison d'ordre pratique, comme le serait, dans le cas d'un arbre, la crainte de se blesser ou de se piquer ».

Précédemment, Reinach avait dit : « (p. 2) La mythologie est un ensemble d'histoires controuvées – non pas inventées, mais combinées et enjolivées à plaisir – dont les person- nages échappent au contrôle de toute histoire positive. La religion est, au premier chef, un sentiment, et l'expression de ce sentiment par des actes d'une nature particulière qui sont les rites ».

Reinach considère ici la mythologie non à sa formation, mais déjà formée, développée, et peut-être arrivée au seuil de la décadence, au moment où l'on n'a aucune répugnance à ajouter des fictions poétiques aux croyances populaires (§ 1027-1029). Si nous admettons pour un moment cette forme restreinte, nous voyons que dans ses observations, Reinach tient compte des actions logiques et non-logiques, bien que d'une manière peu distincte. La religion serait essentiellement non logique, constituée par ce que nous appellerons des résidus, au chap. VI. La mythologie serait essentiellement composée par des développements littéraires, logiques, par ce que nous appellerons dérivations, au chap. IX.

[FN: § 384-1]

M. J, LAGRANGE ; Quelq. rem. sur l'Orpheus de M. Sal. Reinach.

[FN: § 390-1]

M. J. LAGRANGE ; Étud. s. les rel. sém. : « (p. 7). Tout le monde admet du moins qu'il n'y a pas de religion sans la croyance à des pouvoirs supérieurs avec lesquels on peut nouer des relations ». Ces assertions portant sur tout le monde sont souvent démenties par les faits. Voici par exemple Reinach qui fait partie de « tout le monde », et ne semble pas admettre ce que dit le P. Lagrange. Mais pourquoi ces auteurs s'obstinent-ils à vouloir donner le même nom à des choses différentes ? Simplement parce qu'ils veulent faire leur profit des sentiments que suggère ce nom.

[FN: § 391-1]

CIC. ; De div., I, 5, 9 . Ego enim sic existimo : si sint ea, genera divinandi vera, de quibus accepimus, quaeque colimus, esse deos ; vicissimque, si dii sint, esse, qui divinent. – De nat. deor., II, 3, 7 : Praedictiones vero, et praesensiones rerum futurarum quid aliud declarant, nisi hominibus ea, quae sint, ostendi, monstrari, portendi, praedici ? Ex quo illa ostenta, monstra, portenta, prodigia dicuntur ?

[FN: § 393-1]

CIC. ; De nat. deor., I, 19, 51. Exposant les opinions d'Épicure, il dit de la nature d'un dieu : Nihil enim agit : nullis occupationibus est implicatus : nulla opera molitur : sua sapientia et virtute gaudet : habet exploratum fore se semper tum in maximis, tum in aeternis voluptatibus.

DIOG. LAERT. ; X, 139 :

« Qui est bien heureux est immortel ; il n'a pas de soucis et n'en occasionne pas à autrui ».

[FN: § 394-1]

Annales du Musée Guimet, tome I ; Notes abrégées sur les réponses faites dans le Hioun-Kakou... par M.M. Simatchi, Atsoumi et Ahamatsou aux questions de M. Émile Guimet. D sont les demandes ; R les réponses.

[FN: § 394-*]

« La secte sïn-siou est une des plus répandues au Japon... ».

[FN: § 400-1]

AD. FRANCK ; Dict. des sc. phil. ; s. r. Droit.

[FN: § 404-1]

Nous rencontrons ici, dans un cas particulier, des espèces générales d'explications, dont nous traiterons aux chap. IX et X.

[FN: § 410-1]

ARIST. ; Éth. Nicom., V, 7, 1.

« Une partie du droit politique est naturelle, une partie est légale. Naturel est celui qui a partout la même force, et non celui qui change selon l'apparence ». Mag. Moral., I, 34,19 : « Une partie des choses justes le sont par nature, une autre de par la loi ». il dit ensuite que les choses justes par nature peuvent aussi changer, et donne comme exemple que nous pourrions également employer la main droite et la main gauche, mais que cela ne nous empêcherait pas d'avoir toujours une main droite et une main gauche. Puis il ajoute : (21)

« Puisque ce qui persiste le plus souvent est juste selon la nature ». En outre : « Donc la justice selon la nature est meilleure que selon la loi ».

[FN: § 410-2]

ARIST. ; Rhét. En outre (I, 10, 3) :

«J'appelle... commune celle qui, sans être écrite, paraît être reconnue par tous ».

[FN: § 415-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] Voir aussi le traité De officiis, où Cicéron subordonne la morale aux mêmes abstractions. Après avoir dit que la nature ne nous trompe jamais : « (I, 28 100) ... quam si sequemur ducem [naturam], nunquam aberrabimus, consequemurque et id quod acutum et perspicax natura est, et id quod ad hominum consociationem accommodatum, et id quod vehemens atque fortem», il déclare quem: « (I, 29, 101) Omnis autemn actio vacare debet et neglegentia, nec vero agere quidquam, cuius non possit causam probabilem reddere... Efficiendum autem est ut appetitus rationi obediant... ». Il est vrai que Cicéron explique cette contradiction apparente, en disant : « (I, 28, 100-101) Duplex est enim vis animorum atque naturae : una pars in appetitu posita est, quae est Graece, quae hominem huc et illuc rapit ; altera in ratione quae docet et explanat quid faciendum fugiendumve sit. Ita fit ut ratio praesit, appetitus obtemperet ». Mais la signification de natura est si mobile, dans tout le traité, qu'il est impossible de savoir exactement ce que l'auteur entend par là.

[FN: § 425-1]

GROTIUS-BARBEYRAC; Le dr. de la guerre et de la paix, I, 10, 1. Grotius, continue en observant que « (2) les actions à l'égard desquelles la Raison fournit de tels principes, sont obligatoires ou illicites par elles-mêmes, à cause de quoi on les conçoit comme nécessairement ordonnées ou défendues de Dieu »; et que c'est cela qui distingue ce droit du Droit humain. Il est visible qu'ici comme d'habitude, on saisit qu'il y a, dans le droit, quelque chose qui n'est pas arbitraire. C'est ce quelque chose qui s'unit « nécessairement » à Dieu, à la Nature, à la Droite Raison et à d'autres entités semblables.

NOTES DE BARBEYRAC :

† L'auteur dit, moralement nécessaire. mais le terme dont je me suis servi, est plus clair, et l'opposition plus juste.

* J'ai ajouté et sociable; comme l'Auteur s'exprime lui-même plus bas, § 12, num. 1, et chap. suivant, § 1, num. 3. Il y a apparence que son Copiste, ou ses Imprimeurs, avoient sauté ici ces deux mots, sans qu'il s'en soit aperçû, comme il est arrivé en d'autres endroits.

[FN: § 425-2]

PUFENDORF ; De iure naturae et gentium, lib. I, cap. 1, § 10.

[FN: § 425-3]

BURLAMAQUI ; Principes du droit naturel, IIe partie, chap. 5, § 6.

[FN: § 431-1]

PUF.; De off. hom. et civis, 1. I, c. II, § 16.

[FN: § 428-2]

BURLAMAQUI; Elém. du dr. nat., III 13, 1 « 2° Il faut remarquer ensuite qu'en matière de droit naturel, les preuves que l'on tire du consentement et des mœurs des nations, ou des sentiments des philosophes, ne sont pas suffisantes pour établir que telles ou telles choses sont du droit naturel ; on sait assez combien les nations même les plus sages et les plus éclairées se sont égarées sur les choses les plus importantes ». Pufendorf récuse aussi le témoignage du consentement universel. PUFENDORF-BARBEYRAC ; Le dr. de la nat. et des gens, II, 3, 7 : « Il y en a d'autres qui posent pour fondement du Droit Naturel, le consentement de tous les Hommes, ou de toutes les Nations, ou du moins de la plupart et des plus civilisées, à reconnoître certaines choses pour honnêtes ou deshonnêtes. Mais outre que par là on donne seulement une démonstration a posteriori [c'est-à-dire une démonstration expérimentale, qui répugne à tout bon métaphysicien], comme on parle, et qui ne nous enseigne point pourquoi telle on telle chose est prescrite ou défendue par le Droit Naturel, c'est dans le fond une méthode bien peu sûre et environnée d'un nombre infini de difficultez ; car si on en appelle au consentement de tout le Genre Humain, il naît de là, comme le montre fort bien Hobbes (De Cive, cap. II, § 1), deux inconvénients fâcheux. Le premier, c'est que, dans cette supposition il seroit impossible qu'aucun homme qui feroit actuellement usage de la Raison, péchât jamais contre la Loi Naturelle : car dès-là qu'une seule personne, qui fait partie du Genre Humain, entre dans quelque opinion différente de celle des autres, le consentement du Genre Humain devient imparfait. L'autre, c'est qu'il paroît visiblement absurde de prendre pour fondement des Lois Naturelles, le consentement de ceux qui les violent plus souvent qu'ils ne les observent ».

Voir en outre : PUFENDORF-BARBEYRAC; Le dr. de la nat. et des gens, I, 6, 18 : « La Loi naturelle, c'est celle qui convient si nécessairement à la Nature raisonnable et Sociable de l'Homme, que sans l'observation de cette Loi il ne sauroit y avoir parmi le Genre Humain de Société honnête et paisible. Ou si l'on veut, C'est une Loi qui a, pour ainsi dire, une bonté naturelle [Notez l'indétermination habituelle des métaphysiciens. Ils n'arrivent jamais à avoir une idée précise], c'est-à-dire, une vertu propre et interne de procurer l'avantage du Genre Humain. Elle est encore appelée Loi Naturelle, à cause qu'elle peut être connue par les lumières naturelles de la Raison, et par la contemplation de la Nature Humaine en général ».

[FN: § 430-1]

Pufendorf est cruel pour les pauvres animaux ; il ne veut décidément pas qu'ils aient un droit naturel commun avec l'homme. PUFFNDORF-BARBEYRAC ; Le dr. de la nat. et des gens, I. 11, c. 3, § 3. « Il s'est trouvé néanmoins des gens, qui, apparemment pour faire briller leur esprit plûtôt que pour soûtenir sérieusement ce qu'ils pensoient, ont ramassé de tous côtez ce qui pouvoit servir à établir ce prétendu droit, commun aux Hommes et aux Bêtes. Mais il y a longtemps que les Sçavans ont réfuté toutes les raisons qu'on allègue là-dessus. Je me contenterai de toucher ici en peu de mots celles qu'on tire de l'Ecriture Sainte ». Suit une assez longue dissertation, pour démontrer que les pénalités qu'on trouve dans la Bible contre les animaux, ne présupposent pas un droit des animaux.

[FN: § 431-1]

ARIST.; Probl., X, 15 :

L'auteur continue en disant : (Trad. BARTHÉLEMY-SAINT HILAIRE) « Or la sensation, selon les lois naturelles, doit avoir lieu en avant ; et il faut voir devant soi l'objet vers lequel le mouvement nous porte. Plus la distance entre les yeux est grande, plus les regards se portent de côté. Ainsi, pour être conforme à la nature, il faut que l'intervalle soit le plus petit possible ; car à cette condition, on se dirigera le plus sûrement en avant. Comme les autres animaux n'ont pas de mains, il faut nécessairement qu'ils regardent de côté. Aussi leurs yeux sont-ils à une distance plus grande ; et c'est ce qu'on peut remarquer surtout sur le bétail, parce que ces animaux spécialement marchent en baissant la tête ». Oh ! sainte Nature, de quelles belles explications tu nous gratifies !

[FN: § 433-1]

PUFENDORF-BARBEYRAC; Le dr. de la nat. et des gens, II, 3, 13.

[FN: § 435-1]

Loc. cit. Barbeyrac note : « Comme cette période, qui ne se trouve pas dans la première Edition, n'étoit pas bien ajustée à la suite du discours, j'ai changé un peu la liaison, sans néanmoins m'éloigner en aucune manière des idées de mon Auteur ». Il use ensuite de la manière habituelle d'ôter toute force aux objections de ses adversaires, en excluant ses adversaires même du nombre de ceux auquel il est permis de juger des principes posés par l'auteur. « Il faut toûjours supposer ici, que ceux avec qui l'on dispute ne sont ni Pyrrhoniens, ni disposez de manière à se mettre peu en peine du Vrai ou du Faux ; autrement ce serait en vain qu'on voudroit les désabuser ». Au point de vue expérimental, vain est le raisonnement qui n'accepte d'objections que de ceux dont la doctrine est d'accord avec celle que l'on veut démontrer. Mais au point de vue des sentiments, le raisonnement qui s'appuie sur ceux-ci, ne peut être admis que par qui a déjà ces sentiments, au moins en partie. Barbeyrac continue : « La question a toûjours été aussi, si le Juste était tel de sa nature, et non par l'effet d'une volonté arbitraire, , c'est-à-dire, en conséquence des rapports essentiels qu'il y a entre nos Actions et leurs objets, ou la nature des choses ». Ce dilemme n'existe que pour les métaphysiciens. La science expérimentale donne une troisième solution du problème : elle montre que le mot juste indique simplement certains sentiments des hommes qui l'emploient, et qu'il est donc peu précis comme le sont aussi ces sentiments.

[FN: § 436-1]

PUFENDORF-BARBEYRAC ; Le dr. de la nat. et des gens, II, 3, 15 « ... nous n'aurons pas beaucoup de peine à découvrir le véritable fondement du Droit Naturel... Voici donc la Loi fondamentale du Droit Naturel : c'est que chacun doit être porté à former et entretenir, autant qu'il dépend de lui, une Société paisible avec tous les autres, conformément à la constitution et au but de tout le Genre Humain sans exception. [Cela deviendra plus tard la loi universelle de Kant]. Et comme quiconque oblige à une certaine fin, oblige en même tems aux moyens sans quoi on ne sauroit l'obtenir, il s'ensuit de là, que tout ce qui contribue nécessairement à cette Sociabilité universelle, doit être tenu pour prescrit par le Droit naturel, et tout ce qui la trouble, doit au contraire être censé défendu par le même droit ».

[FN: § 439-1]

BURLAMAQUI ; Princip. du dr. de la nat. et des gens, IIe part., chap. 8, § 2.

[FN: § 441-1]

VATTEL ; Le droit des gens, t. I.

[FN: § 443-1]

I. SELDENI de jure naturali et gentium iuxta disciplinam Hébraeorum libri septem, 1. I, c. 4, (p. 43) In designatione, atque definitione Iuris Naturalis, quae apud scriptores solet diversimode occurrere, alii ex Aliorum Animantium actibus, ac usu Iura hominibus aliquot Naturalia petunt ; alii Iuris naturalis Corpus e Moribus omnium, seu plurimarum Gentium communibus ; ex Naturali Ratione, seu recto eiusdem usu alii ; et demum alii e Naturae, adeoque Naturalis rationis Parentis, id est, sanctissimi Numinis Imperio, atque Indicatione.

[FN: § 444-1]

J. DE PAVLY ; Le Talmud de Babylone. Deuxième traité, Shabbath, IX : « (18) Chaque parole sortie de la bouche de Dieu au mont Sinaï, se faisait entendre en soixante-dix langues différentes et remplit tout l'univers d'un parfum agréable. La voix de Dieu était si retentissante qu'à chaque parole les Israélites reculaient de douze lieues ».

MOÏSE SCHWAB ; Le Talmud de Jérusalem. Traité Sota, c. VII, 5 – t. VII – « (p. 305) Ensuite, on apporta des pierres, on construisit l'autel, on l'enduisit de ciment, et l'on inscrivit les paroles de la Loi en soixante-dix langues, comme il est dit (Deutéron., XXVII, 8)... ». Commentaire : « (p. 306) On a enseigné (contrairement à la Mischnâ) : Les dites paroles ont été inscrites sur les pierres de l'endroit où ils passèrent la nuit (Josué, IV, 3), selon l'avis de R. Juda; R. Yossé dit qu'elles furent écrites sur les pierres de l'autel. D'après celui qui professe la première opinion, disant que la Loi a été inscrite sur les murs d'une hôtellerie, on comprend que chaque jour les nations du monde aient pu envoyer leurs scribes (Notarii) qui reproduisaient ces textes, puisque la Loi était écrite en soixante-dix langues... mais comment admettre l'avis de celui qui dit (d'accord avec la Mischnâ) que la Loi a été inscrite sur les pierres de l'autel ? En ce cas, ne s'agit-il pas d'une construction passagère, dont on a dû enfouir sous terre tout ce qui a servi au culte, avant le départ, et comment alors les païens en auraient-ils pu profiter ? C'était, en effet, un miracle que, pendant le court espace de temps où l'autel resta érigé, Dieu développa l'intelligence de chaque nation, de façon qu'elle pût copier (rapidement) le texte de la Loi écrit en soixante-dix langues ».

SURENH. ; Leg. misch., pars III, De uxore adulterii suspecta VII, 5, Bartenor... in scriptura septuaginta nationum, ut quicunque addiscere vellet Legem, addiscere eam posset, ne haberent nationes quo se excusarent, dicendo, non habuimus unde disceremus.

[FN: § 446-1]

MONTAIGNE ; Essais, II, 12: « (p. 506) Mais ils sont plaisants, quand, pour donner quelque (p. 507) certitude aux loix, ils disent qu'il y en a aulcunes fermes, perpetuelles et immuables, qu'ils nomment naturelles, qui sont empreintes en l'humain genre par la condition de leur propre essence... ».

[FN: § 447-1]

LE MERCIER DE LA RIVIÈRE ; L'ordre naturel et essentiel des sociétés politiques, 1767 ; réimpression de 1910.

[FN: § 448-1]

DE MABLY ; Doutes proposés aux philosophes économistes sur l'ordre naturel et essentiel des sociétés politiques. La Haye, 1768.

[FN: § 448-2]

Physiocrates ; édit. Guillaumin, 1re partie, QUESNAY ; Droit naturel EUGÈNE DAIRE, dans ses Observations, au commencement de la 2e partie, trouve admirables ces théories de Quesnay et de son commentateur Le Mercier de la Rivière. « (p. 438) En somme, publicistes et théologiens, au lieu d'étudier, dans la nature de l'homme et dans ses rapports avec le monde extérieur, les lois immuables qui établissent et maintiennent l'ordre au sein des sociétés, imaginèrent qu'il leur appartenait d'inventer ces lois ; et les institutions actuelles de l'Europe témoignent encore du succès avec lequel ils ont, sous ce rapport, substitué leurs propres vues à celles du Créateur ». Il faut croire que le Créateur n'avait pas prévu cette substitution, car, s'il l'avait prévue, il aurait bien pu l'empêcher. Notre auteur dit que Le Mercier de la Rivière prend le contrepied de la doctrine de Rousseau : « (p. 489) au lieu de vouloir que le législateur crée l'ordre, il l'invite seulement à s'y conformer, et à n'en pas chercher la base ailleurs que dans le sentiment et la raison, départis à l'homme pour reconnaître les lois immuables dont dépendent ici-bas son existence et son bonheur ». Il y a là une timide tentative de sortir des brumes de la métaphysique, mais elle est des plus imparfaites. Négligeons l'appel au Créateur et à ses vues, qui nous transportent dans le domaine de la théologie ; mais « les lois immuables qui établissent et maintiennent l'Ordre », « le sentiment et la raison départis à l'homme pour les reconnaître, nous font faire une excursion dans le domaine des causes finales, et en tous cas nous font sortir du domaine expérimental, où n'existent pas de « lois immuables » établies dans tel ou tel but, mais de simples uniformités (§ 99) des faits.

[FN: § 449-1]

Essai d'une philosophie de la Solidarité (L. BOURGEOIS) : « (p. 3) Et d'abord, qu'est-ce que la solidarité objective, considérée comme un fait ? – Kant a dit : « Ce qui constitue l'organisme, c'est la réciprocité entre les parties ». Toute la biologie est en germe là. [Cet adorateur de la Science aurait pu citer, sur ce point, un biologiste et non un métaphysicien]... « Ainsi l'idée de vie est identique à l'idée d'association. Et la doctrine de l'évolution a montré suivant quelle loi cette interdépendance des parties contribue au développement, au progrès de chaque être, de chaque agrégat ».

[FN: § 450-1]

Ess. d'une phil. de la Solid. (L. BOURGEOIS) : « (p. 13) Nous voici donc bien loin de la solidarité-fait et tout proche de la solidarité-devoir. Ne confondons jamais l'une et l'autre : ce sont des contraires. Mais il était indispensable de constater la première pour apercevoir la nécessité morale de la seconde ». Dame Science n'a fait que passer rapidement sur la scène et a disparu dans les coulisses. La « solidarité-fait » a d'autre part trouvé un défenseur dans la personne du Dr Papillaut (Ess. d'une ph. de la Solid.): « (p. 25) Je voudrais réclamer au nom

de la solidarité naturelle, à laquelle, à mon sens, on fait vraiment la part trop petite.. ». Comparez l'attitude de Bentham à l'égard de la morale.

[FN: § 451-1]

Ess. d'une phil. de la, Solid. (L. BOURGEOIS) « (p. 8) Quand nous demandons quelles sont les conditions auxquelles doit satisfaire une société humaine pour se maintenir en équilibre, nous sommes ainsi conduits à reconnaître qu'il n'y a qu'un mot qui les puisse exprimer : il faut que la justice soit ». Ici se pose un problème. Les sociétés qui ont existé jusqu'à présent, étaient-elles oui ou non en équilibre ? Si elles l'étaient, cela veut dire qu'elles possédaient déjà la justice ; et dans ce cas, comment expliquer que M. Bourgeois veuille la donner maintenant, grâce à la solidarité ? Si elles n'étaient pas en équilibre, que pourra bien être cet équilibre, que l'on n'a pas encore vu, jusqu'à présent ? « (p. 8) Je sais bien qu'on a parfois assigné à la société un autre objet, qui n'est rien moins que le bonheur assuré à chacun de ses membres... Le bonheur n'est pas matériel, partageable, réalisable extérieurement. L'idéal de la société c'est la justice pour tous ». Ce qu'est exactement cette justice, il semble que M. Bourgeois n'en sache rien, ou ne veuille pas nous le dire. On lui avait fait l'objection : « (p. 62) M. Léon Bourgeois a déclaré que (p. 63) peu importe l'origine de l'idée de justice, du moment qu'on est d'accord sur ce point que la justice est nécessaire. Cependant des conséquences pratiques fort importantes dérivent de la conception qu'on se fait de la justice... ». Voici la réponse : « (p. 65) M. Léon Bourgeois... répond qu'il n'a pas voulu, dans cette exposition, se préoccuper de l'origine de la notion de justice. [Il ne s'agit pas de l’origine, mais de ce qu'est cette justice]. De quelque manière qu'on cherche à les expliquer, l'idée et le besoin de justice existent au cœur de l'homme. C'est là un fait qu'il suffit de constater à titre de fait et dont on peut partir, d'autant mieux que si, théoriquement, il y a désaccord sur les principes premiers d'où on le fait dériver, pratiquement il y a accord en somme sur le sens, la portée, le contenu de cette notion de justice ». Et voilà qu'apparaît ainsi ce consentement universel qu'on n'aura jamais assez loué (§ 591 et sv.). Ce qui eût été extraordinaire ordinaire, c'est qu'il manquât. Et dame Raison ? Patience un instant ; elle aussi vient au secours de M. Bourgeois. – Dans un autre livre du même auteur, c'est-à-dire dans L. BOURGEOIS ; Solidarité, on lit : « (p. 76) Si la notion première du bien et du mal est une nécessité [que peut bien vouloir dire cela ?], si le sentiment de l'obligation morale constitue en nous un « impératif catégorique », l'opération intellectuelle, par laquelle l'homme s'efforce de définir le bien et le mal et cherche les conditions de l'obligation morale, est du domaine de la raison... (p. 77) tout a évolué autour de l'homme, à mesure qu'évoluait en lui l'idée morale, fonction suprême de la raison ». Dieu accorde longue et heureuse vie à cette bonne dame Raison, afin que les métaphysiciens futurs puissent y avoir recours, comme y ont eu recours leurs prédécesseurs ! La Nature intervient, elle aussi. Ess. d'une phil. de la Solid. (L. BOURGEOIS) : « (p. 10) Observons d'abord que la nature a ses fins à elle, des fins qui ne sont pas les nôtres. L'objet propre de l'homme, dans la société, c'est la justice [même dans les sociétés où existe l'esclavage ?], et la justice n'a jamais été l'objet de la nature ; celle-ci n'est pas injuste, elle est ajuste. Il n'y a donc rien de commun entre le but de la nature et celui de la société ». Mais comment se fait-il que certains précurseurs de M. Bourgeois, les stoïciens, nous disaient au contraire que le principe suprême de la morale était de vivre selon la Nature ? (§ 1605). Comment faire pour savoir qui a raison : ceux-ci ou M. Bourgeois ? Depuis le temps très lointain où les métaphysiciens s'occupent de rechercher le but de la Nature, ils auraient dû le découvrir. Au contraire, chacun va son chemin, et nous autres, malheureux, ne savons qui écouter.

Le principe de sociabilité qui servit déjà à Pufendorf (§ 4-36) ne fait pas défaut. Implicitement, il est partout ; explicitement, il apparaît çà et là. (XAVIER LÉON) : « (p. 242) La raison ignore les individus comme tels, c'est la communauté des individus, c'est l'humanité tout entière qui la réalise [qu'ils sont heureux ceux qui savent ce que cela veut dire « réaliser la raison »!] ; elle est essentiellement la (p. 243) raison humaine »... « (p. 245) C'est ce caractère éminemment social de la raison qui est le fondement de la solidarité humaine, c'est lui qui confère à la solidarité cette valeur morale qu'on s'épuiserait en vain à faire sortir de la constatation tout empirique d'un fait – biologique ou social – ou des conséquences d'un contrat plus ou moins t tacite ». (Voir le reste de la citation : 453 1.

[FN: § 453-1]

L. BOURGEOIS; Solidarité : « (p. 25) La méthode scientifique pénètre aujourd'hui tous les ordres de connaissances. Les esprits les plus réfractaires viennent, tout en protestant, s'y soumettre peu à peu ». Cela est écrit pour les anticléricaux. En continuant la lecture du livre, on apprend à connaître la Science de M. L. Bourgeois. « (p. 73) L'idée du bien et du mal est, en soi, une idée irréductible ; c'est un fait premier, un attribut essentiel de l'humanité ». Mais les métaphysiciens avaient déjà dit cela, il y a plus de mille ans, et il était inutile que, pour le répéter, M. L. Bourgeois invoquât la Science ! Cette Science de M. L. Bourgeois a tout l'air d'être identique à la métaphysique. Mais pourquoi donc donner deux noms différents à la même chose ? Il n'y a d'autres motifs que de flatter certains préjugés qui ont cours aujourd'hui, et sont favorables à dame Science. Ess. d'une phil. de la Solid. (XAVIER LÉON) : « (p. 245) La solidarité est donc justifiée parce qu'elle est une exigence de la raison ; elle est au fond le principe d'intelligibilité de notre action, la condition de réalisation de l'unité de la raison dans l'humanité ». Si ce n'est pas de la métaphysique, qu'est-ce que la métaphysique ?

[FN: § 455-1]

Dict. encycl. de la th. cath., s. r. Droit t. VI, p. 515. – L'auteur cite saint Paul ; Rom. II, 13 ; mais il doit y avoir une erreur ; il veut probablement dire II, 15. – PAUL; Rom., II, 14-15: (15)

« ceux-là montrent que l'œuvre de la loi est écrite dans leurs cœurs... ».

[FN: § 456-1]

PAUL.; Rom., II, 14-15.

[FN: § 456-2]

Dict. encycl. de la th. cath., s.r., Droit., t. VI, p. 515.

[FN: § 456-3]

SUMNER MAINE ; Early history of institutions, trad. DURIEU DE LEYRITZ : « (p. 35) Il [le Senchus Mor, un des anciens livres de lois irlandaises] représente les règles légales qu'il formule, comme découlant de la loi de nature, et de la loi de la lettre. La loi de la lettre, c'est la loi biblique complétée par toute la somme de droit canonique qu'on peut imaginer les monastères de la primitive Église d'Irlande capables d'avoir élaborée ou de s'être appropriée [sic]. Quant aux termes ambigus de loi de nature, ils n'ont aucun rapport avec la fameuse formule des jurisconsultes romains ; ils se réfèrent à un texte de saint Paul dans son Épître aux Romains cité plus haut... La loi de nature est donc l'ancien élément du système, antérieur au christianisme, et le Senchus Mor s'en exprime ainsi : , (p. 36) Les jugements de la droite nature, au temps que l'Esprit-Saint a parlé par la bouche des Brehons [les anciens docteurs de la loi, irlandais] et des vertueux poètes des hommes d'Érin, depuis la première prise de possession de l'Irlande, jusqu'à la réception de la foi, ont tous été exposés par Dubhthach à Patrice. Ce qui n'était pas contraire à la parole de Dieu exprimée dans la loi écrite et le Nouveau Testament et la conscience des croyants, fut maintenu dans les lois des Brehons par Patrice et par les ecclésiastiques et les chefs de l'Irlande, car la loi de nature a été tout à fait bonne, sauf quant à la foi, à ses obligations et à l'harmonie de l'Église et du peuple. Et c'est le Senchus Mor ».

[FN: § 457-1]

THOM.; Summ. théol., I a II ae, q. 91 ; Conclusio des art. 1, 2, 3, 4.

[FN: § 457-2]

THOM. ; Sum. théol., I a, II ae, q. 93 a. 3 ; Conclusio. Quoniam, teste B. Augustino, in temporali lege nihil est iustum ac legitimum quod non sit ex loge aeterna profectum ; certum est omnes leges, inquantum participant de ratione recta, intantum. a lege aeterna derivari.

[FN: § 458-1]

Corp. iur. can., C. VI : Ius autem aut natarale est, aut civile, aut gentium. C. VII : Ius naturale est commune omnium nationum, eo quod ubique instinctu naturae, non constitutione aliqua habetur... Cfr. ISID. ; Etym., V, 4, 1. Mais prenons bien garde que, comme nous le dit Lancelot dans ses Institutes de Droit canonique, 1. I, tit. II, § 3 : Haec tamen de ea consuetudine intelligere nos oportet, quae neque divino iuri, neque canonicis contradicit institutis : si quid autem contra fidem catholicarn usurpare dignoscitur non tam consuetudo, quam vetustas erroris est appellanda. – ISID.; Etym., II, 10, 3 : Porro si ratione lex consistat, lex erit omne, quod iam ratione constiterit, dumtaxat, quod religioni congruat, quod disciplinae conveniat, quod saluti ratione proficiat.

[FN: § 460-1]

LOCKE ; An ess. conc. hum. und., I, c. II, § 13.

[FN: § 461-1]

GROTIUS-BARBEYRAC ; Le dr. de la guerre et de la paix., « (I, 1, 12, P. 53) Or il y a deux manières de prouver qu'une chose est de Droit Naturel : l'une a priori,... c'est-à-dire par des raisons tirées de la nature même de la chose ; l'autre a posteriori, ou par des raisons prises de quelque chose d'extérieur. La première qui est plus subtile et plus abstraite, consiste à montrer la convenance ou disconvenance nécessaire d'une chose avec une Nature Raisonnable et Sociable, telle qu'est celle de l'homme [il y en a d'autres ? Lesquelles?]. En suivant l'autre, plus populaire à [la science est populaire, et la métaphysique sublime], on conclut, sinon très certainement, du moins avec, beaucoup de probabilité, qu'une chose est (p. 54) de Droit Naturel, parce qu'elle est regardée comme telle parmi toutes les Nations, ou du moins parmi les Nations civilisées. Car un effet universel supposant une cause universelle ; une opinion si générale ne peut guères venir que de ce que l'on appelle le Sens Commun ».

NOTE DE BARBEYRAC :

« Cette manière de prouver le Droit Naturel, est de peu d'usage, parce qu'il n'y a que les maximes les plus générales du Droit Naturel, qui aient été reçues parmi la plupart des Nations. Il y en a même de très évidentes, dont le contraire a été pendant longtemps regardé comme une chose indifférente, dans les pays les plus civiliséz, ainsi qu'il paroit par la coûtume horrible d'exposer les enfans ».

[FN: § 462-1] HOBBES ; De cive, Libertas, c. VIII ; Leviath., c. XV. Cet auteur distingue le droit naturel, qui est la liberté qu'a chacun de se défendre, et la loi naturelle, qui est la norme d'après laquelle chacun s'abstient de faire ce qui peut lui nuire à lui-même. Leviath, c. XIV : Jus et lex differunt ut libertas et obligatio.

[FN: § 463-1] DIOG. LAERT.; Epicurus, X, 150 : « Le juste naturel est le pacte de l'utile, conclu afin de ne pas se léser réciproquement, ni d'être lésé. Comme les animaux ne purent conclure un pacte pour ne pas se léser réciproquement ni être lésés, il ne peut y avoir pour eux ni juste ni injuste. De même pour les peuples qui ne purent ou ne voulurent faire de pactes, afin de ne pas se léser ni être lésés ».

[FN: § 466-1]

La Liberté, 25 juillet 1912: « Moulins. – La Cour d'assises de l'Allier a jugé un jeune homme de 18 ans, Louis Auclair, représentant de commerce à Moulins, qui était accusé de parricide. Depuis la mort de sa mère, survenue l'an dernier à Côsne-sur-I'Œil, Louis Auclair vivait en mésintelligence avec son père. Ce dernier, ayant vendu ses biens pour une vingtaine de mille francs, acheta à Montluçon, avenue Jules-Ferry, un bar qu'il se mil à exploiter avec son fils ; mais il ne tarda pas à se livrer à la débauche, ce qui donna à Louis Auclair de grandes inquiétudes sur le sort de sa part d'héritage. Il y eut entre le père et le fils de violentes altercations. Un beau jour, le jeune homme déroba 1000 francs au débitant et s'enfuit habiter à Moulins. Le 9 avril dernier, il retourna à Montluçon et se querella encore avec son père. La nuit suivante, vers minuit, il pénétra dans le bar, et le débitant, accouru au bruit, le trouva près du tiroir-caisse. Le jeune homme assure aujourd'hui qu'il n'était venu là que par bravade et non pour un cambriolage. Quoi qu'il en soit, le père bouscula son fils, qui le tua d'un coup

de revolver dans le ventre. Le jury a rendu un verdict si indulgent que la Cour a puni d'un an de prison seulement ce crime abominable ». Supposons qu'on lise cela, non de la France contemporaine, mais de quelque pays ignoré. On en pourrait conclure que les lois écrites y étaient très indulgentes pour les parricides, et ce serait une déduction erronée.

[FN: § 466-2]

Voici un exemple pris au hasard, et qui est le type d'un très grand nombre d'autres, non seulement en France, mais aussi en Italie et ailleurs. On lit dans la Liberté du 23 mars 1912, sous la signature de GEORGES BERTHOULAT : « La justice sabotée. – Malgré le consortium du mutisme, tout le monde est fixé sur les interventions politiques dans l'affaire Rochette. En dehors des renseignements déjà connus, le simple bon sens y suffit : comment un homme tel que M. Rochette, suité de tant d'obligés, avocats-conseils ou autres, parmi les pontifes du bloc, se serait-il abstenu de faire donner cette garde parlementaire ? On peut être assuré qu'il l'a au contraire exigé... Et c'est ainsi que, par ordre supérieur, M. le procureur général a dû requérir la remise scandaleuse à laquelle s'est rallié docilement M. Bidault de l'Isle, démarche que M. Fabre appelle lui-même dans son procès-verbal, « la seule humiliation de sa carrière ». À côté de ce sabotage de la justice, M. le Provost de Launay en a établi hier à la tribune du Sénat un autre non moins grave, dans cette stupéfiante affaire de la Chartreuse, qui est, plus encore que le cas de Duez, le joyau des liquidations où s'évapora le fameux milliard. Comment la Chartreuse qui valait cinquante millions fut-elle adjugée à cinq cent mille francs ? C'est qu'elle a été avilie... Mais là encore il y a eu des influences politiques : elles se sont si bien employées que le liquidateur... se fit tout à coup le tuteur de celui que visait sa plainte. Et le tribunal de Grenoble, bien qu'en ayant été saisi régulièrement, jugea en 1906, 1908 et 1909 que les pièces l'ayant introduite devant lui devaient être tenues pour inexistantes. Elles existent si bien que le Sénat en a eu connaissance officiellement hier. Cependant, la politique ayant décidé le sauvetage des pilleurs de la Chartreuse, le tribunal et la Cour de Grenoble ne reculèrent point devant cet extraordinaire déni de justice... Enfin, pour compléter le trio des sabotages sensationnels, que penser de celui-ci : la grâce obtenue le 11 février dernier par M. Bourgeois, à l'instigation de son dompteur M. Vallé, en faveur des incendiaires d'Ay ? Il y avait là des gaillards condamnés à des peines de prison d'ailleurs relativement infimes – car s'ils n'eussent pas été les clients de M. Vallé, la loi les vouait aux travaux forcés – pour avoir été pris en flagrant délit, éventrant les toits à coups de hache, y versant du pétrole et mettant le feu. La ville d'Ay va avoir, du chef de leurs incendies et déprédations, des millions d'indemnité à payer... ».

Qu'on y ajoute les sentences du « bon juge » et d'autres tout aussi fantastiques. Une femme tue son mari et sa tante, sans aucun motif sérieux. Voici le compte-rendu de l'audience, que donne la Liberté du 12 mai 1912 :

« Cachée sous ses grands voiles de deuil, Mme P. a comparu cet après-midi devant la Cour d'assises. Elle n'a cessé, durant toute l'audience, de sangloter, interrompant même l'interrogatoire par quelques crises de nerfs. – Pourquoi avez-vous tué votre mari ? interroge le président. – J'étais poussée par une puissance surhumaine, mais si, à ce moment, quelqu'un était venu m'arrêter en me disant : Malheureuse, que vas-tu faire ? je serais revenue à moi, rien ne serait arrivé ! – Vous étiez si peu affolée qu'après avoir tué votre mari, vous avez rechargé votre arme dans les water-closets de la gare d'Austerlitz, – J'aurais rechargé dix revolvers à ce moment-là ! J'étais affolée, je me rendais si peu compte de ce qui s'était passé que je croyais que j'allais surprendre mon mari et ma tante à Savigny ; je ne me souvenais plus de ce que je venais de faire rue Sedaine ! – Après le second crime, vous êtes revenue à Paris et vous avez embrassé votre fille en disant : Pardonne-moi, je suis une criminelle ! – À ce souvenir, l'accusée éclate en sanglots et a une crise de nerfs. Lorsqu'elle est revenue à elle, elle s'écrie à plusieurs reprises : – Ma fille, pardonne-moi, je t'en prie! – On entend alors les témoins. La défense demande à la Cour d'entendre la petite Pâquerette, âgée de 9 ans, enfant de l'accusée. Le président et le ministère public veulent s'opposer à cette audition qu'ils qualifient d'inconvenante ; mais la défense insiste. L'accusée éclate en sanglots et, maintenue par quatre gardes, crie : – Ma chérie ! Ma pauvre petite ! Pardonne à ta mère ! – La fillette déclare, d'une petite voix qu'on entend à peine, que – sa maman lui disait toujours de penser à son père dans sa prière du soir, et que jamais elle ne lui dit du mal de son papa. Cette scène attristante impressionne profondément tout l'auditoire. Après une suspension d'audience, l'avocat général Wattine prononce un réquisitoire sévère. Le jury a rapporté un verdict négatif et la Cour a acquitté Mme P. ». – Ce fait n'est cité qu'à titre d'exemple, comme type d'innombrables autres.

Le phénomène est général, comme le montre une lettre adressée au Temps (août 1912), par M. Loubat, procureur général à Lyon : « Le jury doit être composé en vue de la défense sociale et non des quelques affaires politiques, d'ailleurs très rares aujourd'hui, qui peuvent être portées à la Cour d'assises. Les résultats du système sont assez éloquents. Notre plus haute juridiction criminelle, qui devrait approcher de la justice absolue, en raison des châtiments redoutables et parfois irréparables dont elle dispose, est la plus aléatoire, la plus capricieuse, la plus versatile qu'on puisse imaginer. Certains verdicts sont des actes d'aberration ; le parricide, lui-même, trouve grâce devant le jury. Dans la même session, on voit acquitter des accusés aussi coupables que d'autres qui sont condamnés à mort. Le tribunal qui se permettrait de pareils coups de tête soulèverait l'opinion publique. Ces scandales seraient impossibles si le jury comprenait plus d'hommes moins crédules et plus capables de résister aux impressions d'audience ».

On comprend que pour produire un effet pratique, le procureur général devait limiter son attaque au point où le mal paraissait être le plus grave. Mais, au point de vue théorique, les verdicts des tribunaux valent souvent ceux du jury, et personne n'ignore les services que la Cour de Cassation rendit au gouvernement dans l'affaire Dreyfus.

Une personne très compétente écrit de Paris dans la Gazette de Lausanne, 4 septembre 1912 : « Vous vous étonnerez peut-être que nous ne possédions que trois ou quatre vice- présidents très capables sur douze [vice-présidents du tribunal de la Seine]. moi, ce qui m'étonne, c'est que nous en possédions autant. Car on ne les choisit pas pour leurs capacités, on les choisit pour leurs opinions. S'ils sont instruits, c'est par l'effet de la chance ; et s'ils sont indépendants, c'est par l'effet d'une distraction. Nous avons au tribunal un ancien sénateur radical qui a été remercié par ses électeurs. On l'a nommé parce qu'il était radical et qu'il avait été mis à mal par la « réaction ». Il s'est trouvé que c'était un jurisconsulte de premier ordre, et c'est tant mieux. Mais il n'aurait pas su les causes de révocation des donations qu'on l'aurait nommé sans une hésitation de plus ».

En Italie, c'est encore pire et de beaucoup.

[FN: § 466-3]

On ferait un volume, si l'on voulait citer une partie, même très petite, des très nombreux faits que l'on pourrait rapporter à ce propos. L. LATAPIE, dans La Liberté, 11 janvier 1913, dit que le magistrat est maintenant « sans courage et sans force devant le débordement du désordre et de la criminalité. Il défend la société à coups de mouchoir parfumé contre le surin et l’eustache des bandits. Hier, la foule a laissé pour mort, dans le quartier de la Goutte-d'Or, un cambrioleur qu'elle avait pris sur le fait. Savez-vous combien de condamnations pour cambriolage on a trouvées dans son dossier ? Vingt-trois ! Cela veut dire que vingt-trois fois la police a surpris et arrêté cet apache ; et vingt-trois fois les magistrats l'ont rejeté à la rue après une condamnation légère. Cependant, il existe une loi sur la relégation visant les criminels irréductibles. Les magistrats ne l'appliquent pas, par peur sans doute de diminuer la clientèle des partis avancés. Il est certain que si Paris était purgé subitement des cinquante mille coquins reléguables qui troublent la sécurité, l'armée de la Révolution perdrait ses meilleures troupes. Or, la magistrature vit en bons termes avec la Révolution. Les excès contre les biens et contre les personnes trouvent en elle une indulgence inlassable dès qu'ils se couvrent d'un prétexte politique. Les voleurs et les assassins savent si bien cela qu'ils ne manquent plus jamais de s'affilier au parti Anarchiste avant d'accomplir leurs exploits. S'ils assassinent les garçons de banque et prennent leur portefeuille, c'est pour venger la Démocratie, et s'ils tirent sur les agents, c'est pour améliorer la Société. Les juges pâlissent d'inquiétude devant ces redoutables problèmes sociaux et leur conscience se recroqueville en forme d'escargot sous leur robe rouge. Qui sait ? La magistrature a une grande part de responsabilité dans tous les désordres qui éclatent en France. Elle ne sait inspirer nulle part le respect et la crainte de la Justice. Elle a tellement habitué les agitateurs professionnels à l'impunité que ceux-ci se considèrent comme intolérablement persécutés lorsqu'on fait mine de leur appliquer les lois. Et la presse gouvernementale, qui vit en perpétuelle coquetterie avec les révolutionnaires, ne contribue pas peu à augmenter l'inquiétude et l'hésitation parmi les juges. Je connais la défense que ceux-ci nous opposent : – Après tout, disent-ils, pourquoi serions-nous les seuls à avoir du courage ? Nous nous inspirons de l'attitude de nos gouver- nants. Qu'ils donnent, eux, l'exemple de l'énergie contre les entreprises révolutionnaires, qu'ils rompent toute solidarité avec les institutions qui ont pour but avéré la guerre contre la société et contre la patrie, et nous rétablirons la majesté sévère de la loi ».

Cette dernière observation a sa cause dans un motif de polémique. En réalité, magistrats, gouvernement, public, sont mus par des intérêts et des sentiments semblables. Quand le public est sous l'impression du délit, il frappe le coupable, et, quand cette impression est effacée, se repaît des insanités des humanitaires de tout genre. Les magistrats et les dirigeants suivent la voie qui plaît au public.

En décembre 1912, on jugea, devant les assises de Paris, Mme Bloch, qui avait tué la maîtresse de son mari, une certaine dame Bridgemann, laquelle, à l'instar des femmes libres d'outre Atlantique, menait joyeuse vie avec ses amants, pendant que son mari s'évertuait à gagner de l'argent. Mme Bloch fut acquittée. Jusque-là rien d'étonnant : des cas semblables se produisent par dizaines ou par centaines ; mais ce qui l'est moins, c'est d'entendre le ministère public, qui doit soutenir l'accusation, inciter à l'homicide. Voici ses paroles textuelles : « Ce qu'a fait l'accusée est grave. Elle avait une victime désignée ; elle l'avait chez elle, c'était son mari. Si elle l'avait frappé, nous n'aurions qu'à nous incliner ».

Le correspondant du Journal de Genève, qui a pourtant l'habitude de défendre les pires humanitaires, écrit (28 décembre 1912) : « La chose a fait scandale et toute la presse a protesté. Mais il faudrait plus et mieux pour empêcher la justice de se discréditer elle-même. Le cabotinage fait des ravages affreux dans le monde du palais. On y paraît à la fois moins indépendant que naguère à l'égard du pouvoir et plus accessible au désir d'une mauvaise réclame. Un grand effort serait nécessaire pour rendre à la justice la sérénité, la gravité et l'indépendance qui sont les conditions essentielles de son bon fonctionnement et de son autorité. L'affaire Rochette n'est pas non plus de nature à contribuer au bon renom de la magistrature. On sait que cet aigrefin de haut vol a disparu au moment où il devait se constituer prisonnier ».

Mais tout cela provient des sentiments qui existent dans le public et de l'organisation politique qui en est la conséquence. Ce sont des faits généraux, et l'on ne saurait en accuser telle ou telle personne en particulier.

[FN: § 469-1]

Même à une époque assez récente, l'orthographe était en partie arbitraire.

[FN: § 469-2]

S. REINACH ; Traité d'épigraphie grecque « (p. 237) L'orthographe, surtout dans les documents privés, (p. 238) soustraits au contrôle des secrétaires du peuple ou du sénat, est encore plus individuelle que l'écriture : elle reflète non seulement les habitudes générales de l'époque, mais les caprices ou les manies de chaque lapicide... Ajoutons que le mot d'orthographe éveille en nous une idée de règle qui a été longtemps étrangère à l'antiquité. Pour nous, l'orthographe est une manière fixe d'écrire les mots, en dépit souvent de la prononciation qu'on leur donne ; pour les anciens jusqu'à l'époque alexandrine, comme pour les Français jusqu'au seizième siècle, l'orthographe proprement dite n'existe pas et l'on écrit les mots comme on les prononce. L'écriture était vivante chez eux, elle est savante chez nous... On citerait de nombreuses preuves empruntées à l'épigraphie même, de l'inconstance de la graphie chez les anciens. Ainsi, dans un décret athénien, on trouve à la fois les formes , à quelques lignes de distance... (p. 45) M. Curtius a montré, en s'appuyant sur les inscriptions, comment l'ancien état de la langue grecque, à l'égard des consonnes finales, était celui d'une mobilité absolue, pareille à celle qui se constate jusqu'à la fin pour les consonnes des prépositions apocopées par synalèphe . Puis il s'établit entre ces différentes formes une sorte de lutte pour la vie, et l'orthographe dominante dans la langue classique fut celle qui sortit victorieuse de ce conflit entre différentes formes ».

[FN: § 471-1]

DAVIS ; La Chine, t. II : « (p. 200) Les physiologistes chinois désignent l'homme sous le nom de siao-tien-ti, « petit univers, ou microcosme », et appliquent à cette définition la doctrine du yin et du yang, c'est-à-dire du double principe... maintenant l'ordre et l'harmonie du monde naturel. Ils supposent que c'est dans une certaine proportion entre ces principes, ou entre la force et la faiblesse, le froid, le sec et l'humide, que consiste la santé du corps humain, et que les différents degrés de force ou de faiblesse produisent les maladies et finale- ment la mort. Il règne dans tout leur système médical une grande prétention à l'harmonie et au raisonnement, qui serait admirable, si elle était fondée sur quelque chose de vrai ». Ces braves gens sont si instruits que « (p. 200) ils n'aperçoivent même pas la différence qui existe entre les artères et les veines, et certainement ne savent pas un mot des fonctions des poumons... Ils appellent le cœur « l'époux », et les poumons la « femme ». Ne pratiquant pas la dissection, il serait bien singulier que leurs connaissances fussent plus étendues ». De ce genre étaient chez nous, en d'autres temps, les dissertations de sciences naturelles ; telles sont encore aujourd'hui beaucoup de dissertations de science (?) sociale.

[FN: § 471-2]

CONDILLAC ; Essai sur l'origine des connaissances humaines, section V, 7.

[FN: § 473-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] Ainsi, qui sera juge dans la controverse suivante ? Au cours de son Oraison funèbre de Mme Marie Vignerod, duchesse d'Aiguillon, [Voir VILLEMAIN ; Oraisons funèbres de Bossuet... suivies d'un choix d'oraisons funèbres de Fléchier et de Mascaron, Paris, 1843, p. 345.] Fléchier dit, à propos de la mort des justes : « L'âme se resserre en elle-même, et croit voir, à chaque moment, les portes de l'éternité s'entr'ouvrir pour elle ». Un commentateur LA HARPE) cité en note par Villemain, observe : « Si Fléchier avait dit : Leur âme se recueille en elle-même pour contempler l'éternité, etc., il y aurait un juste rapport entre l'idée et l’expression, parce que la contemplation est la suite du recueillement ; mais que l'âme du juste se resserre quand elle croit voir les portes de l'éternité, l'idée est absolument fausse. L'âme du juste, au contraire, doit s'ouvrir, se dilater, s'élancer au-devant de l'éternité ». On nous dira peut-être que La Harpe, ne critique en somme qu'une expression. C'est entendu ; mais sur quoi se fonde-t-il pour le faire ? Sur une prétendue nécessité de fait extra-expérimental : « L'âme du juste... doit s'ouvrir, etc.». Les abstractions âme, portes de l'éternité, etc., échappant entièrement à l'expérience, il est impossible à qui veut rester dans ce domaine, de savoir si vraiment Fléchier émet une « idée absolument fausse ».

[FN: § 474-1]

Le traité De Melisso est attribué à Aristote. Le philosophe dont on parle maintenant serait Xénophane ; mais ni l'une ni l'autre de ces assertions ne paraît vraie. Pour nous, cela présente peu d'importance, puisque nous étudions seulement des types de raisonnements ; peu nous importent leurs auteurs.

[FN: § 474-2]

De Melisso, c. I, éd. Bekker, p. 977 b – Fragm. philos., éd. Didot, I, p. 294:

Plus loin, c. IV, Bekker, p. 978; Didot, p. 299, on rappelle un fait analogue de Parménide ; et dans les fragments de Parménide, Didot, I, p. 124 : (102)

« Mais puisqu'il est parfait jusqu'à ses extrémités, partout, il est semblable à une sphère bien arrondie, toute également distante de son centre ».

[FN: § 474-3]

De Mélisso, c. IV; Bekker, p. 978 ; Didot, p. 298.

[FN: § 475-1]

De Melisso, c. II; Bekker, p. 976; Didot, p. 289. ARIST.; De caelo, II, 13,7.

[FN: § 477-1]

Summa theol., Prima, q. CVII, I.

[FN: § 478-1]

A. FRANCK; Dict. des sc. philos., s. r. Bien.

[FN: § 485-1]De civ. dei, XVI, 9.

[FN: § 486-1]

LACTANT. ; Div. instit., 1. III, de falsa sapientia, 24, 1 : Quid illi, qui esse contrarios vestigiis nostris antipodas putant ? Num aliquid loquuntur ? aut est quisquam tam ineptus, qui credat, esse homines, quorum vestigia sint superiora, quam capita ? aut ibi, quae apud nos iacent, inversa pendere ? fruges et arbores deorsum versus crescere ? pluvias et nives et grandines sursum versus cadere in terram ? Lactance répond aux « philosophes » comme nos hégéliens répondent aux physiciens. Il dit que du mouvement du soleil et de la lune, les « philosophes déduisirent que le ciel était rond : (7) Hanc igitur coeli rotunditatem illud sequebatur, ut terra in medio sinu eius esset inclusa : quod si ita, esse terram ipsam globo similem. Neque enim fieri posset, ut non esset rotundum, (8) quod rotundo conclusum teneretur. Si autem rotunda etiam terra esset, necesse esse, ut in omnes coeli partes eandem faciem gerat, id est, montes erigat, campos tendat, maria consternat. Quod si esset, etiam sequebatur illud extremum, ut nulla sit pars terrae, quae non ab hominibus caeterisque animalibus incolatur. Sic pendulos istos Antipodas coeli rotunditas adinvenit. (9) Quod si quaeras ad iis, qui haec portenta defendunt : Quomodo ergo non cadunt omnia in inferiorem illam coeli partem ? respondent, hanc rerum esse naturam, ut pondera in medium ferantur, et ad medium connexa sint omnia, sicut radios videmus in rota ; quae autem levia sunt, ut nebula, fumus, ignis, a medio deferantur, ut coelum, petant. (10) Quid dicam de iis nescio, qui cum semel aberraverint, constanter in stultitia perseverant, et vanis vana defendunt. On

dirait vraiment Hegel, quand il s'en prend à Newton. Le bon Lactance conclut : (11) At ego multis argumentis probare possem, nullo modo fieri posse, ut coelum terra sit inferius [toujours la manière hégélienne de raisonner sur les concepts ; Lactance raisonne sur le concept inférieur], nisi et liber iam concludendus esset.... Quel dommage ! Ainsi nous ne connaissons pas ces nombreux arguments ?

[FN: § 487-1]

PLUTARCH.; Deplacitis philosoph., III, 10.

[FN: § 487-2]

PLUTARCH., De facie in orbe lunae, 7, 2: « On ne doit pas écouter les philosophes, quand ils veulent repousser les paradoxes par des paradoxes... (3) Quels paradoxes ne font-ils pas ? Ne disent-ils pas que la terre est sphérique ? elle qui a de si grandes profondeurs, hauteurs, inégalités ? qu'elle est habitée par les antipodes, qui rampent à la façon des vers ou des lézards, la partie supérieure tournée en bas ? »

[FN: § 487-3]

LUCRET.; I, 1056-1063. D'autre part, il demeure en faveur de Lucrèce qu'il n'entendait pas persécuter ceux qui ne pensaient pas comme lui.

[FN: § 488-1]

Le lecteur se rappellera qu'ici, comme ailleurs, nous opposons les concepts aux faits, le subjectif à l'objectif, non au sens métaphysique, mais au sens expérimental, comme il a été énoncé aux § 94 et 95.

[FN: § 489-1]

COSMA IND. ;

(Édit. WINSTEDT, p. 38).

[FN: § 489-2]

COSMAS IND. ; (65 A – Winst., p. 46 – Migne, p. 66)

[FN: § 490-1]

ARIST. ; De caelo, I, 2, 4

[FN: § 491-1]

De caelo, I, 2, 9 :

On peut remarquer que , parfait, a, en grec, deux sens. Ce terme signifie ce qui est fini, achevé, et aussi ce qui est sans défaut, excellent. Dans ce dernier sens, Aristote, Eth. Nic., V, 1, 15, nomme la , pour désigner une vertu très grande, excellente. Ce sens équivoque de convient pour dissimuler la vanité du raisonnement du De caelo. Le mouvement circulaire est fini, achevé, parce qu'il revient sur lui-même, parce qu'il peut continuer indéfiniment sur la même courbe ; et quand, de cette façon, on a admis l'épithète on arrive, en vertu du double sens, à tenir le mouvement circulaire pour meilleur que tout autre mouvement. Voyez encore, pour les différents sens de parfait, Metaphys., IV, 16, p. 1021, Bekk.

Il y a aussi une autre amphibologie. Le raisonnement sur le cercle parfait est répété, De caelo, II, 4, 2. Le cercle est dit parfait, en comparaison de la ligne droite, parce qu'on peut ajouter quelque chose à la droite, tandis qu'on ne peut rien ajouter au cercle. L'auteur continue :

« Donc si le parfait est antérieur à l'imparfait, pour cela aussi la première des figures serait le cercle ». Ce le raisonnement a autant de valeur pour le cercle que pour toute autre figure fermée. Dans ce sens, Aristote dit, De gen. et corrup., II, 10, 8 : Quand l'air vient de l'eau, et le feu de l’air, et de nouveau l'eau, du feu, nous disons que la production a lieu en cercle, puisqu'elle est revenue sur elle-même :

Si l'on devait entendre dans ce sens le passage du De caelo, cité au commencement, on y opposerait seule- ment un mouvement revenant sur lui-même, à un mouvement qui se prolonge indéfiniment sur une ligne non fermée ; mais il n'en est nullement ainsi, et il s'agit bien d'un cercle géométrique, dans le passage de De caelo, puisque, II, 46, on exclut non seulement les figures composées directes, mais aussi celles dont les droites tirées du centre ne sont pas égales, comme les figures lenticulaires ou faites en forme d'œuf. On voit par conséquent que le mouvement circulaire a tantôt un sens tantôt un autre : tantôt c'est simplement un mouve- ment suivant une courbe fermée, tantôt c'est un mouvement suivant un cercle géométrique.

[FN: § 491-2]

Prenons garde d'autre part que c'est le cercle et la sphère en eux-mêmes. L'auteur établit qu'il y a des sciences plus vraies que d'autres. Il suppose un homme qui a la vraie connaissance de la justice, et veut montrer comment elle se mélange à une autre connaissance moins parfaite. Philebus, p. 62 : « Cet homme sera-t-il suffisamment savant s'il connaît la divine raison intrinsèque du cercle et de la sphère , et qu'il ignore la raison humaine des cercles et de la sphère. ? »

[FN: § 492-1]

LAPLACE; Traité de mécanique céleste, Paris, an VII; I, p. 14.

[FN: § 496-1]

POISSON ; Traité de mécanique, I, p. 2: « On donne, en général, le nom de force à la cause quelconque qui met un corps en mouvement ». Les auteurs s'aperçurent ensuite de l'erreur d'une telle définition. SAINT VENANT ; Principes de mécanique fondés sur la Cinématique (lithographié), p. 65 : « À notre point de vue tout pratique, nous ne nous arrêtons pas à discuter si les masses ont quelque rapport avec les quantités de matière des divers corps hétérogènes, et, les forces,... avec les causes efficientes du mouvement qu'ils prennent ».

[FN: § 496-2]

Rivista di Scienze, n° 1. E. PICARD ; La mécanique classique et ses approximations successives, p. 6 : « Dans l'étude des champs constants, la force s'est trouvée successivement définie de deux manières différentes, d'abord par des mesures statiques, et ensuite à un point de vue dynamique par l'intermédiaire des accélérations correspondant aux champs. Aucune relation n'était a priori nécessaire entre ces deux évaluations, et nous devons regarder comme un résultat expérimental que les nombres représentant les forces envisagées au point de vue dynamique et au point de vue statique sont proportionnels ». Le lecteur remarquera cette dernière proposition ; le concept qu'elle exprime est essentiel en science.

[FN: § 498-1]

CIC.; De nat. deor., II, 16, 44. Quae autem natura moverentur, haec aut pondere deorsum, aut levitate in sublime ferri : quorum neutrum astris contingeret, propterea quod eorum motus in orbem circumque ferretur. Nec vero dici potest, vi quadam majore fieri, ut contra naturam astra moveantur : quae enim potest maior esse ? Restat igitur, ut motus astrorum sit volontarius...

[FN: § 499-1]

Nous en traiterons amplement au chap. IX.

[FN: § 502-1]

Pour que cela soit vrai, il faut rapporter le mouvement des planètes au soleil supposé immobile, en admettant qu'on peut négliger les masses des planètes, en comparaison de celle du soleil, ainsi que les actions réciproques des planètes.

[FN: § 502-2]

HEGEL; Philosophie de la Nature, trad. Vera, I. Vera est un hégélien de grande renommée, qui doit avoir compris ce que l'auteur voulait dire.

[FN: § 503-1]

HEGEL; Phil. de la Nat., trad. Vera, I. Nous transcrivons les notes du traducteur ; elles apportent de la clarté à un texte déjà plus que lumineux. Mais la plus belle note est celle qui vient après les paroles suivantes, dans le texte, au point où nous nous sommes arrêtés : « (p. 297) ... loi qui n'est profonde que parce qu'elle est simple, et qu'elle exprime la nature intime de la chose ». Je regrette que cette note soit trop longue pour être citée en entier ; mais le petit passage suivant suffira : « (p. 297) Or, par là même que la chute n'est qu'un moment de la mécanique finie, le temps, l'espace et la matière n'y existent que d'une manière abstraite et incomplète, c'est-à-dire que tous les éléments qui les constituent ne s'y trouvent pas complètement développés et dans leur unité. Le temps n'y existe que comme racine, et l'espace que comme carré, et comme un carré purement formel ». Plaignons cette pauvre chute où le temps n'existe que comme racine !

Je ne conteste pas que cette façon d'assembler des mots qui paraissent enfilés au hasard, ne conduise à des lois « profondes et simples, qui expriment la nature intime de la chose », parce que je ne sais vraiment pas ce qu'est cette vénérable nature ; mais, dans cette Sociologie, je ne recherche pas cette nature intime, et je tâche par conséquent de m'abstenir de mon mieux de discours du genre de celui qui vient d'être noté (§ 20). Peut-être qu'un jour viendra, où les traités de sociologie que l'on composera, comparés à ceux qui ont cours aujourd'hui, apparaîtront comme la mécanique céleste de Gauss, comparée aux songes de Platon ou aux divagations de l'astrologie.

* (NOTE DE VERA) : « Eine blos empirische Grösse, und als qualitativ nur als abstrakte Einheit. C'est ainsi qu'il existe dans la chute ».

** « Für sich, pour soi, c'est-à-dire ici complète ». Hélas, les merveilles qui portent le nom de « totalité réfléchie, pour soi, complète », nous sont également inconnues.

*** « Producirt sich, und bezieht sich darin auf sich selbst, c'est-à-dire le carré ».

† « Als das positive Aussereinander, en tant que continuant l'extériorité positive ».

[FN: § 504-1]

HEGEL; Phil. de la Nat., trad. Vera, II.

[FN: § 504-*]

(NOTE DE VERA) : Unterworfene, soumise, vaincue, par opposition à l'identité individuelle (individuelle Selbst) du métal qui n'est pas passif polir la lumière.

[FN: § 504-2]

La densité du diamant est d'environ 3,5. Certains verres ou cristaux ont les densités suivantes : cristal 3,3 ; flints divers, de 3,6 à 4,3. Au contraire, le métal aluminium (fondu) a la densité 2,56. Donc, si l'on raisonnait comme fait Hegel, l’aluminium devrait être plus transparent que le diamant et le cristal. Il est vraiment regrettable pour les métaphysiciens que ce soit le contraire. Mais de semblables contradictions ne les troublent nullement, et ils trouvent toujours moyen de ménager la chèvre et le chou. Dans les sciences physiques, ils ont été tellement discrédités par leurs erreurs répétées et leurs théories fantastiques, que personne ne se soucie plus d'eux ; cependant ils continuent à pontifier dans la littérature qui usurpe le nom des sciences sociales.

[FN: § 505-1]

A. FOUILLÉE : Crit. des syst. de morale contemp.

[FN: § 505-2]

DAVIS ; La Chine, t. II : « (p. 216) Klaproth a remarqué que, dans une encyclopédie écrite avant la fin du IXe siècle, il est dit que « la lune étant le principe le plus pur de l'eau, influence les marées ». HEGEL ; Philosophie de la Nature, t. I : « (p. 878) La lune est le cristal sans (p. 379) eau, qui s'efforce de se compléter, et d'apaiser la soif de sa rigidité par notre mer, et qui produit ainsi la marée. La mer se soulève et est, pour ainsi dire, sur le point de s'élever vers la lune, et celle-ci semble à son tour vouloir s'emparer d'elle ». C'est ainsi que nos métaphysiciens contemporains dissertent sur les phénomènes sociaux.

[FN: § 506-1]

D. THom.; Opusc. L. De natura luminis. Et pourtant cet auteur avait commencé par une observation juste, en remarquant que le langage vulgaire nous induit en erreur sur la nature de la lumière. Nam quidam dixerunt lumen esse corpus, ad quod falso sunt moti ex quibusdam locutionibus, quibus utuntur loquentes de lumine. Consuevimus enim dicere, quod radius transit per aerem, et quod radii reverberantur, et quod radii intersecant, quae omnia videntur esse corporum.

[FN: § 507-1]

ARISTOT.; De gen. et corrup. I, 2, 10. Nous avons traduit par « faits usuels », littéralement : « les choses sur lesquelles on est d'accord ».

[FN: § 508-1]

F. BACONIS... Novum organum scientiarum, I, 15 : In notionibus nil sani est, nec in logicis, nec in physicis, non Substantia, non Qualitas, Agere,.Pati, ipsum Esse, bonae notiones sunt ; multo minus Grave, Leve, Densum, Tenue, Humidum, Siccum, Generatio, Corruptio, Attrahere, Fugare, Elementum, Materia, Forma, et id genus ; sed omnes phantasticae et male terminatae.

[FN: § 508-2]

F. BACONIS... Novum Organum scientiarum, II, 5 : At praeceptum sive Axioma de transformatione corporum, duplicis est generis. Primum intuetur corpus, ut turmam sive coniugationem naturarum simplicium, ut in auro haec couveniunt ; quod sit flavum, quod sit ponderosum...

[FN: § 510-1]

HEGEL; Phil. de la Nat.. t. I.

[FN: § 511-1] Les notes suivantes sont de Vera.

* C'est l'entendement, plutôt que la raison spéculative, qui domine dans la lumière, précisément parce qu'elle est une identité abstraite.

Hier Aeusseres und Anderes. C'est-à-dire que la lumière se pose d'abord comme moment opposé et extérieur à un autre moment.

** Das Dunkele. L'obscurité, le principe obscurcissant.

[FN: § 514-1]

Pour être bref, nous mettons ces propositions et le syllogisme sous la forme d'équations mathématiques ; soit A = X, X = B; donc A = B. Ainsi nous évitons les questions secondaires qui se rapportent à la nature des prémisses du syllogisme. Ce livre n'est pas un traité de logique, et nous voulons seulement indiquer le point principal du problème.

Qu'on veuille bien prendre garde à ce qui est dit du syllogisme, au § 97, et qui garde sa valeur pour le raisonnement sous forme d'équation.

[FN: § 514-2]

Les métaphysiciens répondent que tout raisonnement se fait sur des concepts, qu'il soit ou non expérimental. Admettons-le, puisque nous ne voulons jamais discuter sur les mots. Pour employer cette terminologie (§ 95), nous dirons que la différence consiste dans le nombre des concepts et dans la façon de s'en servir. Ainsi, pour connaître le mouvement des corps célestes, Hegel met en œuvre quelques concepts, ramassés çà et là. Par leur intermédiaire, il arrive à des conclusions déjà connues, que d'autres avaient tirées, dans leur recherche d'une représentation approximative de ce mouvement. Mais lui, dans son ignorance, se figure qu'il s'agit là d'une représentation précise. Par conséquent, si l'on comparait les concepts qu'il obtient par ce moyen, avec les concepts que l'on a grâce aux lunettes, en mesurant la position des corps célestes, on trouverait de grands écarts. Au contraire, ses contemporains astronomes employaient un très grand nombre de concepts, appelés par eux observations astronomiques ; ils les combinaient avec un autre grand nombre de déductions logico- mathémathiques, et en tiraient, au sujet de la position des astres, des concepts qui avaient le précieux mérite de s'accorder assez bien, en tout cas beaucoup mieux que les concepts hégéliens, avec les concepts qu'on avait acquis grâce aux observations astronomiques d'alors, et avec ceux qu'on tira des observations astronomiques, futures à ce moment, et passées pour nous.

Donc, celui qui veut avoir des concepts s'écartant, comme ceux de Hegel, des concepts donnés par l'observation, n'a qu'à suivre le sentier où s'est engagé Hegel. Celui qui veut au contraire avoir des concepts se rapprochant davantage des concepts donnés par les observations, doit prendre la -voie suivie par les astronomes, les physiciens, les chimistes, etc. Ici, nous voulons trouver, en sociologie, des concepts de ce genre ; et c'est pourquoi nous suivons cette voie, qui seule y mène. Nous n'avons absolument aucun autre motif pour la suivre.

[FN: § 514-3]

G. SENSINI ; La teoria della Rendita : (p. 201, note) « ... les économistes littéraires s'adonnent à des investigations d'une fécondité extraordinaire, qui peuvent se résumer ainsi : Traiter un sujet quelconque, X, sans préciser en rien le sens des mots à employer ; ce qui permettra de jouer à l'infini sur leur ambiguïté. Ne jamais poser un problème avec la rigueur nécessaire ; car, ce faisant, dans l'immense majorité des cas, on verrait que les questions posées ne tiennent pas debout, oui bien qu'elles sont insolubles, parce qu'elles sont mal formulées. Faire un abondant usage d'expressions métaphysiques et en général indéterminées, qui, ne signifiant rien signifient en même temps tout, et mettent à l'abri de toute objection... Faire appel, d'une manière plus on moins voilée, aux sentiments en général, et en particulier à ceux qui sont le plus à la mode, au moment où l'on écrit... (p. 202) L'immense majorité des productions économico-littéraires qui font aujourd'hui la fortune de leurs auteurs, sont de cette espèce ».

[FN: § 514-4]

On comprend par conséquent pourquoi la proposition : A a l'attribut B, est la partie constante et socialement de majeure importance, tandis que les prémisses qui conduisent à cette conclusion sont la partie variable et de moindre importance (§ 850 et sv.).

Dans l'exemple des tempêtes, rapporté au chap. II (§ 186 à 216), la conclusion est que l'on peut, par certaines pratiques, repousser ou attirer des tempêtes, de la grêle, des vents, la partie variable est l'explication de ce pouvoir, c'est-à-dire que c'est celle qui fournit les prémisses dont la proposition indiquée est la conclusion. L'induction nous a fait connaître le fait, et nous l'avons exprimé d'une façon générale (§ 217). Maintenant nous en poursuivons l'étude, et nous voyons les causes de ce fait, c'est-à-dire que nous le mettons en rapport avec d'autres faits.

[FN: § 518-1]

Manuel, I, 39, 40.

[FN: § 536-1]

J. DE MORGAN; Les prem. civil. : «(p. 29) Les documents sur lesquels s'appuie l'histoire proprement dite sont de quatre natures différentes : 1° Les textes contemporains des événements, inscriptions, monnaies et médailles, histoires, annales et mémoires. (p. 30) 2°, Les documents archéologiques, monuments et objets divers rencontrés sur le sol ou dans le sol. 3° Les écrits postérieurs aux événements qu'ils narrent. 4° Les considérations des sciences dont j'ai parlé plus haut (géologie, zoologie, botanique, anthropologie, ethnographie, sociologie, linguistique), auxquelles il convient d'ajouter les observations sur les industries, les arts, le commerce, les connaissances scientifiques, etc. ».

[FN: § 537-1]

Par conséquent le critique trouvera toujours et facilement quelque fait omis. Certaines gens, qui critiquent des œuvres qu'ils seraient incapables d'écrire, même en partie, s'en prévalent pour dire : « Vous avez omis ce fait », ou bien : «Vous avez cité cette édition, qui n'est pas la meilleure ». Ce serait fort bien, même parfait, si l'on pouvait ajouter : « Et ce fait est important pour ou contre votre théorie » ; ou bien : « La meilleure leçon que l'on tire de la meilleure édition est également importante ». Mais sans cette adjonction, l'observation est puérile, et ne montre que la vanité du pédant, parfois cultivé, plus souvent ignorant.

[FN: § 538-1]

On sait assez que, dans la paléographie moderne, tous les manuscrits qui proviennent d'un archétype comptent pour un seul. Par exemple, pour le texte de Plaute, l'Ambrosianus compte plus que tous les autres manuscrits.

[FN: § 538-2]

G. SOREL; L'Indépendance, 15 février 1912. L'auteur conclut l'analyse d'un livre par l'observation suivante, qui s'applique à beaucoup d'autres cas semblables : « (p. 97) Cet ouvrage, établi suivant les plus rigoureux principes de la Sorbonne, pour la composition duquel 422 auteurs ont été utilisés, nous fournit un remarquable échantillon de l'insignifiance des résultats auxquels aboutissent les méthodes enseignées par Lanson ».

[FN: § 538-3]

Pour vouloir critiquer Taine avec trop d'empressement, il est arrivé à ce bon M. Aulard une aventure amusante. Voir : AUGUSTIN COCHIN; La crise de l'histoire révolutionnaire.Taine et M. Aulard. De même pour un fait insignifiant, tiré de Clément d'Alexandrie, la critique de M. Aulard est entièrement erronée. V. PARETO ; Un petit problème de philologie, dans L'Indépendance, 1er mai 1912 : « Au fond, il importe peu à l'histoire de la Révolution française que Taine ait traduit fidèlement, ou n'ait pas traduit fidèlement un passage de Clément d'Alexandrie. M. Aulard aurait donc pu, sans le moindre inconvénient, négliger ce sujet. Mais s'il voulait s'en occuper, il fallait y mettre le temps et l'attention nécessaires. Si M. Aulard avait fait cela, il aurait vu que la comparaison faite par Clément d'Alexandrie est exactement parallèle à celle qu'a voulu faire Taine ; et par conséquent il se serait abstenu de se livrer à une critique qui n'est aucunement fondée ». Il est comique de voir que, dans la transcription de ce passage de Taine, M. Aulard tombe en des erreurs semblables à celles qu'il reproche à Taine. Confrontez le IIIe, volume de Taine, 10e, édition, in-8°, Paris 1887, avec la transcription de M. Aulard : (Taine) « des voiles tissus d'or. (Aulard) : des voiles tissés d'or. (Taine) : d'un air grave en chantant. (Aulard) : d'un air grave et, chantant. (Taine : et soulève. (Aulard) : il soulève ». Il y a 3 erreurs en 11 lignes imprimées de l'édition de Taine. M. Aulard dira qu'elles sont insignifiantes, qu'elles ne changent rien au sens, qu'elles laissent sa critique intacte, et qu'il n’appartient qu'à un sophiste de les relever. Parfaitement ; on ne peut mieux dire ; tel est mon avis, et c'est pourquoi je n'ai pas mentionné ces corrections dans l'article cité. Mais pourquoi M. Aulard a-t-il oublié ces excellents préceptes dans les critiques qu'il adresse à Taine ? Medice, cura te ipsum.

[FN: § 540-1]

J. BERTRAND ; Les fondateurs de l'astronomie : « (p. 146) Kepler a pu affirmer, il est vrai, qu'une erreur de huit minutes était impossible, et cette confiance a tout sauvé ; s'il avait pu en dire autant d'une erreur de huit secondes, tout était perdu... Kepler se trompait, en effet, en regardant l'important avantage obtenu sur la planète rebelle et opiniâtre, comme une de ces victoires décisives qui terminent à jamais la lutte, ces grandes lois, éternellement vraies [Bertrand pouvait nous épargner cette considération métaphysique] dans de justes limites, ne sont pas rigoureusement mathématiques [elles constituent la première approximation : celle dite du mouvement elliptique]. De nombreuses perturbations écartent incessamment Mars de sa route, en l'affranchissant peu à peu des liens (p. 147) délicats dans lesquels l'heureux calculateur avait cru l'enlacer à jamais. Pour qui pénètre plus au fond [approximations successives] ces irrégularités expliquées et prévues confirment, il est vrai, avec éclat la théorie de l'attraction qu'elles agrandissent en l'éclairant ; mais la connaissance prématurée de ces perturbations, conséquence nécessaire d'observations plus précises, en enveloppant la vérité dans d'inextricables embarras, aurait retardé pour bien longtemps peut-être les progrès de la mécanique du ciel. Kepler, rejetant alors l'orbite elliptique aussi bien et au même titre que l'orbite circulaire, eût été forcé de chercher directement les lois du mouvement perturbé, au risque d'épuiser, contre d'invincibles obstacles, toutes les ressources de sa pénétration et l'opiniâtreté de sa patience ». Au contraire, la connaissance du mouvement elliptique conduisit à l'idée que les planètes étaient attirées par le soleil ; puis l'attraction s'étendit aux actions réciproques des planètes entre elles et avec le soleil ; et l'on eut les approximations successives de la mécanique céleste.

[FN: § 540-2]

On appelle souvent erreur cette omission volontaire de certains détails dans une première approximation, et l'on ne fait ainsi que confirmer le dicton que si la parole est d'argent, le silence est d'or. À un autre genre appartiennent le reproche de traiter l'une des parties de la science sociale séparément des autres, et l'objection que si l'on traite de l'une d'entre elles, sans parler en même temps d'une autre, c'est parce qu'on l'ignore ou qu'on la néglige (§ 33 et sv.) mais ces faits ont la même origine, savoir une présomptueuse ignorance du caractère des théories scientifiques, et de la nécessité de les construire au moyen de l'analyse. Toutefois, il faut remercier ces braves gens de ne pas étendre leurs reproches au delà des limites des sciences sociales ; car ils pourraient blâmer avec autant de raison celui qui écrit un traité d'économie, parce qu'il n'y insère pas un traité de l'art culinaire, qui pourtant, nul ne le conteste, est très utile pour agrémenter de la vie (Cours, I, p. 2, § 2 ; p. 14 § 34).

[FN: § 541-1]

G. SOREL; Quelques prétentions juives, dans L'Indépendance, 1er Mai 1912 : « (p. 217) Le plus souvent, lorsque nous cherchons à connaître le rôle historique d'un groupe humain, nous étudions des individus auxquels nous croyons pouvoir attribuer la faculté d'avoir représenté, d'une façon plus ou moins parfaite, les forces morales de la masse ; nous notons les sentiments, les vœux, les conceptions philosophiques que ces personnages exceptionnels ont exprimés ; nous construisons enfin, au moyen de ces éléments particuliers, la conscience des droits et des devoirs qui auraient existé, suivant notre appréciation, dans telle fraction du peuple ».

« Parfois on a voulu s'illusionner sur la sûreté des résultats obtenus par cette méthode, en disant que les hommes. représentatifs seraient entièrement déterminés par leur milieu... Quelques écrivains, admirant l'originalité dont ont fait preuve plusieurs de ces hommes représentatifs, virent, au contraire, en eux des génies créateurs ;... (p. 218) La vérité est évidemment entre ces deux opinions extrêmes... ».

[FN: § 541-2]

BERGK ; Poet. lyr. ; Scholia : « (9) Je porterai le fer dans les rameaux de myrte, comme Harmodius et Aristogiton, quand ils tuèrent le tyran et rendirent les Athéniens égaux devant la loi ». «(11) Je porterai le fer dans les rameaux de myrte, comme Harmodius et Aristogiton, quand, aux Panathénées, ils tuèrent Hipparque, le tyran ».

[FN: § 541-3]

G. SOREL; Le syst. hist. de Renan, t. 1.

[FN: § 541-4]

G. SOREL; Quelques prétentions juives. dans L'Indépendance, 1er Mai 1912 : « (p. 231) C'est bien le cas d'appliquer ces remarques judicieuses que fait Renan : « En histoire religieuse, un texte vaut, non pas ce que l'auteur a voulu dire, mais ce que le besoin du temps lui fait dire. L'histoire religieuse de l'humanité se fait à coups de contre-sens ». Et en note : « Renan; Histoire du peuple d'Israël. tome IV, p. 193. – Cette remarque s'applique aussi fort bien à l'histoire profane ; ainsi la social-démocratie a fait d'effroyables contre-sens pour se donner l'air de suivre les enseignements hégéliens ».

[FN: § 544-1] A. KARR ; Contes et nouvelles.

[FN: § 545-1]

HERONDAE ; Mimiambi, II (Crusius) : (16).

« Si alors, amenant un navire de Aché, il a apporté du grain et fait cesser la funeste famine... ». Une autre leçon (Blass) serait : « Si je n'ai pas, en amenant un vaisseau de Aché, apporté du grain et fait cesser la funeste famine... »

[FN: § 545-2]

Par exemple, L'Argent, de Zola, donne une idée synthétique assez approximative de la vie à la Bourse de Paris, au temps de l'Union générale. Bel Ami, de MAUPASSANT, donne une idée qu'on trouverait difficilement dans d'autres ouvrages, des spéculations des politiciens, au temps de l'occupation de Tunis par la France, et de la part qu'a la presse dans ces spéculations. On peut observer des faits semblables, au temps du conflit entre la France et le Maroc, à la suite du coup d'Agadir.

[FN: § 545-3]

Vers la fin du XVIIIe siècle, un peu partout dans les pays civilisés et spécialement en France, se produisit l'invasion de la doctrine qui veut que toutes les actions soient logiques, et qui place toute action non-logique parmi les « préjugés ». L'extension du phénomène s'aperçoit bien, quand on voit que l'invasion s'étend jusqu'aux romans. En voici un exemple. CRÉBILLON ; La nuit et le moment : « (p. 19) Cidalise. Au vrai, Clitandre, vous n'aimez donc pas Araminte ? (Clitandre hausse les épaules). Mais pourtant vous l'avez eue. – Clitandre. Ah! c'est autre chose. – Cid. En effet on dit qu'aujourd'hui cela fait une différence. –Clit : – Et je crois de plus que ce n'est pas d'aujourd'hui que cela en fait une. – Cid. Vous m'étonnez. Je croyais que c'était une obligation que l'on avait à la philosophie moderne. – Clit. Je croirais bien aussi qu'en cela, comme en beaucoup d'autres choses, elle a rectifié nos idées ; mais qu'elle nous a plus appris à connaître les motifs de nos actions et à ne plus croire que nous agissons au hasard, qu'elle ne les a déterminées. Avant, par (p. 20) exemple, que nous sussions raisonner si bien, nous faisions sûrement tout ce que nous faisons aujourd'hui ; mais nous le faisions entraînés par le torrent, sans connaissance de cause et avec cette timidité que donnent les préjugés. Nous n'étions pas plus estimables qu'aujourd'hui ; mais nous voulions le paraître, et il ne se pouvait pas qu'une prétention si absurde ne gênât beaucoup les plaisirs. Enfin, nous avons eu le bonheur d'arriver au vrai [le Vrai et la Vérité sont les grandes divinités de semblables religions] ; eh ! que n'en résulte-t-il pas pour nous ? Jamais les femmes n'ont mis moins de grimaces dans la société ; jamais l'on a moins affecté la vertu. On se plaît, on se prend. S'ennuie-t-on l'un avec l'autre ? on se quitte avec tout aussi peu de cérémonie que l'on s'est pris... Il est vrai que l'amour n'est pour rien dans tout cela, mais l'amour qu'était-il, qu'un désir que l'on se plaisait à s'exagérer, un mouvement des sens dont il avait plu à la vanité des hommes de faire une vertu ? [des auteurs plus sérieux avaient dit cela de l'instinct religieux et d'autres semblables]. On sait aujourd'hui que le goût seul existe... (p. 21) et je crois à tout prendre, qu'il y a bien de la sagesse à sacrifier à tant de plaisirs quelques vieux préjugés qui rapportent assez peu d'estime et beaucoup d'ennui à ceux qui en font la règle de leur conduite ». Ce passage a plus de valeur, pour la compréhension de la Révolution française, qu'un très grand nombre de descriptions de faits.

Les Misérables de Victor Hugo et, si l'on veut, les romans de George Sand, donnent une idée précise et claire des débordements de l'humanitarisme, dans les sociétés civilisées du XIXe siècle.

[FN: § 547-1]

Nous en avons fait usage implicitement, quand nous avons cherché dans quels rapports la méthode métaphysique était avec les faits expérimentaux. Cette méthode peut-elle ou non conduire à des résultats que l'expérience vérifie ensuite ?

Voyons des cas, comme ceux de la mécanique céleste, de la physique, de la chimie, où les résultats expérimentaux sont bien connus, et adoptons cette méthode; laissons-la même employer par Hegel, tant admiré des métaphysiciens. Si, dans ces cas, elle nous conduit à des conclusions en accord avec l'expérience, nous aurons lieu d'espérer qu'elle produira un effet semblable, quand nous l'emploierons en d'autres matières, comme la science sociale, où les vérifications expérimentales sont moins aisées. Si, au contraire, elle nous conduit, en mécanique céleste, en physique, en chimie, à des conclusions que l'expérience montre privées de sens, fantaisistes, absurdes, nous aurons lieu de craindre que son usage n'ait pas un meilleur sort dans les sciences sociales ou les sciences historiques (§ 484 et sv., 502 et sv., 514-2).

[FN: § 549-1]

Un éminent égyptologue, Édouard NAVILLE, fait, dans le Journal de Genève, 25 août 1912, une analyse du livre The life of a South African Tribe, by HENRI A. JUNOD, vol. I, The social life. Il écrit : « Un des côtés par lequel le livre de M. Junod peut être le plus utile à ceux qui s'adonnent à l'étude des langues très anciennes, c'est le langage. Les primitifs s'expriment presque toujours par métaphores. Tout ce qui, même de loin, se rapproche d'une idée abstraite, doit être rendu par quelque chose tombant sous les sens. D'autre part, tel acte tout à fait grossier ou élémentaire, peut être exprimé par le sens rituel ou religieux qu'on attribue à cet acte. Quiconque n'a pas la clef de ces énigmes risque de s'égarer complètement dans l'interprétation qu'il donne à ces mots ou à ces phrases. Voici, par exemple, un usage qui a été retrouvé dans les tombes égyptiennes, où l'on dépose avec le défunt des vases et des objets brisés. Les Bantou font de même ; ils brisent sur la tombe les objets sans valeur qui appartenaient au mort, surtout les vieux vases en terre, et les manches de zagaïes. Il faut que tout meure avec lui. Cet acte s'appelle « montrer sa colère à la mort ». Nous trouverions dans un texte égyptien ou assyrien une expression pareille « montrer sa colère à la mort », je doute fort qu'aucun philologue même le plus érudit arrivât à donner à cette expression le sens véritable : briser des pots de terre. Je crois que malheureusement dans nos traductions nous avons à nous reprocher de graves erreurs commises ainsi par ignorance. À mon sens c'est ce qui fait que beaucoup de textes égyptiens comme ceux des Pyramides ou le Livre des Morts, nous paraissent si souvent étranges, et même enfantins. Nous n'avons pas la clef des métaphores qui abondent surtout dans le langage religieux. L'ouvrage de M. Junod fourmille d'expressions de cette espèce. Il y en a à chaque page. Je n'en citerai ici que deux. « Manger les bœufs » veut dire accepter le prix d'achat, le « lobola » d'une femme qui se paie par deux, trois, jusqu'à dix de ces animaux. « Manger deux troupeaux » est une expression juridique qui veut dire accepter à tort deux « lobola ».

[FN: § 550-1]

C'est pourquoi j'ai cité, ici, avec beaucoup de précaution, les textes écrits en des langues que je ne connais pas. Ne sachant pas l'hébreu, j'espère que les traductions du Talmud que j'ai employées reproduisent au moins approximativement le texte ; mais je m'abstiens de toute conclusion qui dépendrait trop étroitement du sens précis de quelque terme.

Il serait très utile qu'une personne connaissant les langues orientales : l'arabe, le sanscrit, le chinois, le japonais, etc., nous donnât des traductions littérales, avec commentaires philologiques des passages de textes qui peuvent servir à la sociologie. Tant que cela ne sera pas fait, nous irons un peu à tâtons, dans l'usage que nous ferons des documents écrits en ces langues.

SUMNER MAINE; Early history of institutions, trad. DURIEU DE LEYRITZ. « (p. 14) Il y a cependant une cause plus permanente et plus sérieuse d'embarras pour celui qui veut asseoir des conclusions sur les lois irlandaises. Jusqu'à une époque relativement récente, elles étaient en fait inintelligibles, et c'est leurs premiers traducteurs... (p. 15) qui les ont rendues accessibles à tous. Leur traduction a été revue avec soin par le savant éditeur du texte irlandais ; mais il est probable que plusieurs générations d'érudits adonnés aux études celtiques auront à controverser sur les termes de ces lois avant que le lecteur qui les aborde sans aucune prétention à l'érudition celtique puisse être sûr de posséder le sens exact de chacun des passages qu'il a sous les yeux. …Quant à moi, je m'appliquerai à ne conclure que lorsque le sens et le sujet du texte paraîtront raisonnablement certains, et je m'abstiendrai de certaines recherches très séduisantes qui ne pourraient s'étayer que sur des fragments d'une signification douteuse ».

[FN: § 551-1]

SUMNER MAINE; loc., cit. 550-1 « (p. 354) Les savants auteurs des différentes introductions placées en tête de la publication officielle (p. 355) des anciennes lois de l'Irlande, sont intimement convaincus que la juridiction des tribunaux irlandais était – pour user d'un terme technique, – volontaire. Suivant cette façon de voir, les légistes brehons concevaient assez clairement le droit de saisie, mais c'étaient l'opinion publique et le respect populaire pour une caste professionnelle, qui assuraient dans la pratique l'observation de ce droit ». « (p. 51)... l'absence de toute sanction est souvent l'une des plus grandes difficultés qui s'opposent à l'intelligence du droit brehon. Qu'un homme désobéisse à la loi ou s'oppose à ce qu'elle soit appliquée, qu'arrivera-t-il ? Le savant auteur de l'une des préfaces modernes placées en tête du troisième volume soutient que le pivot du système brehon, c'est l'arbitrage, et je crois (p. 52) aussi que pour autant que ce système est connu, il justifie cette conclusion. Le but unique des Brehons était de forcer les plaideurs à déférer leurs querelles à un Brehon ou à quelque personne puissante conseillée par un Brehon ».

SUMNER MAINE ; Ancient law, trad. Courcelle Seneuil « (p. 7) Il est certain que, dans l'enfance du genre humain, on ne conçoit pas l'idée d'une législation quelconque, ni même d'un auteur déterminé du droit ; on n'y songe pas : le droit est à peine arrivé à l'état de (p. 8) coutume ; il est plutôt une habitude... Il est sans doute fort difficile pour nous d'entrer dans une conception si éloignée de nous dans le temps et par l'association d'idées à laquelle elle est liée... ».

[FN: § 557-1]

BERTRAND; Calcul des probabilités.

[FN: § 558-1]

BERTRAND ; Calcul des probabilités.

[FN: § 558-2]

Et pourquoi pas ? Deux individus n'ont en main ni éphémérides ni calendriers ; l'un dit à l'autre : « S’il pleut le mois prochain, tu me donneras dix francs ; s'il y a une éclipse de lune, je te donnerai la même somme ». Personne ne voudra accepter une semblable gageure, parce que, d'habitude, il est plus facile, en nos pays, de trouver un mois où il pleuve, qu'un mois où il y ait une éclipse de lune.

[FN: § 561-1]

Expliquer, explication, sont pris ici dans le sens d'indication de la cause, de l'origine, de la loi des phénomènes. Si, comme cela arrive quelquefois, on entendait par expliquer, explication, mettre un fait en relation avec d'autres semblables, nous ne serions plus dans le cas considéré ici, au texte, mais dans celui étudié aux § 556 et sv.

[FN: § 563-1]

P. MANSION; Calcul des probabilités « (p. 77) La déduction logique explicite, dit Newman... n'est pas ce qui nous donne la certitude dans le domaine des faits concrets [jusque là, c'est d'accord avec la science expérimentale, dans ce sens qu'il faut des prémisses expérimentales ; la logique seule ne donne rien]. Nous y arrivons, au contraire, par une accumulation de probabilités indépendantes entre elles [il y a là beaucoup de vrai] surgissant de la nature et des circonstances du fait examiné [et de nos investigations, des expériences, des observations] ; probabilités trop faibles pour agir, isolément sur notre esprit, trop fines, trop détournées pour être mises explicitement en syllogisme; trop nombreuses et trop variées d'ailleurs pour être ainsi transformées [c'est vrai en certains cas, faux en d'autres] ».

[FN: § 564-1]

P. MANSION; Calcul des probabilités : « (p. 78) Nous sommes tous certains, dit-il [Newman], sans aucune possibilité de doute, que l'Angleterre est une île. C'est là une proposition à laquelle nous donnons un assentiment complet... Nous ne craignons pas qu'aucune découverte vienne jamais ébranler notre croyance... Et cependant les arguments que nous (p. 79) pouvons faire valoir pour expliquer notre conviction sur ce point sont-ils en rapport avec l'extrême certitude que nous en avons ? On nous a dit dans notre enfance que l'Angleterre est une île ; elle est entourée par la mer sur toutes les cartes, jamais la chose n'a été mise en question devant nous [il devait ajouter : et pourtant c'était permis par les lois et les coutumes]... Mais nous n'en avons pas de preuve directe comme celui qui aurait fait le tour de l'Angleterre ; et nous n'avons peut-être même jamais rencontré quelqu'un qui l'ait fait [argument de peu de valeur : les choses que nous connaissons directement ou par témoignage direct, sont en très petit nombre en comparaison de celles dont nous avons une connaissance indirecte]. Est-ce à dire que notre conviction n'est pas raisonnable ? Nullement. Mais il est certain que nous ne pouvons que difficilement analyser d'une manière complète [et que peut- on bien faire d'une manière vraiment complète ?] les raisons de notre assentiment ».

[FN: § 583-1]

Saint Augustin distingue, il est vrai, l'autorité divine, de l'autorité humaine ; mais ensuite il montre lui-même que l'autorité divine ne nous est connue que par l'intermédiaire d'hommes et d'écrits. D. AUGUST.; De ordine, II, 9, 27 : Auctoritas autem partim divina, est, partim. humana : sed vera, firma, summa ea est quae divina nominatur. Mais il y a ces maudits démons qui induisent en erreur : In qua metuenda est aeriorum animalium mira fallacia, quae per rerum ad istos sensus corporis pertinentium quasdam divinationes, nonnullasque potentias decipere animas facillime consuerunt... Illa ergo auctoritas divina dicenda est, quae non solum in sensibilibus signis transcendit omnem humanam facultatem, sed et ipsum hominem agens, ostendit ei quousque se propter ipsum, depresserit. Humana vera suctoritas plerumque fallit... Mais comment pourrons-nous connaître l'autorité divine ? Voici la réponse : D. AUGUST.; De vera relig., 25, 46: Quid autem agatur [Deus] cum genere humano, per historiam commendari voluit, et per prophetiam. Temporalium. autem rerum fides, sive praeteritarum, sive futurarum, magis credendo quam intelligendo valet. Sed nostrum est considerare quibus vel hominibus vel libris credendum sit ad colendum recte Deum, quae una salus est.

[FN: § 585-1]

Parmi une infinité d'exemples, le suivant suffira. En Italie, le projet de donner à l'État le monopole des assurances sur la vie rencontra de l'opposition. Entre autres motifs opposés, on affirmait que les tables de mortalité employées parle gouvernement étaient inexactes. C'est là une controverse scientifique, exactement de la même nature que celle de Galilée avec l'Inquisition, au sujet du mouvement du soleil. Lorsque la loi eut été approuvée par le Parlement, toutes les controverses, même scientifiques, se trouvèrent résolues par cette approbation ; et le Giornale d'Italia, 16 septembre 1912, publiait la note suivante : « Comme on sait, le Giornale d'Italia n'a pas été favorable à la création du monopole des assurances, et fonda son opposition sur ces théories économiques que l'honorable député Nitti avait toujours affirmées avec conviction, sur d'évidentes raisons de justice, et enfin sur des considérations d'opportunité, qui devaient malheureusement peser d'un grand poids, ensuite de l'hostilité des financiers européens contre l'Italie, durant la guerre. Mais, en vertu de notre profond respect (ossequio), qui ne se démentit jamais, à l'égard des lois de l'État, notre opposition a cessé le jour même où le monopole des assurances fut approuvé par les deux branches du Parlement. Désormais l'Institut National des Assurances existe, et c'est un intérêt de l'État, c'est-à-dire de la collectivité nationale. Tous les Italiens aimant leur pays doivent donc souhaiter qu'il réponde réellement au but dans lequel l'État l'a créé : c'est-à-dire qu'il vulgarise la pratique utile des assurances, et devienne un puissant facteur de progrès économique pour notre pays », Il est impossible de trouver la moindre différence entre cette attitude et celle du catholique qui, après que le pape a prononcé ex cathedra, soumet à cette décision son jugement et sa volonté.

[FN: § 587-1]

VICTOR HENRY; Le Pars. « (p. 16) On sait que les Perses repoussent comme une affreuse profanation la crémation après décès. Ici encore, constatons l'accord de vue, que voile à peine un antagonisme tout superficiel. L'épithète courante de l'Agni védique est pavaka « le purificateur ». – Le feu est l'être pur par excellence, disent les brâhmanes : il faut donc que le corps passe par le feu et y laisse toutes ses souillures, pour que le défunt entre pur au royaume éternel de Yama ; après quoi, le feu ainsi contaminé perdra ses qualités nocives par la vertu d'une lustration rituelle. – Le feu est l'être pur par excellence, ripostent les mazdéens : qui donc oserait en outrager la sainteté, en lui infligeant l'abominable tâche de dévorer ce qu'il y a sur terre de plus immonde, un cadavre en voie de corruption ? – La mystique est coutumière de ces raisonnements poussés à l'outrance, où les extrêmes se touchent ».

[FN: § 587-2]

OLDENB.; La rel. du Veda, p. 288.

[FN: § 587-3]

SONNERAT; Voy. aux Ind. or., t. I. L'auteur observe que : « (p. 85 note) les Brames sectateurs de Vichenou croient que le feu les purifie de leurs péchés ; ceux de Chiven prétendent qu'étant consacrés au service de Dieu, ils n'ont pas besoin de passer par le feu, et que le mal qu'ils ont fait ne peut leur être imputé ; qu'il leur suffit d'être arrosés d'eau lustrale, dont ils usent en abondance ».

[FN: § 587-4]

Anth. Palat., Epigr. sepul., 162. Pline raconte que Tiridate ne voulut pas venir à Rome par mer, pour ne pas souiller l'eau par les besoins naturels de l'homme. PLIN.; Nat. Hist., XXX, 6 : Navigare noluerat, quoniam exspuere in maria, aliisque mortalium. necessitatibus violare naturam eam fas non putant.

[FN: § 587-5]

CHARDIN ; XVII : « (p. 9)... je décrirai ici le cimetière qu'ils ont proche d'Ispahan, à demi-lieue de la ville, dans un lieu fort écarté. C’est une tour ronde, qui est faite de grosses pierres de taille ; elle a environ trente-cinq pieds de haut, et quatre-vingt-dix pieds de diamètre, sans porte et sans entrée... Quand ils portent un mort dans ce tombeau, trois ou quatre de leurs prêtres montent avec des échelles sur le haut du mur, tirent le cadavre avec une corde, et le font descendre le long de ce degré... (p. 10) Il y a... une manière de fosse au milieu, que je vis remplie d'ossements et de guenilles. Ils couchent les morts tout habillés sur un petit lit... Ils les rangent tout autour contre le mur, si serrés qu'ils se touchent les uns les autres... (p. 11) J'y vis des corps encore frais ; il n'y avait rien de gâté aux mains et aux pieds, qui étaient nus ; mais le visage l'était beaucoup, à cause que les corbeaux qui remplissent le cimetière, et qui sont par centaines aux environs, se jettent d'abord sur cette partie. À cinquante pas de ce sépulcre, il y a une petite maison de terre... d'où le principal prêtre se met à observer par quel endroit et comment les corbeaux entameront ce corps. Comme il y en a toujours beaucoup autour de ce cimetière, à cause des cadavres qui y sont exposés à découvert, il ne manque point d'en venir fondre bientôt quelqu'un dessus, et de s'attacher d'abord aux yeux, à ce que l'on assure, comme une partie délicate, que ces oiseaux carnassiers aiment plus que le reste. Le prêtre, qui fait ses observations par un petit trou, pour ne pas effaroucher l'oiseau funèbre, prend garde à quel œil il touche le premier, et dans quelles circonstances ; et il en tire ses conjectures, tant pour la condition du défunt dans l'autre vie que pour la fortune de ses enfans et de ses héritiers dans celle-ci. Le côté droit est dit-on le bon côté... C'est ce que l'on assure généralement dans tous les pays où il y a des Guèbres ; mais j'en ai vu quelques-uns qui m'ont pourtant nié toute cette magie ou superstition ».

[FN: § 594-1]

Restreintes aujourd'hui à la métaphysique et à ses appendices en science sociale, les controverses sur ces correspondances des concepts avec la réalité objective étaient autrefois en grand usage dans les sciences naturelles : la géographie même fut affectée de cette maladie.

STRAB. ; 1, 4, 7-8, p. 66-67, cite Ératosthène, qui estimait vaines et frivoles les disputes ayant pour but de fixer avec précision les limites des continents, parce que là où il n'y a pas de termes précis, on ne peut diviser la terre avec précision. Mais Strabon le gourmande et lui dit entre autres :

; «Qui est-ce qui, comptant trois parties et nommant chacune des parties, ne concevait pas d'abord l'entier dont il faisait ces parties ? » Il ajoute ensuite un motif passablement comique : s'il y a deux princes, dont l'un prétend posséder toute la Lybie, l'autre toute l'Asie, il faut décider à qui appartiendra la basse Égypte. Voilà un joli cas d'amnésie. Strabon, qui vivait au temps de l'empire romain, aurait pu se rappeler que ces controverses se résolvent par les armes, et non par les raisonnements des géographes.

[FN: § 597-1]

KANT; Principes métaphysiques de la Morale, trad. Tissot, Paris 1854, 3e éd.

[FN: § 599-1]

DESCARTES; Disc. de la méth., IVe partie.

[FN: § 601-1]

SPINOZA. : Les princ. de la phil. de Desc., IIe partie, prop. XI ; scolie.

[FN: § 605-1]

Acta et dec. sacr. oecum. conc. vat., c. II : Eadem sancta mater Ecclesia tenet et docet, Deum, rerun omnium principium et finem, naturali humanae rationis lumine e rebus creatis certo cognosci posse ; ... attamen placuisse eius sapientiae et bonitati, alia, eaque supernaturali via, se ipsum ac aeterna voluntatis suae decreta humano generi revelare...

[FN: § 605-2]

Acta et dec. sacr. oecum. conc. vat., c. IV : (p. 134) De fide et ratione. Hoc quoque perpetuus Ecclesiae catholicae consensus tenuit et tenet, duplicem esse ordinem cognitionis, non solum principio, sed obiecto etiam distinctum : principio quidem, quia in altero naturali ratione, in altero fide divina cognoscimus, obiecto autem, quia praeter ea, ad quae naturalis ratio pertingere potest, credenda nobis proponuntur mysteria in Deo abscondita, quae, nisi revelata divinitus, innotescere non possunt. ...(p. 135) Verum etsi fides sit supra rationem, nulla tamen unquam inter fidem et rationem vera dissensio esse potest. Et voici le motif a priori pour lequel cela doit être : cum idem Deus, qui mysteria revelat et fidem infundit, animo humano rationis lumen indiderit ; Deus autem negare seipsum non possit, nec verum vero unquam contradicere. Et nous voilà de nouveau dans les tautologies. Personne ne dit que le vrai peut contredire le vrai ; mais on dit que l'une des deux choses réputées vraies ne l'est pas. Toutes ces explications sont d'ailleurs inutiles pour qui admet que Dieu est tout puissant : il suffit de dire que Dieu l’a voulu ainsi. Pourquoi donc ces subtilités ? Parce que l'homme a un besoin de logique qu'il faut satisfaire d'une façon quelconque : (p. 135) Neque solum fides et ratio inter se dissidere nunquam possunt, sed opem quoque sibi mutuam ferunt, cum recta ratio fidei fundamenta demonstret, eiusque (p. 136) lumine illustrata rerum divinarum scientiam excolat... (p. 139) Canones, III, De Fide, 3. Si quis dixerit. revelationem, divinam externis signis credibilem fieri non posse, ideoque sola interna cuiusque experientia aut inspiratione privata homines ad fidem moveri debere ; anathema sit.

[FN: § 606-1]

D. THOM.; De ver. cath. fid. contra Gentiles, I, proem., 7, 1. Ea enim, quae naturaliter rationi sunt insita, verissima esse constat, in tantum ut nec ea esse falsa sit possibile cogitare [c'est là le principe de toute métaphysique, sans lequel elle ne peut subsister] ; nec id quod fide tenetur, cum tam evidenter divinitus confirmatum sit, fas est credere falsum [mais les incroyants nient justement que Dieu ait évidemment confirmé ce que les croyants admettent]. Quia igitur solum falsum vero contrarium est, ut ex eorum. diffinitionibus inspectis manifeste apparet, impossibile est illis principiis, quae ratio naturaliter cognoscit, praedictam veritatem fidei contrariam esse.

[FN: § 608-1]

TERTULL.; Apolog., II.

[FN: § 608-2]

D. THOM. ; Summa theol., IIa IIae. q. CLIV, 2, 1. Quia apud gentiles fornicatio simplex non reputabatur illicita propter corruptionem naturalis rationis ; Iudaei, autem ex lege divina instructi, eam illicitam reputabant.

[FN: § 611-1]

PIEPENBRING; Théol. de l’anc. test.: « (p. 22) Si cette idée que Jéhova seul est le Dieu d'Israël et que les Israëlites ne doivent point adorer d'autres dieux, peut être ramenée à Moïse, nous ne pouvons pas faire remonter jusqu'à lui le monothéisme absolu, qui n'apparaît sûrement en Israël que beaucoup plus tard. Nous voyons, en effet, que non seulement le peuple, mais les rois et Salomon lui-même, qui avait fait construire un temple à Jéhova, s'adonnaient au culte des dieux étrangers ou le favorisaient. Cela prouve qu'ils attribuaient une existence réelle à ces dieux... (p. 94) Schultz dit avec raison que, en vertu du réalisme puissant de l'antiquité, l'impression première ne pouvait pas être que les dieux étrangers n'étaient que des produits de l'imagination... ». On comprend que, pour Piepenbring, le seul vrai Dieu est celui d'Israël, et que les autres sont faux ; mais on comprend moins comment il croit pouvoir le prouver en repoussant l'origine surnaturelle de la Bible. Si nous devons nous en tenir à l'expérience interne, pourquoi celle de Piepenbring vaut-elle mieux qu'une autre, qui donne des conclusions opposées ?

[FN: § 612-1]

Theaet., p. 153.

[FN: § 612-2]

PLAT.; Crito, p. 44. Socrate, parlant du plus grand nombre, en dit :

« Puisqu'ils ne peuvent faire que quelqu'un soit sage ou inintelligent, ils agissent au hasard ».

Si le Lachès n'est pas de Platon, il exprime d'autre part des idées platoniciennes, et cela nous suffit. Dans ce dialogue, Socrate dit d'une manière claire et nette qu'on ne doit pas prendre garde au jugement du plus grand nombre. Lachès, p. 184. « Socrate. Donnerais-tu ton assentiment à ce que le plus grand nombre d'entre nous louerait, Lysimaque ? – Lysimaque. Que pourrais-je faire d'autre, Socrate ? – Toi aussi, Mélésias, tu le ferais ? Si tu voulais prendre conseil au sujet des exercices gymnastiques de ton fils, accorderais-tu ta confiance à la majorité d'entre nous, plutôt qu'à une personne formée et exercée par de bons maîtres ? – Mélésias. J'accorderais ma confiance à ceux-ci, Socrate. » ... « Socrate : Je pense, en effet, qu'il convient de juger suivant la science et non d'après le nombre, si l'on veut juger correctement ».

[FN: § 612-3]

RITTER ; Hist. de la Philosophie, t. II. « (p. 185)... il [Platon] conseillait de s'en tenir à ce qui, dans l'opinion, semble devoir être regardé comme légitime, afin de le soumettre ensuite à un examen sévère pour en faire le commencement de la philosophie. Platon considère les déterminations d'idées données dans l'opinion comme un commencement convenable pour la recherche philosophique ».

[FN: § 615-1]

Les théories qu'expose LUCRÈCE, suivant celles d'Épicure, n'ont que peu ou point de valeur expérimentale ; mais il y a du vrai dans ce qu'en dit Lucrèce, spécialement s'il s'agit, non des théories d'Épicure, seules, mais des doctrines philosophiques en général ; 1.I :

(63) Humana ante oculos fede quom vita iaceret
In terris, oppressa gravi sub Religione,
.............................................
(67) Primum Graius homo mortaleis toliere contra
Est oculos ausus primusque obsistere contra :
.............................................
Quare Religio, pedibus subiecta, vicissim.
Obteritur, nos exaequat victoria coelo.

« Quand on voyait la vie humaine se traîner à terre, lourdement opprimée sous la Religion... Un Grec, le premier, homme mortel, osa lever les yeux contre elle, et, le premier, lui résister... C'est pourquoi la Religion, jetée sous les pieds, fut à son tour foulée, et la victoire nous égala au ciel » .

[FN: § 618-1]

V. PARETO; Le mythe vertuiste.

[FN: § 618-2]

C'est ainsi que plusieurs Italiens ont dû vivre à l'étranger. En Prusse, les socialistes sont exclus de l'enseignement universitaire. En France, les hérétiques de la religion radicale- humanitaire sont persécutés de toute façon. C'est ainsi qu'on refusa une chaire au Père Scheil. J. Morgan, qui est l'une des meilleures autorités en fait d'assyriologie, dit de lui : « À peine compte-t-on aujourd'hui, en Europe, quatre ou cinq de ces savants [des assyriologues] dont l'opinion fasse autorité et, parmi eux, est V. Scheil que j'ai la bonne fortune et l'honneur d'avoir pour collaborateur dans mes travaux en Perse. Son nom restera à jamais attaché à sa magistrale traduction des lois de Hammourabi et au déchiffrement des textes élamites, tour de force accompli sans l'aide d'un bilingue ». (Les premières civilisations : p. 36). On refusa à ce savant la chaire d'assyriologie au Collège de France, sous prétexte qu'étant un religieux, il n'aurait pas eu l'impartialité nécessaire pour traiter les matières qui ont rapport avec les études bibliques. Mais ensuite, sans se préoccuper le moins du monde de la criante contradiction, on oublia un semblable prétexte, afin de pourvoir de la chaire d'histoire des religions l'ex-abbé Loisy, connu spécialement par sa violente polémique contre le catholicisme. Il ne peut donc y avoir doute que dans ces deux cas parallèles, on ait voulu punir l'adversaire et récompenser l'ami qui désertait le camp ennemi, Mme Curie fut repoussée par l'Académie des Sciences, pour des motifs qui n'avaient rien de scientifique.

[FN: § 619-1]

SUMNER MAINE; Ancient Law, trad. COURCELLE SENEUIL, c. 1. L'auteur affirme que la poésie homérique contient l'indication des formes primitives des concepts juridiques. (p. 3) « Si nous pouvons parvenir à déterminer les formes primitives des concepts juridiques, ce sera au moyen de ces poèmes (a) ; les idées rudimentaires du droit sont pour le juri-consulte ce que les couches primitives de la terre sont pour le géologue (b) : elles contiennent en puissance toutes les formes que le droit a prises plus tard (c). La légèreté ou les préjugés qui se sont opposés à ce qu'on les examinât sérieusement, doivent porter le blâme de la condition peu satisfaisante dans lequel se trouve la science du droit (d) . En réalité, les recherches du juriste sont conduites comme l'étaient celles du physicien et du physiologue, lorsque l'observation n'avait pas encore remplacé l'affirmation hypothétique (e). Des théories plausibles et intelligibles (f), mais sans vérification d'aucune sorte, comme celle du droit naturel ou du contrat social (g), sont généralement préférées à de sérieuses recherches sur l'histoire primitive de la société et du droit (h) ; et elles obscurcissent la vérité, non seulement en éloignant l'attention du point où la vérité se trouve, mais par l'influence très réelle et très importante qu'elles exercent sur les développements postérieurs de la jurisprudence, lorsqu'on les a une fois acceptées et qu'on y croit (i) »

Ce passage renferme un mélange d'assertions en accord avec les faits et d'autres qui ne le sont pas. Il sera utile de les séparer, parce que cet exemple s'appliquera à d'autres cas analogues. Nous allons le faire en présentant les observations suivantes. (a) Affirmation douteuse. Les poèmes homériques furent très remaniés. Il y a maintenant des personnes qui prétendent qu'ils ne sont pas du tout archaïques. Voir : MICHEL BRÉAL ; Pour mieux connaître Homère. L'auteur résume ainsi le but de son ouvrage : (p. 5) « Je voudrais essayer de montrer que l'épopée grecque appartient à un âge de l'humanité qui est déjà loin de l'enfance, et qu'elle représente une civilisation nullement commençante ». J'avoue que je ne suis pas du tout persuadé par les raisonnements de l'auteur ; mais d'autres pourraient l'être. Ce serait donc sur des fondements peu solides que Sumner Maine voudrait édifier exclusivement la science du droit. Cette observation est générale et s'applique à tous les cas dans lesquels on veut expliquer ce qui est bien connu par ce qui l'est moins. (b) Admettons-le ; mais poursuivons l'analogie. Toute l'histoire de la terre ne peut pas nous faire connaître la composition des roches ; il faut que la chimie intervienne (c) They contain, potentially, all the forms in which law has subsequently exhibited itself. Cette expression : potentially est purement métaphysique ; elle vient entacher un raisonnement que l'auteur donne comme étant seulement expérimental. (d) Cela est juste et vrai aussi pour l'économie et la sociologie. (e) Idem. (f) Intelligibles oui, parce qu'en accord avec les sentiments, mais pas avec l'expérience. L'auteur aurait fait cette distinction très importante, si, au lieu de ne s'arrêter qu'à la méthode historique, il avait pensé à la méthode expérimentale. (g) Ce n'est pas seulement que la vérification manque, mais les termes employés ne correspondent à rien de réel. L'auteur a été induit en erreur comme en (f) (h) Il faut dire : « sont préférées à de sérieuses recherches expérimentales ». (i) Très juste, si l'observation se rapporte à la méthode expérimentale.

[FN: § 620-1]

TERTULL. ; Apol., XX : Plus iam offerimus pro ista dilatione maiestatem seripturarum, si non vetustate divinas probamus, si dubitatur antiquitas. [La preuve de l'antiquité, pour donner de l'autorité] ... ... Coram sunt quae docebunt, mundus et saeculum et exitus. Quicquid agitur, praenuntiabaturm; quicquid videtur, audiebatur [comme d'habitude, les preuves font défaut, car celles qui suivent n'en sont certes pas]. Quod terrae vorant urbes, quod insulas maria fraudant, quod externa atque interna bella dilaniant, quod regnis regna compulsant, quod fames et lues et locales quaeque clades et frequentiae plerumque mortium vastant, quod humiles sublimitate, sublimes humilitate mutantur... Il en coûtait peu de prédire des choses fréquentes en ces temps-là. Apollon avait été plus précis : il avait prophétisé les défaites de Crésus et de Pyrrhus, et beaucoup d'autres beaux événements.

[FN: § 620-2]

DRAPER ; Les conf. de la se. et de la rel. « (p. 48) La plus étrange partie de tout ce présomptueux système [la science chrétienne] était encore sa logique et la nature de ses preuves. Celles-ci reposaient toujours sur le miracle. On supposait un fait prouvé par quelque fait extraordinaire mais différent ! Un écrivain arabe, parlant de cela, dit : « Si quelqu'un m'affirme que trois sont plus que dix et ajoute : en preuve de ceci, je vais changer ce bâton en serpent ; je peux admirer son adresse, mais je ne serai certainement pas convaincu ». Et cependant, pendant plus de mille ans, ce fut là la logique courante acceptée dans toute l'Europe. Des propositions absurdes étaient acceptées sur des preuves non moins absurdes ».

[FN: § 623-1]

GALLUPPI ; Elementi di teol. nat. § 43. – Dict. encycl. de la théol. cath., s. r. Foi, IX, : « (p. 32) Voyons donc quelle est la série des faits, quelle est la masse des motifs, quelle est l'armée de témoins qui fondent la conviction du Chrétien affirmant que Jésus de Nazareth est l'envoyé de Dieu, est Dieu même. Ce sont les prophéties, les miracles, l'expérience personnelle de chaque Chrétien [tautologie : celui qui croit tient pour valable ce qu'il croit], l'histoire générale du monde ». Les prophéties et les miracles sont une concession à l'expérience, « Cependant la foi des Chrétiens a encore une base qui surpasse par sa profondeur et son étendue toutes les autres [preuve métaphysique, supérieure à l'expérience, par sa nature propre] : c'est l'expérience intime de la vérité que fait en lui-même tout homme qui suit la doctrine évangélique et les ordonnances du ciel ». Et voici que les modernistes retournent maintenant cette preuve contre les catholiques, qui, pour se défendre, doivent faire appel à la tradition et à l'histoire. L'impératif catégorique est aussi le produit « de l'expérience » que fait en lui-même tout homme qui suit la doctrine kantienne et les ordres de la raison pure ; mais il ne prouve rien à qui ne se soucie ni de Kant ni de sa raison pure. Une autre superbe tautologie est la suivante: « L'histoire. Le terme de cette certitude est l'unité de la doctrine chrétienne, et cette doctrine une s'établit pendant deux siècles, à travers des obstacles sans nombre... ». Personne ne peut nier qu'en tout temps il y a eu des divergences d'opinions entre les chrétiens ; mais si nous appelons orthodoxe une de ces opinions, et les autres hérétiques, nous pourrons affirmer l'unité de la foi,.. parce que nous aurons préalablement exclu ce qui la rendait multiple.

[FN: § 624-1]

J. CALVIN ; Inst. de la relig. chrest., I, 7, 5 : « (t. I, p. 26) Ainsi que ce poinct nous soit résolu, qu'il n'y a que celuy que le sainct Esprit aura enseigné, qui se repose en l'Escriture en droicte fermeté : et combien qu'elle porte en soy sa créance pour estre reçue sans contredit, et n'estre submise à preuves et argumens [nous sommes donc bien en dehors du domaine logico-expérimental] : toutesfois que c'est par le tesmoignage de l'Escriture qu'elle obtient la certitude, qu'elle mérite. Car jà soit qu'en sa propre majesté [et s'il y a des gens qui ne la voient pas !] elle ait assez dequoy estre révérée : neantmoins elle commence lors à nous vrayment toucher, quand elle est scellée en nos coeurs par le Sainct Esprit [il pouvait dire sans tant de longueurs : y croit qui y croit!]. Estans donc illuminez par la vertu d'icelay, desjà nous ne croyons pas ou à nostre jugement, ou à celuy des autres, que l'Escriture est de Dieu : mais par-dessus tout jugement humain nous arrestons indubitablement qu'elle nous a esté donnée de la propre bouche de Dieu, par le ministère des hommes. ...Nous ne cherchons point ou argumens ou véri-similitudes, ausquelles nostre jugement repose : mais nous luy submettons nostre jugement et intelligence, comme à une chose eslevée par-dessus la nécessité d'être jugée ». Qu'il est donc prolixe, ce brave homme ! Il pouvait dire tout cela en beaucoup moins de mots ; mais il en emploie un grand nombre, parce que c'est une musique qui plaisait à ses lecteurs.

[FN: § 624-2]

J. GOUSSET; Théol. dogmat., t. I : « (p. 156, § 281) Ire Règle. L'Écriture doit être interprétée, non par la raison (p. 157) seule, comme le prétendent les sociniens et les rationalistes modernes ; ni par des révélations immédiates, comme l'ont rêvé quelques sectaires enthousiastes ; ni par un secours spécial et individuel du Saint-Esprit, donné à chaque particulier, comme le veulent les luthériens et les calvinistes, mais suivant l'enseignement de l'Église catholique ». C'est-à-dire qu'on substitue l'autorité au principe métaphysique. Tous deux sont étrangers à la science logico-expérimentale.

[FN: § 624-3]

J. CALVIN ; Inst. de la relig. chrest., I, 8, 4 « (t. I, p. 25) Néantmoins ceux qui veulent et s'efforcent de maintenir la foy de l'Escriture par disputes pervertissent l'ordre. Il est vray qu'il y aura tousjours assez de quoy rembarrer les ennemis ; et de moy... toustefois si j'avoye à désmesler ceste querele avec les plus fins contempteurs de Dieu qu'on pourroit trouver, et qui appètent d'estre veus bons cavillateurs, et fort plaisanteurs en renversant l'Escriture, j'espère qu'il ne me seroit pas difficile de rabatre tout leur caquet : et si c'estoit un labeur utile de réfuter toutes les faussetez et malices, et je n'auroye pas grand'peine à monstrer que toutes leurs vanteries qu'ils ameinent en cachete ne sont que fumées ». Ibidem : « (p. 25, § 4) ... Il est bien vray que quand je voudroye débatre ceste cause par raisons et argumens, je pourroye produire en avant plusieurs choses pour approuver que s'il y a un Dieu au ciel, c'est de Luy que la Loy et les Prophéties sont sorties. Mesmes quand tous les plus savans et les plus habiles du monde se lèveroyent à l'encontre, et appliqueroyent tous leurs sens pour se faire valoir à l'opposite, toutesfois sinon qu'ils fussent endurcis à une impudence désespérée, on leur arrachera ceste confession, qu'on voit par signes manifestes que c'est Dieu qui parle par l'Escriture... ». Ainsi l'on prouve ce qu'on veut. Ceux qui ne pensent pas comme Calvin, sont « endurcis à une impudence désespérée » ; de quoi il résulte à l'évidence que tous les hommes qui ne sont pas si impudents pensent comme lui. Et il y a des gens qui admirent ces raisonnements !

[FN: § 625-1]

Dans le seul chapitre dont les citations précédentes sont tirées, nous trouvons : I, 7, 1 : (p. 23) ... ainsi ces vileins sacriléges ne taschans sinon à eslever une tyrannie desbordée sous ce beau tiltre d'Eglise... (2) Or tels brouillons... C'est doncques une resverie trop vaine d'attribuer à l'Eglise puissance de juger l'Escriture… Quant à ce que ces canailles (sic!) demandent dont et comment nous serons persuadez que l'Escriture est procédée de Dieu... (8)... il est aisé d'apercevoir combien telle application est sotte et perverse... (p. 25, § 4)... Mais encore que nous ayons maintenu la sacrée Parole de Dieu contre toutes détractions et murmures des meschans... ». Et, au chapitre suivant (I, 8) : « (p. 81, § 8) Je sais bien qu'ont accoustumé de gazouiller certains brouillons... (9) Ce que ces canailles amènent du livre des Machabées... ». De même, le sénateur Bérenger dénonce au procureur de la République les adversaires qu'il n'est pas en mesure de réfuter.

[FN: § 627-1]

G. FULLIQUET ; Les exp. du chr., : « (p. 202) Seulement, les nécessités de l'époque de la Réformation et l'obligation de soutenir la polémique catholique ont amené les Réformateurs à insister beaucoup sur la valeur de la Bible, seule autorité suffisante, assez reconnue des adversaires pour pouvoir être opposée à l'autorité ecclésiastique de la tradition [ici l'auteur refait un peu l'histoire à sa façon]. En apparence les Réformateurs se bornent à substituer la Bible à l'Église sans changer la conception catholique de la foi : acceptation et maintien de doctrines par confiance, non plus en l'Église, mais en la Bible… La foi n'est pas plus la confiance en la Bible qu'elle n'était la confiance en l'Église. La foi n'est pas acceptation de doctrines. La foi c'est la confiance du cœur en Dieu et en Christ. (p. 203) Seulement, pour la foi, la Bible a un rôle essentiel à jouer : la Bible met à notre portée les expériences religieuses dans la personne des serviteurs de Dieu, qui les ont trouvées dans le passé ; ... la Bible reste à jamais, non l'autorité, ce qui en ce domaine ne signifie rien, mais l'influence souveraine en matière de foi. Mais la Bible n'a aucune autorité quelconque en matière de croyance [c'est ainsi qu'on se débarrasse des contradictions, hélas! importantes et nombreuses, entre l'Écriture Sainte et les faits], car la croyance n'est jamais et ne peut être que l'expression des expériences de la foi, de la vie de la foi ». Cette obstination à nommer expérience ce qui n'a rien de commun avec l'expérience des sciences naturelles a pour but, peut-être à l'insu de celui qui emploie ce terme, de faire tourner à son profit les sentiments d'approbation qui, à notre époque, entourent l'étude des sciences naturelles.

[FN: § 628-1]

PIEPENBRING; Théol. de l'anc. Test.

 


 

Notes du Chapitre V. – Les théories pseudo-scientifiques (§633 à §841), pp. 345-449

[FN: § 639-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Le droit est l'une des disciplines les plus riches en raisonnements de cette sorte. Un des meilleurs exemples qu'on y puisse trouver est l'abondante littérature consacrée à l'étude de la cause dans les contrats. PLANIOL. Traité élém. de dr. civ., t. II, IIIe part., chap. IV, fait justice de la doctrine française, mais ne semble pas voir pourquoi toutes ces discussions sont oiseuses. Il résume ainsi son opinion : « (p. 352, N° 1037). La théorie de la cause, telle que la doctrine française l'a construite a un double défaut : 1° elle est fausse, au moins dans deux cas sur trois ; 2° elle est inutile ». On n'a jamais eu de peine à trouver en défaut n'importe laquelle de ces théories sur la cause des contrats : elles sont toutes éphémères ; mais la persistance avec laquelle on les rajeunit montre la ténacité des conceptions métaphysiques, en droit.

[FN: § 647-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Voir entre autres : Grand Larousse illustré, s. r. Tartufe.

[FN: § 647-2]

E. FOURNIER ; L'esprit des autres.– Ibidem – « (p. 36) J'en connais qui se fâcheraient tout rouge si j'allais leur soutenir que tel vers n'est pas de leur cher Despréaux. Dites, par exemple, à l'un ou l'autre de ces routiniers opiniâtres, que le vers célèbre

La critique est aisée, et l'art est difficile

n'est pas dans l'Art poëtique, et vous verrez la belle querelle qu’ils vous feront. Ils égrèneront vers par vers les quatre chants du (p. 37) poème, voire toutes les œuvres du poëte, et non seulement ils ne trouveront pas celui qu'ils cherchent, mais ils en découvriront même certains au passage qui en sont la contre-partie... N'importe, ils ne s'avoueront pas battus pour si peu, et soutiendront de plus belle que leur vers chéri est de Boileau, et qu'il est dans l'Art poëtique... parce qu'il devrait y être ».

[FN: § 647-3]

Cité de FOURNIER; L'esprit dans l'histoire. L'auteur ajoute dans une note : « D'après le compte-rendu du Journal des Débats du même jour (10 mars 1833), M. de Montlosier fit un signe affirmatif. – Les Mémoires de Bailly, publiés en 1804, t. I, p. 216, ne rapportent les paroles de Mirabeau, ni comme on les répète ordinairement, ni comme elles sont reproduites ici. Les Éphémérides de Noël, au contraire (Juin, p. 164), consacrent dès 1803 la version donnée par M. de Dreux-Brézé ».

[FN: § 648-1]

DUGAS-MONTBEL : Obs. sur l'Iliade : « III, 8-9. Platon, dans sa République... cite, en y faisant un léger changement, le vers 8... Il est probable que Platon citait de mémoire. Cependant, on peut supposer aussi qu'alors le texte d'Homère n'était pas précisément ce qu'il est aujourd'hui. Au reste, Strabon, qui cite le vers 8, et Aulu-Gelle, qui cite les vers 8 et 9, donnent l'un et l'autre des textes conformes à nos éditions. – IV, 431. J'ai déjà fait observer que Platon, qui sans doute citait Homère de mémoire, liait le commencement de ce vers au vers 8 du IIIe chant de l'Iliade. – IX, 591-4. Aristote, en rapportant ce passage, ne le donne pas exactement tel qu'il se trouve dans nos éditions... Il est possible que l'Homère d'Aristote différât dans ce passage de celui que nous avons aujourd'hui... Cependant, je crois qu'ici la différence entre les deux textes tient à ce qu'Aristote citait de mémoire, comme nous l'avons dit de Platon ».

[FN: § 649-1]

Parmi tant d'exemples qu'on pourrait donner, le suivant suffira : HAGENMEYER ; Le vrai et le faux sur Pierre l'Hermite : « (p. 2) Lorsqu'on a sous la main, d'une part des documents [de l'histoire des Croisades] attribués à des auteurs des XI, et XII, siècles, que l'on doit considérer comme des sources provenant de témoins oculaires, et d'autre part une relation des mêmes faits écrite à une époque postérieure, il suffit de les rapprocher pour s'apercevoir que souvent la tradition a été complètement dénaturée ; c'est un fait dont chacun peut faire l'expérience ; il n'est même pas rare que, sous les ornements légendaires dont est surchargé le récit moderne, on ait peine à retrouver la relation primitive, et si l'on est réduit à lui seul, il devient bien difficile d'y retrouver le fonds de vérité historique qui s'y trouve contenu ».

[FN: § 649-2]

Recueil des historiens des Croisades; Historiens orientaux, t. V.

[FN: § 652-1]

Observations upon the Prophecies of Daniel and the Apocalypse of St. John - In two parts – By Sir ISAAC NEWTON – London ; J. Darby and Browne in Bartholomew Close ; 1733. L'auteur dit que Daniel est facile à comprendre : ...amongst the old Prophets, Daniel is most distinct in order to time, and easier to be understood (p. 14). – C'est ainsi qu'il prédit clairement la destruction de l'empire romain ; (cap. VI) On the ten Kingdoms represented by the horns of the fourth Beast.

Now by the war above described the Western Empire of the Romans, about the time that

Rome was besieged and taken by the Goths, became broken into the following ten Kingdoms.

1. The Kingdom of the Vandals and Alans in Spain and Africa.
2 « ... « Suevians in Spain.
3. « ... « Visigots.
4 « ... « Alans in Gallia.
5. « ... « Burgundians.
6. « ... « Franks
7. « ... « Britains.
8 « ... « Hunns.
9. « ... « Lombards.
10. « ... « Ravenna.

Seven of these Kingdoms are thus mentioned by Sigonius... and the Franks, Britains, and Lombards, and you have the ten : for these arose about the same time with the seven (p. 46-48).

[FN: § 652-2]

P. OROSII Hist. ad. pag., I, II : Item anno ante Urbem conditam DCCLXXV [admirez quelle précision !] inter Danai atque Aegypti fratrum filios quinquaginta parricidia una, nocte commissa sunt. I, 17 : At vero ante Urbem conditam CCCCXXX anno raptus Helenae, coniuratio Graecorum et concursus mille navium, dehinc decennis obsidio ac postremo famosum Troiae excidium praedicatur. – CLEM. ALEX.; Strom., I, 21, a de belles et nombreuses connaissances en chronologie ! Par exemple, sous Lyncée, on a le rapt de Proserpine, la fondation du temple d'Éleusis, l'agriculture de Triptolème, l'arrivée de Cadmus à Thèbes, le règne de Minos ; et il continue à citer des dates fantaisistes.

[FN: § 653-1]

LARCHER; Hist. d’Her., t. VII – Idem (p. 576) Les femmes de Lemnos, outrées de la préférence des Lemniens pour leurs concubines, massacrent leurs maris. Années av. J. C. 1355... Œdipe, fils de Laïus, épouse Jocaste sa mère, sans la connoitre, et monte sur le trône. Années av. J. C. 1354 ». Et ainsi de suite.

[FN: § 654-1]

Guill. le Bret., apud GUIZOT. Puis notre auteur dit : « (p. 185) Francion, avec son peuple, parvint jusqu'au Danube, bâtit une ville, appelée Sicambrie, et y régna... Deux cent trente ans s'étant écoulés, vingt-trois mille d'entre eux les quittèrent. [Quel savant auteur ! Il sait l'année de l'émigration et le nombre des émigrants !], sous la conduite d'Hybor... ils vinrent dans la Gaule. Là ayant trouvé un endroit très agréable et très commode sur la Seine, ils y bâtirent une ville, qu'ils appelèrent Lutèce, à cause de la bourbe qui remplissait ce lieu, et se donnèrent le nom Parisiens, de Pâris, fils de Priam, ou plutôt ils furent appelés ainsi du mot grec Parrhesia, qui signifie audace. [Cet auteur fait même de la critique historique]. Ils y demeurèrent mille deux cent soixante ans... ».

DUGAS MONTBEL ; Obs. sur l'Iliade, t. I, p. 298 (chant VI, 402-3) : « Le fameux poète Ronsard a été bien plus loin que Racine, puisqu'il suppose que ce même Astyanax, étant venu dans la Gaule, fut nommé Francion, et devint la tige des rois de France... On trouve l'origine de cette fable dans un prétendu passage de Manethon rapporté par Annius de Viterbe, lequel, dans ses notes, cite aussi l'autorité de l'historien Vincent de Beauvais, qui prétend qu'après la ruine de Troie Astyanax vint dans les Gaules, épousa la fille du roi, et succéda à son beau-père. Beaucoup de poètes n'ont pas établi leurs fictions sur d'aussi bons fondements historiques ». L'origine de la fable remonte peut-être au temps de Lucain. LUC. ; Phars. I :

(427) Arvernique ausi Latio se fingere fratres,
Sanguine ab Iliaco populi;...

Dans les fragments de Frédégaire, la fable est déjà abondante et bien agencée. FRED.; Fragm., p. 698 et sv. (p. 705 et sv.). Encore vers la fin du XVIe siècle, un homme comme Pasquier hésitait à nier de semblables absurdités. ESTIENNIE PASQUIER ; Les mémoires et recherches de la France, livre I, c. 14 : « (p. 68) Au demeurant quant aux Troyens, c'est vrayement grand merveille que chasque nation presque d'un commun consentement s'estime fort honorée de tirer son ancien estre de la destruction de Troye. En cette manière appellent les Romains pour leur premier autheur, un Aenee : les François, un Francion : les Turcs, Turcus: ceux de la grand' Bretaigne, Brutus : et les premiers habitateurs de la mer Adriatique se renomment d'un Anthenor... Quant à moy, je n'ose ny bonnement contrevenir à cette opinion, ny semblablement y consentir librement ; toutesfois il me semble que de disputer de la vieille origine des nations, c'est chose fort chatouilleuse : parce qu'elles ont esté de leur premier avenement si petites, que les vieux autheurs n'estoient soucieux d'emploier le temps à la deduction d'icelles : (p. 69 tellement que petit à petit la memoire s'en est du tout esvanouye, ou convertie en belles fables et frivoles ».

[FN: § 655-1]

Doctrin. SAINT-SIM., Expos. (p. 19) Moïse, Numa, Jésus, ont enfanté des peuples morts ou mourant aujourd'hui ».

[FN: § 658-1]

MENZERAT, dans le Bulletin mensuel de l'Institut Solvay, mai 1910. L'auteur renvoie aussi à ISAAC TAYLOR ; Words and Places, 1902. « (p. 277) Les représentations du peuple à l'égard des noms sont des plus bizarres. Ainsi l'Orange River aurait de l'eau de cette couleur, la mer rouge (traduction du lac d'Edôm) aurait de l'eau rouge ; la Floride est considérée comme la terre « pleine de fleurs », en réalité c'est la terre découverte le jour de Pâques (Pasqua Florida). La pensée populaire veut expliquer des choses qu'elle ne comprend pas ; c'est l'origine des mythes étiologiques. Ce groom anglais qui avait sous sa garde deux chevaux Otello et Desdemona, et qui les appelait Old Fellow et Thursday Morning, peut nous fournir l'exemple de ce que peut cette fantaisie. C'est naturellement toujours un individu qui trouve de semblables indications, au moins en partie. La citadelle de Carthage était Bozra (mot phénicien); les Grecs la confondaient avec = la peau de bœuf. La légende qui a suivi est connue. L'exemple classique est celui de Romulus, qui aurait fondé Rome (forme impossible au point de vue linguistique) ; ou encore celui (p. 278) d'Antwerpen (Anvers) = an de werpen (néerlandais) werf, allemand Werft) ; la légende en a fait handt werpen = la main jetée, et les armes d'Anvers ont conservé le souvenir de cette fondation légendaire. Une légende très instructive à ce point de vue est encore celle de l'évêque Hatto de Mayence, soi-disant mangé par les souris dans son bourg au milieu du Rhin, en face de Bingen ; ce bourg s'appelait Mausthurm = la tour de la douane ; le peuple en a fait Mausthurm, aujourd'hui Mâuseturm = la tour des souris. Enfin, il y a près de Grenoble une tour célèbre : la Tour sans venin, et la légende veut savoir qu'aucun animal venimeux ne peut vivre dans ses environs ; cette superstition a son origine dans l'altération : Tour de Sainte-Verena ».

[FN: § 660-1]

A. MAURY ; Croyances et légendes de l'antiquité.

[FN: § 660-2]

CLAVIER ; Bibliothèque d’Apollodore, notes, t. II (p. 49 ) L'histoire de la naissance d'Orion est racontée plus au long par le schol. d'Homère d'après Euphorion (Il., XVIII, 486), Palæphate (5), Ovide (Fastes, V, 499) et Hygin (Fab., 195, et Poet. Astron., II, 34). Jupiter, Neptune et Mercure ayant été bien reçus par Hyriéus, fils de Neptune et d'Halcyone fille d'Atlas, qui demeurait à Tanagre en Bœotie. voulurent lui donner des preuves de, leur satisfaction. Hyriéus ayant demandé un fils, ils prirent la peau du bœuf qu'il venait de leur sacrifier, et s'étant retirés à part, ils firent dans cette peau, ce que, pour me servir de l'expression d'Ovide, la pudeur défend de dire ; ils fermèrent la peau, l'enterrèrent, et Orion en sortit au bout de dix mois. On lui donna d'abord le nom d'Orion, . (Etymolog. magn., p. 823). Cette mauvaise étymologie a peut-être été le seul fondement de la fable que je viens de rapporter, qui était de l'invention des poètes modernes; car Hésiode, que Phérécydes avait probablement suivi, le disait fils (p. 50) de Neptune et d'Euryale fille de Minos (Erathostenes cataster, 3; HYGIN, poet. astron., II, 34) ».

[FN: § 661-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. VIENNET ; Épîtres et Satires, II. À l'Empereur Napoléon, sur la généalogie que ses courtisans voulaient lui faire : « Toujours la vérité sort de règle à la fable ».

[FN: § 661-2]

Larcher prend encore au sérieux les élucubrations de Palæphate. LARCHER ; Hist. d'Hérod., t. III, p. 494 (note a 1. IV, 75) « Médée (PALAEPH.; De incred., 44) introduisit en Grèce l'usage des bains chauds... L'appareil des chaudières et du feu, fit croire qu'elle rajeunissait les hommes en les faisant cuire ; et cela d'autant plus qu'elle cachoit sa méthode afin que les Médecins ne vinssent point à l'apprendre. Pélias fut étouffé par la vapeur du bain ».

[FN: § 661-2]

PALAEPH.; De incred., 20:

[FN: § 661-3]

PALAEPH. ; De incred. hist., 18. . – Pour la Chimère : 29. .

[FN: § 661-4]

HERACLITI ; De incred., 15.

[FN: § 661-5]

GROTE ;.Hist. de la Grèce, t. II : « (p., 145, note) Le savant M. Jacob Bryant estime les explications de Palæphate comme si elles étaient fondées sur des faits réels. Il admet, par exemple, la ville de Nephelê, citée par cet auteur dans son explication de la fable des Centaures. En outre, il parle avec beaucoup d'éloges de Palæphate en général : , Il (Palæphate) écrivit de bonne heure et semble avoir été, un esprit sérieux et sensé ; il voyait l'absurdité des fables sur lesquelles reposait la théologie de son pays » (Ancient Mythology, vol. I, p. 411-435) ».

« De même aussi, sir Thomas Brown (Enquiry into Vulgar Errors, liv. I, ch. 6, p. 221, édit. 1885) cite Palæephate comme ayant signalé d'une manière incontestable la base réelle des fables ».

[FN: § 663-1]

RENAN ; Vie de Jésus : « (p. LV) Dans un tel effort pour faire revivre les hautes âmes du passé, une part de divination et de conjecture doit être permise. Une grande vie est un tout organique qui ne peut se rendre par la simple agglomération de petits faits. Il faut qu'un sentiment profond embrasse l'ensemble et en fasse l'unité. La raison d'art en pareil sujet est un bon guide ; le tact exquis d'un Gœthe trouverait à s'y appliquer. La condition essentielle des créations de l'art est de former un système vivant dont toutes les parties s'appellent et se commandent ». Cette définition est celle d'un roman historique.

RENAN ; Les Évangiles : « (p. XXXIII) Dans ce volume, comme dans ceux qui précèdent, on a cherché à tenir le milieu entre la critique qui emploie toutes ses ressources à défendre des textes depuis longtemps frappés de discrédit, et le scepticisme exagéré, qui rejette en bloc et a priori tout ce que le christianisme raconte de ses premières origines ». Sur cette façon d'écrire l'histoire, voir G. SOREL; Le système historique de Renan. Tout ce livre est à lire et à étudier attentivement.

S. REINACH ; Orpheus : « (p. 332) Peut-on du moins tenter d’extraire des Évangiles les éléments d'une biographie de Jésus ? Il est contraire à toute saine méthode de composer – comme l'a fait encore Renan – une vie de Jésus, en éliminant le merveilleux des Evangiles. On ne fait pas de l'histoire vraie avec des mythes, pas plus que du pain avec le pollen des fleurs ». On ne saurait mieux dire ! Mais pourquoi l'auteur oublie-t-il cela, quand, à son tour, il veut faire de l'histoire vraie avec les légendes, et particulièrement avec les légendes qui lui paraissent appartenir au totémisme !

[FN: § 664-1]

DuRuy; Hist. des Rom., t. I. Il a dit d'abord : « (p. 1, note) Nous ne voulons pas discuter les légendes de la période royale. Le lecteur, curieux de ces sortes de jeux d'esprit, pourra consulter les premiers volumes de Niebuhr... Pour nous, aux hypothèses, quelque ingénieuses et érudites qu'elles soient, mais toujours aussi incertaines que les traditions qu'elles combattent, nous préférons l'admirable récit de Tite-Live, sinon comme vérité, du moins comme tableau ». En premier lieu, il faut s'entendre sur le but de l'auteur. S’il veut faire œuvre poétique, il fait bien de choisir le « tableau » qui lui paraît être le meilleur, et quelqu'un d'autre pourra, avec autant de raison, préférer Le Roland furieux de l'Arioste, aux légendes que préfère Duruy. Mais s'il veut écrire un ouvrage historique, il importe vraiment peu de savoir quel est le récit poétique qui plaît le plus à l'auteur ; il importe uniquement, exclusivement, de savoir quel est le récit qui se rapproche le plus des faits.

[FN: § 664-2]

Pourtant Duruy observe que « (p. 62) il serait aisé de trouver la ressemblance [de la légende de Romulus] dans d'autres traditions nationales. Ainsi, comme Romulus, Sémiramis est fille d'une déesse ; comme lui, comme Cyrus exposé dans une forêt et allaité par une chienne, elle est abandonnée dans le désert, nourrie par des colombes et recueillie par un pâtre du roi... ». De cette façon, il était sur la voie d'une classification naturelle des légendes (§ 675), et il a déjà noté un élément principal ; c'est-à-dire que les personnages éminents doivent avoir une naissance ou une origine extraordinaire. En continuant, il en pouvait relever d'autres. il dit très bien : « (p. 62) Ces légendes qu'on retrouve jusque sur les rives du Gange, dans l'histoire de Chandragupta, étaient, avec bien d'autres, le patrimoine commun des peuples de race aryenne ». Mais Duruy fait aussitôt volte-face, et, en disant que la légende de Romulus fait partie d'un cycle légendaire commun aux peuples aryens, il revient à l'interprétation historique qu'il a lui-même exclue. « (p. 62) Pour nous Romulus, que l'on rattachera, si l'on veut, à la maison royale d'Albe, sera un de ces chefs de guerre comme en ont eu (p. 63) l'ancienne et la nouvelle Italie, et qui devint roi d'un peuple auquel la position de Rome, d'heureuses circonstances... donnèrent l'empire du monde ». Non ; Romulus, Sémiramis, Cyrus, etc., ne sont que des noms par lesquels on donne une forme concrète aux sentiments dont les nombreuses légendes semblables, notées par Duruy lui-même, tirent leur origine.

[FN: § 668-1]

COMPARETTI; Virgilio nel medio evo.

[FN: § 668-2]

COMPARETTI ; loc. cit., 668-1, t. II, p. 282 à 300. Les faietz merveilleux de Virgille.

[FN: § 668-3]

Plusieurs traits de cette légende sont attribués à d'autres personnages, dans d'autres récits. Par exemple, dans l'histoire de Joseph d'Arimathie, on attribue à Ipocras l'incident de la corbeille, que suivit la vengeance ; ce fait ne diffère que par la forme. P. PARIS; Les rom. de la Table ronde, t. I : «(p. 546) L'histoire des philosophes atteste qu'Ipocras fut le plus habile de tous les hommes dans l'art de physique. Il vécut longtemps sans être grandement renommé ; mais une chose qu'il fit à Rome répandit en tous lieux le bruit de sa science incomparable ». Il arrive à Rome au moment où l'on y pleure pour mort Gaius, neveu de l'empereur Augustus César. Il s'aperçoit que la mort de Gaius n'est qu'apparente et le guérit : aussi est-il grandement honoré et choyé par l'empereur. Il s'éprend d'une dame venue de Gaule à Rome. Celle-ci feint de répondre à ses vœux, et le persuade de se mettre dans une corbeille, afin d'être tiré en haut, jusqu'à la chambre de l'objet aimé et de pouvoir en jouir. « (p. 255) La dame et sa demoiselle étaient en aguet à leur fenêtre : elles tirèrent la corde jusqu'à la hauteur de la chambre où Ipocras pensait entrer ; puis elles continuèrent à tirer, si bien que le corbillon s'éleva plus de deux lames au-dessus de leur fenêtre. Alors elles attachèrent la corde à un crochet enfoncé dans la tour, et crièrent : Tenez-vous en joie, Ipocras, ainsi doit-on mener les musards tels que vous ». Le matin, tous voient Ipocras, qui est couvert de honte. Il pourvoit ensuite à sa vengeance. Il remet à un nain sale et contrefait une herbe au contact de laquelle la belle femme devient amoureuse du nain, l'épouse et demeure avec lui. L'auteur, qui paraît n'avoir pas eu beaucoup d'imagination, copie de nouveau cette aventure, pour faire mourir son Ipocras. Dardane, neveu d'Antoine, roi de Perse, était tenu pour mort. Ipocras le guérit et, en compagnie d'Antoine, va chez le roi de Tyr dont il épouse la fille : mais celle-ci, irritée de ce mariage, finit, après diverses tentatives demeurées vaines à cause de la science de son mari, par employer cette même science et par l'empoisonner. Le roi Antoine se désespère et demande s'il y a un remède. Ipocras répond : « (p. 271) Il y en a bien un ; ce serait une grande table de marbre qu'une femme entièrement nue parviendrait à chauffer au point de la rendre brûlante. – Eh bien ! faisons l'essai et, puisque votre femme est la cause de votre mort, c'est elle que nous étendrons sur le marbre... La dame fut donc étendue sur le marbre, et, le froid de la pierre la gagnant peu à peu, elle mourut dans de cruelles angoisses, une heure avant Ipocras... ».

Le fond de ces histoires gît dans certains sentiments qu'on revêt de formes plus ou moins élégantes et ingénieuses ; puis, sur les fables ainsi construites, on met le nom d'un homme connu. Ici nous avons trois sentiments principaux : 1° le sentiment que l'homme sage ou puissant est abattu par de petites causes ; ce sentiment naît des contrastes qu'on observe souvent dans la vie ; 2° un sentiment misogyne, suivant lequel la femme est l'instrument de la ruine de l'homme sage et de l'homme puissant ; 3° le sentiment de la vengeance. Les histoires qui ont leur origine dans ces sentiments sont en nombre infini. Agamemnon, guerrier très courageux, vainqueur des Troyens, fut tué dans son bain par une faible femme ; suit la vengeance consommée par le fils. Le magicien Virgile est dupé par une simple femme, et en tire une cruelle vengeance. Le très savant Ipocras, qui guérit les morts, ne sait se garder du poison que lui a donné sa femme, mais finit par en tirer vengeance. Les noms d'Agamemnon, de Virgile, d’Ipocras ou d'autres personnages semblables sont tout à fait accessoires, et peuvent être remplacés par d'autres, à volonté. Les circonstances mêmes des faits importent peu, et varient suivant la fantaisie de l'auteur, qui imagine ou copie des légendes déjà connues.

[FN: § 671-1]

G. SOREL; Le syst. hist. de Renan, t. I : «(p. 41) L'interprétation des apocalypses devait jouer un grand rôle dans le travail que Renan voulait entreprendre en 1848 ; nous avons vu que cette interprétation devait aboutir à retrouver l'histoire sous la légende ; je ne crois pas qu'il y ait de sophisme plus dangereux que celui qui suppose une telle entreprise ; une légende peut être très précieuse pour connaître la manière de penser d'un peuple, mais elle ne peut nous fournir des faits, et ce sont des faits que Renan voulait demander aux apocalypses ».

[FN: § 671-2]

CHASSANG : Hist. du roman dans l'ant. grecque et latine « (p. 432) Qu'on parcoure seulement les chroniqueurs byzantins, on y verra partout le souvenir des anciens romans... Zonaras, par exemple, connaît l'histoire de Cyrus d'après Hérodote et d'après Xénophon, et il préfère ce dernier, parce que, dit-il, « c'est un abrégé qu'il écrit, et qu'il lui suffit de donner les récits les plus vraisemblables » , (Zonaras, III, 25). Ainsi, grâce à Zonaras, la Cyropédie qui (p. 483) pour Cicéron était un roman, fait son entrée dans l'histoire. Cédrénus, mieux inspiré, suit Hérodote; mais au récit de l'historien d'Halicarnasse, il mêle quelques fables juives ou chrétiennes. Ces fables se retrouvent avec plus de développement encore, dans J. Malalas ; il est vrai que Malalas a son autorité, et une autorité grave : c'est Jules l'Africain qui, parmi les sources où il a puisé, signale l'Histoire de la guerre entre les Samiens et Cyrus, par le sage Pythagore ! »

[FN: § 674-1]

Le Violier des Histoires romaines, ancienne traduction française des Gesta romanorum, chap. 89.

[FN: § 674-2]

SUET. ; Caesar, 81 : ... ac subito cubiculi fores sponte patuerunt... quinta fere hora progressus est : libellumque insidiarum indicem, ab obvio quodam porrectum, libellis ceteris, quos sinistra manu tenebat, quasi mox lecturus, commiscuit. – Cfr. DIO CASS. ; XLIV, 18. – PLUT. ; Caes., 63.

[FN: § 675-1]

On procède généralement de même, quand on juge les raisonnements et les théories qui ont cours dans la société ; c'est-à-dire qu'on donne la première place à l'exposition logique et à la pseudo-expérience, qui sont des parties accessoires ; tandis qu'on met à l'arrière-plan ou qu'on néglige entièrement les actions non-logiques, qui forment la partie principale du phénomène.

Le présent traité de sociologie vise à replacer ces parties dans leur ordre naturel ; c'est pourquoi nous avons commencé par l'étude des actions non-logiques ; C'est pourquoi nous avons apporté, nous apportons ici et nous apporterons de nouveau dans la suite, des exemples de l'interversion qu'on fait dans l'ordre de ces parties, jusqu'à ce que, séparées et jugées suivant leur importance, nous puissions les étudier à fond, dans les chapitres VII à X. Tant que nous n'aurons pas fait cela, nous n'aurons pas les éléments réels de l'équilibre social.

[FN: § 676-1]

CIC. ; De nat. deor ., III, 22.

[FN: § 678-1]

B. DE LACOMBE; La vie privée de Talleyrand : « (p. 197)... Témoin cette autre histoire dont Napoléon faisait encore des gorges chaudes à Sainte-Hélène (0' MÉARA ; Napoléon en exil, 1822, I, p. 413) : Talleyrand avait invité à dîner l'égyptologue Denon ; pour préparer à sa femme un sujet de conversation, il lui conseilla de parcourir un des livres de son convive; Mme de Talleyrand se trompa de volume ; elle prit, dans la bibliothèque, les Aventures de Robinson Crusoé ; elle les dévora d'une traite avec passion ; le soir venu, à table, toute pleine de sa lecture, elle n'eut rien de plus pressé que de parler à Denon de ses aventures prodigieuses : « Ah! Monsieur, par quelles émotions vous avez dû passer ! Ce naufrage ! Cette île déserte ! Et que vous deviez avoir une drôle de figure avec votre chapeau pointu ! » Le savant n'y comprenait rien et restait abasourdi. Enfin le mystère s'éclaircit ; Mme de Talleyrand l'entreprenait sur son compagnon de misère, le fameux Vendredi... Le malheur de cette anecdote, dont on a voulu tour à tour que Denon, Humboldt et un sir Georges Robinson fassent les héros, c'est qu'elle n'a pas même été inventée pour Mme de Talleyrand ; des années avant sa naissance, parait-il, les conteurs de salon la colportaient déjà : ils n'y faisaient qu'une variante : ils attribuaient le quiproquo à un abbé. Avec les historiettes qui courent sur la princesse de Bénévent, on écrirait tout un volume ».

[FN: § 678-2]

E. FOURNIER ; L'Esprit dans l'histoire.

[FN: § 678-*]

« Questions de littérature légale, p. 68. – L'homme qu'on choisit ainsi pour lui faire endosser l'esprit de tout le monde, est pour les badauds de Paris, lit-on dans la Revue Britannique )oct. 1840, p. 316), ce que la statue de Pasquin est pour les oisifs de Rome, une sorte de monument banal où chacun s'arroge le droit d'afficher ses saillies bonnes ou mauvaises » (Note de Fournier).

[FN: § 679-1]

BAYLE ; Dict. Hist., s. r. Laïs, t. III. En note : « (p. 35) On conjecture qu'il y a eu deux courtisanes nommées Lais. Celle dont je parle fut transportée à Corinthe, lorsque Nicias commandoit l'armée des Athéniens dans la Sicile, c'est-à-dire, l'an 2 de l'Olympiade 91. Elle avait alors sept ans, si nous en croyons le scholiaste d'Aristophane. Or puis que Demosthène n'osa aller à Corinthe qu'en cachette afin de jouir de Laïs ; il fallait qu'il ne fût pas un jeune Ecolier, mais un homme qui avait acquis beaucoup de réputation. On doit donc supposer que pour le moins il avait trente ans ; ainsi Laïs aurait eu alors soixante-sept ans. Il n'y a donc nulle apparence, ni que Demosthène se fût soucié de la voir, ni qu'elle lui eût demandé une grosse somme. Ce fut donc une autre Laïs qui la demanda à Demosthène. Il y a donc eu deux courtisanes nommées Laïs. La difficulté sera très-grande, quand même on supposera que Demosthène fit ce voyage de Corinthe à l’âge d'environ vingt ans ; car notre Laïs eût été presque sexagénaire... Plutarque, parlant de Laïs, fille de la concubine d'Alcibiade, dit expressément qu'elle était native d'Hyccara en Sicile, et qu'elle en fut transportée esclave. Ainsi selon Plutarque la même Laïs, qu'Athénée nomme la jeune, est celle qui était née en Sicile avant la 91 Olympiade : de sorte que si celle qui demanda une grosse somme à Demosthène, est différente de celle-ci, il faudra qu'il y ait eu trois Lais... Pour moi, au lieu d'admettre deux Laïs, j'aimerais mieux dire que les auteurs grecs, qui observoient mal la chronologie, ont appliqué à la courtisane de ce nom une aventure de Demosthène, qui concernait une autre fille de joie ».

[FN: § 689-1]

GASTON PARIS ; Légendes du moyen âge.

[FN: § 680-2]

Beaucoup de légendes du cycle de Charlemagne n'ont rien de commun avec la réalité. On lit, par exemple, dans Menagiana : « (p. 110) Une des plus grandes naïvetez qu'on ait jamais écrites, c'est dans le Roman de Galien restauré, la réception que le Roi Hugon Empereur de Constantinople, fit à Charlemagne accompagné de ses douze Pairs, et ce qui s'en suivit. Charlemagne et ses douze pairs, au retour du S. Sépulcre, passant à Constantinople, y furent reçus au palais du Roi Hugon, qui après un magnifique festin, où étaient la Reine son épouse, et les deux princes Henri et Tibère ses fils, et la belle Jaqueline sa fille, les fit conduire dans une superbe salle pour s'y reposer ». Avant de s'endormir, Charlemagne et ses pairs s'amusent à se vanter d'entreprises impossibles. Ayant appris ces vantardises, le roi Hugon contraint Charlemagne et ses pairs à les mettre à exécution. Avec l'aide du ciel, Charlemagne coupe en deux un homme entièrement armé : et ainsi de suite. Supposez qu'une histoire semblable se trouve dans Suidas, au lieu d'être dans Menagiana, et qu'elle se rapporte aux héros de la Grèce, et soyez certains qu'on n'en finirait plus de la commenter de mille manières, en y cherchant quelque réalité historique... qui n'y est certainement pas. Ôtez, si vous le voulez tout le merveilleux de cette légende ; réduisez-la au simple fait historique du passage de Charlemagne à Constantinople ; même ce fait est entièrement faux.

[FN: § 682-1]

STRAB; II, 3, 5, p. 102, Didot, 84.

[FN: § 682-2]

POLYB.; XXXIV, 2,5 (apud STRAB.; I, 2, 15, p. 23, Didot, 19).

[FN: § 684-1]

LACT.; De falsa relig., XIII, XIV. Ibidem, XI : Antiquus auctor Evhemerus, qui fuit ex civitate Messene, res gestas Iovis et caeterorum, qui du putantur, collegit, historiamque contexuit ex titulis et inscriptionibus, sacris quae in antiquissimis templis habebantur, maximeque in fano Iovis Tryphilii, ubi auream columnam positam esse ab ipso Iove, titulus indicabat : in qua columna gesta sua perscripsit, ut monimentum esset posteris reram saarum. ...Ennius in Sacra historia, descriptis omnibus, quae in vita sua gessit, ad ultimum sic aitm: « Deinde Iuppiter, postquam terram quinquies circuivit, omnibusque amicis atque cognatis suis imperia divisit, reliquitque hominibus leges ; mores frumentaque paravit, multaque alia bona fecit, immortali gloria memoriaque affectus sempiterna monimenta suis reliquit ; aetate pessum acta, in Creta vitam commutavit, et ad deos abiit : eumque Curetes, filii sui, curaverunt, decoraveruntque eum, et sepulcrum eius est in Creta, in oppido Cnoso : et dicitur Vesta hanc urbem creavisse : inque sepulcro eius est inscriptum antiquis litteris Graecis : ZAN KPONOY, id est latine : Iuppiter Saturni ». Hoc certe non poetae tradunt, sed antiquarum rerum scriptores... LYCOPHR., dans la Cassandre, 1194, fait allusion à la région où naquit Zeus. TZETZE observe sur ce vers que les savants savent que les rois portèrent le nom de Zeus et passèrent pour dieux, et qu'ils naquirent en Crète, en Arcadie, à Thèbes et en mille autres lieux – – et qu'on leur dédia des inscriptions. Nous avons le phénomène habituel des mêmes sentiments qu'on exprime de diverses manières (§ 675).

Cfr. ARNOB. ; Ad. gent., IV, 14 – D. CYPR.; De idol. vanit. : Antrum Iovis in Creta visitur, et sepulchrum eius ostenditur. D. EPIPH. ; Ancoratus, 108. Il dit de Zeus : « Dont nombre de gens connaissent le sépulcre, puisqu'en Crète, sur la montagne appelée Lasio de nos jours encore, on le montre du doigt. » – CLEM. ALEX. : Protrep., p. 24, Potter, p. 18 Paris. – Les auteurs païens en parlent aussi : CIC. ; De nat. deor., 21, 53. – LUCIAN. ; De sacrif., 10. – STAT. ; Theb., 1, 278-279. – LUCIAN. ; Phars., VIII, 872. – CALLIMAQUE ; In Iov., 1-9, taxe de mensongers de semblables récits : « Zeus, les uns disent que tu es né sur le mont Ida [en Crète], les autres en Arcadie. Qui, ô père, est menteur ? Les Crétois mentent toujours. En effet, à toi, maître, ils t'ont construit un sépulcre ; tu n'es pas mort : tu es éternel ».

[FN: § 687-1]

A. DARMESTETER; La vie des mots. Parlant de la qualité d'un objet, qui sert à lui donner un nom, l'auteur dit: « (p. 41) Chose curieuse, cette qualité n'a nullement besoin d'être essentielle et vraiment dénominative. Ainsi cahier est, étymologiquement, un groupe de quatre choses (ancien français, caier, caern, cadern, du latin quaternum, groupe de quatre - S. e. feuillets)... (p. 42) La confiture est tout simplement une préparation (confectura). « Le chapelet n'est autre chose qu'une petite couronne (de chapel, chapeau, guirlande) ». – R. TÖPFFER ; Nouv. voy. en zizag, Voy. à la grande Chartreuse : « (p. 10) Nous l'avons déjà dit, faites vivre ensemble, voyager ensemble, pendant quelques jours seulement, une société de gens, et vous verrez toujours se former des mots et des acceptions de mots exclusivement propres à cette société, et cela si certainement, si naturellement, qu'en vérité, au rebours de ce que pensent les doctes, il paraît bien plus difficile d'expliquer comment il pourrait se faire qu'un langage ne naquit pas là où des hommes vivent ensemble, qu'il ne l'est de se figurer comment il y naît ».

[FN: § 688-1]

INST. IUSTIN.: I, 3, 3 : Servi autem ex eo appellati sunt, quod imperatores, captivos vendere iubent, ac per hoc servare, nec occidere solent. M. BRÉAL et A. BAILLY: Dict. étym. latin, s. r. servus : « Servus veut dire littéralement « gardien ». Il correspond au grec (pour ), d'où et .

L'esclave est considéré comme le gardien de la maison. V. J. Darmesteter, Mem. Soc. Ling., II, 309. Cette origine du mot ayant été peu à peu oubliée, servus a signifié simplement « esclave », et ce sens est le seul qui ait passé dans les dérivés tels que servio et servitus. – L'étymologie de servus, entendu comme le prisonnier de guerre dont on a épargné la vie, est donc à rejeter ».

[FN: § 688-2]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. En attendant, voici un exemple tout récent de cette façon de reconstituer l'histoire. Les interprétations de la première étymologie sont, il est vrai, hypothétiques, mais elles montrent bien la méthode de l'auteur, qui laisse errer son imagination au gré de sa fantaisie. Il s'agit d'abord du nom d'un petit village des hautes Alpes valaisannes. Gazette de Lausanne, 5 août 1913, Étymologies. (Signé H. M.) : « Evolène . Qu'est-ce donc que ces « jolis bras » ? À quelle légende, à quelle tradition, à quelle aventure dramatique ou romanesque peuvent-ils bien faire allusion ? Car enfin il doit en être de ce terme comme de tant d'autres noms de lieux dont la signification ou l'origine s'est dès longtemps perdue ; je veux dire que cette poétique dénomination n'est point le fait du hasard, mais qu'elle eut jadis sa raison d'être. Où est l'historien, le folkloriste, l'hellénisant qui nous la retrouvera ? N'y faudrait-il voir peut-être qu'une aimable fantaisie d'érudit, une manière de madrigal, que sais-je, dédié aux belles filles de l'endroit ? Ah ! dame, voilà qui serait fort admissible, après tout. Ou bien s'agit-il de quelque souvenir rapporté de la croisade quatrième ? J'imagine qu'à cette époque, aussi bien que de nos jours, il devait être de mise, très bien porté même, d'employer des vocables provenant des lointains pays où l'on avait guerroyé : cela vous posait un personnage ! Mais encore... Chillon, lui, comme on sait, s'explique de reste : c'est le château du « rivage » , et ce même mot désignera plus tard la contrée de la « côte » par excellence, le Chili, où je note, en passant, la ville de « Chillan ». Voyez aussi Evian, qui prétend venir de , je réjouis, « je guéris » (vieille noblesse !) etc. Tandis qu'Evolène... les bras jolis... énigme !... » Quelques jours après, Ibid., 9 août, Étymologies (non signé), un autre étymologiste propose d'autres étymologies pour expliquer les mêmes noms, en se fondant sur un ouvrage d'autorité. L'auteur de cet ouvrage : « fait dériver Evolène (Evelina en 1250) du celtique Ewe = eau et du latin Lenis =tranquille. Donc : eau tranquille ; et il ajoute que la Borgne, qui y coule, est effectivement à peu près paisible. Le nom Chillon viendrait du patois et signifierait « plate-forme de rocher ». Castrum Quilonis (1195) signifierait donc « château construit sur un chillon », c'est-à-dire sur une plate-forme de rocher. Evian dériverait des racines celtiques Ewe = eau et Ona = rivière, de même que « Evionnaz », Evunna vers 1020 ».

[FN: § 689-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. RABELAIS se moque de ces étymologies : Œuvres, t. II, Pantagruel, I. V, chap. XXXV, (éd. Flammarion) p. 250. Pantagruel demande pourquoi la ville de Chinon, en Touraine, serait la première du monde : « Je, dy, trouve en l'Escriture sacrée que Cayn fut premier bastisseur de villes ; vray donques semblable est que la premiere, il, de son nom, nomma Caynon, comme depuis ont à son imitation tous autres fondateurs et instaurateurs de villes imposé leur nom à icelles. Athené, c'est en grec Minerve, à Athenes ; Alexandre à Alexandrie ; Constantin à Constantinople ; Pompée à Pompeiopolis, en Cilicie ; Adriau à Adrianople ; Canaan aux Cananeens ; Saba aux Sabeians ; Assur aux Assyriens ; Ptolomaïs, Cesarea, Tiberium, Herodium, en Judée ».

[FN: § 690-1]

La Liberté, 10 décembre 1910 : « Du Cri de Paris : Elle sait où est le compteur : C'est la nouvelle locution à la mode. On l'entend dans les petits théâtres et les cafés-concerts. On ne dit pas d'une femme « elle est la maîtresse de M. X... », on dit : – Elle sait où est le compteur. Tout le monde comprend. Mais peu de personnes connaissent l'origine de cette expression. Hâtons-nous de l'expliquer à nos lecteurs. Un de nos auteurs dramatiques, jeune et riche, avait convié quelques actrices fort jolies, et quelques camarades, à venir entendre la lecture d'une pièce nouvelle dans un pied-à-terre élégant qu'il préfère dans certains cas à son domicile officiel. Les invités pénètrent en bande dans une pièce où règne l'obscurité la plus complète. L'auteur dramatique frotte une allumette, tourne une clef et s'écrie : – Zut, le gaz est fermé ! Aussitôt, sans l'ombre d'une hésitation – il est vrai qu'il n'y avait pas de lumière – une des jeunes femmes présentes ouvre un placard et découvre le compteur. La lumière se fit dans la salle et dans l'esprit des assistants, qui connurent ainsi l'élue du moment. – Bon, se dirent-ils, elle sait où est le compteur ! – Et la locution fit fortune ».

[FN: § 691-1]

DUGAS MONTBEL; Obs. sur l'Iliade, t. II, (XVIII, 486): « (p. 145) Quant à Orion, il a été dans la suite le sujet d'une aventure fort dégoûtante, et racontée très-crûment par Voltaire (Dict. phil., s. r. Allégorie) qui nomme cela une allégorie. Ce n'est point le désir d'imaginer une allégorie qui a fait concevoir cette turpitude ; elle n'est due qu'au rapport qui existe entre le nom d' et celui d' , Urina. Ainsi donc, ce n'est point non plus à cause de son aventure qu'il fut nommé Orion, comme le disent les petites scholies, mais, au contraire, ce fut à cause de son nom qu'on imagina l'aventure. La preuve c'est que toutes ces vilenies n'ont été inventées qu'après Homère, qui cependant connaissait le nom ». La preuve n'est pas très solide, mais le fait est probable.

[FN: § 694-1]

TYLOR: La civil. primit. , t. I.

[FN: § 695-1]

Nous ne pouvons pas même donner une traduction rigoureuse du terme dans les poèmes homériques. Dans les œuvres postérieures, on peut traduire par âme ; mais chez Homère, il a différents sens qui ne sont pas bien définis. Du THEIL ; Dict. d'Hom. : « propr. souffle, haleine, et comme celle-ci est le signe de la vie, de là, esprit c.-à.-d. 1° vie, force vitale, âme, esprit : .Il V, 696, l'esprit l'abandonna, c.-à.-d. il tomba en défaillance ; mais aussi la vie l'abandonna, Od. XIV, 426, (où il est dit d'animaux) ; en outre, il se joint souv. à Il V, 396 ; à , Il. XVI, 453 ; à , Il. XI, 334 ; et au pl. Od. III, 74 ; Il. 1, 3, exposant leur vie ; on concevait ce principe vital comme une véritable substance ; quand l'homme meurt, elle s'exhale par sa bouche, Il. IX, 409, ou par une blessure, Il. XIV, 518 de là les âmes des morts dans les enfers, esprit, âme, ombre : l'âme d'Agamemnon, d'Ajax ; cette âme était à la vérité sans corps, mais elle conservait la forme du corps, Od. XI, 207; elle n'a pas les ... Il. XXIII, 103; ce n'était donc qu'un fantôme, , Od. XI, 601 ; aussi les deux mots se trouvent-ils réunis, Il. XXIII, 103 ; Od. XXIV, 14 ; et dans ce sens est opposé au corps que l'ancien Grec appelle son moi, sa personnalité , Il. 1, 3 ; Od. XIV, 32 ; n'est jamais employé dans HOM. pour marquer les situations de l'âme ». Quand nous aurons des explications aussi amples sur les termes employés par les peuples barbares, nous pourrons avoir quelque idée des termes que les voyageurs ou les missionnaires traduisent arbitrairement par notre terme âme.

[FN: § 695-2]

F. FARJENEL: La mor. chin., 5.

[FN: § 695-3]

Même des hommes de science parfaitement au courant de la matière peuvent, dans un moment d'inattention, faire usage de termes qui ne correspondent pas au texte qu'ils ont en vue. A. MAURY ; Hist. des relig. de la Gr., t. I : « (p. 336) L'Élysée, ou mieux le champ Élysée , est dépeint par l'Odyssée* comme une terre où le juste coule en paix une vie facile, sous un ciel toujours serein,... » L'auteur cite « (*IV, 561). Or le terme juste ne convient pas à ce passage. On n'y fait aucune allusion à des hommes justes ; on parle de Ménélas, qui ira au champ Élysée, non parce qu'il a été juste, mais « parce qu'il a [pour femme] Hélène, et qu'il est pour eux [les immortels] le gendre de Zeus ».

(569)

Il est impossible de traduire autrement, et toutes les traductions ont le sens indiqué ; par exemple en latin : quoniam habes Helenam, et ipsis Iovis gener es. Le vers (561) cité de Maury :

(561)

et ceux qui suivent font allusion au fait dont la raison est donnée au vers (569) : dit que Ménélas ne mourra pas, mais ira au champ Élysée, parce que, etc. Supposons que nous ne connaissions de ce passage de l'Odyssée, que ce qu'en rapporte Maury : nous penserions qu'il contient un principe moral, lequel n'existe vraiment pas.

[FN: § 696-1]

Le 25 janvier 1910, un grand nombre de personnes, rassemblées à la Place d'armes, à Turin, attendaient le coucher du soleil pour voir la comète. Celle-ci ne s'étant pas montrée immédiatement, une partie du public siffla, comme si ce fût au théâtre ! Et pourtant il est certain qu'aucune de ces personnes ne s'imaginait que la comète eût une âme. Il n'y a là pas autre chose qu’un de ces mouvements impulsifs qui nous font traiter de la même manière les hommes, les animaux et les choses. PORTER, dans Bibl. univ. des voy., t. 16, raconte quel plaisir et quelle admiration les indigènes de l'île Madison manifestèrent, après avoir vu tirer le canon : « (p. 171) ils embrassèrent et saisirent le canon, s'inclinèrent devant, le caressèrent avec amour, et finirent par glisser deux longs bâtons pour l'emporter vers la montagne » [selon les ordres de Porter]. Les indigènes ne croyaient pas que le canon fût un être animé ; ils manifestaient seulement certains sentiments d'admiration, qu'ils éprouvaient pour sa puissance. – A. ERMAN ; La rel. égypt. Après avoir remarqué combien différaient les manières dont les Égyptiens se représentaient le monde, l'auteur ajoute . « (p. 15) C'est de tous ces divers traits que plus tard l'Égypte de l'époque historique composa son tableau du monde et en fit un mélange, au petit bonheur, sans se préoccuper des contre-sens et des impossibilités qu'elle éditait. On représente le ciel sous la forme d'une vache et on fait voyager sur son ventre la barque du soleil ; on le dit un océan et cependant c'est par lui qu'est engendré le soleil ; le dieu-soleil est un scarabée, alors que le soleil est en même temps son œil. Et les noms et les images qui (p. 16) s'adaptent à ces diverses conceptions se déroulent complètement emmêlés les uns aux autres ». On trouve quelque chose d'analogue jusque dans la mythologie grecque.

[FN: § 697-1]

TYLOR; La civil. primit. , t. I.

[FN: § 701-1]

COOK; 3e voyage, Paris, 1785, II. Parlant des habitants de Nootka (Amérique septentrionale), l'auteur dit : « (p. 352) Leurs autres passions, et surtout la curiosité, paraissent absolument engourdies. Ils ne montraient jamais le moindre désir d'examiner les choses qui leur étaient inconnues, et qui auraient produit le plus grand étonnement chez des personnes curieuses. Contens de se procurer les choses qu'ils connaissaient ou dont ils avaient besoin, tout le reste leur était indifférent ; les personnes, les vêtements, les usages des Européens si différens des leurs, la grandeur même et la construction des vaisseaux, loin d'exciter chez eux de l'admiration, ne fixaient pas même leur attention ». – PRUNEAU DE POMMEGORGE, dans HOVELACQUE ; Les Nègres « (p. 29) Ne pouvant m'imaginer, comme on me l'avait dit, qu'ils [les Sérères] n'eussent aucun culte, et me trouvant un soir au soleil couchant, au bord de la mer, avec cinq à six vieillards, je leur fis demander par mon interprète, s'ils connaissaient celui qui avait fait ce soleil qui allait disparaître... enfin s'ils connaissaient le ciel et les étoiles qui allaient paraître une heure après. À ma question chacun de ces vieillards, comme interdits, se regardait [sic] sans répondre ; cependant, après un instant de silence, un me demanda si moi-même je connaissais tous les objets dont je venais de parler ». L'auteur ignore qu'au point de vue de la science expérimentale, la connaissance qu'il s'imagine avoir de celui qui a fait le soleil a beaucoup moins de valeur que l'ignorance nettement manifestée par les nègres. – PORTER ; dans Bibl. univ. des voy., t. 16. L'auteur parle d'un chef de l'île Madison : « (p. 166) Après qu'il fut demeuré quelque temps sur le pont, je voulus lui faire concevoir une haute idée de notre force ; et en conséquence j'assemblai (p. 167) tout mon équipage : il parut à peine s'en apercevoir. Je fis alors tirer un coup de canon qui ne sembla produire sur lui d'autre effet qu'une sensation douloureuse : il dit que cela lui avait fait mal aux oreilles. Je l'invitai ensuite à descendre dans la cabine, où rien n'attira particulièrement son attention, jusqu'à ce que je lui montrasse quelques dents de baleine... je lui demandai s'il avait vu dans le vaisseau quelque chose qui lui plût, ajoutant que s'il me désignait cette chose, je le prierais de l'accepter. Il me répondit qu'il n'avait rien vu qui lui plût autant que les dents de petites baleines... » – HOVELACQUE ; Les nègres : « p. 456) L'abstraction est absolument en dehors de sa faculté de conception [du nègre] : point de mots abstraits dans son langage ; seules les choses tangibles ont le don de le saisir. Quant à généraliser, quant à tirer de l'ensemble des phénomènes matériels une systématisation quelconque, il ne faut pas le lui demander ».

[FN: § 702-1]

MUNGO PARK ; Voy. dans l’int. de 1'Afr., vol. II. On trouve des considérations analogues chez l'auteur suivant. BURCHELL ; dans Bibl. unir. des voy., t. 26. L'auteur parle à un Bachapin : « (p. 446) Je n'eus pas de peine à lui faire concevoir l'état d'une existence future, attendu que les Bachapins avaient quelques notions confuses de cette espèce ; mais jusqu'à quel degré croyaient-ils aux récompenses et aux châtiments que chaque (p. 447) humain doit recevoir après sa mort, voilà ce que je n'ai jamais pu découvrir au juste [on ne peut en effet pas découvrir ce qui n'existe pas]. Il ne m'a pas semblé non plus qu'ils eussent aucune idée très sublime de l'âme et de son immortalité. Quant à l'existence d'un pouvoir suprême veillant sur le monde, ils ne la nient pas précisément [ils ne nieraient probablement pas non plus un théorème de géométrie !] mais la foi qu'ils y ajoutent est tellement mêlée de supposition, qu'elle ne peut guère influer avec avantage sur leur conduite morale ou sur leurs sentiments religieux. Ces notions superstitieuses ne doivent être que le résultat de la faiblesse des esprits, et le respect dont elles continuent à être honorées prouve mieux que tout autre argument combien est faible l'état de l'intelligence et de la raison parmi ces peuples ».

[FN: § 703-1]

Tylor rejette plusieurs témoignages de voyageurs déclarant que certains peuples avaient une religion, en leur opposant des témoignages contraires d'autres voyageurs. En certains cas, il a raison ; il peut avoir raison en d'autres et peut avoir tort en d'autres encore ; car il n'est pas certain que le second témoignage soit toujours plus croyable que le premier. En tout cas, il n'en reste pas moins vrai que les sauvages s'adonnent généralement peu aux raisonnements abstraits ; et il n'est pas du tout sûr que le concept auquel les voyageurs donnent le nom d'âme, soit identique à celui que nous appelons ainsi. L'exemple certain de la grecque suffit à nous montrer combien il est facile de se tromper dans ces interprétations (§ 695-1).

[FN: § 704-1]

H. SPENCER; Principes de Sociologie, t. I, § 64.

[FN: § 706-1]

H. SPENCER; Principes de Sociologie, t. I, § 63.

[FN: § 706-2]

Voir, sur ce sujet, TULLIO MARTELLO; L'economia moderna e la odierna crisi del darwinismo.

[FN: § 707-1]

H. SPENCER; Principes de Sociologie , t. 1, § 65.

[FN: § 709-1]

H. SPENCER ; Principes de Sociologie, t. I, § 99.

[FN: § 710-1]

H. SPENCER; Principes de Sociologie, t. I.

[FN: § 712-1]

S. REINACH; Cultes, Mythes et Religions, t. I.

[FN: § 713-1]

Dans un ouvrage récent, Reinach ne défend plus le code complet du totémisme. S. REINACH; Orpheus : « (p. 20) Définir le totémisme est très difficile. On peut dire, quitte à préciser ensuite, que c'est une sorte de culte rendu aux animaux et aux végétaux, considérés comme alliés et apparentés de l'homme ». I. G. FRAZER ; Le totémisme : « (p. 3) Un totem est une classe d'objets matériels que le sauvage regarde avec un respect superstitieux, croyant qu'il existe entre lui et chaque membre de cette classe une relation intime et très spéciale... (p. 4) Les rapports entre un homme et son totem ont un caractère d'utilité réciproque : le totem protège l'homme, et celui-ci prouve son respect pour son totem de différentes manières ; il ne le tue pas, par exemple, si c'est un animal; il ne le coupe ni le cueille si c'est une plante. Un totem, et ceci le distingue du fétiche, n'est jamais un individu isolé, mais toujours une classe d'objets, généralement une espèce animale ou végétale, plus rarement une catégorie d'objets inanimés naturels, moins souvent encore d'objets artificiels ».

[FN: § 716-1]

G. VILLANI; Croniche, I. VI, c. 69. «Au temps du dit peuple de Florence, un magnifique et fort lion fut donné en cadeau à la commune; il était enfermé à la place de Saint-Jean. Il arriva que, mal surveillé par celui qui le gardait, le dit lion sortit de sa cage, courant par le pays ; ce dont toute la ville fut frappée de peur. Il arriva à Orto San Michele, y prit un enfant et le tenait entre ses pattes. En l'entendant, la mère qui n'en avait pas d'autres et qui portait cet enfant dans son sein quand le père mourut, comme désespérée, poussant de grands cris, échevelée, courut contre le lion et lui arracha l'enfant d'entre les pattes. Le lion ne fit aucun mal ni à la femme ni à l'enfant ; il regarda simplement ». N'est-ce pas précisément une conséquence de l'article 9 du code du totémisme (§ 712) ? Villani continue : « On se demanda ce qui en était : si c'était la noblesse de la nature du lion, ou si la destinée préservait la vie du dit enfant, pour qu'il vengeât plus tard son père, comme il le fit... ». Ce que Villani appelle « noblesse de la nature du lion » n'est-ce pas évidemment la bienveillance du totem pour son clan ? En comparant un grand nombre d'autres explications avec celle-ci, le lecteur verra qu'elles s'appuient sur des preuves beaucoup plus faibles, et qu'elles sont pourtant admises en toute confiance. On remarquera encore que si l'on avait du temps à consacrer à ces recherches, on trouverait facilement d'autres textes à l'appui des conclusions totémiques concernant le lion de Florence. Par exemple le suivant : BAYLE ; Dist. hist., t. II, s. r. Delphinus : « (267) (A) On a retranché... un endroit curieux qui se trouve dans un Manuscrit de ses Lettres. Le curieux et savant Père Mabillon nous a fait savoir ce que c'est. Le Passage retranché, étoit à la Lettre XXXV du VIIe livre, et contient ceci. Les habitans d'Arezzo avoient jetté dans un puits un lion † de pierre qui étoit au haut de la grande Eglise. On l'en tira quand les François entrèrent dans cette Ville sous Charles VIII, et on le plaça au milieu de la grande rue, et tous les habitans d'Arezzo qui passoient par là furent obligez de se mettre à genoux devant ce lion, et à demander pardon de leur révolte ». Si nous ne connaissions que ce texte, Dieu sait quelle belle théorie on en pourrait tirer ! Ce lion était un marzocco, et le fait raconté rentre dans la grande classe de ceux où l'on voit imposer le salut au drapeau insulté. Une note de Bayle met le lecteur à même de comprendre la chose ; mais sans la note, celui qui ne saurait pas que le Marzocco était l'enseigne de Florence, pourrait supposer toute autre chose qu'un salut au drapeau.

† (NOTE DE BAYLE) : « C'étoient les Armes de Florence ».

[FN: § 717-1]

S. REINAGH; Cultes, Mythes et Religions, t. I, pp. 55-58.

[FN: § 718-1]

Rappelons qu'il n'existe pas une chose à laquelle on ait donné le nom de totémisme, comme il existe un animal auquel on a donné le nom d'éléphant. Il existe différents états d'âme, que certains auteurs ont réunis en une classe, à laquelle ils ont donné le nom de totémisme. La composition de cette classe est arbitraire, entre certaines limites.

[FN: § 719-1]

FOUCART; La méth. comp. dans l'hist. des relig. L'auteur dit : « (p. 52) Ces cultes [des animaux] si constants, si solidement fixés dans leurs traits caractéristiques, paraissent aussi anciens que la religion égyptienne. Ils remontent à ses origines mêmes, s'il est permis de parier d'un temps que personne ne connaîtra jamais directement ». Et plus loin : « (p. 54) Voilà donc, en Égypte, les caractères de la zoolâtrie ; des dieux ayant la forme animale et des chefs humains qui sont leurs descendants directs. Comment s'était formée cette conception ? Elle était née des croyances des Égyptiens et de leurs idées sur le monde sensible au milieu duquel ils se mouvaient ». Ainsi ces braves gens commencèrent par faire une théorie du monde sensible et créèrent ensuite leurs dieux. C'est la manie des interprétations logiques. Et quelle théorie subtile ils avaient, suivant l'auteur ! « (p, 54) À leurs yeux, tout vivait dans la nature, même les objets que nous appelons inanimés. Elle se composait de deux éléments [ils connaissaient aussi les éléments !] : une enveloppe matérielle qui était le corps et un autre élément plus subtil, invisible, mais également matériel, auquel on donnait des noms divers : âme, esprit, double. Leur union était indispensable pour qu'un être fût vivant ». Il ne manque plus à ces hommes vivant en un temps très reculé, « que personne ne connaîtra jamais directement », que d'avoir aussi inventé l'algèbre, et le tableau sera parfait. Cfr. § 1701, 695-1.

[FN: § 720-1]

Série et limite sont pris ici au sens mathématique.

[FN: § 720-2]

On voit bien ce contraste des deux genres, dans le passage suivant, Doctrine S. Simonnienne. Expos., p. 82 : « Nous devons montrer à un siècle qui se dit, pardessus tout, raisonneur, que nos croyances sur l’avenir de l'humanité révélées, par une vive sympathie, par un ardent désir de contribuer à son bonheur, sont justifiées par l'observation la plus rigoureuse des faits... (p. 68) Nous avons dit dès le début que la conception de SAINT-SIMON était vérifiable par l'histoire ; n'attendez de nous ni la discussion des faits partiels, ni l'éclaircissement des détails consignés dans d'obscures chroniques ». C'est la façon habituelle de raisonner : on feint d'admettre l'expérience, pour la repousser aussitôt, « Nous ne porterons nos regards que sur les lois générales qui dominent tous ces faits ; lois simples et constantes comme celles qui régissent l'organisation de l’homme... SAINT-SIMON eut pour mission de découvrir ces lois, et il les légua au monde comme un sublime héritage. Notre mission, à nous qui sommes ses disciples, est de continuer sa révélation, de développer ses hautes conceptions, et de les propager ». [Les termes soulignés le sont aussi dans le texte.]

[FN: § 723-1]

Le Père MARIE JOSEPH LAGRANGE, des Frères prêcheurs; Études sur les religions sémitiques, Paris. 1903 ; avec imprimatur de l'Archevêque de Paris : « (p. 1) En étudiant la religion des Sémites, nous nous proposions seulement d'éclairer quelques points obscurs de la religion des peuples voisins ou parents d'Israël. Ce domaine est encore peu exploré et cependant les découvertes épigraphiques l'étendent chaque jour davantage. Le plus sage serait donc assurément de se borner à recueillir les faits nouveaux et à tirer les conclusions particulières les plus certaines. Pour notre part nous nous sommes efforcé d'éloigner de notre esprit toute idée préconçue. Nous ne nous croyons pas tenu de faire entrer en ligne la Révélation primitive, puisque l'Écriture qui nous l'enseigne ajoute qu'elle a été oblitérée [théorie de la décadence du type]. Jamais nous n'avons cédé à la tentation d'insister plus que de raison sur les symptômes de décadence religieuse ». Nous n'avons pas à vérifier ici comment cette promesse a été tenue ; en tout cas, on voit par le livre du P. Lagrange que l'auteur était de bonne foi en la faisant.

Comparez maintenant ce programme avec celui de l'historiographe officiel de la Révolution française: M. Aulard. A. AULARD ; Hist. polit. de la Rév. franç. : « (p. v.) Dans cette histoire politique de la Révolution française, je me propose de montrer comment les principes de la Déclaration des droits furent, de 1789 à 1904, mis en oeuvre dans les institutions, ou interprétés dans les discours, dans la presse, dans les actes des partis, dans les diverses manifestations de l'opinion publique ». M. Aulard ne s'aperçoit peut-être pas qu'il imite Bossuet. Celui-ci; dans son Discours sur l'histoire universelle, déclare avoir pour but de montrer comment les desseins de la Providence ont gouverné les institutions et les mœurs. « Ainsi tous les grands empires que nous avons vus sur la terre, ont concouru par divers moyens au bien de la religion et à la gloire de Dieu, comme Dieu même l'a déclaré par ses prophètes ». (IIIe partie, chap. 1) M. Aulard continue : « La conséquence logique du principe de l'égalité, c'est la démocratie. La conséquence logique du principe de la souveraineté nationale, c'est la république [pauvre logique ! que de sottises on t'attribue !] Ces deux conséquences ne furent pas tirées tout de suite [voilà le malheur des hommes de ce temps-là, qui n'ont pas eu un savant logicien comme M. Aulard]. Au lieu de la démocratie, les hommes de 1789 établirent un régime censitaire bourgeois. Au lieu de la république, ils organisèrent une monarchie limitée ». M. Bayet a publié, dans la collection de M. Aulard, pour l'enseignement élémentaire, un petit manuel intitulé : Leçons de morale, Cours moyen, Paris, 1909. Il nous avertit (p. I) qu'il montre « la différence entre les vérités scientifiques que l'ignorant seul peut refuser d'admettre, et les croyances religieuses et métaphysiques (p. II) que chacun de nous a le droit d'accepter, de rejeter ou de modifier à sa guise ». C'est là la métaphysique de la Science ; car on méconnaît le caractère essentiellement contingent des vérités scientifiques. Si M. Bayet avait quelque connaissance de la science expérimentale, il saurait qu'elle est dans un continuel devenir, et il aurait appris que la science, progresse justement parce que des hommes de science « refusent d'admettre » certains principes tenus jusqu'à eux pour des « vérités scientifiques ». Parmi ces « vérités scientifiques » de M. Bayet, se trouve une belle théorie de la religion et une non moins belle théorie de son origine.

« Comme on ne peut pas savoir scientifiquement ce qu'il y aura après la mort, les hommes ont essayé de le DEVINER [c'est M. Bayet qui souligne], et ils ont fait à ce sujet, un grand nombre de SUPPOSITIONS. Les uns ont dit qu'après la mort il N'ARRIVAIT RIEN DU TOUT. Mais d'autres ont cru qu'après la mort les hommes se trouvaient en présence d'un être éternel, souverainement bon, souverainement juste : DIEU. Ils ont cru que Dieu jugeait les hommes, les récompensait ou les punissait. À cause de cela, ils ont dit que les hommes devaient honorer et prier Dieu, et ils ont fixé les prières qu'il faut dire pour le prier, et les cérémonies qu'il faut célébrer pour l'honorer. Ainsi, ils ont fondé un certain nombre de religions ». Cet auteur aurait un besoin urgent de lire quelque manuel, même très élémentaire, d'histoire des religions. Avant d'enseigner aux autres, il est bon d'apprendre pour son propre compte. Il est remarquable que ces éminentes personnes, ne pouvant persuader autrui par le raisonnement, font des procès à qui n'admire pas leur profonde science.

[FN: § 726-1]

A. ERMAN ; La religion égypt.

[FN: § 728-1]

Cette limite est semblable à l'asymptote d'une courbe géométrique.

[FN: § 729-1]

H. SPENCER; Principes de Sociologie, t. I, § 150.

[FN: § 731-1]

J. DE MORGAN; Les prem. civ.: « (p. 45) L'Homo (Pithecanthropus) alalus, privé encore de la parole, l'Homo stupidus d'Haeckel, les Anthropopithecus Bourgeoisi et Ribeiroi de Mortillet sont des êtres hypothétiques, dont l'existence ne repose que sur des suppositions, sans bases scientifiques précises. Cette théorie implique l'unité originelle de l'espèce humaine ; ce qui semble vrai pour les races vivant aujourd'hui, mais peut aussi ne pas l'avoir été pour d'autres disparues. Ces hypothèses, dont la gratuité ne fait absolument aucun doute, ont cependant pris, dans la pensée de beaucoup, la valeur d'axiomes sur lesquels s'échafaudèrent, en ces dernières années, nombre de théories où la fantaisie tient lieu de raisonnement scientifique *. Il ne manque pas de savants, ou de soi-disant tels, qui considèrent le Pithecanthropus comme notre ancêtre ; alors que rien ne prouve cette ascendance ; qu'aucune donnée ne permet d'affirmer que ce fut une forme ancestrale de l'homme ; qu'il est apparenté, même d'une façon très éloignée, à notre espèce** ».

Notes de Morgan :

* « Cf. entre autres El. Reclus qui, dans l’Homme et la terre, a poussé les choses à l'extrême ridicule. Il va jusqu'à considérer les animaux domestiques (se basant sur leurs perfectionnements) comme des candidats à l'humanité... ».

** « Une autre théorie tend à considérer les Simiens comme des branches dégénérées de la race humaine. Cf. J. H. F. KOHLBRUGGE, Die Morphologische Abstammung des Menschen, Stuttgart, 1908 ».

[FN: § 732-1]

Doctrin. S. SIMON ; Expos. : « (p. 18) Mais quelle est cette nouvelle manière d'envisager l'histoire, de faire, pour ainsi dire, raconter au passé l'avenir de l'humanité ? De quelle valeur est donc cette preuve apportée par nous à l'appui de nos rêves d'avenir ? Une science nouvelle, une science tout aussi positive que toutes celles qui méritent ce titre, a été conçue par SAINT-SIMON : Cette science est celle de l'espèce humaine : sa méthode est la même que celle qui est employée en astronomie, en physique ; les faits y sont classés par séries de termes homogènes, enchaînés par ordre de généralisation et de particularisation, de manière à faire ressortir leur TENDANCE, (p. 19) c'est-à-dire à montrer la loi de croissance et de décroissance à laquelle ils sont soumis ».

[FN: § 734-1]

PETR.; p. 109. SERVIUS; Ad. Virg. Aen., III 57.

[FN: § 735-1]

LUCIEN BIART ; Les Aztèques, p. 125-126. – A. RÉVILLE; Les rel. du Mex., etc.: « (p. 135) On lui avait endossé les insignes et les vêtements de Tezeatlipoca, et, lorsqu'il parcourait la ville, escorté de huit pages à la livrée royale, le peuple l'adorait comme s'il eût été la divinité elle-même. On prenait de lui les soins les plus attentifs, on le baignait, on le parfumait, on le coiffait, on renouvelait son uniforme divin, et on lui donnait pour compagnes quatre belles jeunes filles, portant des noms de déesses et qui recevaient pour instruction de ne rien négliger pour rendre leur divin époux aussi heureux que possible. Dans les vingt jours qui précédaient la fête, ces marques d'honneur allaient encore en augmentant... Mais la veille du dernier jour de fête, le substitut de Tezeatlipoca était embarqué sur un canot royal, lui, ses huit pages et ses quatre déesses, et conduit de l'autre côté du lac. Le soir ses déesses quittaient leur pauvre dieu, et les huit pages le menaient à deux lieues de là vers un teocalli solitaire dont il gravissait les degrés en brisant ses flûtes. Au sommet il était (p. 186) saisi par les prêtres qui l'attendaient, étalé brusquement sur la pierre du sacrifice, éventré, et son cœur palpitant était offert au soleil ».

[FN: § 737-1]

FRAZER; Le rameau d'or, t. II. – S. REINACH; Cultes, Mythes et Religions, I.

[FN: § 737-2]

JACOB; Curiosités de l'histoire de France. Beletus appelle la fête des fous « (p. 14) la liberté de décembre, à l'instar des Saturnales païennes. Cette liberté consistait à intervertir les rôles et les rangs du clergé, qui, pendant les fêtes de Noël et de l'Épiphanie, commettait toutes sortes de folies dans l'intérieur des églises : les clercs, diacres et sous-diacres officiaient à la place des prêtres ; ceux-ci dansaient et jouaient aux dés, à la paume, à la boule et à d'autres jeux de hasard devant l'autel ; les enfants de chœur, masqués et couverts de chapes, occupaient les stalles des chanoines ; la veille des Innocents, ils (p. 15) élisaient un évêque parmi eux, le revêtaient d'habits épiscopaux, le sacraient et le promenaient par la ville au son des cloches et des instruments. (p. 17)... le jour de la Circoncision les gens d'Église assistaient à l'office, les uns en habit de femmes, de fous, d'histrions ; les autres en chape et en chasubles mises à l'envers [remarquez le principe du contraste]; la plupart avec des masques de figure monstrueuse: ils élisaient un évêque ou un archevêque des Fous... (p. 31)... à Antibes... les acteurs de cette fête, semblables à des fous furieux, se revêtaient d'ornements sacerdotaux mis à l'envers [toujours le contraste] ou déchirés, pour occuper les stalles du chœur ; ils tenaient des livres d'heures à rebours, et faisaient semblant de lire avec des lunettes dont les verres étaient remplacés par des écorces d'oranges ; ils s'encensaient avec de la cendre ou de la farine... ». – DUCANGE ; s. r. Kalendae. L'auteur cite des lettres de Charles VII, roi de France, données le 17 avril 1445. « Charles, etc. Notre amé et féal conseiller l'évesque de Troyes nous a fait exposer en complaignant, que combien que... par le decret (du Concile de Basle) est expréssement deffendu aux gens et ministres de l'église certaine dérisoire et scandaleuse feste, qu'ils appellent la feste aux fols, laquelle en plusieurs églises cathédrales et autres, collégiales estoit accoustumé de faire, environ les festes et octave de Noël, en laquelle faisant iceux gens d'église irrévérences et dérisions de Dieu nostre créateur, et de son saint et divin office, au très grand vitupere et diffame de tout l'estat ecclésiastique, faisoient toutes églises et lieux saints, comme dehors et mesmement durant le divin office plusieurs grandes insolences, dérisions mocqueries, spectacles publics, de leurs corps déguisements, en usant d'habits indécents et non appartenants à leur estat et profession, comme d'habits et vestements de fols, de gens d'armes et autres habits séculiers, et les aucuns usants d'habits et vestements de femmes, aucuns de faux visages... »

[FN: § 737-3]

S. REINACH ; Orpheus, p. 337 : «Enfin et surtout, les circonstances de la Passion ressemblent, d'une manière tout à fait suspecte, à des rites usités fort antérieurement dans certaines fêtes. À celle dite des Sacaea, en Babylonie et en Perse, on promenait en triomphe un condamné habillé en roi ; à la fin de la fête, il était dépouillé de ses beaux vêtements, flagellé, pendu ou crucifié. Nous savons par Philon que la populace d'Alexandrie qualifiait de Karabas un de ces rois improvisés, qu'on accablait d'honneurs dérisoires pour le maltraiter ensuite. Mais Karabas n'a de sens ni en araméen, ni en grec : il faut (p. 838) restituer Barabas, qui signifie en araméen, « le fils du père »... Il résulte de ces rapprochements que Jésus aurait été mis à mort, non de préférence à Barabas, mais en qualité de Barabas. Les Évangélistes n'ont compris ni la cérémonie qu'ils racontaient, ni la nature des honneurs dérisoires rendus à Jésus... ».

[FN: § 738-1]

MARDRUS; Le livre des mille et une nuits, t. X; Histoire du dormeur éveillé, p. 179-263. Le Calife endort Aboul-Hassân et le met à sa place. Aboul-Hassân « (p. 195) se vit d'abord dans un lit magnifique dont la couverture était recouverte d'un brocart d'or rouge... Et il jeta les yeux autour de lui et se vit entouré de jeunes femmes et de jeunes esclaves inclinés, d'une beauté ravissante... Et tout près de lui, sur tabouret, il reconnut, à leur couleur, les habits, le manteau et le turban de l'émir des Croyants ». Le lendemain, Aboul-Hassân est reconduit à sa maison; et comme il persiste à se croire le Calife, on le traite de fou « (p. 221)... le porteur de l'hôpital des fous, suivi de deux solides gardiens, arriva avec tout un attirail de chaînes et de menottes, et tenant à la main une cravache en nerf de bœuf... le portier commença par lui appliquer sur l'épaule deux ou trois coups de son nerf de bœuf. Après quoi... (p. 222) ils le chargèrent de chaînes de fer et le transportèrent à l'hôpital des fous, au milieu d'un grand rassemblement de passants qui lui donnaient les uns un coup de poing et les autres un coup de pied... »

[FN: § 738-2]

LAGRANGE ; Quelques remarques sur l'Orpheus de M. Salomon Reinach, p. 39 à 52.

[FN: § 739-1]

FRIEDLAENDER ; Mœurs romaines, t. II, parle de représentations théâtrales dans l'arène, où figuraient des condamnés. « (p. 161) On les instruisait et exerçait spécialement pour leur rôle, dans lequel ils ne feignaient pas de subir, mais souffraient bien réellement la mort et les tourments. Ils paraissaient couverts de tuniques somptueuses et brochées d'or... quand soudain s’échappaient de ces magnifiques vêtements, comme de ceux de Médée, des flammes destructives qui consumaient ces malheureux, au milieu d'horribles souffrances. ...(p. 162) Des chrétiens furent obligés de subir le martyre en costume de prêtre de Saturne... des chrétiennes travesties en prêtresses de Cérès. Il n'y avait guère de forme de torture et de supplice, mentionnée avec effroi par l'histoire ou la littérature, qui ne fût employée, pour l'amusement du peuple, à ces représentations. …(p. 163) Ces exécutions, à Rome, avaient généralement lieu de bon matin, et nous savons, par Philon, qu'il n'en était pas autrement à Alexandrie ». Voir en outre Martial, L’âne de Lucien, le livre X des Métamorphoses d'Apulée.

[FN: § 743-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. MICHEL REVON ; Anthol. japonaise, des orig. au XXe siècle. L'auteur donne entre autres la traduction de plusieurs passages du Kojiki (Livre des choses anciennes), qui est en quelque sorte la Bible du Japon. Pages 39-42, IX, Le pays des ténèbres, M. Revon note, au cours de sa traduction, des ressemblances frappantes entre le mythe japonais et le mythe grec, mais il ne se croit pas obligé d'en conclure à une imitation. Le dieu Izanaghi, désolé de la mort d'Izanami, qui est à la fois sa sœur et son épouse, descend aux Enfers. « Désirant revoir sa jeune sœur l'auguste Izanami, il la suivit au Pays des Ténèbres... Alors l'auguste Izanami répondit : „ Il est lamentable que tu ne sois pas venu plus tôt : j'ai mangé à l'intérieur des Enfers ! * Néanmoins, ô mon auguste et charmant frère aîné, touchée de l'honneur de ton entrée ici, je voudrais revenir ; et je vais en conférer avec les divinités des Enfers. Ne me regarde pas ! “ ** ». Izanaghi n'a pu s'empêcher de regarder son épouse. Mais l'aspect de la déesse est affreusement repoussant. « Alors, comme l'auguste Izanaghi, terrifié à cette vue, s'enfuyait en arrière, sa jeune sœur, l'auguste Izanami : „ Tu m'as remplie de honte ! ” Et ce disant, aussitôt elle lança à sa poursuite les Hideuses-Femelles des Enfers... *** Ensuite, elle lança à sa poursuite les huit espèces de dieux du Tonnerre, avec mille cinq cents guerriers des Enfers. Mais, tirant le sabre de dix largeurs de main dont il était augustement ceint, et de sa main le brandissant derrière lui ****, il fuyait en avant ; ... (p. 41) C'est pourquoi l'auguste Izanami est appelée la Grande-divinité-des-Enfers ***** ». Par ci par là, dans le Kojiki, M. Revon relève encore d'autres ressemblances entre la mythologie des Japonais et celle des Grecs, des Hébreux ou d'autres peuples éloignés du Japon. C'est ainsi qu'on rencontre le dieu forgeron Ama-tsou-ma-ra qui, comme les Cyclopes, n'a qu'un seul œil. Page 54, note 3, l'auteur fait la remarque suivante : « D'une manière générale, les descentes aux Enfers peuvent se ramener à deux motifs principaux : désir de revoir un être aimé (Orphée, Izanaghi), ou désir de consulter un personnage fameux, de préférence un ancêtre (Ulysse, Oh-kouni-noushi) ».

[NOTES DE M. REVON].

* Lorsqu'un vivant avait goûté aux aliments du monde souterrain, il ne pouvait plus revenir à la lumière. Comp. la grenade de Perséphone on de Proserpine.

** Cette défense est aussi le nœud du mythe d'Orphée, qui doit remonter au jour sans se retourner, tandis qu'Eurydice marche derrière lui.

*** Les Erinnyes du mythe japonais.

**** Il a soin de ne pas se retourner. Comp. l'attitude des anciens Grecs sacrifiant aux dieux souterrains.

***** De même que Proserpine devient la reine des Enfers ou elle a été retenue.

[FN: § 744-1]

M. J. LAGRANGE; Quelq. rem. sur l'Orph., fait les objections suivantes : 1° Il ne faut pas confondre l'épisode de Karabas et le rite des Sacées. « (p. 38) Quand le jeune roi Agrippa Ier... passa à Alexandrie, les indigènes de cette ville résolurent de lui donner un charivari... (p. 39) On s'empara donc d'un pauvre fou, nommé Karabas. Philon, n'étant point un évangéliste, n'a pas dû se tromper en lui donnant ce nom... On pousse le pauvre idiot au gymnase, on le met bien en vue... Quand il est revêtu des insignes de la royauté, « à la façon des mimes au théâtre », des jeunes gens se font ses gardes du corps... La populace l'acclame Marin, c'est-à-dire Seigneur, en syriaque, pour bien montrer qu'elle se jouait d'Agrippa. Ce fut, on le voit, une scène de bouffons, attentatoire au respect dû à une pauvre créature humaine, mais du moins il n'y eut ni coups, ni sang versé ». Ce fait, raconté par Philon, in Flaccum, paraît vraiment étranger à l'argumentation que veut faire Reinach. « (p. 39) Néanmoins, dira-t-on, cela ressemble beaucoup (p. 40) à la scène du corps de garde de Jérusalem. – Je le crois bien ! aussi depuis que Grotius a signalé ce passage de Philon, en 1641, il traîne dans tous les commentaires. Rien de plus propre à mettre dans son jour historique la conduite des soldats de Pilate. Des deux côtés on veut se moquer des Juifs et des prétentions d'un Juif à la couronne [c'est-à-dire que nous avons des branches d'un même tronc, comme dans la fig. 15]. À Alexandrie Agrippa n'est maltraité pour ainsi dire qu'en effigie, dans la personne de Karabas, dit Barabbas – ; à Jérusalem, c'est un prétendant à la couronne qui est livré aux soldats, au moment où cette prétention est un crime capital ; il est déjà condamné. Aussi, tandis qu'à Alexandrie on s'amuse, à Jérusalem la plaisanterie se termine dans le sang ». Le fait des Sacées rentre au contraire dans la catégorie dont Reinach peut faire état. Le P. Lagrange dit : « (p. 40) Cette fête des Sacées nous est connue par Bérose (ATHEN.; XIV, p. 639 c). Elle durait cinq jours avec des allures de carnaval. Les maîtres obéissaient à (p. 41) leurs domestiques, on promenait solennellement un individu habillé en roi. Quoique Bérose ne donne pas beaucoup de détails, il est assez piquant qu'il nous fasse connaître le sobriquet imposé au roi de comédie. Ce « Barabas » se nommait Zoganés !... Plus tard, Strabon nous montre la fête des Sacées intimement liée avec le culte de la (p. 42) déesse persane Anaïtis (STRAB.; XI, 8, 5) ». Le P. Lagrange rappelle que, suivant Dion Chrysostôme (De Regno, IV, 66), Diogène aurait fait à Alexandre la description de cette fête. « (p. 42) Les Perses prennent un prisonnier condamné à mort et le font asseoir sur le trône du roi ; on le revêt de l'habit royal ; on le laisse commander, boire, s'amuser, en prendre à son aise pendant ces journées avec les concubines du roi, et personne ne l'empêche de faire tout ce qui lui plaît. Après cela on le dépouille, on le flagelle et on le pend ». « (p. 117) Le texte de Dion avait été cité en marge de l'évangile par Wetstein en 1752. Personne n'avait exagéré l'importance du rapprochement. Ce qui lui a donné un regain de nouveauté, c'est la publication, par M. Cumont, des actes de saint Dasius. Ce soldat chrétien refusa de jouer le rôle de roi des Saturnales, et dut à cause de cela subir le martyre. Or ce roi prétendu représentait Saturne, et, s'il pouvait, pendant trente jours, se permettre tous les excès, il devait, au jour de la fête, s'immoler sur l'autel du dieu ».

[FN: § 745-1]

HÉROD. ; II, 62 : « Quand, dans la ville de Sain, les gens se réunissent pour des sacrifices, une nuit déterminée, tous allument des lanternes, en plein air autour des maisons. Ces lanternes sont de petits vases pleins de sel et d'huile, surmontés d'un lumignon qui brûle toute la nuit. Ils donnent à cette fête le nom de lampes allumées † ».

† (NOTE DE LARCHER) : Cette fête qui ressemble beaucoup à celle des lanternes établie à la Chine depuis un temps immémorial, pourrait servir à confirmer le sentiment de M. de Guignes, qui a soupçonné l'un des premiers que la Chine n'était qu'une colonie de l'Égypte ».

Voilà l'une des nombreuses idées erronées, que donne le principe qui attribue une origine commune aux choses semblables.

[FN: § 747-1]

DIONYS. HAL.; II, 66.

[FN: § 747-2]

OVID.; Fast., VI :

(289) Quid mirum, virgo si virgine laeta ministra
Admittit castas in sua sacra manus ?
Nec tu allud Vestam, quamn vivam intellige flammam :
Nataque de flamma corpora nulle, vides.
Iure igitur virgo est, quae semina nulle remittit,
Nec capitm; et comites virginitatis habet.

[FN: § 747-3]

CIC ; De leg., II, 12, 29 : Cumque Vesta, quasi focus urbis, ut graeco nomine est appellata (quod nos prope idem graecum interpretatum nomen tenemus) consepta sit, ei colendae virgines praesint, ut advigiletur facilius ad castodiam ignis, et sentiant mulieres in natura feminarum omnem castitatem pati [al. peti]. Si l'on admet la leçon : peti, les femmes devraient être chastes, en voyant que la chasteté plaît aux dieux. Duruy parait être de cet avis. Hist. rom., 1 : « (p. 103) Mais à l'idée religieuse qui avait d'abord déterminé les conditions imposées aux prêtresses s'était ajouté, comme conséquence, une idée morale. Cette flamme éternelle qui symbolisait la vie même du peuple romain, des vierges seules pouvaient l'entretenir ; l'institution du collège des vestales était donc une glorification involontaire de la chasteté, et, en des temps de ferveur, cette croyance devait avoir une influence heureuse sur les mœurs ». L'histoire écrite de cette manière devient un recueil de fables morales à l'usage des enfants.

[FN: § 747-4]

PLUTARCH. ; Numa, IX.

[FN: § 747-5]

Plutarque ajoute : « (6) Et, à la vérité, en Grèce, là où l'on conserve le feu inextinguible, comme à Delphes et à Athènes, ce ne sont pas des vierges qui le gardent, mais des femmes qui ont cessé d'être aptes aux rapports sexuels ».

[FN: § 747-6]

PLUTARCH. ; Camillus , XX.

[FN: § 748-1]

DIOD. SIC.; XVI, 26, 6.

[FN: § 748-2]

PLUTARCH. ; De Pyth. orac., 22 : . »Ainsi la Pythie qui sert le dieu est née de famille régulière et bonne autant que toute autre, et vit avec décence ». L'auteur continue en disant que cette jeune fille est selon le désir de Xénophon, qui voulait que lorsque l'épouse allait habiter chez son mari, elle eût vu et entendu le moins de choses possible. C'est peut-être pourquoi BOUCHÉ-LECLERC ; Hist. de la div., III p. 98, dit : « Le dieu qui devait être désormais son seul époux, la voulait belle et chaste. Toute souillure l'eût rendue indigne de l'union mystique que les polémistes chrétiens se sont trop complus à ridiculiser par leurs allusions indécentes... » Ainsi voilà une nouvelle explication logique !

[FN: § 749-1] PAUS.; VIII, 5 :

[FN: § 750-1]

PAUS.; VIII, 13.

[FN: § 750-2]

PAUS.; VII, 25.

[FN: § 751-1]

PAUS.; VII, 19; VII, 26; II, 33.

[FN: § 751-2]

PAUS.; VIII, 47.

[FN: § 751-3]

AUCTOR. (DEMOSTH.); C. Near. 75.

[FN: § 751-4]

Levit., 21, 13.

[FN: § 752-1]

GELL. ; I, 12, nous donne, suivant Labéon, les conditions que devait remplir la jeune fille que le pontifex maximus prenait pour être Vestale : Qui de [vestali] virgine capienda scripserunt, quorum diligentissime scripsit Labeo Antistius, minorem quam annos VI, maiorem quam annos X natam, negaverunt capi fas esse ; item quae non sit patrima et matrima ; item quae lingua debili sensuve aurium deminuta aliave qua corporis labe insignita sit ; item quae ipsa aut cuius pater emancipatus sit, etiam si vivo patre in avi potestate sit ; item cuius parentes alter ambove servitute servierunt ; aut in negotiis sordidis diversantur.

[FN: § 752-2]

On sait que les prêtres catholiques doivent vivre dans la chasteté et ne pas avoir de défauts corporels importants. P. LANCELLOTTO ; Institutiones iuris canonici, I, 25 : § 19 Bigamus [qui s'est marié deux fois de suite régulièrement], et qui uxorem duxit viduam, eiectam, vel meretricem, ordinari non possunt. § 22. Corpore vitiatus, nisi modica sit laesio, ordinari non potest. Corp. iur. can. Dec. Grat. pars I, dist. 33, c. 2 : Maritum duarum post baptismum matronarum Clericum non ordinandum, neque eum, qui unam quidem, sed concubinam, non matronam habuit : nec illum, qui viduam, aut repudiatam, vel meretricem in matrimonium assumserit ; nec eum, qui semetipsum quolibet corporis sui membro indignatione aliqua, vel iusto, vel iniusto timore superatus truncaverit : nec illum qui usuras accepisse convincitur aut in scena lusisse dignoscitur : nec eum, qui publica poenitentia mortalia crimina deflevit : neque illum, qui in furiam aliquando versus insanivit, vel afflictione diaboli vexatus est : neque eum, qui per ambitionem ad imitationem Simonis magi pecuniam obtulerit. Ibid. Dist. 32, c. 12 : Nemo ad sacrum Ordinem permittatur accedere, nisi aut virgo, aut probatae sit castitatis, et qui usque ad Subdiaconatum unicam, et virginem uxorem habuerit. Cette dernière disposition est la même que celle en vigueur pour l'archonte-roi, à Athènes. RABB.; Leg. crim. du Tal., p. 190 : « Mischnah. Sont condamnés à la peine du fouet... un grand-prêtre qui prend une veuve (Levit., XXI, 14); un prêtre qui prend une femme divorcée ou celle qui a pratiqué la cérémonie du déchaussement (Deut., XXV, 9)... ». Decr. Grat., pars. 1, dist. 55, c. 4: Si quis abscidit semetipsum, id est, si quis amputavit sibi virilia, non fiat Clericus : quia sui est homicida, et Dei conditionis inimicus. § 1. Si quis cum. Clericus fuerit, absciderit semetipsum, omnino damnetur ; quia sui est homicida. C.5: Hi, qui se, carnali vitio repugnare nescientes, abscindunt ; ad Clerum pervenire non possunt. Au contraire les prêtres de Cybèle étaient eunuques.

[FN: § 754-1]

MARQUARDT ; Le Culte, t. II.

[FN: § 754-2]

PLUTARCH ; Quaest rom., 96. Il donne aussi ce motif et le suivant, indiqué dans le texte.

[FN: § 755-1]

RÉVILLE ; Les relig. du Mex. etc., p. 367. FEST. ; Probrum Virginis Vestalis, ut capite puniretur, vir qui eam incestavisset, verberibus necaretur, lex fixa in atrio Libertatis cum multis aliis legibus incendio consumpta est, ut ait M. Cato in ea oratione, quae de Auguribus inscribitur. Adicit quoque virgines Vestales sacerdotio exauguratas, quae incesti damnatae, vivae defossae sunt, quod sacra Vestae matris polluissent : nec tamen, licet nocentes, extra urbem obruebantur, sed in campo proxime portam Collinam, qui Sceleratus appellatur.

[FN: § 756-1]

DION. HAL.; II, 67.

[FN: § 757-1]

DION. HAL.; VIII, 89. Une autre légende nous donne l'étymologie du Campus sceleratus, ainsi nommé parce qu'en l'an 331 av. J.-C., on y ensevelit vive la Vestale Minucia, coupable d'avoir perdu sa virginité. Liv.VIII, 15: Eo anno Minucia Vestalis, suspecta primo propter mundiorem iusto cultum, insimulata deinde apud pontifices ab indice servo ; cum decreto eorum iussa esset sacris abstinere, familiam que in potestate habere ; facto iudicio, viva sub terram ad portam Collinam dextra via strata defossa Scelerato campo ; credo, ab incesto id el loco nomen factum.

[FN: § 757-2]

DION, HAL.; IX, 40.

[FN: § 758-1]

LIV.; XXII, 57.

[FN: § 760-1]

PLUTARCH.; Numa, 10, 8. L'auteur donne comme cause de cette façon de procéder, qu'il serait impie de laisser mourir de faim des corps consacrés par des cérémonies sacrées.

[FN: § 760-2]

SOPH.; Antig., 773-780. Créon dit d'Antigone : « Conduite en un lieu désert et sans trace d'hommes, je l'enfermerai vivante dans une caverne, avec assez de vivres pour parer au sacrilège, et pour que la cité évite le crime ». Le scoliaste observe que c'était une ancienne coutume, « afin qu'il ne parût pas qu'on faisait mourir de faim ; ce qui est impie » – ...

[FN: § 760-3]

ZONAR. ; VII, 8. Il raconte comment Tarquin l'Ancien fit ensevelir vivante, avec une couchette, une lanterne, une table et de la nourriture, une Vestale qui avait perdu sa virginité ; et il ajoute : « Et c'est ainsi que dès lors, il devint de règle de punir celles des prêtresses qui n'avaient pas gardé leur virginité ».

[FN: § 761-1]

SUET.; Domit.; 8. – DIO CASS.; LXVII, 3. Il raconte un peu différemment la punition des Vestales. PLIN. ; Epist., IV, 11 : Nam cum. Corneliam, maximam Vestalem, defodere vivam concupisset, ut qui illustrari saeculum suum eiusmodi exemplo arbitraretur,...

[FN: § 761-2]

DIO CASS.; LXXVII, 16. – HEROD.; IV, 6 :

« Il fit enterrer vives des Vestales comme si elles n'avaient pas gardé leur virginité ».

[FN: § 762-1]

DIO CASS.; LXXIX, 9. – HEROD.; V, 4. Il s'en excusa dans une lettre au Sénat, en disant : « qu'il était soumis aux passions humaines, et qu'il avait été pris par l'amour de la jeune fille ; que l'union d'un prêtre et d'une prêtresse était bien assortie ». – RÉVILLE ; Les rel. du Mex., etc., p. 366: « les Vierges du Soleil vivaient cloîtrées, dans une retraite absolue, sans aucun rapport avec le reste de la société, (p. 367) surtout avec les hommes. Seuls, l'Inca, et sa principale épouse, la Coya pouvaient pénétrer dans le couvent. Or ces visites de l'Inca n'étaient pas précisément désintéressées. C'est là, en effet, qu'il recrutait ordinairement son sérail. Fils du Soleil et pouvant épouser ses sœurs, il choisissait ainsi dans sa famille. Pourtant les jeunes vierges étaient astreintes à la chasteté la plus rigoureuse et s'engageaient par serment à n'y jamais manquer. Mais leur vœu consistait en ceci qu'elles n'auraient jamais d'autre époux que le Soleil ou celui à qui le Soleil les donnerait».

[FN: § 763-1]

GARCILLASSO DE LA VEGA ; Hist. des Incas, II; (p. 147) « La principale des quatre fêtes du Soleil que les Rois Incas célébroient, se nommoit Raymi ; elle arrivoit au mois de juin... (p. 149) Les prêtres Incas qui devoient faire les sacrifices, préparoient la veille de la fête les moutons et les agneaux qui devoient y servir, aussi bien que les vivres et le breuvage que l'on devoit présenter au Soleil... Les femmes du Soleil employoient cette même nuit à pétrir une pâte nommée Cancu ; elles en faisoient des petits pains de la grosseur d'une pomme... (p. 150) Les Vierges élues pouvoient seules pétrir la farine dont on faisoit les pains, principalement ceux que l'Inca et les Princes du Sang devoient manger ; elles accommodoient aussi toutes les autres viandes : car il était supposé que ce jour-là le Soleil traitoit ses enfans ». SERVIUS; ad. Egl., VIII, 82 Sparge molam. Far et salem. Hoc nomen de sacris tractum est : far enim pium id est, mola casta, salsa (utrumque enim significat) ita fit : virgines Vestales tres maximae ex Nonis Maiis ad pridie Idus Maias [date très peu différente de celle de la fête du Pérou, simplement parce que c'étaient des fêtes de printemps] alternis diebus spicas adoreas in corbibus messuariis ponunt ; easque spicas ipsae virgines torrent, pinsunt, molunt, atque ita molitum condunt. Ex eo farre virgines ter in anno molam faciunt : Lupercalibus, Vestalibus, Idibus Septembribus : adiecto sale cocto, et sale duro.

[FN: § 765-1]

G. SOREL; Quelques prétentions juives, dans l'Indépendance, 15 mai 1912 ; « (p. 292) Au cours du XIXe siècle le catholicisme a singulièrement renforcé sa situation, en suivant une voie toute différente de celle que lui conseillaient de prendre les hommes habiles ; il a développé sa théologie, il a multiplié ses instituts monastiques, il a accordé au miracle une importance qu'on ne lui avait pas reconnue depuis le Moyen-Âge... » G. Sorel ajoute en note : « (p. 193) Bernard Lazare s'était terriblement trompé quand il avait écrit : „ La religion chrétienne disparaît comme la religion juive, comme toutes les religions, dont nous voyons la très lente agonie. Elle meurt sous les coups de la raison et de la science... Nous perdons de jour en jour le sens et le besoin de l'absurde, par conséquent le besoin religieux, surtout le besoin pratique, et ceux qui croient encore à la divinité ne croient à la nécessité, ni surtout à l'efficacité du culte ”. (L'antisémitisme, pages 359-360). Bernard Lazare a paraphrasé ici des textes de Renan, sans examiner personnellement la question ; d'ailleurs les choses ont bien changé depuis 1894 ! » Le passage transcrit ici de Bernard Lazare est en absolu et complet désaccord avec les faits.

[FN: § 767-1]

GROTE ; t. II.

[FN: § 768-1]

HERACLIDIS PONTICI ; allegortae Homeri.

[FN: § 770-1]

J. HUGON ; Vera historia romana, seu origo Latii, vel Italiae, ac Romanae Urbis, e tenebris longae vetustatis in lucem, producta, Romæ 1655.

[FN: § 770-2]

Homerus Hebraeus, sive historia Hebraeorum ab Homero hebraicis nominibus ac sententiis conscripta in Odyssea et Iliade, exposita, illustrataque studio ac opera GERARDI CROESI. Dordreci, 1704.

[FN: § 771-1]

COMPARETTI ; Virg. net medio evo, I, p. 134 et sv.

[FN: § 772-1]

COMPARATTI; Virg. nel medio evo, I, p. 144 et sv. – FULGENT. ; Exp. Virg. cont. (Mythographorum latinorum tomus alter, p. 147 – ed. Teubner., R. Helm, p. 89-90). L'auteur feint que Virgile lui parle et dit : ... trifarius in vita humana gradus est, Primum habere : deinde regere quod habeas : tertium vero ornare quod regis. Ergo tres gradus istos in uno versu nostro, considera positos : id est, Arma, virum et primus. Arma, id est virtus, pertinet ad substantiam corporalem : Virum, id est sapientia, pertinet ad substantiam sensualem ; Primus vero, id est princeps, pertinet ad substantiam ornantem. Quo sit huiusmodi ordo : habere, regere, ornare. Ergo sub figuralitate historiae plenum hominis monstravimus statum ; ut sit prima natura : secunda doctrina, tertia felicitas. Il y a trois degrés dans la vie humaine : le premier, c'est avoir ; le second, c'est régir ce qu'on a ; le troisième, orner ce qu'on régit. Ces trois degrés, tu les retrouves dans mon vers. Arma, c'est-à-dire la force, se rapporte à la substance corporelle. Virum, c'est-à-dire le savoir, se rapporte à la substance intellectuelle. Primus, c'est-à-dire le principe, se rapporte à la substance ornante. De sorte que tu as ici par ordre : avoir, régir, orner. Ainsi, nous avons esquissé, dans le symbole d'un récit, la condition normale de la vie humaine : d'abord la nature, puis la doctrine, troisièmement le bonheur ».

[FN: § 774-1]

PHIL. IUD.; Sacr. leg. alleg., (éd. Richter, II, 16 éd.; Mang., p. 78; éd. Par., p. 1098):

[FN: § 774-2]

A. LOISY ; Simples réflexions, etc., p. 52 et sv. Plus loin, l'auteur se plaint de ce que son idée est travestie par le Saint-Office ; il dit : « (p. 55) Je fais entendre que Jean pouvait se dire le témoin du Christ, étant le témoin de sa vie dans l'Église. La S. Congrégation me fait dire que Jean n'aurait pas dû se présenter en témoin du Christ, puisqu'il n'était qu'un témoin de la vie chrétienne. Sous la ressemblance des textes, les deux idées sont différentes ». Pour se faire comprendre, notre autour ne ferait pas mal de s'expliquer mieux. Au point de vue historico-expérimental, il semble en effet que si l'on dit : « Pline le Jeune est un témoin de Trajan ; Suétone est un témoin de plusieurs empereurs ; Jean est un témoin du Christ », on entend que Pline a connu, vu Trajan, Suétone, les empereurs, Jean, le Christ. Si l'on veut dire autre chose, il faut le faire clairement comprendre.

[FN: § 774-3]

Un autre auteur nous explique l'allégorie des noces de Cana. JEAN D'ALMA ; La contr. du quatr. évang., « (p. 59), 6. Il y a six urnes de pierre posées à terre selon le mode de purification des Juifs, et d'une capacité d'environ deux ou trois mesures. Si l'on veut chercher encore quel sens l'évangile spirituel accorde à ce symbole, il (p. 60) faut rapprocher le festin de Cana de celui que Jésus fit, après avoir rassemblé ses cinq premiers apôtres dans la maison de Lévi-Matthieu. C'est là que, répondant à une question des Pharisiens sur la différence de sa discipline et de celle des disciples de Jean, il se donne comme l'époux qui vit avec ses amis et qui ne met pas son vin dans de vieilles outres (Marc II, 22). Or les cinq disciples qu'il vient de réunir et qui, avec l'époux de Cana, sont portés au nombre de six, ne sont point des outres de cuir, mais bien des urnes de pierre, fondements de l'Église ». Si les disciples avaient été au nombre de six, on n'aurait pas tenu compte de l'époux, et l'on aurait eu également les six urnes. Si les disciples avaient été quatre, il n'y aurait pas eu grand mal : on leur ajoutait l'époux et l'épouse, et l'on avait encore le nombre six. «(p. 62), 11. Tel fut, dit l'évangéliste, le début des miracles de Jésus... Il serait étrange que le christianisme eût un miracle matériel de ce genre pour point de départ... » Avec des preuves de ce genre, on démontre tout ce qu'on veut.

[FN: § 775-1]

JEAN D'ALMA ; La contr. du quatr. évang. L'auteur reconnaît que l'histoire et l'allégorie s'entrecroisent, dans l'évangile selon Saint-Jean. « (p. 25), 19 Ayant achevé son prologue, l'évangéliste entre aussitôt dans l'exposition du drame qu'il vient d'annoncer. Voici la première rencontre des ténèbres et de la lumière. Ce n'est pas que Jean soit la lumière, mais c'est un témoin, un flambeau ardent et brillant. Il baptise : les Juifs envoient vers lui, de Jérusalem, ceux qui sont officiellement chargés parmi eux de la religion, c'est-à-dire les prêtres et les lévites. Faut-il prendre à la lettre ce récit ? Ou est-il absolument allégorique ? Il peut être historique à la fois et allégorique ». L'auteur a raison. Mais c'est justement pourquoi il est inutile de chercher, comme il le fait, à séparer l'histoire, de l'allégorie et, ajouterons-nous, de l'invention et de l'imagination.

[FN: § 776-1]

A. LOISY ; Autour d'un petit livre.

[FN: § 777-1]

PIEPENBRING ; Jésus historique. L'auteur loue beaucoup l'abbé Loisy. Il cherche à deviner ce qu'était l'Évangile primitif, et ne s'aperçoit pas que, dans son œuvre entièrement hypothétique, il ne trouve que ce qu'il lui plaît d'y mettre. C'est ainsi qu'il peut conclure « (p. 181) Si maintenant nous jetons encore un coup d'œil rétrospectif sur le ministère de Jésus, il convient de dire que, dans les sources de nos Évangiles, les miracles ne jouent qu'un rôle minime et se réduisent à quelques guérisons opérées par Jésus. La prédication fut donc de beaucoup l'élément principal de son ministère. Il en est tout autrement dans les parties récentes des Évangiles. Une comparaison attentive de celles-ci avec les sources premières prouve que les miracles sont allés en augmentant dans l'histoire évangélique, et qu'ils ont pris un caractère toujours plus extraordinaire ». Où sont ces « sources » ? De l'aveu de Piepenbring lui-même, elles se réduisent aux Logia, dont il dit : « (p. 40) On voit que les Logia nous sont parvenus dans un état décousu et que certains textes n'y sont plus tout à fait primitifs, mais portent déjà l'empreinte de la théologie apostolique... » C'est un proto-Marc, que personne n'a jamais vu, et dont beaucoup mettent l'existence en doute. C’est sur ces fondements fragiles que l'auteur élève tout son édifice. « (p. 75) Comme il n'est pas à supposer qu'en dehors des Logia et du proto-Marc, il n'y ait aucun autre élément authentique dans nos Évangiles synoptiques, il y a lieu de les examiner attentivement pour recueillir ceux de ces éléments qui s'y trouvent réellement ». C'est la même opération qu'on a tentée pour l'Iliade et pour d'autres récits légendaires, mais avec peu ou point de succès. Il n'y a pas moyen de résoudre ces devinettes. Parmi les plus belles transformations d'un texte connu en un prétendu texte primitif entièrement inconnu, il faut placer celle accomplie par Bascoul, pour le texte de la célèbre ode de Sapho. Il affirme que le texte que nous connaissons est une parodie. Jusque-là, passe encore : mais ensuite, sans l'aide d'aucun autre document que du même texte, il trouve le texte primitif qui a été parodié, et qui est de nature entièrement différente de celui que nous connaissons ! Espérons que cet auteur emploiera sa méthode pour nous donner une Iliade primitive, grâce à laquelle nous connaîtrons la véritable histoire de la guerre de Troie, et qu'il mènera ainsi à bonne fin l'audacieuse entreprise tentée en vain par Thucydide, par Dion Chrysostome et par tant d'autres auteurs. I. M. F. BASCOUL ; La chaste Sappho. L'ode n'est plus érotique, au contraire, elle est « (p. 30)... la description... des émotions que provoquent l'apparition et les chants d'un poète-musicien, rival de Sappho et de son école. Ici l'histoire nous indique Stésichore. [C'est vraiment une bien belle chose que de pouvoir deviner si facilement l'histoire!] C'est lui qui, en sa qualité de grand poète, et de rénovateur de la poésie lyrique, devait fatalement [quand on sait ce qui doit arriver, on sait aussi ce qui est arrivé] produire une grande impression sur Sappho qui, proscrite avec sa fille, le rencontra en Sicile [quel dommage que l'auteur ne nous dise pas le jour précis] ; et c'est pour émouvoir l'indifférence de sa fille, que Sappho lui chanta ce chef-d'œuvre de description naturelle et sublime des émotions que provoque : D'abord l'apparition des Dieux... (p. 31) Ensuite l'inspiration... Enfin l’enthousiasme... »,

[FN: § 778-1]

La dispute a aujourd'hui tourné principalement à la politique ; et il ne s'agit pas tant de critique historique, que d'attaquer ou de défendre l'Église romaine. S. REINACH. Orpheus, p. 328 : « La comparaison de nos Évangiles et la distinction des couches successives qui les ont formés prouvent que même la légende de Jésus, telle que l'enseigne l'Église, n'est pas appuyée dans toutes ses parties parles textes, qu'elle allègue ». Reinach a raison ; mais les interprétations qu'il admet, de l'abbé, Loisy, ne valent pas mieux. Elles manquent de preuves autant que les interprétations d'Homère par Héraclide. Nous ne sommes pas enfermés dans le dilemme : ou d'accepter l'Iliade comme un récit historique, ou d'y substituer les interprétations d'Héraclide.

[FN: § 779-1]

G. FOUCART; La méth. comp. dans l'hist. des relig. « (p. 18) Au siècle dernier, la découverte de la littérature védique suscita dans le monde savant un enthousiasme dont il est difficile de se faire aujourd'hui une idée. On s'imagina posséder, transmis fidèlement par la tradition, les chants des pasteurs de la première humanité, célébrant leurs dieux en menant paître leurs troupeaux. C'étaient, croyait-on, les (p. 19) ancêtres des races aryennes, et dans leurs monuments on allait trouver la clef de toutes les langues, de toutes les religions des peuples indo-européens. Celles de la Grèce eurent particulièrement à souffrir de cette illusion ; pendant cinquante ans, la méthode philologique, qui avait la prétention de révéler la nature véritable des dieux helléniques, les mythes salaires, les phénomènes météorologiques empêchèrent tout progrès sérieux, Le mythe solaire, surtout, semble la maladie inévitable que traversent, pendant leur croissance, les sciences religieuses en formation. L'Égyptologie est encore infectée des rêveries fumeuses de la première école, dont on vit se perpétuer jusqu'en ces dernières années le galimatias mystique. Pour les religions helléniques, les traités les plus récents sont encore tout imprégnés des vieilles erreurs propagées par Max Muller et son école ». Malheureusement la méthode « comparative » de Foucart a aussi de graves défauts, comme toute méthode a priori.

[FN: § 781-1]

MAX MULLER ; Ess. sur la méth. comp., p. 111 et sv. Dans le texte, j'ai ajouté la forme grecque de Prokris. L'auteur continue : « (p. 113) Le second élément est : “Éos aime Képhalos”. Ceci n'a point besoin d'explication ; c'est le vieux conte répété cent fois dans la mythologie aryenne ; “L'Aurore aime le Soleil”. Le troisième élément est : “Prokris est infidèle ; cependant son nouvel amant, quoique sous, une autre forme, est toujours Képhalos”. On peut interpréter ceci comme une expression poétique des rayons du soleil réfléchis en diverses couleurs par les gouttes de rosée. Prokris est embrassée par beaucoup d'amants ; cependant tous sont Képhalos, déguisé, puis enfin reconnu. Le dernier élément est : “Prokris est tuée par Képhalos”, c'est-à-dire la rosée est absorbée par le soleil. Prokris meurt à cause de son amour pour Képhalos, et il doit la tuer parce qu'il l'aime. L'absorption graduelle et inévitable de la rosée par les rayons brûlants du soleil est exprimée, avec beaucoup de vérité, par le trait fatal de Képhalos, lancé (p. 114) sans intention sur Prokris, cachée dans la buisson de la forêt ». N'oublions pas que de semblables interprétations ont été admises et admirées par un grand nombre de gens.

[FN: § 781-2]

Je ne sais pas le sanscrit, et n'ai par conséquent rien à dire sur les assertions étymologiques de Muller. Je les accepte, les yeux fermés ; mais malheureusement, même si on les accepte sans conditions, le raisonnement auquel elles servent de prémisses vaut peu de chose ou rien.

[FN: § 782-1]

A. MAURY ; Hist. des rel. de la Gr., I, p. 12, note.

[FN: § 782-2]

Dict. DAREMBERG SAGLIO, s. r. Centaures, p. 1010.

[FN: § 782-3]

Dict. DAREMBERG SAGLIO, s. r. Centaures, p. 1010.

[FN: § 782-4]

Dict. DAREMBERG SAGLIO, s. r. Centaures, p. 1010.

[FN: § 783-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Ce besoin de longues démonstrations est parfois plus ou moins conscient. EDWARD A. KIMBALL ; Christian Science, Ses Bienfaits Pour l'Humanité, p. 47 : « ... tandis que les « Christian Scientists » sentent que seules les longues études et de longues démonstrations leur permettent d'expliquer la Science ». [C'est nous qui soulignons].

[FN: § 784-1]

A. MAURY ; Hist. des rel. de la Gr., I. BERGAIGNE ; Les dieux souv. de la rel. véd. : « (p. 65) ...il semble permis d'induire qu'au moins dans la pensée de l'auteur de cet hymne, le personnage de Gandharva est équivalent à celui de Savitri... On peut se demander si Gandharva ne joue pas comme Tvashtri, le rôle d'un ennemi d'Indra... Gandharva ne peut guère, dans un pareil mythe, représenter que le gardien du Soma, ou le Soma lui-même, et dans le second cas il ferait double emploi avec Kutsa... (p. 66) D'après le vers IX, 113, 3, ce sont les Gandharvas, déjà assimilés sans doute à des sacrificateurs dans l'hymne III, 38 (vers 6), qui ont reçu le taureau grandi dans les nuages (Soma) et en ont fait le suc du Soma (de la plante du Soma terrestre). Ils jouent alors un rôle bienfaisant en communiquant le Soma aux hommes... (p. 67) En somme, le personnage de Gandharva est un exemple incontestable de la confusion qui s'est souvent opérée, sous un même nom, d'attributs appartenant au Père et au fils ». OLDENBERG ; La relig. du Véda, « (p. 205) Le type de Gandharva remonte, y compris son nom (p. 206) védique, jusqu'à ta période indo-éranienne ; mais il est extraordinairement obscur, [en note : Manhardt et d'autres, – avec raison, je crois, – ont condamné le rapprochement des Gandharvas et des Centaures]. Le Rig-Véda le mentionne, tantôt au singulier, tantôt au pluriel, mais il ne fournit sur lui que des indications confuses et ambiguës. Les traits en sont effacés et fort altérés, probablement parce qu'on a confondu sous un seul nom toutes sortes d'êtres mythiques. Bref, rien de précis ni de sûr ne se laisse entrevoir ».

[FN: § 784-2]

V. HENRY: dans le Journal des Savants , 1899, pp. 22-26.

[FN: § 786-1]

E. PAIS ; Stor. di Roma, I, I, p. 477. «Nous attribuons, au contraire, de l'importance au renseignement d'après lequel Junius Brutus, précisément parce qu'il était un héros rattaché au culte de Junon, était aussi rattaché à celui d'Apollon ou du Soleil... Zaleucos aussi, le législateur des Locriens, était devenu célèbre par sa sévérité... À propos du législateur Charondas aussi, on racontait quelque chose de semblable, et en général, tant de Charondas que de Zaleucos, on racontait les mêmes aventures... (478) Le récit de Zaleucos perd toute valeur, par le fait que ce personnage, qui aurait reçu sa législation de Minerve, n'a jamais existé. Zaleucos était une divinité, et sa nature est expliquée par son nom même qui veut dire : qui est tout à fait lumineux. En un mot, Zaleucos était le soleil, et l’œil dont il aurait privé sa propre personne et son fils, symbolisent le Soleil nouveau et le Soleil ancien ».

[FN: § 788-1]

Un opuscule publié sur ce sujet est fameux. La première édition est anonyme ; elle a pour titre : Comme quoi Napoléon n'a jamais existé, grand erratum, source d'un nombre infini d'errata à noter dans l'histoire du XIXe, siècle. Paris 1827. La 5e édition, publiée après la mort de l'auteur, porte son nom : J. B. PÉRÈS, bibliothécaire de la ville d'Agen. La 10e édition est de 1864. Enfin, une nouvelle édition a été publiée en 1909, avec des notes bio-bibliographiques de GUSTAVE DAVOIS. Les raisonnements contenus dans cette petite brochure sont tout à fait semblables à ceux des auteurs qui interprètent la mythologie par les mythes solaires. « (p. 15) On prétend que sa mère [de Napoléon] se nommait Letitia. Mais sous le (p. 16) nom de Letitia, qui veut dire la joie, on a voulu désigner l'aurore, dont la lumière naissante répand la joie dans toute la nature... Encore est-il bien remarquable que, suivant la mythologie grecque, la mère d'Apollon s'appelait Leto, ou Létô (En Grec). Mais si de Leto les Romains firent Latone, mère d'Apollon, on a mieux aimé, dans notre siècle, en faire Letitia, parce que laetitia est le substantif du verbe laetor ou de l'inusité laeto (p. 17) qui voulait dire inspirer la joie. Il est donc certain que cette Letitia est prise, comme son fils, dans la mythologie grecque ». « (p. 17) On dit que ce moderne Apollon avait quatre frères. Or, ces quatre frères sont les quatre saisons de l'année... », « (p. 25) On dit que Napoléon mit fin à un fléau dévastateur qui terrorisait toute la France, et qu'on nomma l'hydre de la Révolution. Or, une hydre est un serpent, et peu importe l'espèce, surtout quand il s'agit d'une fable. C'est le serpent Python, reptile énorme qui était pour la Grèce l'objet d'une extrême terreur, qu'Apollon dissipa en tuant ce monstre... ».

[FN: § 789-1]

COMPARETTI ; loc., Cit. 668, 1, t. II.

[FN: § 790-1]

P. JENSEN ; Das Gilgamesh.

[FN: § 793-1]

H. SPENCER ; Principes de Sociologie, t. I.

[FN: § 802-1]

JHERING ; L'esprit du droit romain, t. I : ( «p. 30) Si grande qu'ait été l'habileté des jurisconsultes classiques de Rome, il existait cependant, même de leur temps, des règles du droit qui leur restèrent inconnues, et qui furent mises en lumière la première fois, grâce aux efforts de la jurisprudence actuelle : je les nomme les règles latentes du droit. Cela est-il possible, nous demandera-t-on, en objectant que pour appliquer ces règles il fallait les connaître ? Pour toute réponse, nous pouvons nous borner à renvoyer aux lois du langage. Des milliers de personnes appliquent chaque jour ces lois dont elles n'ont jamais entendu parler, [actions non-logiques], dont le savant lui-même n'a pas toujours pleine conscience ; mais ce qui manque à l'entendement est suppléé par le sentiment, par l'instinct grammatical ».

[FN: § 805-1]

F. GIRARD; Manuel élémentaire de droit romain.

[FN: § 805-*]

« Mais cette théorie est hors de cause quand il a simplement teint une étoffe, ou, quoi qu'en dise maladroitement Justinien, Inst., 2, 1, De R. D., 25, quand il a simplement tiré du blé des épis qui le contenaient : cf. D., 41, 1. De A. R. D., 7, 7 in fine. »

[FN: § 815-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR] Les théories juridiques de l'abus du droit sont un bon exemple de cette façon de raisonner.

[FN: § 818-1]

Sumner Maine a parfaitement compris, en ce qui concerne le droit, l'antagonisme existant entre les concepts métaphysiques d'un idéal parfait, et l'étude des faits, qu'il confond avec la « méthode historique ». Il dit « (p. 91) Je crois... qu'elle [la philosophie fondée sur un état de nature] est le plus grand adversaire de la méthode historique; et chaque fois que, toute objection religieuse mise de côté, on verra quelqu'un rejeter cette façon d'étudier ou la condamner, on trouvera généralement qu'il est, consciemment ou non, sous l'impression ou le préjugé qu'il existe un état naturel et non historique de la société et de l'individu ». (Ancient law, ch. IV). Mais il oublie cela, quand il traite de la morale. Il semble croire qu'elle est un modèle de perfection dont la morale actuelle approche plus que celle du passé; par exemple, quand il dit que les jurisconsultes anglais croient que l'Équité anglaise a pour fondement les règles de la morale ; « (p. 69) mais ils oublient que ce sont des règles des siècles passés... et que, si elles ne diffèrent pas beaucoup du credo éthique de notre temps, elles ne sont pas nécessairement (p. 70) à son niveau (they are not necessarily on a level with it). – Ancient law, chap. III.

[FN: § 821-1]

J. J. ROUSSEAU ; Disc. sur l'orig. et les fond. de l'inég. parmi les homm. Il dit dans la préface : «Laissant donc tous les livres scientifiques qui ne nous apprennent qu'à voir les hommes tels qu'ils se sont faits, et méditant sur les premières et plus simples opérations de l'âme humaine, j'y crois apercevoir deux principes antérieurs à la raison... » Notez que Rousseau est le Saint-Père d'une Église qui prétend représenter la Raison et la Science, contre l'Église catholique, que ces messieurs disent représenter la « superstition ».

[FN: § 821-2]

Ici, sans s'en apercevoir, Rousseau se prend à ses propres filets. Oui, il a raison : ses recherches sont semblables aux élucubrations où l'on recherche l’origine du Monde, dans l'humide, dans le feu, etc.; elles sont avec la science sociale dans le même rapport que ces élucubrations étaient avec l'astronomie, telle qu’elle existait de son temps déjà.

[FN: § 822-1]

F. ENGELS ; L'orig. de la fam. : « (p. 2) 1° Stade inférieur. C'est l'enfance du genre humain qui, vivant, tout au moins en partie sur les arbres – ce qui explique seul qu'il ait pu continuer d'exister en présence des grands fauves – se tenait encore dans ses demeures primitives, les forêts tropicales ou sous-tropicales. Les fruits, les noix, les racines servaient de nourriture ; l'élaboration d'un langage articulé est le produit principal de cette époque... Bien qu'il ait pu durer [cet état primitif] des milliers d'années, nous ne pouvons pas davantage en démontrer l'existence [par des témoignages directs ; cependant, une fois accordé que] l’humain est issu du règne animal, on est obligé d'accepter cette transition ». – 2° Stade moyen. Il commence avec l'emploi des poissons (parmi lesquels nous comptons aussi les crustacés, les coquillages et d'autres animaux aquatiques) pour la nourriture, et avec l'usage du feu. Les deux vont ensemble, le feu seul permettant de rendre le poisson parfaitement comestible ». Voyez donc combien de belles choses sait notre auteur ! Les savants discutent pour savoir si la race humaine a une ou plusieurs origines, et où doivent être placées cette origine ou ces origines ; et notre auteur sait que l'homme vient de l'animal, et que cette transformation a eu lieu dans les régions tropicales ou sous-tropicales. Et puis il sait que les hommes commencèrent par manger des poissons ; et cela ne suffit pas : il sait aussi que « (p. 3) des peuples exclusivement chasseurs, tels qu'ils figurent dans (p. 4) les livres, c'est-à-dire ne vivant que de la chasse, il n'y en a jamais eu, le produit de la chasse étant beaucoup trop incertain ».

[FN: § 823-1]

BURLAMAQUI ; Princ. du dr. nat., II 5, 3.

[FN: § 825-1]

Notez que cela se produit à cause de la définition qu'on donne de l'économie pure, et que les définitions sont toujours arbitraires, entre certaines limites (§ 119). Dans le Manuel, nous donnons de l'économie politique la définition suivante : « (P. 145) Nous étudierons les actions logiques, répétées, en grand nombre, qu'exécutent les hommes pour se procurer les choses qui satisfont leurs goûts ».

[FN: § 834-1]

J'emploie ici le terme fiction dans un sens général, comme le fait SUMNER MAINE; Ancient law : «(p. 25) I employ the word «fiction» in a sense considerably wider than that in wich English lawyers are accustomed to use it, and with a meaning much more extensive than that wich belonged to the Roman « fictiones». Fictio, in old Roman law, is properly a term of pleading, and signifies a false averment on the part of the plaintiff wich the defendant was not allowed to traverse ; such, for exemple, as an (p. 26) averment that the plaintiff was a Roman citizen, when in thruth he was a foreigner. The object of these « fictiones » was, of course, to give jurisdiction, and they therefore strongly resembled the allegations in the writs of the English Queen's Bench and Exchequer, by which those Courts contrived to usurp the jurisdiction of the Common Pleas : – the allegation that the defendant was in custody of the King's marshal, or that the plaintiff was the King’s debtor, and could not pay his debt by reason of the defendant's default. But now I employ the expression « Legal Fiction » to signify any assumption wich conceals, or affects to conceal, the fact that a rule of law bas undergone alteration, its letter remaining unchanged, its operation being modified ». « J'emploie le terme « fiction» dans un sens beaucoup plus large que celui en usage parmi les jurisconsultes anglais, et dans un sens plus large que les fictiones romaines. Fictio, dans l'ancienne législation romaine, est proprement un terme de procédure, et signifie une fausse assertion de la part du demandeur, que le défendeur ne peut repousser : par exemple, que le demandeur est citoyen romain, tandis qu'en réalité, il est étranger. L'objet de ces fictiones était d'accorder la juridiction. Elles ressemblent beaucoup aux assertions faites dans les actes devant les Cours de la Reine et de l'Échiquier, grâce auxquelles ces cours imaginèrent d'usurper la juridiction des cours de Common Pleas. Par exemple : l'affirmation que le défendeur est sous la garde du maréchal du roi, ou que le demandeur est débiteur du roi et ne peut pas payer sa dette, par la faute du défendeur. Mais j'emploie maintenant l'expression fiction légale, pour indiquer une affirmation quelconque, qui dissimule ou feint de dissimuler le fait que la règle juridique a été altérée, tandis qu'elle reste la même dans la lettre, les conséquences étant changées ». Le sens peut être encore plus large, et indiquer une assertion évidemment fausse, qu'on accepte pour laisser intacte une règle quelconque, une doctrine, un théorème, tout en en changeant les conséquences.

[FN: § 835-1]

F. GIRARD ; Man... de Dr. Rom., p. 40.

[FN: § 837-1]

SUMNER MAINE ; Ancient law. – LAMBERT; La fonct. du droit civ. comp ., I, p. 180 et sv.

[FN: § 840-1]

E. ROGUIN ; Traité de droit civil comparé, t. I, Le mariage. L'auteur ajoute: « (p. 10) Maintenant, comment faut-il apprécier ces tendances (p. 11) législatives ? Nous n'avons pas eu souci de donner toujours notre opinion, et le présent volume ne contient que quelques appréciations critiques clairsemées ».

[FN: § 841-1]

Gardons-nous bien de croire que ces sentiments et ces préjugés n'étant pas « raisonnables » n'ont aucune valeur sociale. Au contraire, ils représentent une force dont les effets se manifestent toutes les fois qu'elle elle n'est pas contrecarrée par une force plus puissante (§ 2148 et sv.). Ainsi, si les règles du droit pénal ont peu ou point de valeur dans les procès passionnels ou politiques, c'est simplement parce qu'en ce cas elles sont écartées par la passion ; mais elles retrouvent leur valeur dans les procès où la passion n'intervient que faiblement ou pas du tout.

 


 

Notes du Chapitre VI. – Les résidus (§842 à §1088), pp. 450-577

[FN: § 871-1]

MACR. ; Satur., VII. Les nombres entre parenthèses indiquent les chapitres : (VI) Et alios quidem medicos idem dicentes semper audivi, vinum inter calida censendum ; sed et nunc Eustathius, cum causas ebrietatis attingeret, praedicabat vini calorem. On saisit clairement l'idée : celui qui s'enivre a chaud ; donc le vin est chaud. «Mihi autem hoc saepe mecum reputanti visa est vini natura frigori propior, quam calori... » Remarquez que la chaleur n'est pas un caractère propre du vin, mais est accidentelle : Dabo aliud indicium accidentis magis vino, quam ingeniti caloris. Toutes les choses chaudes incitent à l'acte sexuel ; pas le vin ; donc il est froid, Deinde omnia calida Venerem provocant, et semen excitant, et generationi favent : hausto autem mero plurimo, flunt viri ad coitum pigriores. Là, l'idée de chaud se rapporte à l'acuité du sentiment amoureux. Le vinaigre est encore plus froid que le vin. Quid aceto frigidius, quod culpatum vinum est ? En outre : Nec hoc praetereo, quod ex fructibus arborum illi sunt frigidiores, quorum succus imitatur vini saporem : ut mala seu simplicia, seu granata, vel cydonia, quae cotonia vocat Cato. Il semble ici que le terme chaud se rapporte à certaines saveurs. Les femmes s'enivrent moins facilement que les hommes; et l'on cherche les motifs de ce fait, qui est faux. Quelqu'un dit que C'est parce que le corps de la femme est très humide : Mulier humectissimo est corpore, et à cause de ses règles. Un autre ajoute qu'on a oublié le motif pour lequel le corps des femmes est froid (VII) : ita unum ab eo praetermissum est, nimio frigore, quod in earum corpore est, frigescere haustum vinum... Mais un autre encore objecte : Tu vero, Symmache, frustra opinaris, frigidam esse mulierum naturam; quam ego calidiorem virili, si tibi volenti erit, facile probabo. Quis ergo dicat frigidas, quas nemo potest negare plenas caloris, quia sanguinis plenae sunt ? deinde, licet urendi corpora defunctorum usus nostro seculo nullus sit : lectio tamen docet, eo tempore, quo igni dari honor mortuis habebatur, si quando usu venisset, ut plura corpora simul incenderentur, solitos fuisse funerum ministros denis virorum corporibus adiicere singula muliebria ; et unius adiutu, quasi natura flammei, et ideo celeriter ardentis, cetera flagrabant. Ita nec veteribus calor mulierum habebatur incognitus. (VII) Les femmes supportent mieux le froid que les hommes, grâce à la chaleur qu'elles ont dans le corps : Quid plura ? nonne videmus mulieres, quando nimium frigus est, mediocri veste contentas, nec ita operimentis plurimis involutas, ut viri solent ; scilicet naturali calore, contra frigus, quod aer ingerit, repugnante ? Au contraire, objecte un autre, c'est parce que le froid convient au froid : Quod frigus aeris tolerabilius viris ferunt, facit hoc suum frigus : similibus enim similia gaudent. Ideo ne corpus earum frigus horreat, facit consuetudo naturae, quam sortitae sunt frigidiorem.

[FN: § 871-2]

On n'oublie naturellement pas l'histoire habituelle de l'eau des puits. chaude en hiver, froide en été : (VIII) Usu tibi, Albine compertum est, aquas, quae vel de altis puteis, vel de fontibus hauriuntur, fumare hieme, aestate frigescere.

[FN: § 873-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR] PAUL JANET ; Princip. de Métaphys. et de Psychol.. t. I, p. 22 : « Pascal disait que, tout ayant rapport à tout, toutes choses étant causées et causantes, celui qui ne sait pas tout ne sait rien. Ne peut-on pas dire, au contraire, en retournant la proposition, que tout ayant rapport à tout, toutes choses étant causées et causantes, celui qui sait quelque chose, si peu que ce soit, sait par là même quelque chose du tout ? » Pourquoi pas ? on en dit bien d'autres, dans cette « science » que Paul Janet définit ainsi (Ibid., p. 23) : « ... la philosophie est pour nous la science de l'esprit libre, et la science libre de l'esprit ».

[FN: § 886-1]

CIC.; Brut., 46. – QUINT.: VITI, I.

[FN: § 892-1]

Voir, par exemple : Il libro dei sogni ovvero l'eco della fortuna, Firenze, A. Salani editore, 672 pagine. Quand la loterie existait en France, on ne manquait pas de livres semblables. «Liste générale des rêves (Paris, 1787, in-12), avec les noms des choses rêvées et leurs numéros correspondans pour les tirages de la Loterie Royale de France ; ouvrage traduit de l'italien de Fortunato Indovino ; enrichi de quantité de figures analogues à la dite loterie. Nouvelle édition revue, corrigée et augmentée avec les tables des tirages de la même loterie ».

[FN: § 893-1]

Un auteur s'imagine que les actions non-logiques proviennent de l'« escogitation», qui est toujours logique, et que c'est seulement après avoir oublié ces motifs logiques, que les hommes inventent des explications qui font paraître non-logiques les actions.

[FN: § 894-1]

PLIN ; Nat. Hist. Les livres et les paragraphes sont indiqués dans le texte.

[FN: § 894-2]

Voir de nombreux détails, dans HUMBERT DE GALLIER ; Les mœurs et la vie .privée d'autrefois.

[FN: § 894-3]

On a voulu voir l'origine de la civilisation dans les jeux de hasard. Il y a un peu de vrai dans ce paradoxe, en ce sens que le jeu de hasard est l'une des très nombreuses manifestations de l'instinct des combinaisons , qui a été effectivement et demeure un très puissant facteur de civilisation.

[FN: § 895-1]

P. DU CHAILLU ; Voy... dans l’Afrique mérid., pp. 74-75.

[FN: § 898-1]

S. REINACH; Cultes, Mythes et Religion; t. I.

[FN: §901-1]

COWPER ROSE ; dans Biblioth, univ, des voy .; t. 29.

[FN: § 904-1]

S. REINACH ; loc., cit., § 898-1.

[FN: § 908-1]

GELL. ; IV, 9 : Religiosi enim dies dicuntur tristi omine infames impeditique ; in quibus et res divinas facere et rem quampiam novam. exordiri temparandum est ; quos multitudo imperitorum.prave et perperam nefastos appellant. Comme on le sait, aux jours néfastes, le préteur ne pouvait prononcer les mots : do, dico, addico. – VARRO ; De ling. lat., VI, 29: Dies fasti, per quos praetoribus omnia verba sine piaculo licet fari. (30) Contrarii horum. vocantur dies nefasti, per quos dies nefas fari praetorem do, dico, addico ; itaque non potest agi, necesse enim aliquo eorum uti verbo, cum lege quid peragitur. L'inverse pourrait aussi s'être produit, à l'origine. Les auteurs de l'époque historique ne savent pas pourquoi certains jours étaient fastes, d'autres néfastes. Le préteur qui, par inadvertance, prononçait les mots do, dico, addico, devait se purifier par des sacrifices. S'il les avait prononcés, sachant que c'était défendu, Q. Mucius disait, qu'il ne pouvait expier. (30) Praetor qui tum fatus est, si imprudens fecit, piaculari hostia facta piatur ; si prudens dixit, Quintus Mucius ambigebat eum expiari, ut impium non posse.

[FN: § 908-2]

MACROB. ; Satur., I, 16 : Sunt praeterea ferias propriae familiarum ; ut familiae Claudiae, vel Aemiliae, seu Iuliae, sive Corneliae, et si quas ferias proprias quaeque familia ex usu domesticae celebritatis observat. Sunt singulorum ; ut natalium fulgurumque susceptiones, item funerum atque expiationum : apud veteres quoque, qui nominasset Salutem, Semoniam, Seiam, Segetiam, Tutilinam, ferias observabat. Item Flaminica, quoties tonitrua audisset, feriata erat, donec placasset Deos.

[FN: § 908-3]

Luc. ; Pseudolog., 12-13.

[FN: § 909-1]

MURATORI ; Dissert. LIX, p. 70 et sv. : (p. 70) Inter superstitiones numerantur quoque observatio temporum, sive dierum. Frequentissima haec olim fuit, reclamantibus frustra Ecclesiae Pastoribus, ac Patribus... (p. 71) Sed quam pertinax impia haec observatio etiam inter Christi fideles fuerit, exemplo erunt dies Aegyptiaci a remota antiquitate ad Saeculum usque XVI Christianae Aerae diligentissime a plerisque servati, et publicis etiam Kalendariis inscripti... Videlicet singulis mensibus dies duo adeo infausti, adeoque mali ominis, atque ii suis sedibus designati, decurrere putabantur, ut nihil nisi adversi tunc operanti formidandum foret. Non vulgus dumtaxat, sed et homines politioris Minervae, iis diebus sibi religiose cavebant, rati traditionem hanc tanta antiquitate stipatam gravibus fundamentis niti, quae tamen unice in nubibus, sive in impostorum phantasia olim fabricata fuit. C'est l’erreur habituelle qui substitue les actions logiques aux actions non-logiques. (p. 72) Profecto ne heic quidem. Maiorum nostrorum mores se improvidam credulitatem, sive superstitionem mirari nobis licet, quum ne nostra quidem aetas careat, hominibus, et fortasse plus sibi sapientiae tribuentibus, quam rudium saeculorum mentes sibi tribuerunt : qui die Veneris nullum iter inchoarent, veriti, ne exemplo suo verum. comprobarent adagium. quoddam Hispanicum nempe : Die Hartis, aut Veneris neque nuptias, neque iter institue. Qui etiam horrent, si quando ad mensam cum duodecim aliis convivis se sedere deprehendunt : opinio enim invaluit, non excessurum annum integrum, quin ex iis tredecim unum mors insidiosa surripiat. Qui denique, ut plura alia praeteream, si forte sal in mensa effundi conspiciunt, infortunium aliquod imminere sibi continuo persuadent.

[FN: § 909-2]

SUET.; Oct. 92: Auspicia et omina quaedam pro certissimis observabat... Observabat et dies quosdam, ne aut prostridie nundinas quoquam proficisceretur, aut Nonis quicquam rei seriae inchoaret ; nihil in hoc quidem aliud devitans, ut ad Tiberium scribit, quam nominis. « il [Auguste] observait certains jours ; il ne se mettait pas en route le jour suivant ceux du marché, et ne commençait aux nonnes aucune chose importante ; il n'avait en cela d'autre répugnance, comme il l'écrivit à Tibère, que le mauvais augure du nom ». – M. BUSH ; Les mém. de Bismarck, t. II, p. 24 : « Jules Favre vient de télégraphier qu'il serait vendredi à Francfort. Le chef [Bismarck], lui, n'y sera que samedi, parce qu'il a peur que le vendredi ne lui porte malheur ». Il se peut encore que ce fût une excuse diplomatique, mais le fait de l'avoir employée montre qu'il y avait des gens qui y croyaient.

[FN: § 912-1]

RICARDUS HEIM ; Incantamenta magica graeca latina. V. Similia similibus. (p. 481) Opinio de vi algue potestate similium, quae his verbis « similia similibus » breviter explicari potest, cura in universa arte magica tum in medicinali multum valebat. De hac re antiqui scriptores superstitiosi multum scripserunt et finxerunt, veluti Ps. Democritus et Nepualius quorum libri adhuc extant : . Per fictam quandam similitudinem vera mala depelli posse credebant homines, qui decipi volebant. [Voilà l'explication logique de l'instinct qui pousse à unir des choses semblables ou contraires]. Multa exempla affert Kopp (pal. crit. III, § 511, 512, 516 sq.: Wuttke, § 477). Mira sunt commenta quae hic superstitio et cogitatio vana creavit, veluti Geop. II, 42, 2... (p. 485) De quibus Hercolis leonem suffocantis imaginibus in tabulis gemmisque haud raro repertis iam antea... dixi...

[FN: § 913-1]

RÉVILLE; Les religions des peuples non civilisés, t. I (p. 152) Le Cafre... n'est pas fétichiste, n'est donc pas idolâtre comme le Nègre, mais il a, s'il est possible, plus encore d'amulettes de toute forme et de tout nom... (p. 153) C'est l'idée que les qualités ou les défauts d'un objet quelconque se transmettent par le simple contact, et que l'analogie de deux faits, l'un accompli, l'autre désiré, équivaut à un rapport de cause à effet ». C'est là l'erreur habituelle de supposer des raisonnements logiques où ils n'existent pas. Songez donc si un Cafre est capable de raisonnements métaphysiques sur la cause et l'effet ! En réalité, il y a un sentiment non-logique. qui fait croire que choses et actes s'unissent avec d'autres choses et d'autres actes semblables. « (p. 153) Un collier de Cafre, par exemple, tient enfilés un os de mouton, un anneau de fer, une griffe de lion, une patte de milan. Pourquoi ? C'est pour que son possesseur puisse fuir avec la rapidité du milan, qu'il ait la force du lion, la dureté d'un os et la solidité du fer, S'il se voit menacé de mort, un Cafre se fixe sur la poitrine un de ces insectes qui vivent longtemps encore, bien que percés d'une aiguille, pour lui emprunter sa faculté de longue résistance à la mort. S'il veut adoucir le cœur de celui dont il désire acheter le bétail ou la fille, il mâche un morceau de bois jusqu'à ce qu'il soit réduit en pulpe... ».

[FN: § 913-2]

Il convient d'observer ici comment on arrive au même point avec la méthode inductive et avec la méthode déductive. Au chapitre précédent (§ 733 et sv.), nous avons étudié directement des phénomènes où apparaissaient des faits semblables, et nous avons cherché si cela se produisait toujours par imitation. La réponse a été négative, et nous avons vu qu'il y a des cas où l'imitation est exclue ; et, par induction, nous avons été conduits à envisager une autre cause de la similitude des faits, c'est-à-dire les sentiments qui poussent les hommes à unir certaines choses. En suivant au contraire la voie déductive, on commencerait par reconnaître, comme nous le faisons ici, l'existence de ces sentiments. Ensuite, de cette existence, on déduirait que des hommes ayant les mêmes sentiments, peuvent, en certains cas, agir d'une façon semblable, sans s'imiter réciproquement le moins du monde. Alors les faits cités au chapitre précédent, au lieu de servir à l'induction, serviraient à vérifier les conclusions de la déduction. D'une manière ou de l'autre, on opère rigoureusement d'après la méthode expérimentale, puisque, ou par induction, ou par déduction, les faits gouvernent toujours tout le raisonnement.

[FN: § 914-1]

THÉOCR.; II, 24-31. - *Le scoliaste note : «Comme le laurier mis au feu disparaît tout à coup, que de même aussi le corps de Delphis soit consumé dans la flamme de l'amour ». Plus loin (58), la magicienne dit qu'elle écrase un lézard pour Delphis, et qu'elle lui portera un mauvais breuvage. Là, il n'y a aucune ressemblance : nous sommes dans le cas des résidus (a). – VIRGILE, Egl., VIII, imite Théocrite et ajoute quelque chose, tiré des superstitions populaires.

(79) Ducite ab urbe domum, mea carmina, ducite Daphnim.
Limus ut hic durescit, et haec ut cers, liquescit
Uno eodemque igni : sic nostro Daphnis amore.

« Comme cette argile durcit et cette cire se fond dans le même feu, qu'ainsi fasse mon amour à Daphnis ». SERVIUS explique : Fecerat illa duas imagines, alteram ex limo, qui ex igne fit durior : alteram ex cera, quae igne solvitur ; ut videlicet mens amatoris ita duresceret ad illam, quam tunc amabat, omnesque alias, sicut ad ignem limus ; et ad se ita molliretur et solveretur amore, ut cera ad ignem liquescit. En un mot, son amant devait, tel l'argile au feu, devenir dur aux autres femmes et, tel que la cire, se fondre à son amour à elle. Virgile continue :

(82) Sparge molam, et fragilis incende bitumine lauros.
Daphnis me malus urit: ego hanc in Daphnide laurum.

« Répands cette farine sacrée et brûle avec le bitume les lauriers fragiles. Le perfide Daphnis me fait brûler, moi je fais brûler Daphnis dans ce laurier ». – SERVIUS observe : In Daphnide laurum. Aut archaïsmos est, pro in Daphniden : aut intelligamus supra Daphnidis effigieni eam laurum, incendere, propter nominis similitudinem. Il est mieux d'entendre : in hac lauro uro Daphnidem. La similitude devient plus complète, dans Virgile, par l'opération faite sur les dépouilles de Daphnis. La magicienne les enterre sous le seuil de la porte, pour rappeler Daphnis à cette porte.

(92) Pignora cara sui ; quae nunc ego limine in ipso,
Terra, tibi mando ; debent hæc pignora Daphnim.

[FN: § 914-2]

OVID. ; Epist. VI. Hypsipyle Iasoni,

(91) Devovet absentes simulacraque cerea figit,
Et miserum tenues in iecur urget acus.

[FN: § 914-3]

TARTAROTTI ; Del congresso notturno delle Lamie, lib. II, cap. 17, 2.

[FN: § 914-4]

FERNAND HAYEM ; La Maréchale d'Ancre et Leonora Galigai ; p. 280. Interrogatoire de L. Galigai. L'accusée répond : « Ne scayt ce qu'on luy veult dire des images de cire, et que c'est à faire à des sorciers, n'ayant jamais esté autre que chrestienne et qu'il ne se trouvera jamais cela d'elle. – A quoi elle se servoit de ces images de cire ? – A dict que Dieu la punisse si elle scayt que c'est desd images de cire... ». (p. 281) « Dans sa maison, lorsqu'elle fut ravagée, pillée et démolie, elle avait eu une chambre haulte en forme de galetas en lad maison un cercueil, sur une table et en icelle une effigie de cire couverte d'un poille de velours noir, quatre chandeliers aux coings avec des cierges blancs. – A dict qu'elle vouldroit plustôt mourir que de veoir une telle chose que cela... » Reg. crim. du Chat de Paris ; t. II. Procès contre Jehenne de Brigue, en 1390 : « (p. 287) Et lors lui qui deppose demanda à ycelle Jehennete se elle savoit bien qui estoit la femme qui lui faisoit souffrir tel tourment, laquele lui respondi que se faisoit ladite Gilete,... et que elle avoit fait un voult de cire où elle avoit mis des cheveux de lui qui depose, et que toutes fois que il estoit ainsi malade, elle mettoit sur le feu, en une paelle d'arain, le dit voult, et le tournoit à une cuillier d'arain, laquelle paelle et cuillier il lui avoit donnée. Et lors lui qui deppose lui demanda comment elle le savoit, et elle lui respondi que elle le savoit parce que elle avoit parlé à ses choses, et que oncques homs n'avoit esté si fort envoultés, et que, pour le guérir, avoit souffert moult de paine, et autant que elle avoit oncques souffert ».

[FN: § 915-1]

M. PSELLI ; De operatione daemonum, p. 85. L'auteur s'en prend aux médecins qui ne veulent pas reconnaître l'œuvre du démon et qui veulent expliquer les phénomènes par des faits expérimentaux. (p. 85) . « Il n'y a pas lieu de s'étonner si les médecins parlent ainsi : ils ne voient rien au delà de ce qui tombe sous les sens, et ne s'occupent que du corps ». C'est précisément ce que, de nos jours encore, les métaphysiciens, admirateurs de Kant et de Hegel ou des beautés sublimes « du droit des gens », reprochent aux personnes qui veulent demeurer dans le domaine des réalités expérimentales.

[FN: § 915-2]

WIER ; Hist. disp. et disc., I « (p. 339) Ie proposerai en cest endroit une esmerueiable histoire... laquelle a esté escrite par Hector Boece... Le Roy Dussus tomba en vne maladie, laquelle de soy mesme n'étoit si dangereuse que dificile a conoistre par les plus doctes medecins... Car il suoit toute nuit, et ne pouuoit dormir, et de iour il se reposoit, à peine soulagé de la douleur qu'il auoit enduree toute la nuit... » Finalement, en Écosse, on a vent, sans savoir comment, « (p. 340) que le Roy estoit detenu par vue si longue espace de temps en langueur... non par maladie naturelle, mais au moyen de l'art diabolique des sorcieres, lesquelles exerçoient contre luy l'art de Magie et sorcellerie, en vne ville de Morauie, nommee Forres ». Le roi envoie des messagers dans cette ville, et découvre que les soldats soupçonnaient déjà la chose, à cause des propos de la maîtresse d'un soldat, laquelle était fille d'une sorcière. Les soldats vont à sa maison, de nuit, « (p. 341) lesquels entrans de force en la maison fermee, trouuèrent vne sorciere qui tenoit une image de cire, representant la figure de Dussus, laquelle estoit faicte, comme il est vraysemblable, par art Diabolique, et attachee à vn pau de bois deuant le feu, là où elle se fondoit, ce pendant que vne autre sorcière en recitant quelques charmes, distilloit peu à peu vne liqueur (p. 342) par dessus l'effigie. Ces sorcières doncques etant prises... et interroguees... elles respondirent que le Roy Dussus fondoit en sueur, pendant que son effigie estoit devant le feu : et que tandis que lon prononçoit les charmes il ne pouuoit dormir, tellement qu'à mesure que la cire fondoit, il tomboit en langueur, et qu'il mourroit incontinent qu’elle seroit du tout fondue. Elles dirent aussi que les Diables les auoyent ainsi apprises... » Ils brûlent les sorcières et « ce pendant que ces choses se faisoyent... le Roy commença à se reuenir, et passa la nuict sans suer, si bien que le iour suyuant il reprit ses forces... » Wier dit que c'est peut-être le démon qui a fait celav; mais il ajoute ensuite « (p. 343) Ie dis ceci encores que l'histoire fust vraye, ce que ie ne pense... ».

[FN: § 917-1]

Geopont., II. 42 – † il y a une variante que nous rapportons pour montrer comment s'allongent les légendes nées d'un résidu. Au lieu de dire simplement quelqu'un, l'un des manuscrits porte : « Une vierge à l'âge nubile, pieds nus, nue, n'ayant rien sur elle, les cheveux défaits, portant un coq dans ses mains, etc. » Il y a là un résidu du genre (β 2). Cette vierge qui se promène nue autour du champ est une chose exceptionnelle, qui s'unit à la chose rare qu'est la disparition de l'orobanche. Notez qu'on dit qu'elle doit être d'âge nubile, – – car si c'était une fillette, il n'y aurait rien d'extraordinaire à ce qu'elle allât nue.

[FN: § 919-1]

ARNOB.; Adv. gentes, VI1, 19 : Sed erras, inquit, et laberis : nam Diis fœminis fœminas, mares maribus hostias immolare, abstrusa et interior ratio est, vulgique a cognitione dimota. – VIRG.; Aen., III :

(118) Sic fatus, meritos aris mactavit honores,
Taurum Neptuno, taurum tibi, pulcher Apollo ;
Nigram Hiemi pecudem, Zephyris felicibus albam.

– SERV., (118) : Ratio enim victimarum. fit pro qualitate numinum : nam aut hae immolantur, quae obsunt eorum muneribus, ut porcus Cereri ; quia obest frugibus : hircus Libero ; quia vitibus nocet. Aut certe ad similitudinem : ut inferis nigras pecudes ; superis albas immolent ; tempesti atras ; candidas serenitati,... SCHOEM ; Ant. grecq., II : « (p. 292) Nulle part ailleurs qu'à Sparte on n'offrait des chèvres à Héra. Athéna les réprouvait aussi, et l'on pensait que cette rancune venait des dégâts qu'elles causaient aux oliviers. [Dérivation pour expliquer un résidu (I-α)] Pour la même raison, ces animaux ne pouvaient être conduits sur l'Acropole pour être sacrifiés à aucune des divinités dont les temples avoisinaient celui de la déesse protectrice de la ville. On prêtait sans doute à Dionysos un raisonnement contraire [c'est le fait habituel des dérivations: une même dérivation peut servir pour et contre (§ 587, 1416, 1774)] ; on croyait être particulièrement agréable à ce dieu en lui offrant des boucs, à cause des ravages qu'ils faisaient dans les vignes ». Qu’y a-t-il là de constant ? Le résidu de la combinaison (α). Qu'y a-t-il de variable ? Les raisonnements ayant pour but de donner une apparence logique au résidu, les dérivations. – DAREMB. SAGL., s. r. Sacrificium: « (p. 959) Quant aux raisons pour lesquelles les anciens expliquaient préférences ou répugnances de telle divinité vis-à-vis de telle ou telle victime, elles sont parfois futiles [Résidus (α)] ; en tout cas elles ne se ramènent point à un seul et unique principe. Ce sont parfois de simples jeux de mots [Résidu (γ)]. Le rouget disait Apollodore et répète Athénée, s'offrait à Hécate parce que son nom rappelait des épithètes courantes de la déesse : ; le porc, insinue le Mégarien d'Aristophane, est une victime qui convient certainement à Aphrodite, parce que son nom désigne aussi les parties sexuelles de la femme. D'autres fois, on arguait d'une ressemblance, plus ou moins réelle, entre l'humeur du dieu et celle de la victime... Ici, la prétendue hostilité d'un dieu ou d'une déesse à l'égard d'une espèce d'animaux engageait, prétendait-on, à les lui sacrifier... Là, cette hostilité servait, tout au contraire, à motiver l'exclusion de telles ou telles victimes... Dans les sacrifices aux morts, la victime, quand il y en avait une, paraît avoir été d'ordinaire une brebis, et de même dans les sacrifices aux héros, exception faite pour les braves tombés sur le champ de bataille et à qui l'on rendait des honneurs héroïques ; à ceux-là on sacrifiait des taureaux. » [Résidu (β 1)].

[FN: § 920-1]

FESTUS ; s. r. Cingulum : Cingulo nova nupta praecingebatur, quod vir in lecto, solvebat, factum ex lana ovis, ut, sicut illa in glomos sublata coniuncta inter se sit, sic vir suus secum cinctus vinctusque esset. Hunc Herculeaneo nodo vinctum vir solvit ominis gratia, ut sic ipse felix sit in suscipiendis liberis, ut fuit Hercules, qui septuaginta liberos reliquit.

[FN: § 921-1]

SUET ; Oct., 91 : Ex nocturno visu, etiam stipem quotannis die certo emendicabat a populo, cavam manum asses porrigentibus praebens. – DIO CASS. : LIV, 35.

[FN: § 923-1]

SUET. ; Nero, 56 : Alia superstitione captus, in qua sola pertinacissime haesit. Siquidem icunculam puellarem, cum quasi remedium insidiarum a plebeio quodam et ignoto muneri accepisset, detecta confestim coniuratione, pro summo numine, trinisque in die sacrificiis, colere perseveravit ; volebatque credi monitione eius futura praenoscere. Il y avait là concours de circonstances exceptionnelles. – Voilà une chose simplement rare. ÉMILE OLLIVIER; L'emp. lib., II Leprince Louis Napoléon (le futur Napoléon III) trouva dans l'héritage maternel « (p. 55) de précieux souvenirs ; un surtout dont il ne se sépara jamais, le talisman. C'était un bijou contenant un morceau de la vraie croix, trouvé au cou de Charlemagne dans son tombeau et envoyé lors du couronnement à Napoléon Ier – . Dans la famille on attachait à sa possession une promesse de protection divine. Joséphine, non sans peine, obtint d'en rester la dépositaire ; après le divorce on ne le lui retira pas ; Hortense le recueillit ».

[FN: § 925-1]

SUET. ; Galb., 1. – PLIN. ; XV, 40. – DIO CASS. ; XLVIII, 52. Ces deux derniers auteurs ne disent pas que les lauriers se desséchèrent ; Pline dit même que, de son temps, il y en avait encore.

[FN: § 925-2]

PLIN. ; Nat. Hist., VIII, 69 : Est in Annalibus nostris, peperisse saepe [mulas] ; verum prodigii loco habitum.

[FN: § 925-3]

LIV.; XXXVII, 3.

[FN: § 925-4]

SUET.; Oct., 94.

[FN: § 925-5]

Les grandes chroniques de France, publ. par P. Paris ; t. II, Le sixiesme livre des fais, etc. : « (p. 285) Plusieurs signes avindrent par trois ans devant qui apertement signifloient sa mort et son deffinement. Le premier fu que le soleil et la lune perdirent leur couleur naturelle par trois jours, et furent ainsi comme tous noirs, un pou (p. 286) avant ce qu'il mourust... le cinquiesme si fu quant il chevauchoit un jour de lieu en autre, le jour devint ainsi comme tout noir, et un grant brandon de feu courut soudainement de la destre partie en la senestre par devant luy... ».

[FN: § 926-1]

La conception de Bouddha fut accompagnée de tant de prodiges, qu'il serait trop long – et peu utile –d'en rapporter ici ne fût-ce qu'une partie importante. L'exemple suivant suffira. – H. KERN ; Hist. du Boudh., I, p. 23-24. La vertueuse reine Mâyâ a rêvé que « (p. 23) les quatre souverains divins des points cardinaux l'enlevèrent avec son lit et la portèrent sur l'Himâlaya, où ils la déposèrent sous l'ombrage d'un arbre à larges branches... (p. 24) le Bodhisatva prit la forme d'un éléphant blanc, quitta la Montagne d'Or sur laquelle il se trouvait, monta sur la Montagne d'Argent, entra avec un lis d'eau blanc dans sa trompe, et accompagné d'un bruit formidable, dans la grotte d'or, et après avoir fait trois fois le tour du lit de repos, en prenant la droite, en signe de respect, il ouvrit le flanc droit de la reine et entra ainsi dans son sein... Au moment de la conception du Bodhisatva dans le sein de sa mère, la nature entière fut en mouvement et l'on aperçut trente-deux présages : une lumière incomparable illumina tout l'Univers, etc. ». Les Latins ne donnent pas dans ces extravagances orientales. Suétone, Oct., 94, raconte, suivant Asclépiade Mendès, comment Atia conçut Auguste. Elle était venue au temple d'Apollon, pour y sacrifier. « La litière ayant été déposée à terre, tandis que les autres matrones se retirèrent, elle s'endormit. Tout d'un coup, un serpent s'introduisit auprès d'elle ; puis il s'en alla peu après. Elle se purifia comme après les embrassements de son mari. Dès ce moment, elle eut sur le corps une tache en forme de serpent, et l'on ne put jamais l'enlever ; c'est pourquoi Atia dut toujours s'abstenir des bains publics ». Les serpents, soit dit sans vouloir faire tort à celui qui séduisit Ève, notre mère, paraissent avoir fréquemment et volontiers des rapports avec les femmes. L'un d'eux, soit pour son propre compte, soit pour celui de Zeus, engrossa Olympie, mère d'Alexandre le Grand. – IUST. ; XII, 16. Qua nocte eum mater Olympias concepit, visa per quietem est cum ingenti serpente volutari ; nec decepta somnio est : nam profecto maius humana mortalitate opus utero tulit. « La nuit dans laquelle sa mère Olympie conçut, il sembla à celle-ci, dans son sommeil, coucher avec un énorme serpent ; et elle ne fut pas trompée par le sommeil, car elle n'était certainement pas enceinte des œuvres d'un mortel ». – Idem ; XI, 11. Il raconte comment Alexandre ad Iovem deinde Hammonem pergit, consulturus et de eventu faturorum, et de origine sua. Namque mater eius Olympias confessa viro suo, Philippo fuerat : Alexandrum non ex eo se, sed ex serpente ingentis magnitudinis concepisse. Denique Philippus ultimo prope vitae suae tempore, filium suum non esse palam praedicaverat. Qua ex causa Olympiadem, velut stupri compertam, repudio demiserat. Puis la légende croît et s'étend. PLUTARQUE, Alex., 2, raconte que Philippe vit un serpent qui dormait auprès de sa femme. Il ajoute que d'autres disent qu'Olympie gardait près d'elle des serpents apprivoisés. Puis (3) il rapporte que Philippe perdit un œil « qu'il avait mis à l'entrebâillement de la porte, pour voir le dieu coucher avec sa femme, sous la forme d'un dragon » En réalité, Philippe perdit son œil au siège de Métone. De nouvelles enjolivures produisent ensuite le roman de la naissance d'Alexandre, dans le Pseudo-Callisthène. Il ne nous importe pas du tout de rechercher quelle part de croyance naïve et quelle part d'artifice il pourrait y avoir dans ces légendes, et pas même si elles pourraient tirer leur origine d'un fait réel, comme celui, cité aussi par Lucien, Pseudomant., 6, des serpents apprivoisés, que des femmes macédoniennes gardaient auprès d'elles. Mais le seul fait de l'existence de ces légendes, et mieux encore de l'accueil favorable qu'elles ont rencontré, démontre qu'elles correspondaient à certains sentiments. C'est cela seul qu'il nous importe de mettre en lumière. Notez de plus, comme d'habitude, l'existence d'un noyau autour duquel s'étend la nébuleuse des dérivations. P. Scipion, le premier Africain, eut aussi pour père un serpent, très gros, cela s'entend, et qui, de plus, devait être divin. – Liv. XXVI, 19. Le genre de vie de P. Scipion fit croire stirpis eum divinae virum esse ; retulique famam, in Alexandro Magno prius vulgatam, et vanitate et fabula parem, anguis immanis concubitu conceptum, et in cubiculo matris eius persaepe visam prodigii eius speciem, interventuque hominum. evolutam repente, atque ex oculis elapsam. – Cfr. GELL ; VII, 1. Servius Tullius ne pouvait pas, ne devait pas être fils d'esclaves. Tite-Live assigne à ce personnage l'origine la moins merveilleuse (I, 39), en supposant que sa mère était déjà enceinte des œuvres de son mari, chef de Corniculus, lorsqu'elle fut faite prisonnière. Denys raconte aussi cela, IV, 1. Mais à un si grand homme, le résidu du présent genre devait faire trouver plus et mieux. Aussi Denys lui-même, IV, 2, nous dit-il qu'il a trouvé dans les annales du pays, et chez nombre d'historiens romains, une autre origine, qui se rapproche de la fable, et raconte-t-il une longue histoire, reproduite ensuite par Ovide et par Pline, suivant laquelle Vulcain aurait engendré Servius Tullius d'une manière un peu bizarre. – PLINE, XXXVI, 70, raconte le fait comme s'il y croyait, mais enlève la paternité à Vulcain pour l'attribuer au foyer. Non praeteribo et unum, foci exemplum romanis litteris clarum. Tarquinio Prisco regnante tradunt repente in foco eius comparuisse genitale e cinere masculini sexus, eamque, quae insederat ibi, Tanaquilis reginae ancillam Ocrisiam captivam, consurrexisse gravidam. Ita Servium Tullium natum, qui regno successit. – OVID.; Fast., VI, 627 et sv., restitue la paternité à Vulcain, qui opéra par le moyen du prodige noté par Pline.

(627) Namque pater Tulli Vulcanus, Ocresia mater,
Praesignis facie, Corniculana fuit.
Hanc secum Tatiaquil, sacris de more paratis,
Jussit in ornatum fundere vina focum.
Hic inter cineres obscaeni forma virilis
Aut fuit, aut visa est : sed fuit illa magis.
Iussa loco captiva fovet conceptus ab illa
Servius a coelo semina gentis habet.

Un fait est remarquable : quelle que fût sa pensée intime, Ovide montre qu'il ne croit pas que ce fut une vaine apparence (sed fait illa magis). ARNOBE, Ad. gent., V, 18. n'est frappé que par l'obscénité du fait, et la reproche aux païens. – On peut assigner une origine divine, même aux philosophes, quand ils sont éminents. – ORIGENE (Contra Celsum, I) dit : « (p. 29) Quelques-uns, non pas dans les histoires antiques ou héroïques, mais dans celles qui contiennent des faits récents, estimèrent rapporter comme une chose possible, que Platon naquit de sa mère Amphiction, avec laquelle il avait été interdit à Ariston [son mari] d'avoir des rapports, avant qu'elle eût enfanté le fruit d'Apollon. Mais ce sont là de pures fables, qui sont produites par la croyance que les hommes réputés supérieurs aux autres pour leur sagesse, devaient tirer leur origine de quelque semence divine, comme il convient à une nature supérieure à celle des hommes ». C'est exactement cela, mais sans tant de raisonnements ; simplement parce que, dans l'esprit, les choses excellentes s'associent à d'autres choses excellentes ; les très mauvaises, à d'autres très mauvaises.

[FN: § 926-2]

GROTE ; Hist. de la Gr., t. I : « (p. 96)... ainsi la généalogie était composée en vue de satisfaire à la fois le goût des Grecs pour les aventures romanesques, et leur besoin d'une ligne non interrompue de filiation entre eux-mêmes et les dieux. Le personnage éponyme, de qui la communauté tire son nom, est quelquefois le fils du dieu local, quelquefois un homme indigène né de la terre, qui est en effet divinisée elle-même. On verra par la seule description de ces généalogies qu'elles renfermaient des éléments humains et historiques, aussi bien que des éléments divins et extra-historiques... À leurs yeux [des Grecs]... non seulement tous les membres étaient également réels, mais les dieux et les héros au commencement étaient en un certain sens les plus réels ; du moins ils étaient les plus estimés et les plus indispensables de tous ».

[FN: § 927-1]

OVID. ; Fast., V :

(231) Sancta Iovem Iuno, nata sine matra Minerva
Officio doluit non eguisse suo.

Flore lui enseigne comment devenir mère sans avoir de rapports avec un être masculin, et lui raconte l'histoire d'une fleur reçue en cadeau.

(253) Qui dabat, Hoc, dixit, sterilem quoque tange iuvencam,
Mater erit : tetigi ; nec mora mater erat
Protinus haerentem decerpsi pollice florem
Tangitur ; et tacto concipit illa sinu.

La légende d’Héphaistos (Vulcain) se trouve déjà dans Hésiode, Théog., 927 ; mais Homère, Il., I, 578, le fait fils de Zeus et de Héra. Apollodore suit la tradition d'Hésiode, I, 3, 5 : . « Héra conçut Héphaistos, sans embrassements ».

[FN: § 927-2]

Gen. (trad. SEGOND) ; 6... (2) les fils de Dieu virent que les filles des hommes étaient belles et ils en prirent pour femmes... (4) Les géants étaient sur la terre en ces temps-là, après que les fils de Dieu furent venus vers les filles des hommes et qu'elles leur eurent donné des enfants ; ce sont ces héros qui furent fameux dans l'antiquité. [Voir Addition A18 par l’auteur] – D. HIERONYM. ; t. III : Questiones sive traditiones hebraicae in Genesim : (p. 855) Videntes autem filii Dei filias hominum quia bonae sunt. Verbum Hebraicum eloim... communis est numeri : et Deus quippe, et dii similiter appellantur : propter quod Aquila plurale numero, filios deorum ausus est dicere, deos intelligens, sanctos, sive angelos...

[FN: § 927-3]

Dans l'édition Panckoucke, d'Ovide, l'observation suivante de Desaintange est transcrite dans une note « (t. VIII, p. 327) ... Si nous étions tentés de nous moquer de cette fable légendaire qu'Ovide nous a transmise... rappelons-nous qu'un grave docteur anglais... publia, au dix-huitième siècle, une brochure intitulée Lucina sine concubitu (Lucine affranchie des lois du concours), dans laquelle il cherche à prouver qu'une femme peut concevoir et accoucher sans avoir de commerce avec aucun homme, comme (p. 328) les jumens des Géorgiques (liv. III, v. 271) de Virgile, devenues fécondes sans autre étalon que le Zéphyr ou vent du couchant... Voilà précisément le charme qu'opère le Zéphyr sur les femmes qui préfèrent ses baisers à un plaisir vulgaire : témoin la dame d'Aiguemère, accouchée en l'absence de son mari d'un fils déclaré légitime par un arrêt du parlement de Grenoble en date du 13 février 1637. Cette dame, une belle nuit d'été que sa fenêtre était ouverte, son lit exposé au couchant et sa couverture en désordre, s'était imaginé que son mari était de retour d'Allemagne, et qu'elle avait reçu ses caresses. Elle avait pris l'air du couchant : c'est cet air qu'elle avait respiré... ». Burette ajoute, et il ne semble pas qu'il plaisante : « (p. 328)... Il y a certainement dans la nature des forces occultes et mystérieuses que la science n'a pas encore soumises à son empire. Il y a dans l'imagination une puissance que les miracles du magnétisme ont fait éclater ». Et le livre où cela est écrit a été publié en 1835 !

PLIN. ; Nat. hist. VIII, 67 : « Il est manifeste qu'en Lusitanie, près de la ville de Lisbonne et du Tage, les juments qui se tiennent contre le vent de Favonius conçoivent de par le vent, et deviennent grosses ; les poulains qui naissent sont très rapides, mais ne vivent pas plus de trois ans ». – Varron y ajoute aussi les poules, et dit que le fait est notoire. VARR. ; De agric., II : In foetura res incredibilis est in Hispania, sed est vera, quod in Lusitania ad oceanum in ea regione, ubi est oppidum Olysippo, monte Tagro, quaedam e vento certo tempore concipiunt equae, ut hic gallinae quoque solent, quarum ova appellant. Sed ex his equis, qui nati pulli, non plus triennium vivunt. – PAUSANIAS, VII, 17, a une longue histoire de la naissance d'Attis, qu'il est inutile de rapporter ici. Il suffit de savoir qu'Agdistis naquit de Zeus, d'une manière étrange ; que d'une partie du corps d'Agdistis, se développa un amandier ; qu'enfin, la fille du fleuve Sangaris, ayant mis dans son sein des fruits de cet arbre, ils disparurent, et elle enfanta Attis. C'est ainsi qu'on a l'un des nombreux exemples d'une suite de générations et de faite étranges, pour arriver à une naissance. – Des légendes semblables, on en a tant qu'on veut, toujours avec un noyau de résidus et autour une nébuleuse d'imaginations poétiques ou simplement fantaisistes.

[FN: § 927 note 3b]

Note ajoutée à l’édition française par l’auteur : ARISTOTE, De animal. hist., rapporte, sans en prendre la responsabilité, la croyance que les juments peuvent être fécondées par le vent.

[FN: § 927-4]

Comme descendante de Persée, Alcmène aussi remontait à Zeus. Suivant APOLL, II, 4, 6, Electryon, père d'Alcmène, la donna avec le royaume à Amphitryon, en convenant que celui-ci la garderait vierge, jusqu'au retour de l'expédition qu'Electryon devait faire contre les Téléboens. Electryon mourut, et Amphitryon, après diverses aventures, fit l'expédition contre les Téléboens. À son retour, Zeus le précéda, et, prenant les traits d'Amphitryon il jouit d'Alcmène, en une nuit qu'il fit durer autant que trois autres : . C'est pourquoi Lycophron, 33 appelle Héraclès « lion des trois nuits ». –RICH. WAGNER ; Epitoma vaticana Apollodori bibliotheca: (p. 23) ... « ... quintuplant, ou selon d'autres, triplant une nuit. » – PALLAD.; Anth., IX (Epig. demonstr.), 441, donne à Héraclès l'épithète de . – STATIUS ; Theb., XII. Junon adresse à la lune ces paroles :

(299) Da mibi poscenti munus breve, Cynthia, si quis
Est Iunonis honos : certe Iovis improba iussu
Ternoctem Herculeam : veteres sed mitte querelas

Lact.; Comm., v. 301, note à ce propos : ... ne adventu diei concubitus minueretur voluptas, iussit Iuppiter illam noctem triplicem fieri, qua triplices cursus Luna peregit. Ex quo compressu Alcmenae Hercules dicitur natus. Merito erge noctem Herculeam dixit, in qua conceptus est Hercules. – DIOD. ; IV, 9, 2, rend très clair le résidu dont nous parlons. Il dit : « En s'unissant à Alcmène, Zeus rendit triple la nuit et par la longueur du temps employé à la procréation, il démontra dès l'abord de quelle force devait être l'enfant ». Diodore ajoute que Zeus rechercha Alcmène, non poussé par un désir amoureux, mais avec le but de procréer un fils. – SERV. ; Ad Aen., VIII, 103 : Amphitryo rex Thebanorum fuit, cuius uxorem Alemenam, Iuppiter adamavit, et dum vir eius Oechaliam civitatem oppugnaret, de trinoctio facta una nocte, cum ea, coucubuit : quae post duos edidit filios ; unum de Iove id est Herculem ; alterum de marito, qui Iphiclus appellatus est. Pour ce dernier, il fallut moins de peine que pour Hercule. SCHOL. AD. ILIAD, XIV 323. Après avoir dit que Zeus fit un fils à Alcmène, il ajoute : « De même Amphitryon, dans la même nuit ». Apollodore fit Iphiclus plus jeune qu'Hercule d'une nuit. Certains auteurs, surtout les Latins, doublent la nuit de la conception d'Hercule, au lieu de la tripler : OVID.; Amor. I, 13, 45. PROPERT. ; II, 22, 25-26. – MART. CAPELL. ; II, 157. – SENEC., Agam., 814-815. – HIERON. ; Adversus vigilantium, t. II : (p. 409) In Alemenae adulterio duas noctes Iuppiter copulavit, ut magnae fortitudinis Hercules nasceretur. – HYGIN. ; Fab., XXIX. – Il y a des Pères de l'Église qui sont plus généreux, et qui accordent neuf nuits aux plaisirs amoureux de Zeus : CLEMENT. ; Protrept.. p. 28. Pott. – 21. Par. –ARNOB.; Ad. gent., IV, 26 : Iuppiter ipse rex mundi, nonne a vobis infamatus est... Quis illum in Alcmena novem noctibus fecit pervigilasse continuis ?... Et sane adiungitis beneficia non parva : siquidem vobis deus Hercules natus est, qui in rebus huiusmodi patris sui transiret exuperaretque virtutes. Ille noctibus vix novem unam potuit prolem extundere, concinnare, compingere... – CIRILL,.; Adv. Iulan., VI.

[FN: § 927-5]

DELRIO ; Disq. Magic., t. I; I. II, q. 15. « (p. 180 Dicimus ergo, ex concubito incubi cum muliere aliquando prolem nasci posse : et tum prolis verum patrem non fore daemonem, sed illum hominem cuius semine daemon abusus fuerit. Negarunt hoc Plutarchus in Numa... sed hoc olim affirmarunt Aegyptii teste Plutarcho et affirmant communiter Scholastici, qui omnes etiam optimi philosophi fuere... Accedunt plurima exempla ab illis et aliis narrata, quae si vera sunt, haud dubie iuxta has conclusiones explicanda sunt. Vetustas obtrudit suos semideos, Hercules. Sarpedones, Aeneas, Servios Tullos ;. Anglia, Merlinum ; Pannonia, Hunnos ex Arlunis strigibus Gothicis et Faunis natos, ...nec desunt qui Lutherum in hanc classem retulerint (§ 927-6). Et ante sexennium in primario Brabantiae oppido punita fuit mulier, quod ex daemone peperisset : et nostris temporibus id contigisse etiam Lud. Molina ex nostrae societatis Theologis prodidit, et complures alii gentium diversarum scriptores allatis exemplis confirmarunt.– IORNAND.; De reb. Goth., 24 (8) : Filimer rex Gothorum, ...qui et terras Scythicas cum sua gente introisset... reperit in populo suo quasdam magas mulieres, quas patrio sermone aliorumnas is ipse cognominat ; easque habens suspectas, de medio sui proturbat, longeque ab exercitu suo fugatas, in solitudinem coegit terrae. Quas spiritus immundi per eremum vagantes dum vidissent, et earum se complexibus in coitu miscuissent genus ferocissimun edidere : ... Naturellement ; telle devait être l'origine de ce peuple féroce et détesté. Même l'excellent Saint Augustin se montre aussi bien renseigné sur la génération des démons que sur la question des antipodes, et sur tant d'autres semblables (§ 1488). – D. AUGUST. ; De civ. dei, XV, 23 : Et quoniam creberrima fama est, multique se expertos, vel ab eis qui experti essent, de quorum fide dubitandum non est, audisse confirmant, Silvanos, et Faunos, quos vulgo ineubos vocant, improbos saepe exstitisse mulieribus, et earum appetisse ac peregisse concubitum : et quosdam daemones, quos Dusios Galli nuncupant, hanc assidue immunditiam et tentare et efficere, plures talesque asseverant, ut hoc negare impudentiae videatur. C'est bien cela : « en sorte qu'il y aurait de l'impudence à le nier ». – BODIN ; De la demonomanie des sorciers, II, 7 : « p. 104 a) Si les sorciers ont copulation avec les dœmons. – (p. 104 b) J'ai aussi leu l'extraict des interrogatoires faicts aux Sorciers de Longny en Potez, qui furent aussi bruslees vives, que maistre Adrian de Fer, Lieutenant general de Laon m'a baillé. J'en mettrais quelques confessions sur ce poinct icy ». Suivent divers faits de femmes qui avouent avoir connu charnellement le diable. « (p. 105 a) En cas pareil nous lisons au XVI liure de Meyer... que l'an MCCCCLIX grand nombre d'hommes et femmes furent bruslees en la ville d'Arras, accusees les uns par les autres, et confesserent qu'elles estoyent la nuict transportées aux danses, et puis qu'ils se couployent auecques les Diables... Jacques Spranger, et ses quatre compagnons inquisiteurs des sorcieres, escriuent qu'ils ont faict le procés à vne infinité de Sorcieres, en ayant faict executer fort grand nombre en Alemagne... et que toutes generalement sans exception, confessoient que le Diable auoit copulation charnelle avec elles... Henry de Coulongne (p. 105 b)... dit qu'il n'y a rien plus vulgaire en Alemaigne, et non pas seulement en Alemaigne, ains celà estoit notoire en toute la Grece et Italie. Car les Faunes, Satyres, Syluains ne sont rien autre chose que ces Dæmons, et malins esprits. Et par prouerbe le mot de Satyrizer, signifie paillarder. (p. 106 a) Nous lisons aussi en l'histoire sainct Bernard, qu'il y eut vne Sorciere, qui auoit ordinairement compagnie du Diable aupres de son mary, sans qu'il s'en apperceut. Ceste question (à sauoir si telle copulation est possible) fut traictee devant l'Empereur Sigismond, et. à sçavoir si de telle copulation il pouuoit naistre quelque chose : Et fut resolu contre l'opinion de Cassianus, que telle copulation est possible, et la generation aussi. Nous lisons aussi au liure premier chap. XXVII des histoires des Indes Occidentales, que ces peuples là tenoyent pour certain, que leur Dieu Cocoto couchoit avec les femmes : Car les Dieux de ce pays là n'estoient autres que Diables ». Voir la suite au § 928-1. – Dans un livre publié en 1864, un auteur moderne rapporte, en y prêtant créance, une partie des innombrables absurdités qui furent écrites à propos de la génération des démons, et conclut qu'il n'est pas possible de nier l'existence de l'union objective des démons et des êtres humains. – G. DES MOUSSEAUX ; Les hauts phénomènes de la magie : « (p. 297) Nier ces faits étranges, dit «un magistrat distingué et intègre » [En note : A. DE GASPARIN, Surn., vol. II, p. 154. Autre bel exemplaire !] le très savant et très expérimenté de Lancre [qui a fait mourir des centaines de sorciers et de sorcières], « ce serait détruire ce que l'antiquité et NOS PROCÉDURES nous ont fait voir » [C'est l'auteur qui souligne]. Et. je le répète, ce serait détruire, en outre, ce dont autrefois – et de nos jours [c'est l'auteur qui souligne] – la chair et le sang ont témoigné ; ce que l'inspection médicale et la science théologique ont constaté chacune par les moyens qui leur sont propres ». Voilà un bel exemple de la valeur expérimentale du consentement universel, aujourd'hui transformé en sentences du suffrage universel. Mais peut-être cette nouvelle divinité est-elle exempte des erreurs où tombèrent ses prédécesseurs ?

[FN: § 927-6]

DELRIO ; Magiq. disq., t. I, p. 180 (lib. II, quaest. 15) (§ 927-5). À propos de cette origine de Luther, il cite : Fontan. in hist. sacra de stal. religion. Il ne suffit pas que le démon intervienne à la naissance, il devait aussi intervenir à la mort. Le même Delrio, ibidem, t. II, p. 76 (lib. III, pars prior., quaest. 7) : Sane fuit animaduersum, et quo tempore Lutherus obiit, in Geila Brabantiae, ab obsessis daemones ad Lutheri funus aduolasse. Luther, lui-même, a dit tant de fois, pendant sa vie, avoir vu des démons, qu'il n'est pas si étrange que ces vénérables personnages soient allés à ses funérailles. – I. WIER ; Hist. disp. et disc., t. I, p. 418 et sv. (liv. III, chap. 25). Il raconte une longue histoire de la génération diabolique de Luther, et ajoute (p. 420) : « L'histoire Catholique de l’estat de la Religion en nostre temps escrite en françois par vn certain docteur en Theologie nommé S. Fontaines, dit que ceste opinion publiee par liures imprimez est vraysemblable, asauoir que Marguerite mere de Luther fut engrossee de lui par le diable. qui auoit eu sa compagnie autresfois autant qu'elle fust mariee à Iean Luther ». – MAINBOURG ; Hist. du Luth., I, p. 22-24, croit devoir réfuter ces fables : « Il [Luther] naquit à Islebe, ville du comté de Mansfeld l'an 1483, non pas d'un Incube, ainsi que quelques uns, pour le rendre plus odieux, l'ont écrit sans aucune apparence de vérité, mais comme naissent les autres hommes, et l'on n'en a jamais douté que depuis qu'il devint hérésiarque... ».

[FN: § 928-1]

Cette question : les démons peuvent-ils, et comment peuvent-ils rendre mères les femmes, a été résolue en divers sens par les Pères de l'Église. SAINT THOMAS en disserte doctement dans la Summa theol., Ia, q. LI, 3 : Si tamen ex coitu daemonum aliqui interdum nascuntur, hoc non est per semen ab eis decisum, aut a corporibus assumptis ; sed per semen alicuius hominis ad hoc acceptum, utpote quod idem daemon, qui est succubus ad virum, fiat incubus ad mulierem : sicut et aliarum rerum semina assumunt ad aliquarum rerum generationem, ut Augustinus dicit † ; ut sic ille qui nascitur, non sit filius daemonis, sed illius hominis cuius est semen acceptant – BODIN ; De la demonomanie... Suite de la citation § 927-5: « (p. 106 a) Aussi les Docteurs ne s'accordent pas en cecy : entre lesquels les vns tiennent, que les Diemons Hyphialtes, ou Succubes reçoiuent la semence des hommes, et s'en servent enuers les femmes en Daemons Ephialtes, ou Incubes, comme (p. 106 b) dit Thomas d'Aquin, chose qui semble incroyable : mais quoy qu'il en soit. Spranger escript que les Alemans (qui ont plus d'esperience des Sorciers, pour y en auoir eu de toute ancienneté, et en plus grand nombre que és autres pays) tiennent que, de telle copulation il en vient quelquesfois des enfans, qu'ils appellent Vechselkind, on enfans changez, qui sont beaucoup plus pesans que les autres, et sont toujours maigres, et tariroient trois nourrices sans engresser. Les autres sont Diables en guise d'enfans, qui ont copulation avec les nourrices Sorcieres, et soutient on ne sçait qu'ils deuiennent.

† Le livre cité de Saint Augustin est De trinitate lib. quind., III, c. VIII et IX. On y apprend beaucoup de belles choses ; entre autres : (13) : Et certe apes semina filiorum non coeundo concipiunt sed tanquam sparsa per terras ore colligunt.

[FN: § 929-1]

SALLUST.; Bell. Catil., XXII, trad. NISARD. – FLOR., IV, 1, dit simplement : Additum est pignus coniurationis, sanguis humanus, quem circumlatum pateris bibere : summum nefas, nisi amplius esset, propter quod biberunt. « Le gage de la conjuration fut le sang humain qu'on but, présenté à la ronde dans les coupes : crime abominable, mais pas plus grand que celui pour lequel ils buvaient ». Ces derniers mots manifestent le résidu pur.

[FN: § 929-2]

PLUT. ; CIC., X, 2.

[FN: § 929-3]

DIO CASS.; XXXVII, 30 (p. 30) : E. GROS observe avec justesse : « » La version de Xylander, Ea deinde ipse cum aliis comedit, reproduite par Reimarus et par Sturz a été suivie par Wagner et par M. Tafel. Mais tel n'est pas le sens de , comme l'a très bien remarqué M. Mérimée dans une note de son Histoire de la Conjuration de Catilina, p. 113. La véritable signification est donnée par H. Etienne : – Exta in manus assumo et attrecto, ut quum coniurati se iureiurando et religione astringebant... Cf. Duncan, Lexic Homer. – Pindar, p. 1042 ; Eusthate, Comment. sur l'Iliade, I, v. 464 ».

[FN: § 929-4]

DIO CASS. ; XLIII, 24.

[FN: § 929-5]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. C'est ce qu'exprime l'adage : aux grands maux les grands remèdes.

[FN: § 929-6]

MARQUARDT, Le culte chez les Rom., I, p. 315, nous fait connaître un de ces prétextes : « César fit mettre à mort un des émeutiers ; deux autres furent sacrifiés au champ de Mars par les pontifes et par le flamen Martialis et l'on exposa leurs têtes à la Regia. Si tant est que ces faits soient vrais, le sacrifice accompli à cette occasion était un piaculum ; il avait été nécessité par l'opposition égoïste des soldats à ce que l'on accordât aux dieux les sacrifices et les actions de grâce qui leur étaient dus. Mais comment ce piaculum consistait-il dans un sacrifice humain ? Cela est bien surprenant, pour l'époque de César, quoi que l'on puisse penser d'ailleurs, des sacrifices humains à Rome ». – La réponse à la question de Marquardt est simple. Que le sacrifice des deux hommes soit ou non un piaculum, que l'histoire soit ou non inventée, celui qui fit mettre à mort les hommes, ou celui qui inventa l'histoire, trouvait convenable d'unir une chose terrible au fait de la rébellion des soldats, qui devaient tant de reconnaissance à César.

[FN: § 930-1]

FESTI epit., s. r. ver sacrum : Ver sacrum vovendi mos fuit Italis. Magnis enim periculis adducti vovebant, quaecunque proximo vere nata essent apud se animalia immolaturos. Sed cum crudele videretur pueros ac puellas innocentes interficere, perductos in adultam aetatem velabant atque ita extra fines suos exigebant. – FESTI frag. ; s. r. Mamertini. – STRAB. V, p. 250. – DIONYS.; I, 16.– SERV. ; Ad Aen. VII, 796. –NONN. ; XII, p. 522.

[FN: § 930-2]

LIV. XXII, 10. Il faut lire avec quelles précautions ingénieuses sont fixées les prescriptions du pacte. En voici quelques-unes. Il dit des animaux gardés pour le sacrifice : Si id moritur, quod fieri oportebit, profanum esto, neque scelus esto, si quis rumpet occidetve insciens, ne fraus esto : si quis clepsit, ne populo scelus esto, neve cui cleptum erit : si atro die faxit insciens, probe factum esto...

[FN: § 930-3]

LIV. ; XXXIII, 44.

[FN: § 930-4]

LIV.; XXXIV, 44.

[FN: § 931-1]

CIC. ; In Vatin., VI, 14 : ... quae te tanta pravitas mentis tenuerit, qui tantus furor, ut, cum, inaudita ac nefaria sacra susceperis, cum inferorum animas elicere, cum puerorum extis deos manes mactare soleas... – QUINT.; Declam., 8. –LUCAN.,VI, 558. – LAMPRID.; Eliog., 8. – EUSEB. ; Hist. eccl.,VIII, 14, 5 IX, 9 ; Vit. Costant., I, 36. – AMMIAN, MARC.; XXIX, 2, 17– THEODORET. ; Eccl. hist.,III, 26. IUV. ; VI :

(551) Pectora pullorum rimabitur, exta catelli,
Interdum et pueri : faciet, quod deferat ipse.

[FN: § 931-2]

F. FUNCK BRENT. ; Le drame des poisons : « (p. 171) Au jour dit se rencontrèrent à Villebousin, Mme de Montespan, l'abbé Guibourg, Leroy, « une grande personne », qui est certainement Mlle Desœillets, et un personnage au nom inconnu, qui se disait attaché à l'archevêque de Sens. Dans la chapelle du château, le prêtre dit la messe sur le corps nu de la favorite couchée sur l'autel. À la consécration, il récita la conjuration, dont il donna le texte aux commissaires de la Chambre : « Astaroth, Asmodée, princes de l'Amitié, je vous conjure d'accepter le sacrifice, que je vous présente de cet enfant pour les choses que je vous demande, qui soit que l'amitié du Roi, de monseigneur le Dauphin, me soit (p. 172) continuée, et, honorée des princes et princesses de la Cour, que rien ne me soit dénié de tout ce que je demanderai au Roi, tant pour mes parents que serviteurs ». – « Guibourg avait acheté un écu (quinze francs d'aujourd'hui) l'enfant qui fut sacrifié, à cette messe, écrit la Reynie... Les détails de la messe du Mesnil furent déclarés par Guibourg, et d'autre part, confirmés par la déposition de la Chanfrain, sa maîtresse. La seconde messe sur le corps de Mme de Montespan eut lieu quinze jours ou trois semaines après la première, la ... troisième eut lieu, dans une maison, à Paris... ».

[FN: § 932-1]

GEORGES GAULIS ; La révolte des Albanais, dans Journ. de Genève, 7 mai 1910 : « Il y a des progrès qui ne s'imposent qu'à coups de fusils dans les masses ignorantes où le mot progrès n'a pas le sens presque mystique que nous lui attribuons ». C'est vrai des Albanais ; mais en France, en Italie, en Angleterre, en Allemagne, « les masses ignorantes » ont un profond sentiment mystique du progrès.

[FN: § 934-1]

Leurs prédécesseurs de 1848 avaient d'ailleurs suivi la même voie, imitant en cela les gouvernements monarchiques auxquels ils succédaient. Voir les preuves dans DUGUÉ DE LA FAUCONNERIE, Souvenirs d'un vieil homme, p. 299 à 330.

[FN: § 935-1]

Par exemple, M. PAUL DOUMER, n'ayant pas été réélu aux élections générales de mai 1910, écrivit à ses électeurs : « Au moment où je sors du Parlement, après avoir consacré an service exclusif du pays tout ce que je pouvais avoir de forces et de connaissance des affaires de l'État, je ne veux prononcer ni parole d'amertume, ni récrimination. Le suffrage universel est souverain et sa volonté doit être respectée, quels que soient les sentiments qui la dictent et lors même qu'elle s'exprime par un mode de scrutin qui déforme et abaisse tout, qui tend à faire de l'élu, non le représentant de l'intérêt général, mais le prisonnier d'intérêts particuliers souvent les moins défendables ». Et ces gens méprisent les catholiques, parce qu'ils se soumettent à la volonté du Pape ! Pourtant un catholique ne dit pas que « la volonté du Pape doit être respectée, quels que soient les sentiments qui la dictent » ; mais il croit que cette volonté est inspirée par Dieu, et c'est pourquoi il s'y soumet.

[FN: § 935-2]

En France, au mois de mars 1910, plusieurs savants et professeurs d'universités publièrent un manifeste, où on lit le passage suivant : « Nous voulons la réforme électorale pour fortifier la république et pour améliorer notre régime parlementaire... L'usage du scrutin d'arrondissement a perpétré des mœurs électorales et politiques intolérables : la candidature officielle, l'arbitraire dans les actes administratifs, l'arbitraire même dans l'application des lois, la faveur substituée à la justice, le désordre dans les services publics, le déficit dans les budgets, où les intérêts privés et de clientèle prévalent sur l'intérêt général. Il faut affranchir les députés de la servitude qui les oblige à satisfaire des appétits pour conserver des mandats. Il faut mettre plus de dignité et de moralité dans l'exercice du droit de suffrage ». Il ne leur vient pas à l'esprit que le suffrage universel et la démocratie pourraient être pour quelque chose dans ces maux. Ces divinités sont essentiellement bonnes ; elles sont même « le bien » ; et par conséquent, elles ne peuvent jamais, en aucune manière, faire mal.

[FN: § 938-1]

Le vers est peut-être interpolé ; mais cela importe peu à notre sujet. HESIOD.; Theog. :

Comme on le sait, Athéna sortit ensuite de la tête de Zeus. APPOLLOD.; I, 3,6.

[FN: § 938-2]

OLDENBERG; La relig. du Veda : « (p. 147) Sôma, la boisson divine. – La boisson qui donne à Indra la force d'accomplir ses hauts faits, c'est le suc extrait par pressurage de la plante à sôma. L'idée d'une boisson enivrante, appartenant aux dieux, paraît remonter jusqu'à l'époque indo-européenne. La liqueur qui verse à l'homme une vigueur mystérieuse et une excitation extatique, doit être de nature divine, être la propriété exclusive des dieux. C'est ainsi que, chez les indigènes d'Amérique, le tabac qui leur cause une sorte d'inspiration surnaturelle, est dit « herbe sacrée », et ils pensent que les dieux fument aussi pour se livrer à cette extase. Les Indo-Européens donc semblent avoir déjà placé au ciel la patrie de la boisson divine... Mais de la cachette céleste, où la garde un vigilant démon, la liqueur est emportée par un oiseau... (p. 152) Les poètes louent la sagesse, la splendeur, la sublimité de Sôma ; mais rarement ils lui assignent une forme ou des actions humaines... On le loue de donner la joie aux hommes : « Nous avons bu le sôma, nous voici devenus immortels ; nous avons pénétré jusqu'à la lumière et trouvé les dieux ; que peut maintenant nous faire, ô immortel, la haine on la malignité du mortel ? » (R. V., VIII, 48, 3) ».

[FN: § 939-1]

APOLLOD. ; III 13, 6. Pour plus de détails, voir BAYLE ; Dict. hist., s. r. Achille.

[FN: § 939-2]

DUMONT D'URVILLF; dans : Bibl. unir. des voy., t. XVIII « (p. 276) Les Nouveaux-Zélandais pensent qu'après la mort l'âme ou l'esprit qu’ils nomment waidoua, est un souffle intérieur, entièrement distinct de la matière corporelle. Les deux substances jusqu'alors unies se séparent ; le waidoua demeure trois jours à planer autour du corps, puis se rend au fameux rocher de Reinga, mot qui signifie départ ; rocher que nous avons cité comme le Ténare de ces sauvages, et d'où un atoua emporte le waidoua au séjour de la gloire ou de la honte, pendant que le corps ou la partie impure de l'homme s'en va dans les ténèbres... ». Cette première partie du récit est donnée comme explication de la seconde que nous allons transcrire ; mais elle a peu de valeur, car dévorer « un souffle intérieur » reste tout de même une chose étrange ; et l'on voit que cette première partie a été inventée pour donner une explication quelconque de la seconde. « (p. 276) C'est avec ces idées superstitieuses qu'ils sont naturellement portés à dévorer le corps de leurs ennemis ; ils croient qu'en agissant ainsi, ils absorberont l'âme de cet ennemi, la joindront à la leur et donneront à celle-ci plus de force. Aussi pensent-ils que plus un chef a dévoré d'ennemis d'un (p. 277) rang distingué dans ce monde, plus dans l'autre son waidoua triomphant sera heureux et digne d'envie. Au surplus ce bonheur futur ne consiste que dans de grands festins en poissons et en patates, et dans ces combats acharnés où les waidouas élus seront toujours vainqueurs. Comme les Nouveaux-Zélandais croient que le waidoua se tient dans l'œil gauche, un guerrier qui vient de terrasser son rival ne manque jamais de lui arracher cet œil et de l'avaler ». L'auteur ajoute : « (p. 277) Il boit en outre le sang de cet ennemi pour éviter la fureur du waidoua vaincu ; car celui-ci retrouve de la sorte dans l'assimilation qui vient de s'opérer une portion de l'aliment qui le nourrissait et qui dès lors l'empêche de nuire ». Comme d'habitude, le résidu est constant (assimilation d'une partie de l'ennemi) ; les dérivations sont variables (souffle, aliment).

[FN: § 939-3]

I. G. FRAZER ; Le ram. d'or, t. II : « (p. 115) Le sauvage croit qu'en mangeant la chair d'un animal ou d'un homme, il acquiert les qualités physiques, morales ou intellectuelles qui distinguent cet animal ou cet homme. Par exemple, dans l'Amérique du Nord, les Creeks, les Cherokee et d'autres Indiens de même race « croient que la nature a le pouvoir de transmettre aux hommes et aux animaux les qualités soit des aliments dont ils se nourrissent, soit des objets que perçoivent leurs divers sens. Celui qui vit de gibier est donc, d'après ce système, plus vif que celui qui mange de l'ours, de la volaille, du bétail ou du porc... » (JANES ADAIR, History of the American Indian, p. 133)... (p. 116) Les Namaquas ne mangent pas de lièvre pour ne pas devenir poltrons. Mais ils mangent la chair du lion, ils boivent son sang et celui du léopard, pour acquérir le courage et la vigueur de ces animaux (THEOPHILUS HAN ; Tsuni-Goam, the supreme Being of the Khi-Khoi, p. 106). D'autres tribus guerrières du sud-est de l'Afrique observent les mêmes coutumes (J. MACDONAL ; Light in Africa, p. 174; id. dans : Journal of the Anthropological Institute, XIX, 1890, p. 282)... (p. 117) Parfois lorsqu'un Zoulou tue une bête fauve, un léopard par exemple, il fait boire le sang de l'animal à ses enfants et leur fait manger son cœur ; il espère les rendre ainsi braves et audacieux... Quand une épidémie désole un Kraal zoulou, le médecin de la tribu prend un os d'un vieux chien, d'une vieille vache, ou de n'importe quel autre animal, pourvu qu'il soit très vieux ; il le broie et en administre la poudre à ses concitoyens, afin qu'ils vivent aussi vieux que l'animal dont provient l'os ». CHARD1N ; Voy. de Paris à Ispahan, t. VII : « (p. 115) Ils [les Persans] estiment le mouton par-dessus toutes les bêtes de boucherie, disant qu'il n'a nulle mauvaise habitude, et qu'on n'en peut, par conséquent, contracter de mauvaises en s'en nourrissant ; car leurs médecins tiennent unanimement que l'homme devient tel que les animaux dont il se nourrit ».

[FN: § 940-1]

IUST. ; Apol., I, 65, 3 et sv. L'auteur ajoute « (66, 4) Les méchants démons ont imité cette institution dans les mystères de Mithra, où l'on offre à ceux qui veulent se faire initier du pain et une coupe d'eau, et l'on profère certaines paroles que vous savez ou que vous pouvez savoir ». Là, nous avons l'erreur habituelle, consistant à supposer que deux dérivations d'un résidu ont au contraire été produites en imitation l'une de l'autre.

[FN: § 940-2]

est proprement l'aliment consacré et qui renferme la grâce du Seigneur.

[FN: § 940-3]

On pourrait traduire, d'une manière plus libre : « ... À cause des paroles de sa prière, nous savons que l'aliment consacré est de la chair et du sang de Jésus incarné, et que notre sang et nos chairs sont nourris par cet aliment, grâce à une transformation ».

[FN: § 942-1]

CLEMENT. ALEX. ; Cohort. ad. gent., p. 18 Potter –p. 14 Paris :

* –ayant opéré – ne donne pas un sens très satisfaisant. Dans l'édition Migne, on propose « - id est postquam inspexi sacrum illum , et secretam mercem ». Ainsi, le sens est bon.

ARN. ; Adv. gent., V, 26 : Ieiunavi, atque ebibi cyceonem : ex cista sumpsi,,et in calathum misi : accepi rursus, in cistulam transtuli.

[FN: § 942-2]

ORPH.; Argon., 323-330. Le cicéon est composé de farine, de sang de taureau, d'eau de mer, et l'on y ajoute de l'huile. – HESYCH.. ; s. r. . « Boisson composée d'un mélange de vin, de miel, d'eau et de farine. Le scoliaste de l'Odyss., X, 290, y ajoute du fromage.

[FN: § 943-1]

J. F. Davis ; La Chine, II : « (p. 92) Les amulettes dont les Chinois se servent consistent en des assemblages mystiques de caractères ou de mots divers... Tantôt on porte ces amulettes sur soi, tantôt on les colle contre les murs de sa maison. Pour les employer à la guérison des malades, on les trace sur des feuilles qu'on laisse infuser dans la boisson préparée pour eux, ou bien sur du papier que l'on brûle, et dont on leur fait avaler les cendres dans un liquide quelconque ».

[FN: § 947-1]

Gazette de Lausanne, mai 1910.

[FN: § 949-1]

D. GREGOR. TUR.; Hist. Franc., VIII, 16: ... sed tamen Deus ubique est, et virtus eius ipsa est forinsecus, quae habetur intrinsecus.

[FN: § 949-2]

PERT.; Stor. d. dir. ital., VI, I : « (p. 372) Malgré ces solennités et ces précautions, les parjures étaient cependant toujours très fréquents. Dans le but de diminuer les maux causés par cet abus des choses saintes, le roi Robert fit construire des reliquaires vides ou avec de fausses reliques, pour qu'on prêtât serment dessus ».

[FN: § 950-1]

W. MARSDEN ; Rist. de Sumatra, t. II « (p. 9) Le lieu où le serment se fait avec le plus de solennité, est le crammat, ou tombeau de leurs ancêtres ; et l'on y observe plusieurs cérémonies superstitieuses. En général, les habitans de la côte, par leur longue fréquentation avec les Malais, ont une idée du Koran, par lequel ils jurent pour l'ordinaire ; cérémonie dont les prêtres ne manquent pas de tirer parti en leur faisant payer une certaine somme ; mais les habitans de l'intérieur conservent dans leurs maisons certaines vieilles reliques,... qu'ils produisent quand il est question de faire un serment. La personne qui a perdu sa cause et qui (p. 10) oblige sa partie adverse au serment, demande souvent deux ou trois jours pour disposer l'appareil du serment, soompatan, ou la chose sur laquelle ils jurent, qui peut être plus ou moins sacrée, plus ou moins efficace. C'est un vieux cris rouillé, ou un canon de fusil rompu, ou quelque ancienne arme, à laquelle le hasard ou le caprice a attribué une vertu extraordinaire. Dans la cérémonie du serment, ils la plongent dans l'eau, et celui qui fait le serment boit cette eau après avoir prononcé la formule ci-dessus rapportée ». Plus loin : « (p. 10) Le soompatan le plus ordinaire, est le cris, sur la lame duquel ils répandent quelquefois du suc de limon, qui imprime une tache sur les lèvres de celui qui boit l'eau ; (p. 11) circonstance qui ne peut que faire impression sur un esprit faible et coupable, qui doit s'imaginer que la tache extérieure offre aux spectateurs une image de la tache intérieure ». La formule du serment : « (p. 5) Si ce que je déclare ici expressément (alors il expose le fait) est vrai et réellement ainsi, que je sois libre et délivré de mon serment : si ce que j'avance est faux, que mon serment soit la cause de ma mort ».

[FN: § 952-1]

CHARDIN ; Voy., VII : « (p. 11) Ils [les Persans] croient que les prières de tous les hommes sont bonnes et efficaces et ils acceptent, et même ils recherchent dans leurs maladies, et en d'autres besoins, la dévotion des gens de différentes religions, chose que j'ai vu pratiquer mille fois ». – Ibidem, VIII : « (p. 149) Ils [les Persans] se servent beaucoup de ces remèdes magiques et d'autres semblables dans les maladies durant lesquelles ils se vouent non seulement (p. 150) à tous leurs saints, mais aussi à des saints de toutes religions ; ils s'adressent aux gentils, aux juifs, aux chrétiens, à tout le monde. Les chrétiens lisent sur les malades l'évangile de saint Jean, qu'on lit à la messe ; et les missionnaires latins, encore plus que les chrétiens orientaux, font métier de lire cet évangile sur les hommes, les femmes et les enfants ; ce qui ne peut passer que comme un acte magique, car vous concevez bien que les Persans n'entendent pas plus le latin que les Européens n'entendent le persan ; mais de plus cela doit être regardé comme une grande profanation, puisque les mahométans ne croient pas au Verbe éternel annoncé dans cet évangile ; mais ils croient, au contraire, notre religion la plus fausse et la plus damnable ». Chardin raisonne comme si les actions étaient logiques.

FRASER, dans Bibl. univ. des voy., t. 35. L'auteur raconte l'histoire d'un vieillard qui portait, suspendue au cou une boîte de cuivre renfermant deux figurines, « (p. 469) dont l'une était une lame de cuivre, idole ordinaire des adorations du Grand-Lama, et que l'on donne à ceux qui vont en pèlerinage à son temple ; l'autre était une petite image chinoise peinte sur de la porcelaine ou de la terre cuite. Ces deux reliques étaient enveloppées dans un morceau de soie jaune. Il dit qu'il les avait reçues du Grand-Lama à l’Hassa, où il avait fait quelques années auparavant un pèlerinage. Cet homme était hindou de religion et adorait ces idoles à la manière des Hindous. Cependant elles lui venaient du chef d'une autre croyance, et que probablement il avait été visiter dans un but religieux. Cet homme offrait ainsi un exemple curieux de tolérance et d'ignorance à la fois ».

[FN: § 952-2]

Actus apostolorum, XIX, 11-12: (12)

Dict. encycl. de la Th. cath. s. r. Reliques : « (p. 103) Si les mouchoirs et les linges de S. Paul, qui étaient extérieurs à sa personne, guérissaient les maladies, à plus forte raison cette vertu devait-elle être attribuée aux corps mêmes des (p. 104) saints ayant servi de demeure aux âmes dont découlaient ces vertus. S. Basile dit dans son homélie sur Ste Julitte : – “Son corps repose maintenant sous le splendide vestibule d'un temple de la ville et sanctifie le lieu où il se trouve et ceux qui viennent l'y visiter”. “Dans l'ancienne alliance – dit-il ailleurs (Homil. in Ps. 115) on tenait les corps des morts pour impurs ; il en est autrement dans la nouvelle alliance. Quiconque touche les ossements des saints, obtient par ce contact quelque chose de la grâce sanctifiante qui demeure dans ces corps, ” ».

[FN: § 952-3]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Il suffisait même de moins que cela. Act. des ap., V, 15 : « en sorte qu'on apportait les malades dans les rues et qu'on les plaçait sur des lits et des couchettes, afin que, lorsque Pierre passerait, son ombre au moins couvrit quelqu'un d'eux ». L'imposition des mains avait aussi les vertus les plus inattendues. Ibid. XIX, 6 : « Lorsque Paul leur eut imposé les mains, le Saint-Esprit vint sur eux, et ils parlaient en langues et prophétisaient ».

[FN: § 954-1]

Decret. Grat., Pars. sec., Ca. 26, Qu. V, c. 3. Non liceat Christianis tenere traditiones Gentilium. 1. Nec in collectionibus herbaram, quae medicinales sunt, aliquas observationes, aut incantationes liceat attendere : nisi tantum cum symbolo divine, aut oratione Dominica, ut tantum Deus creator omnium, et Dominus honoretur. 3 Mulieribus quoque Christianis non liceat in suis lanificiis vanitatem observare, sed Deum invocent adiutorem, qui eis sapientiam texendi donavit. L. FERRARIS; Bibl. Canonica, t. VIII, s. r. Superstitio, 49, (p. 514). Observantia sanitatum, est superstitio, qua media inania, et inutilia adhibentar ad sanitatem hominum, aut brutorum conservandam vel recuperandam... Sic huius superstitionis rei evadunt qui certa ignota nomina, certa determinata verba, certos characteres, certas scripturas, certa involucra, certa signa, certain numeram Crucium, et Orationum, et alia huiusmodi inutilia adhibent, et applicant ad sanandas infirmitates, ad curanda vulnera, ad mitigandos dolores, ad sistendum sanguinem, ad se vel alios reddendos impenetrabiles, seu invulnerabiles telis, ensibus, globerum ictibus, ut sint immunes ab hostium laesionibus, et ab omni infortunio, et qualibet infirmitate liberi, quia supradicta omnia, et similia, nec a Deo, nec a natura, nec ab Ecclesia saut ad id ordinata, (p. 515). Unde huius superstitionis rei evadunt, qui in ludo mutant locum, aut chartas ad evitandam malam ludi fortunam ; qui ferunt lignum particulare ad lucrandum in ludo : qui nolunt adire convivium, in quo cum suo interventu sint tresdecim. Qui in nocte S. Ioannis orant, ut in somno appareant illi quibus nubere debeant. Qui credunt se non dacturos uxorem eo anno, quo coram se ignis fuit coopertus cineribus. Qui scopas invertunt, ut mulier de qua suspicantur, quod sit Saga, si talis sit, abire non possit, nisi gressu averse, seu cancrino. Aut certain schedam affigunt ianuae, ut ad eam cogatur venire fur. Qui cum gallina instar galli cantat, credunt male imminere. Qui credunt praenanciari alicui mortem, vel infortunium, dum avis moestum canit, corvas crocitat, lepus occurrit. Qui aliquid infaustum metuunt, si videant duos sacerdotes simul elevantes hostiam in Missa. Qui credunt gallinas fore liberas ab accipitre, si primum suum ovum detur pauperi. Qui conservant ova die Parasceves a gallinis exclusa ad extinguendum incendium, et sic de aliis fere infinitis similibus superstitionibus... On remarquera que tout cela est vraiment une bien petite partie des innombrables façons dont, en ces matières, se manifestent les résidus des combinaisons.

[FN: § 954-2]

D. THOM. ; Summa theol., 2a « 2ae, Q. 96, ad 4 : Conclusio. Verba divina ad collum, suspendere, nisi aliquid falsitatis vel dubii contineant, non illicitum omnino est quanquam landabilius esset ab his abstinere. Pour expliquer cela, le saint dit (ad. 3) ce que nous citons dans le texte. (Concl.) Similiter etiam videtur esse cavendum, si contineat ignota nomina, ne sub illis aliquid illicituni lateat.

[FN: § 955-1]

TERTULL. : De virgin. velandis , XV : Nam est aliquid etiam apud ethnicos metuendam, quod fascinum vocant, infeliciorem laudis et gloriae enormioris eventum. Hoc nos interdum diabolo interpretamur, ipsius est enim boni odium ; interdum deo deputamus, illius est enim superbiae iudicium, extollentis humiles et deprimentis elatos.

[FN: § 955-2]

D. BASILII Hom. de invidia, 4 (p. 95, A – GAUME, t. II, I, p. 132)

[FN: § 955-3]

M. DELRIO ; Magic. disq., t. II, 1. III, p. I, q. IV, s. 1 : De fascinatione (p. 25) Sit ergo conclus. I. Fascinatio proprie dicta (prout illam vulgo sumunt) est aliquid, non naturale, sed fabulosum superstitiosumque. Hanc conclus optime docent, Leonard. Vairus, Laurent. Ananias, Francis. Valesius, et Iulius Schalig. Probatur auctoritate magni Basilii, qui spernit ut muliebrem nugacitatem (homil. de Invidia). Secunda conclusio. Restat, fascinatio nascatur ex pacto ; ita, ut aspiciente malefico vel laudante, Diabolus modis sibi (p. 26) notis laedateum quem dicimus fascinari. Suit la définition donnée dans le texte.

[FN: § 955-4]

PLUTARCH.; Symph. , V, 7

[FN: § 955-5]

HELIODOR. ; Aethiop ., III, 7.

[FN: § 956-1]

HESIOD.; Op. et d., 348 :

[FN: § 956-2]

COLUM. : 1, 3.

[FN: § 956-3]

CATULL. ; 5 :

Aut ne quis malus invidere possit,
Cum tantum sciat esse basiorum.

M. A. MURETI op omm., t.II in Catul.comm. On observe à propos de ce passage : (p. 727) Putabatur enim fascinatio eis rebus nocere non posse, quarum vel nomen, vel numerus ignoraretur [comme d'habitude, c'est l'instinct des combinaisons]. Nostrates quidem rustici, poma in novellis arboribus crescentia numerare, hodieque religioni habent.

[FN: § 956-4]

VIRG. ; Egl., III, 103:

Nescio quis teneros oculus mihi fascinat agnos.

Egl., VII :

(27) Aut, si ultra placitum laudarit, baccare frontem
Cingite, ne vati noceat mala lingua ftituro.

SERVIUS note : Mala lingua. Fascinatoria, nocendi scilicet studio, HORAT. : Epist., I, 14 :

(37) Non istic obliquo oculo mea commoda quisquam
Limat, non odio obseuro morsuque venenat :

[FN: § 956-5]

PLIN. ; Nat. hist ., VII, 2.

[FN: § 956-6]

Si l'on observe attentivement comment s'établit la renommée de jettatore ou de jettatrice, on verra qu'il en va comme de la semence répandue sur la terre : une partie germe, une partie meurt. On dit : A, B, C sont jettatori. Pour A, B, les choses en restent là ; pour C, elles se confirment souvent par des motifs absurdes. À ce propos, je me souviens d'un fait. Une dame, âgée et laide, cela s'entend, fut appelée jettatrice. Le hasard voulut qu’un lustre tombât dans un bal où cette dame se trouvait. On dit aussitôt : « Voyez si elle n'est pas jettatrice! » ; et l'on ne faisait pas attention que ce motif pouvait s'appliquer également à toutes les autres personnes qui assistaient à cette fête. Toutes ces personnes, y compris la jettatrice, allèrent, suivant l'usage, rendre visite à la dame qui avait donné le bal et il arriva que peu après, les enfants de cette dame prirent la rougeole. Ce fut la dernière et la plus convaincante preuve que la personne supposée jettatrice l’était vraiment ; elle endura tant et de telles persécutions qu'elle dut quitter la ville où ces fait se passèrent.

[FN: § 957-1]

Voir dans le Dict. DAREMB. SAGLIO. s. r. Fascinum, les nombreux moyens employés autrefois, dont une partie continuèrent à être en usage jusqu'à notre époque. « (p. 985,) Les Romains avaient placé les enfants sous la protection d'une divinité, spéciale, Cunina, qui avait pour fonction de veiller sur leur berceau (cunae) et de les soustraire à l'influence du mauvais œil. Enfin on se figurait que les animaux sauvages eux-mêmes pouvaient en souffrir et que leur instinct les portait à s'en garantir en plaçant dans leur gîte des plantes et des pierres dont ils connaissaient la vertu secrète... L'insecte que nous appelons mante religieuse passait pour avoir le mauvais œil et pour ensorceler non seulement les hommes, mais les animaux. Au contraire par une association d'idées qui est constante dans ce genre de superstitions, son image était considérée comme très propre à éloigner les sortilèges ; Pisistrate en avait fait mettre une sur l'Acropole d'Athènes en guise de préservatif ». Ce n'est pas seulement dans « ce genre de superstitions » ; c'est en général, qu'un résidu s'applique aussi bien pour que contre, et le contraire du pour n'est pas le contre, ni vice-versa, mais bien l'absence de toute action (§ 911).

[FN: § 960-1]

ARIST.; Metaph., 1, 5, 3. Il écrit : « La décade semble être parfaite ». – CLEMENT. ALEX. ; Strom. ; VI, 11, p. 782 Potter – p. 656, Paris. 7 « La décade est parfaite d'un consentement unanime ».

[FN: § 960-2]

PHILOL. in Frag. philosoph. graec., Didot, II, p. 4 (13).

[FN: § 960-3]

HIEROCLIS commentarius in aureum carmen dans Frag.philosoph. graec. ,Didot, I, p. 464-465.

[FN: § 960-4]

– CHALCIDII commentarius in Timaeum Platonis. 36 Frag. phil. graec., t. II). L'auteur s'arrête longuement à montrer les belles propriétés du nombre 7. (p. 188) Deinde alia quoque septenarii numeri proprietas consideratur, quam caeteri numeri non habent. Si quidem cum alii, qui finibus decumani numeri continentur, partim alios ipsi pariant, partim ab aliis pariantur, partim et pariant alios, et pariantur ab aliis ; solus septenarius numerus, neque gignat ex se alium numerum infra decumanum limitem, neque a quoquam ipse nascatur... (p. 189) Proptereaque Minerva est a veteribus cognominatus, item ut illa, sine matre, perpetuoque virgo.

[FN: § 960-5]

ARIST.: De coel.. I, 1. 2.

[FN: § 960-6]

SUID. ; s. r.

« Le sacrifice parfait de trois victimes : un porc, un bélier, un bouc ».

[FN: § 960-7]

Ou bien solitaurilia qui, suivant Festus (s. r.), est ainsi nommé parce qu'on sacrifie trois animaux qui ne sont pas châtrés.

[FN: § 960-8]

VIRG.; Egl., VIII. 75 : ...numero deus impare gaudet. – SERV. : Aut quicomque superorum (iuxta Pythagoreos, qui ternarium numerum perfectum summo Deo assignant, a quo initium, et medium, et finis est), aut revera Hecaten dicit, cuius triplex potestas esse perhibetur... (quamvis omnium prope deorum potestas triplici signo ostendatur ; ut Iovis trifidani fulmen ; Neptuni tridens ; Plutonis canis triceps. Apollo, idem Sol, idem Liber : vel quod omnia ternario numero continentur, ut Parcae, Furiae ; Hercules etiam trinoctio conceptus : Musae ternae. Aut impare, quemadmodumcumque : nam septem chordae, septem planetae, septem dies nominibus deorum, septem stellae in Septentrione, et multa his similia ; et impar numerus immortalis quia dividi integer non potest [quelle belle raison !]; par numerus mortalis, quia dividi potest ; licet Varro dicat Pythagoreos putare imparem numerum habere finem, parem esse infinitum : ideo medendi causa multarumque rerum impares numeros servari : nam, ut supra dictum est, superi dii impari, inferi pari gaudent).

[FN: § 960-9]

MARQUARDT ; Le culte chez les Rom., t I : « (p. 316) On rédigeait par écrit les vota publica avec l'aide des pontifes et l’on pouvait évaluer en les faisant, à une certaine somme les offrandes, les jeux et les sacrifices qui avaient été, voués » En note : « LIV. : XXII, 10, 7: Eiusdem rei causa ludi magni voti aeris trecentis triginta tribus milibus trecentis triginta tribus triente. Le nombre 333 333 1/3 est un nombre sacré : on le retrouve encore du temps de l'empire. V. l'inscription d'Éphèse, C. I. L. III, 6065), où un Romain dédie cette somme, en substituant au triens gravis aeris, qui n'avait plus cours, 1/2 sesterce ».

[FN: § 961-1]

A. COMTE ; Syst. de polit. posit., t. III.

[FN: § 961-2]

Loc. cit. 961-1 : « (p. 130) Une existence quelconque, dynamiquement considérée, offre trois états successifs, un commencement, un milieu, une fin. [Comte aurait au moins pu citer quelque auteur qui a dit cela avant lui, § 960-5]. Statiquement envisagée, sa constitution résulte du concours permanent entre deux éléments opposés mais comparables, [celui qui comprend cela est bien doué]. Conçue dans son ensemble, elle se présente toujours comme une [tautologie]. Ainsi, toute construction, où ne prévaut pas l'unité de principe, toute composition plus que binaire, et toute succession dépassant trois degrés, sont nécessairement vicieuses, l'opération étant mal instituée ou restant inachevée [ainsi parle le souverain pontife du positivisme ; il n'y arien à ajouter]. Une synthèse pleinement subjective dispose les penseurs fétichistes à sentir ces propriétés fondamentales des seuls nombres que l'on conçoive sans signes [notre savant auteur se trompe : le nombre quatre se conçoit fort bien sans signes, et d'autres aussi, suivant les personnes], surtout quand la numération naissante concentre l'attention vers les rudiments arithmétiques. Toutes les spéculations philosophiques sur les nombres résultent de la subordination des autres envers ceux-là. Elles doivent donc concerner surtout ceux qui, ne comportant aucun partage [il pouvait au moins citer quelque auteur comme Hiéroclès, § 960] sont justement qualifiés de premiers, comme racines universelles. On explique ainsi la prédilection spontanée qu'ils inspirent partout [vraiment partout ? Comte a-t-il fait une enquête ?]. Il suffit ici de la spécifier envers le nombre sept, qui dérive doublement des trois radicaux, en faisant suivre ou précéder d'une synthèse, tantôt un couple de progressions, tantôt une progression de couples, suivant que sa destination est statique ou dynamique ». Ce long discours doit vouloir dire simplement que 7 = 3 + 3 + 1, et que 7 = 2 + 2 + 2 + 1. C'est un bel exemple de raisonnement par accord de sentiments.

[FN: § 961-3]

A. COMTE : Synthèse subjective.

[FN: § 962-1]

PHIL. IUD. ; De mundi opificio, 30, p. 20 Paris – p. 21 Mang.

[FN: § 962-2]

[FN: § 962-3]

PHIL. IUD. ; Sacrae legis allegoriarum post sex dierum opus, I, 2, p. 41 Paris. – p. 44 Mang. Exactement, il s'agit de la dyade, de la triade, de l'ebdomade, etc., au lieu du 2, du 3, du 7, etc.

[FN: § 962-4]

Loc. cit. , § 962 3.

[FN: § 962-5]

Loc., cit. § 962 3, I, 4, p. 41 Paris. – p. 45 Mang.

[FN: § 962-6]

PHIL. IUD. ; De decalogo, 5, p. 746 Paris. – p. 183 Mang. Il s'agit du très parfait nombre dix. – De congressu quaerendae eruditionis gratia, 16, p. 437 Paris. – p. 532 Mang. – De septenario et festis, 23, p. 1195 Paris. – p. 296-297 Mang. Voyez aussi : D. EPH., t. II, p. 304-309, De Numerorum mysteriis. L'auteur commence par traiter des mystères du nombre trois ; il fait voir ensuite l'excellence du double du nombre trois, c'est-à-dire du nombre six. Il démontre aisément que le nombre sept est parfait, et fait une longue énumération des choses sacrées ou simplement importantes qui sont au nombre de sept.

[FN: § 963-1]

D. AUG. ; De genesi ad litteram, IV, 2, 2 : Proinde istum senarium ea ratione perfectum diximus, quod suis partibus compleatur, talibus dumtaxat partibus, quae multiplicatae possint consummare numerum cuius partes sunt. – 6 est égal à 1 plus 2, plus 3 ; et 1 multiplié par 2, multiplié par 3, donne 6.

[FN: § 963-2]

Loc. cit. § 963 1, IV, 2, 6 : Perfecto ergo numero dierum, hoc est senario, perfecit Deus opera sua quae fecit. – Plus clairement encore : 7, 14 : Quamobrem non possumus dicere, propterea senarium numerum esse perfectum, quia sex diebus perfecit Deus omnia opera sua : sed propterca Deum sex diebus perfecisse opera sua, quia senarius numerus perfectus est. Itaque etiam si ista non essent, perfectus ille esset : nisi autem ille perfectus esset, ista secundum eum perfecta non fierent.

[FN: § 964-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR] Qu'on nous permette encore un exemple, qui a trait à la Chine. LAO-TSEU ; Le livre de la Voie et de la Vertu. p. XXVI : « Lao-tseu changea plusieurs fois de nom. Tous les hommes, disent quelques livres des Tao-sse, se trouvent souvent dans des circonstances périlleuses. Si alors le sage change de nom, pour se conformer aux changements qui arrivent dans la nature, il peut échapper aux dangers et prolonger sa vie. Beaucoup d'hommes de notre temps qui possèdent le Tao [Vérité, Voie, Absolu, etc.] se soumettent aussi à cette nécessité ».

[FN: § 970-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. SCHÆFFLE ; La Quintessence du Socialisme, p. 29 : « …le capital est vraiment un vampire, un spoliateur, un voleur ». Ce petit livre abonde en exemples de résidus des genres (I-δ) et (I-ε).

[FN: § 973-1]

Manuel, I, 48, p. 37.

[FN: § 977-1]

Manuel , I, 51, p. 88.

[FN: § 985-1]

On a des exemples tant qu'on veut. Dans les Chroniques, on en trouve à foison – FOULCHER DE CHARTRES, dans GUIZOT ; Collect. de mém. : « (p. 33) Quand nous eûmes atteint la ville d'Héraclée, nous vîmes un prodige dans le ciel ; il y parut en effet une lueur brillante et d'une blancheur resplendissante, ayant la figure d'un glaive, dont la pointe était tournée vers l'Orient. Ce que ce signe annonçait pour l’avenir nous l'ignorions ; mais le futur comme le présent nous le remettions entre les mains de Dieu ». – « (p. 155) Dans l'année 1106, nous vîmes une comète se montrer dans le ciel... Ce signe ayant commencé à briller dans le mois de février, le jour même où la lune était nouvelle, présageait évidemment des événemens futurs : n'osant toutefois porter la présomption jusqu'à tirer quelque pronostic de ce phénomène, nous nous remîmes, sur tout ce qu'il pouvait amener, au jugement de Dieu ». – « (p. 217... Balak eut alors, par un songe, révélation d'un certain malheur qui le menaçait. Il crut voir en effet Josselin lui arracher les yeux, ainsi que lui-même le raconta dans la suite aux siens. Ses prêtres [c'était un infidèle] auxquels il fit sur-le-champ connaître ce songe, et demanda l'interprétation, lui dirent „que ce malheur ou quelque autre équivalent lui arriverait certainement, si le hasard voulait qu'il tombât quelque jour entre les mains de Josselin“ ». Balak est tué ensuite dans un combat contre Josselin, et on lui coupe la tête. « Josselin commanda de la porter sur-le-champ à Antioche comme témoignage de la victoire qu'il venait de remporter ». – « (p. 233)... C'est ainsi que s'accomplit le songe rapporté ci-dessus, et que Balak, triste prophète de son, propre sort, avait raconté dans le temps où Josselin s'évada si miraculeusement de sa prison : alors, en effet, il vit en songe celui-ci lui arracher les yeux ; et certes Josselin les lui arracha bien, puisqu'il lui ravit et sa tête et l'usage de tous ses membres ».

[FN: § 987-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Une brochure qu'on distribue en 1913, inspirée par la première guerre balkanique, explique ou prédit l'histoire de l'Islam par la Bible. Voici qui annonce la fin de la Turquie pour 1913. Remarquons en passant que le commentateur a retranché de la citation (Apocalypse, IX, 13-17) deux passages qui l'embarrassaient par trop. Il ne signale que le second par quelques petits points. Nous les rétablissons entre parenthèses : PAUL STEINER; La Question d'Orient et la portée mondiale de sa solution : « “(p. 6-7) Le sixième ange sonna de la trompette. Et j'entendis une voix [venant des quatre cornes de l'autel d'or qui est devant Dieu et] disant au sixième ange qui avait la trompette : Délie les quatre anges qui sont liés sur le grand fleuve d'Euphrate. Et les quatre anges qui étaient prêts pour l'heure, le jour, le mois et l'année furent déliés... [afin qu'ils tuassent le tiers des hommes. Le nombre des cavaliers de l'armée était de deux myriades : j'en entendis le nombre.] Et ainsi je vis les chevaux dans la vision, et ceux qui les montaient ayant des cuirasses couleur de feu, d'hyacinthe et de soufre. Les têtes des chevaux étaient comme des têtes de lions ; et de leurs bouches il sortait du feu, de la fumée et du soufre (v. 13-21)”. La description là encore est si précise qu'on ne peut s'y méprendre, ce sont bien les Tares. C'est en premier lieu leur localité géographique qui est désignée par cette expression „sur le grand fleuve d'Euphrate“– puis c'est leur cavalerie si redoutable, leurs couleurs nationales, – le rouge, le bleu et le jaune qui sont encore à présent des couleurs sacrées chez les Turcs, – leur terrible artillerie dont le feu et la fumée sont expressément désignés, leur cruauté dans la guerre, leurs étendards de queues de cheval, et par-dessus tout, le temps exact qui devait s'écouler depuis le moment où ils furent virtuellement reconnus les maîtres de l'empire byzantin, dont la capitale était Constantinople, jusqu'à celui où eux-mêmes, après 391 ans de domination, cessent d'exister comme nation indépendante ».

[FN: § 996-1]

E. DE RUGGIERO ; Diz. Epigr., s. r. Annona (dea) : « inscription urbaine C. VI, 22) [Orelli, 1810] Annonae sanctae Aelius Vitalio mensor perpetuus dignissimo corporis pistorum siliginiariorum d(ono) d(edit);– d'Ostie (G. VIII, 7960) [Orelli-Henzen, 5320] M. Aemilius Ballator praeter (sestertium) X m(illia) n(ummum), quae in opus cultumve theatri postulante populo dedit, statuas duas, Genium patriae n(ostrae) et Annonae sacrae urbis sua pecunia posuit, etc. Son culte se développa davantage, à Rome et hors de Rome, après que, dans l'empire, et grâce à la réorganisation de la cura annonae, Rome eut été largement pourvue de vivres, et à bon marché ».

[FN: § 997-1]

G. SOREL ; Le syst. hist. de Renan, t. IV, IIIe partie, c. I : La vie posthume de Jésus et les traces qu'elle a laissées. L'auteur traite des apôtres après la mort de Jésus : « (p. 341) Durant cette période ils se croyaient en présence d'un Jésus aussi réel que celui qu'ils avaient connu en Galilée et ils continuaient leur ancienne existence auprès de lui. Il n'est pas douteux que cela n'ait duré longtemps ; ainsi on prétendait rattacher à une révélation faite par Jésus ressuscité les règles du jeûne et de la Pâque chrétienne (Didascalie, XXI). Cela suppose que d'après de très anciennes traditions la vie posthume de Jésus se serait assez prolongée pour que des lois ecclésiastiques aient eu le temps de se former de ce temps. Je crois qu'il faut la considérer comme ayant subsisté jusqu'au martyre de saint Jacques l'apôtre : cette hypothèse se, fonde sur beaucoup de détails qui sans elle seraient inintelligibles ».

[FN: § 1001-1]

E. B. TYLOR ; La civil. prim., 1, p. 81.

[FN: § 1002-1]

L. DUCHESNE ; Orig. du culte chrét., I.

[FN: § 1004-1]

D. AUG. : Epist. XXIX, Il raconte qu’il voulait faire cesser les banquets qu'on faisait dans les églises pour honorer les morts. Ceux qui l'écoutaient n'étaient pas persuadés. Ils disaient : (8) Quare modo : non enim, antea qui haec non prohibuerunt, Christiani non erant ? – Le saint eut un moment de découragement et se disposait déjà à se retirer, quand ses contradicteurs vinrent le trouver ; c'est pourquoi il leur exposa comment l'Église avait dû tolérer ces banquets. (9) ... scilicet post persecutiones tam multas tamque vehementes, cum facta pace, turbae gentilium in Christianum nomen venire cupientes hoc impedirentur, quod dies festos cum idolis suis solerent in abundantia epularum et ebrietate consumere, nec facile ab his perniciosissimis et tara vetustissimis voluptatibus se possent abstinere, visum fuisse maioribus nostris, ut huic infirmitatis parti interim parceretur, diesque festos, post eos quos relinquebant. alios in honorem sanctorum Martyrum vel non simili sacrilegio, quamvis simili luxu celebrarentur. – Il exhorte ses auditeurs à imiter les Églises d'outre-mer, qui repoussaient ces désordres. Remarquez que, dans les Confessions, VI, 2, il loue Saint Ambroise d'avoir défendu, à Milan, de porter des vivres en l'honneur des saints, « pour ne pas fournir l'occasion aux intempérants de s'enivrer, et parce que cela était semblable aux superstitions des Parentalia des païens – ne ulla occasio se ingurgitandi daretur ebriosis ; et quia illa quasi parentalia superstitioni gentilium essent simillima ». – Et comme on lui objectait, Epist., XXIX, l'existence « (10) des banquets qu'on faisait chaque jour dans la basilique du bienheureux apôtre Pierre, il répondit qu'il savait qu'on les avait souvent défendus, mais qu'ils avaient lieu loin de l'habitation de l'évêque et que, dans cette grande ville, il y a beaucoup d'hommes charnels, spécialement des étrangers, qui arrivent tous les jours et qui suivent cet usage d'autant plus qu'ils sont plus ignorants, à tel point qu'on n'avait pu jusqu'alors réprimer ni détruire ce fléau ». Voir aussi du même auteur : De moribus eeclesiae catholicae et de moribus manichaeorum, I 24, 75, où il parle des mauvais chrétiens : Novi multos esse sepulcrorum et picturarum adoratores : novi multos esse, qui luxuriosissime super mortuos bibant, et epulas cadaveribus exhibentes, super sepultos seipsos sepeliant, et voracitates ebrietatesque suas deputent religioni. Ailleurs, Epist., XXII, il parle des banquets qu'on faisait dans les cimetières, et conseille à Aurélius de les réprimer. On voit manifestement la persistance des anciens usages, quand Saint Augustin observe : (6) Sed quoniam istae in coemeteriis ebrietates et luxuriosa convivia, non solum honores Martyrum a carnali et imperita plebe credi solent, sed etiam solatia mortaorum,... – Il est donc évident que l'Église faisait ce qui était en son pouvoir pour supprimer de semblables usages, et les tolérait seulement quand elle ne pouvait faire autrement. À ce propos, il convient de lire toute la lettre de GRÉGOIRE LE GRAND ; liber IX, Epist., 71 : Gregorius Mellito abbati. Il donne des prescriptions sur la conduite à tenir avec les Anglais. D'abord, il observe qu'on peut se servir des temples païens. Aqua benedicta flat in eisdem fanis aspergatur, altaria construantur, reliquiae ponantur : quia si fana eadem bene constructa sunt, necesse est ut a cultu daemonum in obsequium veri Dei debeant commodari ; ut dum gens ipsa eadem fana sua non virlet destrui, de corde errorem deponat, et Deum verurn cognoscens, ac adorans, ad loca quae consuevit, familiarius concurrat. Il est donc évident qu'on veut profiter de l'usage qu’avaient les gens, de se rassembler en certains lieux. Grégoire continue : Et qui boves solent in sacrificio daemonuin multos occidere, debet his etiain hac de re aliqua solennitas immutari ; ut die dedicationis vel natalicio sanctorum martyrum quorum illic reliquiae ponuntur, tabernacula sibi circa easdem. Ecclesias, quae ex fanis commutatae sunt, de ramis arborum faciant, et religiosis conviviis solennitatem celebrent... Nam duris mentibus simul omnia abscindere impossibile esse non dubium, est...

MURATORI ; Ant. Ital., Dissert. 7-5, p. 453, t. III, parte II : « Et c'est pourquoi, dans ces Réunions [des Confraternités], on croit parfois célébrer plus solennellement les Fêtes par quelque festin et de bon vin ; en outre, assez souvent il y éclate des rixes et des inimitiés : il convient d'écouter de nouveau Hincmar, qui atteste qu'il arrivait la même chose de son temps, et semble décrire les coutumes de notre époque. Pastos autem, et commessationem, quas Divina auctoritas vetat, ubi et gravedines et indebitae exactiones, et turpes ac inanes laetitiae, et rixae, saepe etiam, sicut experti sumus, usque ad homicidia, et odia, et dissentiones accidere solent, adeo, interdicimus... ».

[FN: § 1006-1]

A. MAURY ; La magie et l'astrologie... Cfr. SAINTYVES ; Les saints successeurs des dieux.

[FN: § 1008-1]

BEECHEY ; dans Bibl. univ. des voy., t. 19 : L'auteur parle des Indiens qui étaient instruits dans les missions de San Francisco : « (p. 314) Les néophytes s'étant agenouillés, l'orateur (p. 315) commença : « Très Sainte-Trinité, Jésus-Christ, le Saint-Esprit... » ; faisant une pause entre chaque mot pour s'assurer si ces pauvres Indiens, qui n'avaient jamais prononcé un mot d'espagnol, articulaient correctement, ou s'ils laissaient quelques fautes à reprendre... Ils ne me paraissaient pas grandement pénétrés de l'acte auquel on les préparait, et je fis remarquer au père que les personnes chargées de leur instruction religieuse avaient là une tâche bien difficile. Il me répondit qu'au contraire, on ne rencontrait jamais d'obstacles de leur part ; qu'ils étaient accoutumés à changer de dieux, et que la conversion était en quelque sorte pour eux une affaire d'habitude. Je ne pus m'empêcher de sourire à cette réflexion du père, mais je ne doute pas qu'elle fût conforme à la vérité, et que les Indiens que j'avais sous les yeux apostasieraient une seconde fois avec tout autant d’indifférence, s'ils trouvaient un jour l'occasion de retourner dans leur tribu ».

[FN: § 1010-1]

LEA ; Hist. de l'Inquis., t. I, p. 399; trad. Reinach.

[FN: § 1011-1]

Un correspondant du Journal de Genève, 11 juillet 1913, qui se montre pourtant très favorable la « répression de la traite des blanches », est toutefois contraint par l'évidence des faits, d'avouer qu'il y a un peu de comédie dans cette entreprise. Il parle du Congrès contre la traite des blanches, qui eut lieu à Londres, du 30 juin au 5 juillet 1913 ; et, après avoir dit : « Son importance égalera certainement celle du congrès de Madrid en 1910, qui fit époque dans la lutte contre le nouveau fléau [ce brave homme appelle nouveau ce qui a toujours existé, depuis les temps où les hétaïres grecques inspiraient des poètes et des auteurs comiques, jusqu'à nos jours] révélé au monde il y a moins d'un demi-siècle par la sagacité de quelques philanthropes et de spécialistes en morale sexuelle [ces spécialistes le sont même parfois trop] », il ajoute candidement : « Ces hommes eurent de la peine à convaincre leurs contemporains de la réalité de l'abominable trafic qu'ils dénonçaient ; puis, lorsque l'authenticité de certains faits ne put plus être démentie, on passa de l'extrême défiance à une crédulité qui accepta sans contrôle et avec une sorte d'empressement des récits aussi dramatiques qu'imaginaires. Le cinématographe lui-même vint ajouter à ces dépositions sensationnelles le témoignage truqué de ses films, à tel effet que les gens cultivés, à l'esprit critique et qui ne s'en laissent point conter, ont recommencé à poser la question préalable. Aussi, dans ce domaine plus que dans tout autre, importe-t-il d'établir des organisations très sérieuses d'information et de contrôle ; ces organisations-là existent et se complètent peu à peu par les soins du bureau central international de Londres et des comités nationaux dits : « contre la traite des blanches ». Des rapports présentés par les délégués, il ressort avec une évidence indéniable que, si la traite ne s'exerce pas dans les proportions fantastiques voulues par certains écrivains, elle existe, elle agit partout ; il n'y a pas de grande ville au monde qui n'ait ses traitants, son organisation occulte et son marché de jeunes filles. Seulement – et c'est ce qui explique l'attitude négative ou dubitative de certains de nos magistrats en face des dénonciations des sociétés de surveillance, – la traite des blanches ne s'opère plus ordinairement par les moyens brutaux, tombant directement sous le code pénal, mais par une série savamment agencée d'influences, de contacts, de tentations, de dégradations progressives, qui livrent, quasi consentante à sa perte, la jeune fille hier encore pure et fière ». Habemus confitentem reum.

[FN: § 1012-1]

On observe maintenant des phénomènes qui sont semblables à ceux qu'on observait aux temps de l'Inquisition, si l'on tient compte de la réduction générale des peines, réduction profitant aussi aux voleurs et aux assassins. Pour éviter le scandale, les inquisiteurs anciens acceptaient des dénonciations secrètes et taisaient les noms des témoins. B. GUIDONIS ; Practica inquisitionis hereticepravitatis : (p. 189) ... si inquisitoribus videtur testibus deponentibus periculum imminere ex publicatione nominum eorumdem, possunt coram aliquibus personis eorumdem testium nomina exprimere non publice, set secrete. De hoc habetur in littera Innocentii papa IIII ti inquisitoribus fratribus ordinis Predicatorum : Cum negocium fidei catholice. Et infra : Sane volumus ut nomina tam accusantium pravitatem hereticam quam testificantium super ea nullatenus publicentur propter scandalum vel periculum quod ex publicatione huiusmodi sequi posset... Et maintenant, sinon légalement, du moins en fait, on procède de même contre la « littérature immorale » et d'autres délits semblables de l'hérésie moderne. Beaucoup de gens veulent bien espionner, mais désirent garder l'anonyme, et leurs dénonciations sont faites de seconde main, par quelque chef ou secrétaire des « ligues pour le relèvement de la morale ». Celles-ci obtiennent de journalistes complaisants qu'ils ne racontent pas les procès pour « littérature immorale » ou pour « traite des blanches», et cela précisément pour le même motif invoqué par le pape Innocent IV ; c'est-à-dire « à cause du scandale ou du péril qu'il peut résulter de cette publication ». Les conséquences de cette procédure secrète sont que maintenant, comme alors, on ne s'aperçoit pas des vices de ces procès. – LEA ; Hist. de l'Inq., p. 406; trad. Reinach, t. I, p. 457 : « Si la procédure avait été publique, l'infamie de ce système aurait été sans doute atténuée ; mais l'Inquisition s'enveloppait d'un profond mystère [comme aujourd'hui nos vertuistes] jusqu'après le prononcé de la sentence ». Maintenant même les jugements ne sont pas publiés par les journaux politiques. Il faut aller les chercher dans des publications spéciales. Ainsi, la majeure partie du public les ignore. Il ne faut pas oublier que, parmi les inquisiteurs modernes ou parmi ceux qui les admirent, beaucoup détestent les inquisiteurs anciens et les tiennent pour absolument iniques ; et ils croient se justifier en disant que la foi de ceux-ci était « fausse », et que la leur est « vraie ».

[FN: § 1015-1]

I. F. DAVIS ; La Chine, trad. franç., t. I : « (p. 248) Le système en vertu duquel les familles forment des espèces de clubs ou de tribus, a sans doute produit ce respect sacré pour la parenté... C'est encore de cette source que provient l'amour des Chinois pour les lieux qui l'ont vu naître, et ce sentiment est si vif chez lui, qu'il lui fait souvent abandonner les honneurs et les profits d'un emploi élevé pour se retirer dans son village natal. Ils ont une maxime populaire dont le sens est „celui qui parvient aux honneurs ou à la richesse, et qui ne retourne jamais au lieu de sa naissance, est comme un homme splendidement vêtu qui marche dans les ténèbres” ; tous deux agissent en vain ».

[FN: § 1025-1]

SÉNART ; Les castes dans l'Inde « (p. 94) De tous temps, les sectes ont pullulé dans l'Inde ; cette végétation est loin d'être arrêtée. Il en naît presque d'année en année. Il est vrai que c'est pour s'absorber bien vite dans la marée montante de l'hindouisme qui, malgré son caractère composite, est réputé orthodoxe. En général ces mouvements religieux, très circonscrits, donnent naissance seulement à des groupes d'ascètes qui, étant voués à la pénitence et au célibat, excluent la condition première de la caste, l'hérédité. Ils se recrutent par des affiliations volontaires ou s'adjoignent des enfants empruntés à d'autres castes. Cependant, nombre de ces confréries étant composées d'associés des deux sexes, tournent plus ou moins en castes héréditaires... (p. 95). Les mouvements qui se produisent ainsi dans les castes et en modifient incessamment l'assiette, sont individuels ou sont collectifs. Certaines gens trouvent moyen, grâce à des protections puissantes ou à des subterfuges, à des fictions ou à la corruption, de s'introduire isolément dans des castes diverses ; le fait est fréquent surtout dans les pays frontières, d'une observance moins stricte. On a vu des hommes de toute caste créés brâhmanes par le caprice d'un chef. Telle caste peu sévère, sous certaines conditions, ouvre (p. 96) aisément ses rangs à tout venant. Telles tribus nomades ou criminelles, moyennant payement, s'adjoignent volontiers des compagnons ». Des faits semblables se sont toujours produits. Il n'est pas de plus grande erreur que de croire que la réalité corresponde toujours précisément aux abstractions des littérateurs et des légistes.

[FN: § 1029-1]

FUSTEL DE COULANGES ; La cité antique.

[FN: § 1037-1]

J. FLACH. ; Les orig. de Vanc. France ; t. II. – FUST. DE COUL., La cité ant., « (p. 96) Grâce à la religion domestique, la famille était un petit corps organisé, une petite société qui avait son chef et son gouvernement ». Qu'on supprime les mots : « Grâce à la religion domestique », et cette description s'applique à la maisnie féodale comme à la famille antique. Il faut modifier les mots supprimés en ce sens qu'ils doivent indiquer que la religion confirmait le fait, et lui donnait une nouvelle force. Ainsi le parallèle entre la famille antique et la maisnie féodale est complet. Fustel de Coulanges dit encore : « p. 126) Mais cette famille des anciens âges n'est pas réduite aux proportions de la famille moderne. Dans les grandes sociétés la famille se démembre et s'amoindrit, mais en l'absence de toute autre société elle s'étend, elle se développe, elle se ramifie (p. 127) sans se diviser. Plusieurs branches cadettes restent groupées autour d'une branche aînée [jusque là il en est parfaitement de même pour la famille féodale ; la différence apparaît seulement dans les mots suivants], près du foyer unique et du tombeau commun. Un autre élément encore entra dans la composition de cette famille antique [et de la collectivité féodale]. Le besoin réciproque que le pauvre a du riche et que le riche a du pauvre fit des serviteurs. Mais dans cette sorte de régime patriarcal serviteurs ou esclaves c'est tout un. On conçoit, en effet, que le principe d'un service libre, volontaire, pouvant cesser au gré du serviteur, ne peut guère s'accorder avec un état social où la famille vit isolée. [Cette observation s'applique aussi à la famille féodale.] Il faut donc que par quelque moyen le serviteur devienne un membre et une partie intégrante de cette famille ». La famille antique et la maisnie féodale y ont précisément pourvu.

[FN: § 1037-2]

Dig. ;L. 16, 195 § 2 : Pater autem familias appellatur, qui in domo dominium habet, recteque hoc nomine appellatur, quamvis filiura non habeat.

[FN: § 1038-1]

PERTILE : St. del dir. ital. . I.

[FN: § 1040-1]

Odyss., XIV, 63-64.

[FN: § 1047-1]

CUNNINGHAM ; Voyage à la Nouvelle-Galles du Sud, dans Biblioth. univ. des voy., t. 43. L'auteur parle des criminels déportés en Australie : « (p. 151) Les termes qui servent à qualifier le caractère de chaque individu ont, parmi les convicts, un sens tout-à-fait différent de celui qu'on y attache dans la société des honnêtes gens. Un bon garçon est celui qui partage loyalement avec son complice ce qu'ils ont volé de compagnie, et qui n'avoue jamais un vol et se garde de rendre témoignage contre un associé. Un adroit garçon est un coquin téméraire, entreprenant, habile à toute chose, tandis qu'un grand coquin est celui qui est assez vil pour avouer son crime ou dénoncer son complice ». De même aujourd'hui, pour certaines personnes, le bon juge est celui qui rend un jugement contraire aux lois ; le Mauvais juge celui qui les applique loyalement.

[FN: § 1050-1]

ARIST.; Polit., 1, 2, 9-0.

[FN: § 1050-2]

À part les enquêtes officielles et une infinité de documents, voir A. CONAN DOYLE; Le crime du Congo. Voici un autre exemple, pris au hasard parmi tant d'autres qu'on pourrait citer : « La Liberté, 9 août 1912. Pour répondre aux accusations de cruauté dirigées contre les planteurs portugais de l'Angola, un de ceux-ci a publié un volumineux ouvrage dans lequel il vante les bons traitements dont les nègres engagés par contrat, sont, au contraire, l'objet de la part de ses compatriotes de la colonie. M. René Claparède, secrétaire général du Comité international des Ligues du Congo, réfute cette assertion dans la France d'Outre-Mer. Il explique que ces prétendus engagés par contrats sont de véritables esclaves, les contrats étant automatiquement renouvelables, ce qui transforme l'engagement en servage à vie. Quant aux bons traitements dont se vantent les Portugais, leur efficacité est telle que la mortalité des noirs est de plus de 10 pour cent dans les îles sous leur dépendance, alors qu'elle ne dépasse pas 2,6 pour cent à la Jamaïque et 2,5 à la Trinidad. Aussi les malheureux nègres essaient à qui mieux mieux de fuir les plantations et de gagner les forêts ; mais alors ont lieu des chasses à l'homme dont M. Claparède nous donne une idée d'après le récit qui lui fut fait par un des planteurs qui y ont pris part. – Les chasseurs (dit-il) avaient été conduits par des guides en un endroit où l'on savait que les fugitifs s'étaient dirigés. Ils arrivèrent près de huttes qui venaient d'être abandonnées. Tout près, caché dans l'herbe, ils trouvèrent un vieillard. – Nous le prîmes (dit le planteur) et nous le forçâmes à nous dire où étaient les autres. Tout d'abord nous ne pûmes rien tirer de lui; après un long moment, sans dire un mot, il leva la main vers les arbres les plus élevés, et là nous vîmes les esclaves, hommes et femmes, accrochés comme des chauves-souris, sous les branches. Ce ne fut pas long, je vous assure, avant que nous les eussions descendus à travers le feuillage. Ma parole, quelle merveilleuse journée de sport nous eûmes là ! » On écrit ces choses contre de petits pays tels que la Belgique ou le Portugal, et l'on tait ce que font également et d'une manière pire, les Anglais, les Allemands et les autres peuples civilisés qui ont des colonies. Ajoutez que le gouvernement belge corrigea en grande partie l'oppression de l'administration du roi Léopold, au Congo, et que la république portugaise corrigea aussi l'oppression tolérée par la monarchie, tandis que les grands États dits « civilisés » continuent à conquérir les terres des peuples dits « barbares », ou à y maintenir leur domination habituelle, en semant dans ces contrées la mort, le pillage et les ruines. Les très civilisés Américains n'agissent pas autrement à l'égard des malheureux habitants des îles Philippines, et des malheureux survivants des Peaux-Rouges, qu'ils ont dépouillés de leur territoire héréditaire. Des preuves, il y en a assez pour remplir un volume. Il nous suffira d'indiquer un document publié tandis que cet ouvrage était sous presse. « La Liberté, 21 juillet 1913. Le sort des Peaux-Rouges. ... Une récente enquête du New-York Herald a précisé les méfaits de l'administration yankee et voici l'opinion d'un spécialiste, M. Robert G. Valentine, ex-commissaire des affaires indiennes » „Il est étonnant de constater que les blancs s'inspirent d'une morale différente quand il s'agit de leurs rapports entre eux ou de leurs relations avec les Peaux-Rouges. Des gens qui n'oseraient pas voler leurs semblables à face pâle trouvent tout naturel de dépouiller les Indiens. Ils savent, d'ailleurs, que ce faisant ils ne courent aucun risque ; et l'on peut conclure que les pillards ne sont pas tant à blâmer que la population américaine qui encourage si complaisamment leurs délits. J'en ai la preuve entre les mains et les faits dont je suis saisi sont tellement abominables qu'un jury ne manquerait pas de les flétrir...“ On raconte ensuite les diverses façons dont les blancs, gens certainement très civilisés et non moins certainement un peu voleurs et parfois assassins, dépouillent les Indiens : „Une combinaison souvent employée pour les priver de leur argent consiste à les obliger de déposer leur avoir dans des banques qui, au bout de quelques mois, se déclarent frauduleusement en faillite. Les agents gouvernementaux et les banquiers véreux partagent ensuite les bénéfices. Ils ont neuf chances sur dix de rester impunis. Bien mieux, des Indiens qui résistaient aux prétentions des envahisseurs blancs ont été assassinés. Ce cas s'est produit l'an dernier dans le comté de Johnston, en Oklahoma, où deux Cherokees qui ne voulaient point lâcher prise furent exécutés sans pitié. La justice dut tout de même intervenir et l'on découvrit que le juge du district était l'associé d'une bande de malfaiteurs occupés à voler les Peaux-Rouges de la région ! Ce juge fut révoqué et trois ou quatre condamnations furent prononcées. Néanmoins, le zèle des tribunaux est, en général, fort lent et la procédure infiniment tortueuse dans les procès qu'engagent les tribus... Citons encore un cas, celui des Pimas. Cette tribu auparavant se montrait industrieuse et vivait largement de son travail. Par la faute des Américains, elle a été amenée à la paresse, à l'indigence, à la décrépitude. Les marchands de biens ont manœuvré de telle sorte que les forêts, les pâturages, les mines des Pimas ont été rachetés pour des sommes insignifiantes. À peine l'État d'Arizona a-t-il été admis dans la Confédération, que déjà les spéculateurs américains commencent à tracasser les Navajos – gens pacifiques et dignes – parce que leurs propriétés ont augmenté de valeur. C'est toujours la même méthode d'intimidation et d'accaparement“. Tout cela n'est rien en comparaison des innombrables autres faits qu'on pourrait citer, et auxquels il y aurait lieu d'ajouter les lynchages de nègres et autres semblables menus faits. Les missionnaires américains, qui voient si bien la paille des autres pays, feraient bien de regarder la poutre du leur.

[FN: § 1051-1]

Le prof. Colajanni a fort bien montré, la vanité de toutes ces déclamations. – NAPOLEONE COLAJANNI ; Latini e Anglo-Sassoni (Razze inferiori e razze superiori). – ARCANGELO GHISLERI, en plusieurs de ses écrits, a crevé ces ballons d'hypocrisie.

[FN: § 1052-1]

COOK, dans Bibl. univ. des voy., t. 10 – 3e voyage. L'auteur décrit les phénomènes, sous le voile des dérivations, qui d'ailleurs ne dissimule pas trop les résidus. Il s'agit des habitants de Taïti : « (p. 239)... S'ils croient les âmes dépouillées de quelques-unes des passions qui les animaient tandis qu'elles se trouvaient réunies au corps, ils ne supposent pas qu'elles en soient absolument affranchies. Aussi les âmes qui ont été ennemies sur la terre se livrent-elles des combats lorsqu'elles se rencontrent ; mais il paraît que ces démêlés n'aboutissent à rien, puisqu'elles sont réputées invulnérables. Ils ont la même idée de la rencontre d'un homme et d'une femme. Si le mari meurt le premier, il reconnaît l'âme de son épouse, dès le moment où elle arrive dans la terre des esprits ; il se fait reconnaître dans une maison spacieuse, appelée Tourova, où se rassemblent les âmes des morts, pour se divertir avec les dieux. Les deux époux vont ensuite occuper une habitation séparée, où ils demeurent à jamais et où ils font des enfants ; au reste ils ne procréent que des êtres spirituels, car (p. 240) leur mariage et leurs embrassements ne sont pas les mêmes que ceux des êtres corporels ». Les dérivations sont illogiques, absurdes, simplement parce qu'elles sont accessoires ; les résidus seuls sont importants.

[FN: § 1052-2]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Comme on sait, l'histoire – ou la légende – veut que les généraux athéniens, vainqueurs sur mer aux îles Arginuses, fussent empêchés par une mer démontée de donner la sépulture à leurs morts. De retour à Athènes, les généraux furent condamnés à la peine capitale.

[FN: § 1054-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. La littérature pseudo-scientifique publiée par la Société des Recherches Psychiques, à Paris, fournit une abondante moisson d'exemples de ce genre. Il semble que le but de chaque publication soit de battre le record de l'extravagance. D'une façon générale, les « études » sur la Télépathie, la Force-Pensée, l'Hypnotisme, la Thérapie magnétique, le Zoïsme, la science Occulte de la Respiration, etc., offrent de nombreux exemples de résidus de la IIe classe. Le spiritisme est une exaltation de l'espèce (II-β).

[FN: § 1061-1]

A. ERMAN ; La relig. égypt.– E. NAVILLE ; La relig. des anc. Egypt. : « (p. 45)... à l'époque historique nous pourrons constater chez les Égyptiens des idées très arrêtées, qui ont conduit à la momification à laquelle ils donnaient une grande importance, et qui était si bien ancrée dans leur esprit, que cette coutume a duré jusqu'à l'époque chrétienne, et a même provoqué les reproches sévères de certains Pères de l'Église [Cfr. 1004-1]. La momie (p. 46) est devenue l'expression consacrée pour le défunt de la Terre d'Égypte, et il semble qu'il n'en ait jamais été autrement. Aussi, grand a été l'étonnement des premiers explorateurs qui ont trouvé qu'à l'époque très ancienne, préhistorique ou primitive comme on veut l'appeler, il n'en avait point été ainsi. Bien au contraire, les modes de sépulture paraissent avoir répondu à une idée tout autre que celle qui prévalut plus tard [ou mieux : les modes de sépulture changèrent en même temps que les idées avec lesquelles ils étaient en rapport de mutuelle dépendance]. Dans les nécropoles de cette population indigène qui a été subjuguée par les conquérants étrangers, nous trouvons de petites tombes rectangulaires ou ovales ; le cadavre y est placé tout entier sans aucune trace de momification, les genoux ramenés contre la poitrine... On a appelé cette position embryonnaire, et l'on y a vu comme une attitude préparatoire à une seconde naissance, la meilleure pour un corps qui allait renaître à une vie nouvelle [abus habituel des explications logiques]. Il me semble que cette explication est un peu savante pour la population dont il s'agit ; et (p. 47) qu'il y en a une autre beaucoup plus simple, qui nous est fournie par le père de l'histoire Hérodote ». En somme, l'auteur croit que cet usage vient de peuples comme les Nasamons qui tiennent le moribond assis à la mode orientale.

[FN: § 1070-1]

S. REINACH; Cult., myth. et rel., t. III, p. 186-196. Après avoir rappelé une petite image portant cette inscription : TEPMANIA, publiée par Mommsen, il cite une mosaïque et observe : « (p. 186) l'inscription TAAAIA qui l'entoure permet d'y saluer la première image certaine de la Gaule que nous ait léguée l'art gréco-romain. Le médaillon qui décore ce buste fait partie d'une mosaïque considérable, datant des Sévères... (p. 189) On connaissait déjà quelques exemples de provinces ou de villes représentées sur les mosaïques du IIe siècle. La tradition de ces personnifications topiques ne s’est pas perdue pendant le haut moyen âge... ». Il y a un grand nombre d'exemples de ces personnifications, sur les monnaies, les médailles, etc. ; de Rome.

[FN: § 1070-2]

F. ROBIOU ; L'état relig. de la Gr. et de l'Or., p. 22 : « ... si dans Pindare et, un peu après, dans l'Électre de Sophocle, Némésis est personnifiée, ni Eschyle ni même Hérodote, dans l'œuvre de qui elle joue un rôle important, n'en font un être anthropomorphique proprement dit ; en d'autres termes, cette conception paraît avoir flotté alors entre le sens abstrait et le sens mythologique ». – Société biblique de Paris; Les livres apocryphes de l'Ancien Testament. L'auteur du livre dit : La sagesse de Jésus, fils de Sirach (L'Ecclésiastique), « (p. 390) personnifie parfois la Sagesse, comme les écrivains de son peuple l'avaient fait avant lui, mais il se laisse ramener insensiblement à une représentation plus concrète, et l'on ne sait plus, en bien des cas, (p. 391) lorsqu'il parle de la sagesse, s'il pense à l'entité, métaphysique ou à la vertu pratique. Ce qu'il en dit est assez incohérent : Elle est la première des créatures, éternelle et partout répandue. Tout homme y a part... Dieu lui a ordonné d'habiter avec Jacob et elle a fait de Jérusalem sa capitale. Elle est parfois identifiée plus ou moins complètement avec la crainte de Dieu et même avec la Loi ». – TOUTAIN ; Les cultes païens dans l'emp. rom., t. I : « (p. 415) Si nous exceptons les deux déesses Fortuna et Victoria, qui méritent, en raison de leur importance, une étude particulière, les divinités abstraites dont nous avons relevé les noms sur des documents épigraphiques sont : Aequitas, Bonus Eventus, Concordia, Copia, Disciplina, Fama (?), Felicitas, Fides publica, Gloria, Honos, Iuventus, Libertas, Mens ou Bona Mens, Pax, Pietas, Prosperitas (p. 416) Deorum, Providentia, Salus Generis Humani, Sanctitas, Virtus ».

[FN: § 1074-1]

Dict. DAREMB. SAGLIO ; s. r. Roma, Rome personnifiée ou déifiée (E. Maynial) : « (p. 875) La plus ancienne représentation de Roma, comme personnification symbolique de l'État, apparaît au droit des premiers deniers de la République à partir de 269 av. J.-C. (p. 876) En gravant cette tête sur leurs monnaies, les Romains n'avaient aucunement l'idée de représenter Roma comme une divinité ; mais seulement de créer un emblème de leur cité, sous les traits d'une femme armée, à l'exemple de tant de villes grecques. Ce sont les peuples étrangers qui, par flatterie ou par reconnaissance, donnèrent à la personnification de Roma le caractère et les attributs d'une divinité. En même temps qu'ils divinisaient Rome, les Grecs donnaient à cette nouvelle déesse une histoire et une personnalité définies. La plus ancienne tradition relative à Roma, celle de l'historien Gallias rapportée par Denys d'Halicarnasse, la représente comme une Troyenne... Sous l'Empire le culte de Roma se développa et se régularisa. (p. 877) L'empereur Hadrien consacra définitivement et reconnut officiellement dans Rome même le culte qui s'adressait à l'État divinisé... » – TOUTAIN ; loc. cit. 1070-2 : « (p. 41) Le culte de la déesse Rome a donc survécu en divers point du monde romain pendant presque tout le haut empire. Séparé du culte impérial, il ne semble pas avoir été très répandu dans les provinces latines. »... « (p. 74) Le culte de la puissance romaine sous les diverses formes qu'il revêtit, fut général dans les provinces latines. Si la déesse Rome y eut moins d'adorateurs qu'elle n'en avait eu en Grèce et en Asie pendant les deux derniers siècles de la République, la divinité impériale du moins y reçut des hommages innombrables. Outre l'Auguste lui-même, vivant ou mort, on honora d'un véritable culte ses proches, sa maison, ses qualités, ses exploits ». L'auteur démontre ensuite que ce culte naquit spontanément, qu'il ne fut pas imposé. En grand, les peuples adoraient Rome et l'Empereur ; en petit, parfois en tout petit, des collectivités et des individus adoraient ce qui leur était profitable. « p. 376) Les molinarii de Guntia étaient des meuniers qui rendaient un culte au dieu du fleuve, parce que le fleuve faisait marcher leurs moulins ».

[FN: § 1074-2]

Les Chalcidiens, sauvés par Titus Quintus Flaminius, lui consacrèrent les plus beaux édifices de leur ville. PLUTARQUE ; T. Q. Flam., XVI, 4-5, nous fait connaître deux inscriptions de ces édifices. La première dit : « Le peuple [consacre] ce gymnase à Titus et à Héraclès » ; et la seconde : «Le peuple à Titus et à Apollon Delphien ». Au temps de Plutarque, on élisait encore un prêtre de Titus, et l'on chantait un péan qui se terminait ainsi :

Nous vénérons la foi des Romains,
Foi ardemment désirée, que nous jurons de conserver,
Chantez, vierges,
Zeus et la grande Rome, et Titus et avec eux la foi des Romains.
Io ! Paian ! Oh ! Titus sauveur !

À peu près en ce temps, à Locres, un autel était ainsi consacré : « Les Locriens à Jupiter optimus maximus, aux dieux et aux déesses immortels, et à Rome Éternelle ». – ORELLI ; 1799 : Iovi optimo maximo diis deabusque immortalibus et Romae Aeternae Locrenses. – Le peuple de Mélos dédia une statue et une couronne de bronze à Rome. – LIV.; XLIII, 6 : Alabandenses templum urbis Romae se fecisse commemoraverunt, ludosque anniversarios ei divae instituisse... –TACIT. ; Ann., IV. Onze cités se disputaient pour obtenir l'autorisation d'élever un temple à Tibère. Les Smyrniotes rappelèrent leur antiquité, leur fidélité au peuple romain, et ajoutèrent : (56) Seque primos templum urbis Romae statuisse, M. Porcio consule, magnis quidem iam populi romani rebus, nondum tamen ad summum elatis, stante adhuc punica urbe, et validis per Asiam regibus : « Qu'ils avaient, les premiers, décerné un temple à Rome, sous le consulat de M. Porcins, alors que le peuple romain avait déjà fait de grandes choses, sans avoir encore atteint la suprême grandeur, Carthage étant toujours debout et des rois puissants régnant en Asie ». DIO CASS. ; II, 20 : « Parmi les autres choses que César [Auguste] édicta, il permit à Éphèse et à Nicée d'élever un temple à Rome et à César, son père, qu'il appela le héros Julius ». –ORELLI, 155. On mentionne des individus sacerdoti Romae et Aug. P. H. C. (Provinciae Hispaniae citerioris). – Idem ; 488 ; 606 : Romae et Augusto. Caesari divi F. patri patriae. – 732 ; 1800; 3674 : ... mun. L. (Lyciorum) restitutae in maiorum libert. Roma (i. e. Statuam Deae Romae dedicavit). Iovei Capitolino et poplo romano V. M. (virtutis, Sirmond.) benivolentiae beneficiq. caussa. – 5211 : ... sacerdos Romae et Aug. – 7172 : in aede Romae et Augusti. –-MART. ; XII, 8 :

Terrarum Dea gentiumque Roma,
Cui par est nihil, et nihil secundum,
…………………………………….

Plus tard, RUTILIUS ; I, dira :

(47) Exaudi, Regina tui pulcherrima mundi,
Inter sidereos Roma recepta polos ;
Exaudi, genetrix hominum, genetrixque Deorum,
Non procul a caelo per tua templa sumus.

[FN: § 1076-1]

D. HIERONYM.: c. Iovan., II, in fine : t. II, p. 380 : Urbs potens, urbs orbis domina, urbs Apostoli voce laudata, interpretare vocabulum tuum, Roma aut fortitudinis nomen est apud Graecos, aut sublimitatis iuxta Hebraeos,...

[FN: § 1078-1]

Le Mouvement pacifiste. Correspondance bimensuelle du bureau international de la paix à Berne, 15 avril 1912, n. 7. Tout l'article est un prêche comme on en a dans d'autres religions ; il semble même être une réminiscence de quelque prêche chrétien : « (p. 101) Il n'y a pas de miracles sans la foi. Le pacifisme, doctrine mondiale, accomplira des miracles s'il règne dans votre cœur ». La souplesse des dérivations se voit bien au fait de certains pacifistes italiens, qui prêchèrent la guerre au nom de la paix ! (1705 et sv.) Il semble qu'il y ait contradiction, et c'est vrai au point de vue logique, mais pas à celui des sentiments. Ces pacifistes donnaient le nom de pacifisme à un agrégat de sentiments de bienveillance et d'amour pour d'autres hommes ; le même agrégat de sentiments existe dans le patriotisme. Il y a donc deux noms pour une même chose, et l'on ne s'aperçoit pas de la contradiction, en cédant aux diverses impulsions de cet agrégat unique de sentiments. De même, que de guerres a-t-on faites au nom de la religion chrétienne, qui prêche la paix !

[FN: § 1082-1]

HOVELACQUE ; Les nègres : « (p. 897) La religion des noirs sus-équatoriaux est le fétichisme le plus rudimentaire. La vue d'un être quelconque, d'un objet, d'un phénomène, émeut particulièrement l'individu, et celui-ci attribue à cet être, à cet objet, à ce phénomène une puissance particulière. On n'en est pas encore au spiritualisme et au spiritisme, on ne croit pas encore à des êtres immatériels, mais on est sur la voie de l'animisme ».

[FN: § 1082-2]

A. LYALL; Mœurs relig. et soc. de l'ext. Orient, t. I.

[FN: § 1083-1]

L'auteur continue : « (p. 18)... le sentiment qui pousse l'Indien non-initié à adorer des troncs d'arbres et des pierres, ou ce que l'on appelle les caprices de la nature, est tout uniment dans son essence, cette frayeur sainte de l'extraordinaire, qui n'est particulière à aucune religion. Elle survit encore de nos jours en Angleterre dans l'habitude d'attribuer les accidents grotesques ou frappants du paysage, les antiquités énigmatiques, au diable, qui se trouve ainsi légataire universel de (p. 19) toutes les superstitions païennes démodées en pays chrétien. Dans n'importe quel district de l'Inde, des objets ou des configurations locales, telles que les Palets du Diable (près de Stanton)... recevraient un véritable culte ; des particularités analogues sont actuellement adorées par tout le Bérar, et, dans chaque cas, une signification mystique ou symbolique a été imaginée ou sanctionnée par quelque brahmane expérimenté, pour justifier et autoriser cette coutume [voilà la dérivation très bien décrite]. Pourtant il semble certain qu'en principe, le vulgaire n'a aucune arrière-pensée et n'attache aucun sens secondaire à son acte d'adoration [Voilà une bonne description du résidu]. L'adorateur n'a nul besoin d'un motif de ce genre ; il ne demande aucun signe, n'offre aucune prière, n'attend aucune récompense. Il prête une attention respectueuse à une chose inexplicable, à l'expression alarmante d'un pouvoir inconnu, puis il passe son chemin ». Puis viennent les dérivations : « Il n'est pas difficile de voir comment ce culte original et élémentaire [résidus] se modifie en pénétrant dans la sphère supérieure des superstitions créées par l'imagination [comment naissent les dérivations]. D'abord la pierre est la demeure d'un esprit ; sa forme ou sa situation curieuse trahit la possession. (p. 20) Plus tard, cette forme ou apparence étrange dénote un dessein préconçu, une intervention manuelle des êtres surnaturels, à moins qu'elle ne soit un dernier vestige de leur présence sur la terre. Un pas de plus, et nous entrons dans le vaste monde de la mythologie et des légendes héroïques, où les traits naturellement remarquables d'une colline, d'une brèche dans un roc,... rappellent les miracles et les hauts faits d'un saint, d'un demi-dieu, ou même d'une divinité tout épanouie. Le Bérar nous fournit de ces fables en abondance, et par delà, nous arrivons, je crois, au point où l'on regarde les pierres comme des emblèmes d'attributs mystérieux ; ... (p. 21) en un mot, à toute cette catégorie de notions qui séparent entièrement l'image extérieure de la puissance réellement adorée. De sorte que nous émergeons enfin dans le pur symbolisme, comme il advient quand on choisit arbitrairement un objet quelconque pour servir de but visible à l’adoration spirituelle ». Voir la suite de la citation au § 1090.

[FN: § 1084-1]

On trouve beaucoup d'autres cas semblables. Par exemple, PALLAS ; V « (p. 151) Les Ostiaks vénèrent aussi certaines montagnes et des arbres, qui ont frappé leur imagination, ou qui ont été déclarés comme sacrés par leurs devins. Ils ne passent jamais devant sans y décocher une flèche ; c'est la marque de vénération que l'on rend à ces objets. Mon récit ne regarde que le culte particulier. Le culte public est adressé à des idoles de la première classe, bénites par leurs devins... (p. 152) Les Ostiaks vénéraient autrefois beaucoup d'arbres de cette forêt ; ils y appendaient les fourrures et les peaux d'animaux immolés. (p. 153) Mais comme les Kosaques s'emparaient de ces fourrures, ils se sont déterminés à couper les arbres dont ils ont formé des troncs et de gros rondins. Après les avoir ornés de chiffons et de plaquettes, ils les ont placés dans des lieux sûrs, où ils vont aujourd'hui déposer leurs offrandes ».

[FN: § 1086-1]

Un même homme peut aussi, dans sa vie, gravir une semblable échelle. En juillet 1913, fut inauguré à Paris un monument au Père Hyacinthe, sur lequel on lit : « Le père Hyacinthe, prêtre de Saint-Sulpice, puis carme déchaussé, prêcha dans la chaire de Notre-Dame de 1864 à 1869, puis quitta l'Église, et se maria le 3 septembre 1872. Pendant vingt ans il prêcha la réforme catholique et l'union des Églises (1873-1890) ; pendant les vingt années suivantes, il s’éleva au-dessus de toutes les Églises, et mourut en libre-croyant monothéiste ». Ce fait n'est pas singulier. Il est bien connu qu'en général, beaucoup de gens commencèrent par se détacher de l'Église catholique, en disant qu'ils voulaient seulement s'attacher à un autre catholicisme, meilleur et plus libéral. Mais ils s'arrêtèrent bien rarement à ce point. Leur évolution continue et, peu à peu, leur catholicisme devient du théisme. Parfois, le théisme devient ensuite du matérialisme. Parfois encore, l'évolution s'arrête à un certain point ; il y a recul, et l'homme meurt dans la religion catholique de son enfance.

 


 

Notes du Chapitre VII. – Les résidus (suite) (§1089 à §1206) Examen des IIIe et IVe classes. pp. 578-648

[FN: § 1095-1]

J. LUBOCK : Les orig. de la civ.

[FN: § 1098-1]

On donne ce nom à des accès de ferveur religieuse qui frappent de temps en temps les habitants du Pays de Galles ou d'autres populations.

[FN: § 1098-2]

H. Bois ; Le Réveil au Pays de Galles : « (p. 147) Les incrédules sont dans les galeries. Sidney Evans [c'est l'apôtre, le prophète du Réveil] conseille aux ouvriers chrétiens (christian workers) de ne pas discuter avec les incrédules, de témoigner, d'attester, de montrer la vie qui est en eux, de prier. Au premier rang de l'assemblée, une femme désire se convertir, n'arrive pas à se décider. Un chrétien qui est à côté d'elle, prie à haute voix pour elle. Elle ne se décide toujours pas. Le meeting arrive à sa fin. Elle ne bouge pas. Et le chrétien reste, lui aussi, à côté d'elle à lui parler, à l'exhorter ».

[FN: § 1098-3]

H. Bois ; loc. cit. : « (p. 179)... tandis que la Mission Torrey est plus dogmatique, plus doctrinale, le Réveil gallois est plus émotif, plus affectif, plus vibrant, plus vital. Dans la Mission Torrey, les allocutions sont un très gros et très important morceau : Torrey est si didactique qu'il n'est pas rare de voir des auditeurs prendre des notes pendant qu'il parle... Les allocutions sont, au contraire, à l'arrière-plan dans le Réveil gallois où l'importance suprême est accordée au chant et à la prière... L'émotion qui déborde partout an Réveil gallois, ne joue aucun rôle dans les discours de Torrey... »

[FN: § 1098-4]

L'auteur explique ce que vent dire ce fameux hwyl (prononcez houïl). Ce terme signifie « (p. 268) plein vent dans les voiles ». Il ajoute : « (p. 268) Si parfois les Gallois prient en chantant, il est vrai aussi de dire qu'ils chantent en priant ; c'est ce qui se produit dans ce qu'on appelle en gallois le hwyl ». – I. ROGUES; Un mouv. myst. cont. : « (p. 140)... le mot hwyl ne désigne pas seulement un procédé oratoire, mais un état de conscience particulier dont la mélopée plaintive susmentionnée est ou est censée être la traduction. Psychologiquement il est constitué par une émotion intense avec perte de la conscience du monde extérieur et amnésie consécutive ». On ne saurait décrire autrement le shamanisme.

[FN: § 1099-1]

H. Bois ; loc. cit. § 10981: « (p. 227) J'ai vu un jeune homme couché tout de son long sur les marches de l'escalier conduisant à la chaire, la figure crispée, les poings raidis, et dans cette posture il a lancé une véhémente prière, restant dans la même attitude après avoir prié. J'ai vu des hommes empoignés par l'émotion au fur et à mesure que la réunion se prolongeait et se développait, fermer leurs poings, boxer pour ainsi dire en cadence, tout en restant assis et sans mot dire, ou bien se frapper la tête, se prendre la tête à deux mains, faire de grands gestes tout en restant silencieux. J'ai vu des femmes, des jeunes filles, sous l'empire de la contagion émotive et nerveuse s'abstraire de plus en plus de leur entourage, les joues rouges, l'œil fixe, parfois les paupières fermées. Ceux ou celles chez qui cela devient trop fort éclatent presque inconsciemment en prières ou en cantiques ». Plus loin : « (p. 2111) À côté des prières d'actions de grâces, il y a les prières qui sont de véritables cris. Crier à Dieu, lutter avec Dieu, agoniser dans la prière. ces expressions deviennent tout à fait, littéralement exactes. On peut entendre effectivement les cris déchirants de pécheurs qui s'estiment perdus et qui supplient le Dieu de miséricorde d'avoir pitié d'eux : (p. 242) Seigneur sois miséricordieux envers moi ! moi !moi !... ».

[FN: § 1101-1]

G. SOREL dans L’Indépendance, 1er mai 1912 « (p. 230) De ce que les chefs de soulèvement populaire aient, soit au cours du Moyen-Âge, soit au début des (p. 231) temps modernes, prétendu fonder leurs révoltes sur des paroles prononcées par des prophètes d'Israël, il ne faudrait pas en conclure que ces prophètes ont été des révolutionnaires. C'est bien le cas d'appliquer ces remarques judicieuses que fait Renan : « En histoire religieuse, un texte vaut, non pas ce que l'auteur a voulu dire, mais ce que le besoin du temps lui fait dire ». En note : « RENAN ; Histoire du peuple d'Israël, tome IV, p. 193 » – « Cette remarque s'applique aussi fort bien à l'histoire profane ; ainsi la social-démocratie a fait d'effroyables contresens pour se donner l'air de suivre les enseignements hégéliens ». Très juste. Le fait est encore plus général et dépend de ce que la dérivation est secondaire, et qu'on trouve toujours autant de dérivations qu'on veut pour justifier des résidus, des tendances, des intérêts. On remarquera la phraséologie habituelle, dans le passage de Renan, qui parle des « besoins du temps ». Que peut bien être cette nouvelle entité ? Pour rester dans le domaine de l'expérience, il faut rectifier en disant : « ... mais ce que les hommes en tirent pour justifier leurs sentiments, leurs inclinations, leurs intérêts, en un temps donné ».

[FN: § 1102-1]

BINET SANGLÉ : Les proph. juifs. « (p. 76) Le nabi iahvéiste est un dégénéré, dont l'écorce cérébrale, incomplètement développée, ne contient qu'un nombre restreint de neurones mnésiques, c'est-à-dire de clichés à images et à idées. De ce fait le champ de sa pensée est limité. De plus, en raison de l'arrêt de développement de ces neurones et de l’hypercontractilité qui en est la conséquence, il présente une disposition particulière à la dissociation cérébrale, à la formation de ces groupes neuroniens indépendants, qui sont (p. 77) le théâtre des courts circuits mnésiques, conditions des hallucinations et des obsessions ». L'auteur parle de l'antique prophétisme. Plusieurs auteurs protestants avouent qu'il y avait là quelque chose de pathologique. Par exemple PIEPENBRING; Théol. de l’anc. test. : « (p. 16) C'est évidemment parce qu'il se mêlait à l'ancien prophétisme toutes sortes d'excentricités, que les prophètes sont parfois (p. 17) traités de fous ou d'hommes en délire. Ce qui a pu contribuer également à leur faire cette réputation, ce sont les actes symboliques, assez curieux, qu'ils employaient pour exprimer leur pensée d'une manière plastique ». Mais ayant fait ainsi la part du feu, ils veulent au moins sauver le nouveau prophétisme ; et ils ne peuvent faire autrement, parce que celui-ci se rattache à l'Évangile. Notre auteur dit du nouveau prophétisme : « (p. 73) Il apparaît... dans toute sa pureté. dégagé des usages traditionnels que nous rencontrons parmi les autres peuples de l'antiquité et qui exerçaient une puissante influence sur les anciens prophètes d'Israël. Ceux-ci se livraient encore à l'art de la divination et leur activité n'était pas exempte d'une exaltation plus ou moins maladive ; les prophètes de notre période au contraire sont des prédicateurs, parlant sous l'influence de l'inspiration divine, sans toutefois perdre conscience d'eux-mêmes, et se laissant guider par les événements politiques, qu'ils observent avec attention ». On ménage ainsi la chèvre et le chou. Les croyants se contentent de l'inspiration divine, et les pseudo-expérimentaux de la constatation de leurs succès politiques. « (p. 79) Tout cela prouve incontestablement que, parmi les prophètes israélites, il existait quelque chose de semblable à la glossolalie, ce degré inférieur de l'inspiration chrétienne [notez que l'auteur ne la rejette pas absolument ; il la place seulement à un degré inférieur], et à d'autres phénomènes analogues qui se sont produits depuis dans l'Église, principalement sous l'influence du méthodisme américain ; mais cela ne prouve pas que tous [quelques-uns oui ; tous non] étaient dans cet état quand ils recevaient la parole divine ». « (p. 81) Les deux sortes d'inspiration chrétienne que saint Paul décrit, 1 Cor. 14, ont évidemment une grande analogie avec les deux sortes de prophétisme de l'ancien Israël. Et de même que l'apôtre place la simple prédication évangélique au-dessus de la glossolalie, de même nous devons placer la simple prédication prophétique, faite sous l'inspiration de l'esprit de Dieu, bien au-dessus de l'ancien prophétisme extatique ». L'auteur ne définit pas ce qu'il entend par un prophétisme supérieur à un autre. Par conséquent, nous ne pouvons ni admettre ni rejeter son théorème. Il ne donne et ne peut donner aucune preuve expérimentale que les dits prophètes « fussent inspirés par l'esprit de Dieu ». On ne peut y croire que moyennant un acte de foi, et l'on ne sait pourquoi l'acte de foi doit s'arrêter à la proposition générale, et ne pas aller jusqu'à croire vrais aussi tous les détails du prophétisme, soit ancien soit nouveau. On ne nous donne aucun critère pour savoir où doit cesser la foi et commencer la recherche expérimentale.

[FN: § 1105-1]

BOUCHÉ-LECLERCQ ; Hist. de la div. dans l'ant., t. III. La pudique retenue de notre auteur qui – dans un ouvrage scientifique en quatre volumes ! – n'ose pas décrire l'extase de la Pythie, est vraiment caractéristique de la stupide phobie sexuelle qui règne de nos jours. Van Dale, qui vivait en un temps où les savants n'étaient pas affectés de cette maladie, expose clairement et simplement ce dont il s'agit. En résumé, on disait qu'un méchant démon entrait par les parties sexuelles de la Pythie, et répondait par sa bouche. Voilà le grand mystère qu'on ne peut dévoiler sans offenser les bigots de la vertu. Je le regrette pour eux ; mais je veux citer ce que dit Van Dale. – VAN DALE ; De orac. vet. ethn. : (p. 153) Quod apud ipsos Ethnicos nullibi legimus ; se quod non nisi nuda assertatione affirmant veteres nonnulli Christiani, eosque secure hie secuti multi ex recentioribus Theologis, est, Pythiam, dum sic in Tripode sederet, recepisse non tantum intra corpus Cacodaemonen, seu Diabolum ; verum et per ipsius muliebria, seu membra pudenda, in ipsum corpus intrasse, ac per os illius Responsa, quae Ethnici Divina Christiani vero Diabolica, appellabant. Primus autem qui inter Christianos, quod sciam, illud asseruit est Origines : qui lib. 7. Contra Celsum. ita loquitur : ...(p. 154) Certe de Pythia, quo non aliud manteion est celebrius, narratur vatem illam Apollinis desidere super foramen specus Castalii, et ascendentem inde spiritum per muliebre gremium recipere, quo repleta profert ista praeclara et Divina, ut putantur Oracula... Hunc sequitur Chrysostomus ; qui Hom. XX in I Cor. 22 ita, (aeque haesitanter tamen quam. Origines per narrant ac dicunt loquifur Dicitur Pythia (mulier quaedam) insidere Tripodi quandoque Apollinis, ac quidem cruribus apertis : sicque malignum Spiritum inferne in corpus eius penetrantem, ipsam implere furore... Ex hoc vero Chrysostomo sua mutuatus videtur Aristophanis Scholiastes, qui pene iisdem. verbis tititur. La scolie citée par Van Dale est celle du Plutus, v. 39.

[FN: § 1106-1]

MICHAUD ; Hist. des cr., I « (p. 121). au temps dont nous parlons, la dévotion du pèlerinage, qui devenait plus vive en se communiquant, et qu'on pouvait appeler, selon l'expression de Saint Paul, la folie de la croix, était une passion ardente et jalouse qui parlait plus haut que toutes les autres. (p. 122) Les femmes, les enfants, les clercs, s'imprimaient des croix sur le front ou sur d'autres parties de leur corps, pour montrer la volonté de Dieu. …(p. 123) Ce qu'on aura peine à croire, les voleurs, les brigands quittaient leurs retraites inconnues, venaient confesser leurs forfaits [exactement ce qui arrive dans les Réveils et les Missions de l'Armée du Salut ; mais, alors comme aujourd'hui, ces conversions étaient et sont éphémères] et promettaient en recevant la croix, d'aller les expier dans la Palestine ». – LEA ; Hist. de l’inq., t. I, p. 147, tract. Reinach, p. 165-166 : « (p. 165) Pendant que l'on prêchait cette croisade [contre les Albigeois], certaines villes et bourgades d'Allemagne se remplissaient de femmes qui, faute de pouvoir satisfaire leur ardeur religieuse en prenant la croix (p. 166) se déshabillaient et couraient toutes nues par les rues et par les routes. Un symptôme plus éloquent encore de la maladie de cette époque [l’auteur pouvait observer des maladies semblables dans son pays. Cette mégère qui détruisait à coups de hache les débits de boissons alcooliques, reproduisait en elle un exemple de la maladie des croisades], fut la Croisade des Enfants, qui désola des milliers de demeures. Sur de vastes étendues de territoire, on vit des foules d'enfants se mettre en marche, sans chefs ni guides, pour aller à la recherche de la Terre Sainte ; ... Le petit nombre de ceux qui revinrent ne purent donner aucune explication du désir frénétique qui les avait emportés ».

[FN: § 1107-1]

HORAT. ; Od., I, 16 :

Non Dindyrnene, non adytis quatit
Mentem sacerdotum incola Pythius,
Non Liber aeque, non acuta
Sic geminant Corybantes aera
Tristes ut irae.

« Non, Dindyméné [Cybèle], non, dans le sanctuaire, ni le dieu pythique [Apollon], inspirateur, ni Liber [Bacchus] ne troublent l'esprit du prêtre ; les Chorybantes ne frappent pas, de coups répétés, le bronze sonore, comme la funeste fureur [trouble l'homme].

[FN: § 1108-1]

EURIP., Bacch. : « (215-216) M'étant absenté de cette terre, j'entends les nouveaux malheurs de cette cité : (217) Nos femmes ont abandonné les maisons, (218-220) poussées par un enthousiasme simulé, et parcourent les montagnes ombreuses, célébrant par des danses ce nouveau dieu, Bacchus, quel qu'il soit. (221-223). Au milieu des thyases, sont placés des cratères pleins, et chacune de son côté se retire dans la solitude, pour jouir des embrassements des hommes, (224) sous le prétexte qu'elles sont des Ménades qui sacrifient ; (225) mais elles se préoccupent plus d'Aphrodite que de Bacchus. (226-227) Toutes celles que j'ai pu saisir, les gardes les tiennent, les mains liées, dans les maisons publiques. (228) Celles qui ont échappé, je les capturerai sur les montagnes et les conduirai ici... » – CICÉRON ; De leg., II, ne s'exprime pas autrement. Il est manifeste qu'il condamne les réunions déréglées, anarchiques, tandis qu'il admet tout ce qui est réglé par le pouvoir public. 14, 35 Att. Quid tandem id est ? – Marc. De nocturnis sacrificiis mulierum. – Att. Ego vero assentior ; excepto praesertim in ipsa lege sollemni sacrifcio ac publico. – Mais cela ne lui suffit pas : Marc. Quid ergo aget Iacchus, Eumolpidaeque nostri, et augusta illa mysteria, si quidem sacra nocturna tollimus ? Non enim populo Romano, sed omnibus bonis firmisque populis leges damus. – (36) Att. Excipis, credo, illa, quibus ipsi initiati sumus. – Marc. Ego vero excipiam. – Il ne veut pas qu'ils aient lieu à Rome : il permet seulement que les femmes soient initiées aux mystères de Cérès, d'après les rites romains : 15, 37 Quo in genere severitatem maiorum senatus vetus auctoritas de Bacchanalibus, et consulum, exercitu adhibito, quaestio animadversioque declarat. Atque omnia nocturna, ne nos duriores forte videamur, in media Graecia Diagondas Thebanus lege perpetua sustulit. En somme, tout besoin religieux peut être satisfait au moyen d'un culte bien organisé par l'État : Publicus autem sacerdos imprudentiam consilio expiatam metu liberet audaciam in admittendis religionibus fœdis damnet, atque impiam iudicet.

[FN: § 1109-1]

S. REINACH; Cultes, myth., et relig., III, ne croit pas aux accusations portées contre les gens qui célébraient les Bacchanales. Il dit fort bien : « (p. 269) Toutes les accusations répandues contre la moralité des mystères sont des inventions grossières ou ridicules. analogues à celles qui furent propagées à Rome même contre les premiers chrétiens, puis, dans le monde chrétien, contre les Manichéens, les Juifs, les Templiers et beaucoup d'autres. La malignité humaine est peu inventive ; en tête des griefs contre les sectaires qu'elle veut perdre, on trouve toujours le meurtre, la sodomie et le viol ». Mais ensuite, il laisse libre cours à sa fantaisie, et donne une version du fait des Bacchanales, qui va entièrement au delà des documents que nous possédons. Ainsi l'on cherche simplement à deviner l'histoire, et non pas à l'écrire.

[FN: § 1112-1]

J. LUBBOCK ; Les orig. de la civ. [L'ouvrage cité de Williams est Fiji and the Fijians, vol. 1, p. 224] : « (p. 389) Il se fait alors un profond silence, le prêtre, s'absorbe dans ses pensées, tous les yeux sont fixés sur (p. 340) lui. Au bout de quelques minutes, il se met à trembler ; on voit des tiraillements sur son visage, ses membres sont agités de soubresauts nerveux. Ces soubresauts s'augmentent, tous les muscles de son corps s'agitent, et le prêtre se met à frissonner comme s'il avait un violent accès de fièvre. Quelquefois ce tremblement est accompagné de murmures et de sanglots ; les veines se gonflent et la circulation du sang s'accélère. Le prêtre est actuellement possédé de son dieu, aussi ses paroles et ses actions ne sont-elles plus les siennes propres, mais celles dé la divinité qui s'est emparée de lui ».

[FN: § 1112-2]

H. Bois ; loc. cit., § 1098-1 : « (p. 493) Evan (p. 494) Roberts, presque aussitôt arrivé se dresse dans la chaire, arrête le chant et demande : “Est-ce que ce lieu est clair ? J'ai peur que non. Est-ce que nous sommes venus ici pour voir seulement, au lieu de venir pour adorer le Dieu vivant ? Est-ce que nous sommes venus ici pour être divertis, au lieu de venir pour être sanctifiés ? ” – Une pause – “ Non, ce lieu n'est pas clair. Qu'est-ce, mes amis ? ” demande le revivaliste sauvagement. Et il se penche sur la chaire, la figure toute rouge, congestionnée, les veines gonflées. – “ Il y a, déclare-t-il, quelque chose d'extraordinaire qui ne va pas ” Quelqu'un commence une prière : “ S'il y a ici quelque chose qui pèse sur ce... ” – “ Ne dites pas si, interrompt Roberts, ne dites pas si ”. Et il s'assied pleurant et criant : – “ Ô Seigneur, courbe-les !” Ses grands sanglots sont terribles à entendre. Le Dr M'Affee... se précipite à son secours. “ Ô Seigneur, s'écrie Evan Roberts avec désespoir, C'est plus que je ne puis porter !” Puis il dit à l'assemblée : – “ C'est le fardeau le plus pesant que j'aie encore porté ” et il s'arrête. On prie partout dans l'édifice. Evan Roberts, au milieu de violents sanglots, s'écrie : – “ Il est difficile d'obéir toujours à Dieu... L'obstacle, dit-il un peu plus tard, est le môme qu’hier soir ; je dois donner le message... ” Et il succombe de nouveau à son émotion. À la fin, comme s'il faisait appel à toute son énergie, pour se vaincre lui-même, il dit : “Dieu m'a confié ce message, il y a plusieurs jours, mais c'est seulement ce soir qu'il doit être révélé. Voici le message. Faites-en ce que vous voudrez. Il vient directement de Dieu : Les fondations de cette Église ne sont pas sur le Roc ” (sensation)... ».

[FN: § 1119-1]

Voir sur ce sujet: FAUSTO SQUILLACE ; La Moda. L'auteur observe avec raison que « (p. 21) on peut grouper les courants ou tendances collectives, propres à un laps de temps plus ou moins court, sous le nom générique et compréhensif de modes, c'est-à-dire de façon de penser, de sentir à un moment déterminé, en certaines conditions, en pleine conformité avec d'autres individus du même temps et de la même société ». Parfois, ces façons ont des causes générales qui agissent sur beaucoup d'individus, un grand nombre d'autres les employant ensuite par simple imitation. Parfois, ce peut être le caprice d'un seul individu, qui donne naissance à une mode, suivie ensuite par d'autres individus. Par exemple, la façon dont se vêtait Édouard VII d'Angleterre créait la mode masculine.

[FN: § 1123-1]

PALGRAVE ; Voyage dans l'Arabie. t. II.

[FN: § 1123-2]

PALGRAVE ; loc. cit. 1123-1 « (p. 80) Le fondateur de la secte wahabite et son disciple Saoud (p. 81) n'avaient pas moins en vue l'établissement d'un grand empire que le prosélytisme religieux ; ces deux hommes, – le premier plus encore peut-être que le second, – voulaient non seulement convertir leurs voisins, mais les soumettre... Il leur fallait trouver à la conquête un motif plausible, et avoir un signe de ralliement qui servit à reconnaître les partisans de leur doctrine. Croire à l'unité de Dieu, s'acquitter régulièrement des prières prescrites... tout cela ne suffisait pas à tracer une ligne de démarcation. ...Il était besoin d'imaginer quelque chose de plus : le tabac fournit un excellent prétexte ».

[FN: § 1125-1]

J. G. FRAZER; Le ram. d'or, I : « (p. 255) Chez les Indiens Creeks, tout jeune homme, lors de son initiation, devait s'abstenir pendant douze lunes de curer ses oreilles et de se gratter la tête avec les doigts ; il devait se servir d'un petit bâton. Pendant quatre lunes, il devait avoir un feu qui lui fût propre, et c'était une vierge qui lui préparait sa nourriture. La cinquième lune, n'importe qui pouvait préparer ses repas, mais il devait se servir le premier et n'employer qu'une cuiller et une poêle. Le cinquième jour de la douzième lune, il recueillait de la balle de blé, la brûlait et se frottait le corps avec les cendres... Pendant tout le temps que durait l'initiation, il ne (p. 256) pouvait toucher que les jeunes gens qui se faisaient initier comme lui. Une coutume analogue existait chez les Cafres, lors de la circoncision des garçons ». Le même auteur cite une infinité d'autres exemples analogues.

[FN: § 1127-1]

Le 22 juillet 1913, à Paris, un inspecteur de police tenta d'assassiner une dame Roudier, pour la voler. Il fut arrêté et, interrogé, il avoua le crime. « „Je suis un misérable“, s'écria-t-il, après avoir décliné son identité et sa qualité. „J'ai voulu me procurer de l'argent à tout prix, mais c'est le besoin qui m'a poussé. J'ai un petit garçon d'un an à peine, et ma femme attend la venue d'un autre enfant. J'étais à bout de ressources ; il me restait juste treize sous en poche. J'habite depuis huit jours seulement la rue Nationale ; les frais de mon déménagement puis le terme ont épuisé toutes mes ressources.“ – „ Pourquoi“, lui demanda-t-on, „ n'avez-vous pas demandé un secours à l'administration ? Elle vous l'aurait certainement accordé.“ – „ Je n'ai pas osé “, répondit l'inspecteur, „ étant trop jeune dans le service, et d'ailleurs je craignais qu'une semblable démarche ne me valût de mauvaises notes... J'avais fait la connaissance de Mme Roudier il y a un an. Me voyant dans une telle gêne, j'ai tout de suite pensé à cette dame avec l'idée d'aller lui emprunter cinquante francs. Mais, quand je me suis trouvé en sa présence, je n'ai pas ose risquer ma requête. J'allais me retirer quand tout à coup je pensai à ma petite famille qui, bientôt, n'aurait plus de pain... Une idée infernale a germé dans mon esprit... J'ai vu rouge... Je me suis alors précipité sur cette femme ; comme elle criait, je l'ai prise à la gorge, pour ne plus entendre ses appels déchirants, puis j'ai compris que j'étais perdu, et je me suis sauvé... Ah ! je suis bien coupable... Mais ce fut, je vous le jure, un moment de folie...“ (La Liberté, 23 juillet 1913) ». Or une question se pose. Cet homme a-t-il bien ou mal fait d'avoir deux fils, alors qu'il ne pouvait les entretenir ? Nous ne voulons ici nullement résoudre cette question dans un sens ou dans l'autre ; mais il est évident que si l'on veut l'examiner, il faut pouvoir parler d'anti-malthusianisme, de malthusianisme et même de pratiques anti-fécondatrices ; car, en somme, qui veut la fin veut les moyens. S'il est défendu de le faire, si l'on ne peut discuter ces questions, nous revenons au temps où il était défendu de discuter les dogmes de l'Église catholique. Ceux qui admirent cette époque peuvent, sans contradiction, vouloir y faire retour ; mais ceux qui la condamnent sont ridiculement illogiques de vouloir en imiter les usages.

[FN: § 1127-2]

Parmi de nombreux exemples qu'on pourrait citer, le suivant suffira « La Liberté, 13 juin 1912. – Hier matin a comparu devant le tribunal de Newington le sieur Henri James Brown, 22 ans, qui persistait, malgré les injonctions des policemen, à flaner sur les trottoirs de Piccadilly en offrant aux passants des photographies obscènes. Le magistrat, M. Lawrie, a agrémenté sa sentence d'un petit discours : – Je regrette vivement de ne pouvoir vous condamner aussi sévèrement que vous le méritez. Je crois, en tout cas, faire de mon mieux. Vous recevrez 25 coups du chat à 9 queues et vous ferez 9 mois de travaux forcés... » Espérons que ce magistrat émérite publiera, lui aussi, son Malleus maleficarum. Mais peut-être n'est-il pas même assez intelligent pour le faire. Ceux qui croient à la métempsycose peuvent s'imaginer que l'âme de Mélitos qui accusa Socrate de corrompre les jeunes Athéniens, après avoir fait une petite pause dans le corps de ce Pierre de Lancre qui fit brûler tant de sorcières, au « pays de Labour », est allée ensuite finir dans ce digne magistrat anglais.

[FN: § 1127-3]

JOINVILLE : « 138 § 685 (p. 379) Le roi aimait tant Dieu et sa Douce Mère, que tous ceux qu'il pouvait convaincre d'avoir dit sur Dieu ou sa Mère chose déshonnête ou vilain jurement, il les faisait punir grièvement. Ainsi je vis qu'il fit mettre un orfèvre à l'échelle à Césarée, en caleçon et en chemise, les boyaux et la fressure d'un porc autour du cou, et en si grande foison qu'ils lui arrivaient jusqu'au nez. J'ai ouï dire que depuis que je revins d'outre-mer, il fit brûler pour cela le nez et la lèvre à un bourgeois de Paris ; mais je ne le vis pas. Et le saint roi dit : „ Je voudrais être marqué d'un fer chaud, à condition que tous vilains jurements fussent ôtés de mon royaume “ ».

[FN: § 1127-4]

JOINVILLE : « 10, § 51, (p. 31) il [le roi] me conta qu'il y eut une grande conférence de clercs et de Juifs au monastère de Cluny. Il y eut là un chevalier... et dit qu'on lui fit venir le plus grand clerc et le plus grand maître des Juifs : et ainsi firent-ils. Et il lui fit une demande qui fut telle : „ Maître – fit le chevalier – je vous demande si vous croyez que la Vierge Marie, qui porta Dieu en ses flancs et en ses bras, ait enfanté vierge, et qu'elle soit mère de Dieu “. (52) Et le Juif répondit que de tout cela il ne croyait rien. Et le chevalier lui répondit qu'il avait vraiment agi en fou, quand ne croyant en elle ni ne l'aimant il était entré en son église et en sa maison. „ Et vraiment –fit le chevalier – vous le payerez “. Et alors, il leva sa béquille et frappa le Juif près de l'oreille, et le jeta par terre. Et les Juifs se mirent en fuite, et emportèrent leur maître tout blessé : et ainsi finit la conférence. (53) Alors l'abbé vint au chevalier, et lui dit qu'il avait fait une grande folie. Et le chevalier répondit que l'abbé avait fait une plus grande folie encore d'assembler une telle conférence ; car avant que la conférence fût menée à fin, il y avait céans grande foison de bons chrétiens qui fussent partis de là tous mécréans, parce qu'ils n'eussent pas bien entendu les Juifs. „ Aussi vous dis-je – fit le roi – que nul, s'il n'est très-bon clerc, ne doit disputer avec eux ; mais un laïque, quand il entend médire de la loi chrétienne, ne doit pas défendre la loi chrétienne, sinon avec l'épée, dont il doit donner dans le ventre, autant qu'elle peut y entrer “ ». Ces disputes étaient fréquentes, dans les temps anciens, et continuèrent jusqu'à la Réforme. Saint Grégoire de Tours en raconte une qui eut lieu avec un Juif, devant le roi Chilpéric. Le saint dit de fort belles choses au mécréant, mais ne put le persuader, et le roi le laissa aller en paix sans que personne ne lui fît tort. Hist., VI, 5... Haec et alia nobis dicentibus, numquam compunctus est miser ad credendum. Tunc rex, silente illo, cam videret eum his sermonibus non compungi, ad me conversus, postulat ut, accepta benedictione, discederet.

[FN: § 1127-5]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Le Journal, 12 août 1913, URBAIN GOHIER, Deux

Morales : « Pendant que Luther se cachait, fuyant les vengeances de l'Église romaine, il adjurait les Allemands de brûler les synagogues et de couper la langue aux juifs « jusqu'au fond du gosier », pour leur démontrer le mystère d'un Dieu en trois personnes. Les protestants, qui se plaignaient des dragonnades de Louvois, avaient dragonné les catholiques en Angleterre, en Écosse, en Irlande, avec une impitoyable férocité.

» Échappé des bûchers de France, Calvin s'était empressé de brûler Servet. Le pasteur Jurien, réfugié à l'Université de Rotterdam après la révocation de l'édit de Nantes, et retrouvant dans cet asile son coreligionnaire et collègue Bayle, n'avait point eu de cesse qu'il ne le fit chasser comme incrédule. Les Jansénistes persécutés souffraient les pires violences avec résignation ; tout ce qu'ils demandaient au gouvernement, c'était un redoublement de rigueur contre les huguenots. Aujourd'hui, les dépêches de Varsovie nous apprennent que les Polonais font rôtir des juifs accusés d'avoir jeté des pierres au saint sacrement, et que les juifs font griller vifs des Polonais accusés d'avoir surpris les délibérations du Bund ».

[FN: § 1128-1]

Nombreux sont les faits qu'on pourrait citer pour montrer ce contraste. Nous en avons d'ailleurs relevé plusieurs. Ajoutons-y les suivants : Corriere della Sera. 12 janvier 1913. – À Boston, les dames et les demoiselles qui emplissaient ce théâtre de l'Opéra, pour la première représentation de la Tosca de Puccini, furent... grandement scandalisées de la scène dite du sofa, au second acte, entre Scarpia et la protagoniste. Qu'il suffise de dire que le chef de la police intervint, en ordonnant par raison de moralité, que, dans les représentations suivantes, cette scène fût retranchée ou transformée radicalement ». Les acteurs résistèrent. « On télégraphia à Puccini, qui répondit que la scène devait être jouée intégralement, sinon le spectacle serait supprimé, sans autre ». On en vint à une transaction : la Tosca resta debout. « Et les Bostoniens, ainsi que le chef de la police furent satisfaits ». Voici le revers : « Gazette de Lausanne, 21 janvier 1913. – „ Le sabotage de l'estomac“ –. M. Ettor, un des leaders du syndicat international des „ travailleurs industriels du monde“, récemment acquitté de complicité criminelle dans les violences des grévistes des filatures de Lawrence (Massachusetts), conseille aux garçons d'hôtel et de restaurant en grève à New-York d'empoisonner les capitalistes ou tout au moins de saboter leurs repas. „ Si vous êtes forcés de reprendre le travail dans de mauvaises conditions – leur dit-il – faites-le avec la résolution bien arrêtée de rendre inquiétant pour les capitalistes de manger les mets préparés par votre syndicat “. Les grands hôtels et restaurants de New-York engagent des détectives privés qui surveillent les cuisines et les salles de restaurant ». À ce qu'il paraît, suivant ces excellents législateurs, on fait moins de tort à un homme en l'empoisonnant, qu'en lui laissant voir, au théâtre, un chanteur et une cantatrice assis sur le même canapé. Il y a mieux encore, si nous sortons du Massachusetts. On a découvert, à New-York, une association qui avait incendié plus d'un millier de maisons, pour toucher des primes d'assurance. Pendant que s'accomplissent ces faits louables, la police veille à ce qu'on n'introduise pas, d'Europe à New-York, des livres obscènes ou même seulement sensuels. Le procès d'Indianapolis, au sud de Chicago, contre ceux qui faisaient sauter en l'air, à la dynamite, des établissements industriels et des maisons, et tuaient des personnes, a donné l'occasion au juge fédéral Anderson, de déclarer que si les autorités locales avaient fait leur devoir, ces crimes auraient pu être évités. Il semblerait que ç'eût été plus utile à la société, que de donner la chasse aux jeunes gens qui font l'amour avec les jeunes filles. On peut bien appeler traite la corruption des députés américains, si l'on emploie ce nom pour la corruption de femmes consentantes, avec cette seule différence que les députés vendent le bien d'autrui et les femmes le leur. Les vertuistes américains qui s'occupent avec tant de sollicitude de la seconde traite, n'ont plus le temps de s'occuper de la première ; et l'on sait que la « traite des législateurs » prospère, fleurit, fructifie, aux États-Unis. Dernièrement encore, un certain Mulhall a publiquement accusé de corruption un grand nombre de législateurs, se déclarant prêt à prouver ses accusations par d'innombrables documents ; et il fit allusion à plus de 20 000 lettres et télégrammes. La Commission parlementaire du travail semble avoir été surtout victime de cette « traite des législateurs » ; victime comme la plus grande partie des femmes sujettes à la « traite des blanches », cela s'entend.

[FN: § 1135-1]

PAUTHIER ; Confucius et Mencius. Meng-Tseu dit au roi ; « (p. 209)... c'est l'humanité qui vous a inspiré ce détour. Lorsque vous aviez le bœuf sous vos yeux, vous n'aviez pas encore vu le mouton. Quand l'homme supérieur a vu les animaux vivans, il ne peut supporter de les voir mourir ; quand il a entendu leurs cris d'agonie, il ne peut supporter de manger leur chair. C'est pourquoi l'homme supérieur place son abattoir et sa cuisine dans des lieux éloignés ».

[FN: § 1136-1]

Voici comment il est raconté par le Journal de Genève, 3 juillet 1910. « Le 26 février 1907, il [Liabeuf] est condamné pour vol par le tribunal correctionnel de Saint-Étienne à quatre mois de prison ; le 7 juin 1907, il est condamné par le même tribunal et pour le même délit à trois mois de prison : le 14 août 1909, il est condamné par le tribunal correctionnel de la Seine, pour vagabondage spécial [euphémisme qui, dans le jargon d'un siècle hypocrite, sert à désigner ce qu'on nomme en français le métier de souteneur] à trois mois de prison et cent francs d'amende ; le 4 mai 1910, il est condamné à mort par la Cour d'Assises... Après avoir participé aux exploits d'une bande de voleurs et s'être compromis avec des malfaiteurs avérés, Liabeuf avait quitté Saint-Étienne et était venu à Paris. Ici, loin de s'amender, il avait encore fréquenté des souteneurs et des filles. Condamné à la prison pour vagabondage spécial, il avait juré une haine mortelle aux inspecteurs Vors et Maugras, dont les témoignages formels l'avaient accablé. Pour se venger, il avait confectionné des brassards et des poignets de cuir hérissés de pointes métalliques, et un soir, revêtu de cette redoutable armure, il s'était mis, au sortir d'un bar, à la recherche des deux inspecteurs. Or ce ne furent pas ces derniers qui tombèrent sous ses coups, mais d'autres agents que le bandit ne connaissait même pas. On n'a pas oublié l'effroyable boucherie : le gardien de paix Deray mortellement atteint d'une balle et de coups de tranchet ; ses collègues Fournès, Février et d'autres, criblés de blessures »... « Liabeuf, il est vrai, protesta toujours contre la condamnation infligée pour vagabondage spécial. Mais au cours des débats qui se déroulèrent devant le jury, aucun fait, aucun élément nouveau ne permit de mettre positivement en doute la réalité du fait ».

[FN: § 1136-2]

Carducci écrivit au sujet de ces dames, à propos du procès Fadda. On les a vues reparaître dans les procès de Musolino et d'autres brigands, ainsi que d'exploiteurs de femmes. Ces vers de Junéval restent toujours vrais, VI :

(110) Sed gladiator erat, facit hoc illos Hyacinthos.
Hoc pueris patriaeque, hoc praetulit illa sorori
Atque viro ; ferrum est, quod amant...

Le scoliaste observe avec justesse : sed gladiator Crudelitas tantam deformitatem decorabat, atque illi formosum et pulchrum exhibebat.

[FN: § 1136-3]

Le journal La Liberté dit à propos de la veuve Deray : « Cette innocente victime de la tragédie de la rue Aubry-le-Boucher a mené une vie atroce depuis le jour où son mari a trouvé la mort. Déjà frappée dans son affection la plus chère, Mme Deray dut subir chaque jour les injures des Apaches. La polémique qui survint au sujet du sort de l'assassin réveillait à chaque instant ses souffrances et ravivait sa douleur. Depuis l'exécution, ce que la malheureuse a supporté est inimaginable, et elle a dû abandonner le logement où tant de souvenirs l'attachaient. Sur le conseil même du commissaire de police de son quartier, elle va déménager. Elle a trouvé heureusement une modeste situation de femme de ménage, qui lui permettra de vivre et de subvenir aux besoins de son garçonnet : le pauvre petit a été tellement bouleversé par la disparition de son père, qu'il est tombé malade et qu'il est à peine remis aujourd'hui ». Il y eut même quelqu'un pour dire qu'on ne devait pas pleurer la victime de Liabeuf, car se faire tuer appartient au métier de l'agent de police. Notez que la même personne veut que le risque professionnel de l'ouvrier soit à la charge du patron. Nous avons là un nouveau cas de l'existence de deux résidus contradictoires chez un même individu.

[FN: § 1136-4]

« La Liberté, 6 mai 1912. – Toute la presse a approuvé le geste du gendarme qui, à Bougival, tua un cambrioleur qui faisait mine de sortir un revolver de sa poche... Toute la presse, sauf l'Humanité, qui déclare : „ Nous estimons que ce bon geste est exécrable et dangereux “. Dangereux évidemment... pour le malfaiteur, mais exécrable, non pas ! »

[FN: § 1140-1]

Le Matin, 5 juillet 1912, a publié le « carnet » de Garnier, où ce criminel exprime ses sentiments au moyen des dérivations employées par les littérateurs du temps où il vivait. Il écrit : « Tout être venant au monde a droit à la vie. Cela est indiscutable puisque c'est une loi de la nature. [Il aura lu cela dans quelque journal, qui l'aura pris de quelque littérateur de second ordre, qui l'aura pris de maîtres tels que Victor Hugo, Anatole France, L. Bourgeois, etc.]... » Dès mon plus jeune âge, je connus déjà l'autorité du père et de la mère, et avant d'avoir l'âge de comprendre, je me révoltais contre cette autorité, ainsi que celle de l'école [simple expression de sentiments]. J'avais alors treize ans, je commençais à travailler ; la raison me venant, je commençais à comprendre ce que c'était que la vie et l'engeance sociale. Je vis les individus mauvais, je me suis dit : il faut que je cherche un moyen de sortir de cette pourriture qu'étaient patrons, ouvriers, bourgeois, magistrats, policiers et autres [autre dérivation prise par lui dans les journaux socialistes]. Tous ces gens-là me répugnaient, les uns parce qu'ils étaient autoritaires, les autres parce qu'ils supportaient de faire tous ces gestes. Ne voulant pas être exploité et non plus exploiteur, je me mis à voler à l'étalage, ce qui ne rapportait pas grand' chose. [Toutes ces dérivations pour dire qu'il voulait jouir de la vie sans travailler. En somme, il n'était ni meilleur ni pire que d'autres gens, comme la Tarnowska, pour laquelle les excellents humanitaires ont tant de pitié.] » Une première fois je fus pris ; pour la première fois, j'avais alors dix-sept ans, je fus condamné à trois mois de prison. Quand je sortis de prison, je rentrai chez mes parents, qui me firent des reproches assez violents ; mais d'avoir subi tout ce qu'on appelle la justice, la prison m'avait rendu encore plus révolté. Je devins alors anarchiste : j'avais environ dix-huit ans. Je ne voulus plus retourner travailler [voilà le véritable motif de tous ces bavardages ; de pareilles gens ne peuvent demeurer dans une société civilisée ; mais les bons humanitaires s'opposent à ce qu'on les élimine], et je recommençai encore la reprise individuelle [dérivation copiée comme d'habitude, dans quelque feuille de chou, qui l'aura prise de quelque maître]. Mais pas plus de chance que la première fois. Au bout de trois ou quatre mois, j'étais encore pris. Je fus condamné à deux mois ». Il raconte comment il connut les anarchistes et partagea leurs théories. « Mon opinion fut vite formée, je devins comme eux [c'est-à-dire qu'il trouva cette expression pour des sentiments qui préexistaient en lui], je ne voulus plus du tout aller travailler pour d'autres, je voulus aussi travailler pour moi ; mais comment m'y prendre ? Je n'avais pas grand'chose, mais j'avais acquis un peu plus d'expérience, et plein d'énergie, résolu à me défendre contre cette meute pleine de bêtise et d'iniquité qu'est la présente société [dérivation semblable à celle employée par les maîtres, quand ils disent vouloir préparer « une humanité meilleure, avec un peu plus de justice ». C'est pourquoi ils voudraient que les Garniers les élisent députés ; et les Garniers trouvent plus expéditif et plus raisonnable de réaliser directement ce un peu plus de justice]. « Je quittai Paris vers dix-neuf ans et demi, car j'entrevoyais avec horreur le régiment [à un être de cette trempe, la discipline militaire répugne encore plus que la discipline civile]. Peut-être cette masse inconsciente et fourbe changera-t-elle ; peut-être ! Je l'espère, mais moi je ne veux pas me sacrifier pour elle : c'est maintenant que je suis sur la terre, c'est maintenant que j'ai le droit de vivre, et je m'y prendrai par tous les moyens que la science [le dieu de sa religion] met à ma disposition... À la ruse, je répondrai par la ruse ; à la force, je répondrai par la force ». Il raconte diverses aventures de délinquant, en Belgique. Recherché par la police à Bruxelles, il retourne à Paris, « où j'allai m'installer au journal l'Anarchie, pour lequel je me mis à l'œuvre. J'y travaillai presque tous les jours, et comme l'ordinaire était un peu maigre, je fis, en compagnie de quelques camarades, une quantité de cambriolages, mais cela ne rapportait pas beaucoup. Je fis l'émission de fausse monnaie, mais cela ne rapportait pas beaucoup, et je risquais autant que d'aller faire un cambriolage, qui me rapportait plus. [Messieurs les humanitaires peuvent dire ce qu'ils veulent ; mais il est évident que si l'on éliminait ces gens de la société, on mettrait un terme à leurs exploits ; tandis que la douceur de la répression leur permet de les continuer] ». Il s'associe à d'autres et raconte de nombreux cambriolages faits en leur compagnie. « ... En septembre, octobre, pendant ces deux mois, le principal cambriolage fut celui du bureau de poste de Chelles,... qui nous rapporta 4000 francs, et quelques autres de moindre importance. Enfin vers le commencement de novembre, nous en faisions encore un à Compiègne, qui nous rapporta 3500 francs ». Garnier s'unit à Bonnot, apprend à conduire les automobiles. Il raconte le premier gros coup : il tue un huissier qui portait l'argent d'une banque. « Arrivé à trois pas environ du garçon, je sors mon revolver et froidement je tire une première balle, puis une deuxième ; il tombe, pendant que celui qui l'accompagne s'enfuit en courant, transi de peur. Je ramasse un sac, mon copain en ramasse un autre que cet imbécile ne veut pas lâcher, car il n'est pas tué ; mais il finit par lâcher prise, car il perd connaissance ». Les humanitaires pleurent les pauvres malheureux tels que Garnier... mais ils ne s'occupent pas du tout de leurs victimes. Dans son numéro du 6 juillet, le Matin rapporte la suite de ces mémoires, où sont racontés beaucoup d'autres crimes qu'il est inutile de mentionner ici. Voyons seulement comment il tue un pauvre diable de chauffeur. « ... je ramassai un gros morceau de bois... et j'en frappai un formidable coup sur la tempe gauche du chauffeur qui tomba à terre sans pousser un cri. Il était mort ou peu s'en fallait. Pour ne pas qu'il reprenne ses sens quelquefois, un copain va chercher un cric qui pèse 60 kilogrammes et lui pose cet objet sur la poitrine, et quelques minutes après le corps ne bouge plus, il est mort ». M. Anatole France vend beaucoup de livres où il démontre que ces assassins sont... malheureux (§ 1638-1). Il est bon de noter ensemble les sentiments exprimés par Garnier et ceux des gens qui achètent ces livres et s'en repaissent.

[FN: § 1142-1]

La Liberté, 8 mai 1912 : « Dans un pavillon situé au milieu d'un jardin, 8 rue de Bagneux, à Sceaux, habite une rentière, Mme Herbuté de Bute, âgée de 51 ans, qui, sourde et à moitié aveugle, y vit seule. Elle passait pour avoir quelque fortune, et une de ses anciennes domestiques l'apprit au mécanicien Gabriel Gaugnon, âgé de 18 ans, habitant Fontenay-aux-Roses. Gaugnon résolut de la dévaliser et il proposa à ses camarades Fernand Le Bas, 17 ans, habitant Bourg-la-Reine, et Fernand Léard, 21 ans, habitant Sceaux, de l'accompagner. Ils acceptèrent. Le 10 janvier dernier, Léard se présenta chez Mme Herbuté, se disant employé d'un grand épicier parisien et proposant une livraison. Léard constata que la dame était sourde et il avertit ses deux complices. Tous trois revinrent le lendemain, 11 janvier, à 6 heures du soir, Léard enfonça la porte de clôture du jardin, fermée à clef ; puis, avec l'aide de Gaugnon, enfonça la porte de la maison. Le Bas resta dehors pour faire le guet et les deux jeunes gens pénétrèrent à l'intérieur de l'habitation. Mme Herbuté lisait son journal dans sa chambre à coucher ; elle n'entendit aucun bruit. Brusquement, Léard l'empoigna au cou et s'efforça de la maintenir et d'étouffer ses cris tandis que Gaugnon fouillait les divers meubles de la chambre. Mais Mme Herbuté tenta de se dégager ; elle tomba sur les genoux et parvint à tirer de sa poche un poignard dont elle chercha à frapper Léard qui s'écarta instinctivement. La quinquagénaire put alors se sauver et s'emparer d'un revolver. Cependant, s'étant rendue dans le jardin, elle y fut saisie par Le Bas, qui la jeta et la maintint à terre. Mme Herbuté ne perdit point son sang-froid ; elle tira un coup de revolver dans la direction de Le Bas, tout en criant au secours ! Les trois malandrins furent arrêtés peu après et, cet après-midi, ils ont comparu devant la Cour d'Assises de la Seine. Tous trois ont fait des aveux complets et Mme Herbuté de Bute, entendue comme témoin, a réclamé l'indulgence du jury en leur faveur. Le jury, à la stupéfaction générale, rapporte un verdict négatif. Les trois malandrins sont acquittés... Ce verdict n'est ahurissant qu'en apparence. Il s'explique, d'un côté, par la terreur que répand encore la bande Bonnot-Garnier et ses vengeurs, car il est malheureusement trop certain que jusqu'à présent ce sont surtout ceux qui devraient être exécutés qui exécutent. D'autre part, les jurés assez lâches pour avoir peur trouvent encore une excuse dans ce fait que la législation répressive et pénitentiaire, en ces dernières années, s'est inspirée uniquement de la sympathie croissante dont jouissent auprès du régime les anarchistes et les malandrins, d'où cette conclusion, en somme assez logique, que le : „ Soyez bons pour les animaux “ Il est une consigne humanitaire conforme aux indications d'en haut. Enfin, troisième facteur essentiel, la politique du : „ Pas d'ennemis à gauche ! “ ayant aussi sévi contre l'institution du jury dans le sens d'une adjonction des incapacités, a doté les Cours d'Assises de jurés nouveaux et, parmi ces prolétaires conscients, il en est sans doute qui ne sont pas loin d'admirer Bonnot dont l'unifié Hervé a fait un professeur d'énergie... » – La Liberté, 9 mai 1912 : « Le jury de la Seine a acquitté hier trois jeunes cambrioleurs particulièrement distingués qui, un soir de janvier dernier, après s'être introduits par effraction dans la petite maison où vivait seule une vieille rentière de Sceaux, sourde et à moitié aveugle, ont fait de leur mieux pour la supprimer afin de la dévaliser. S'ils n'ont pas réussi dans cette double et louable entreprise ce n'est assurément pas leur faute, mais parce que la victime a eu le mauvais goût de ne pas se laisser chouriner sans pousser les hauts cris. Les jurés, cependant, ont décidé qu'il était bon et juste de rendre ces doux adolescents à la liberté de leurs chères études sur le vol et l'assassinat. Stupéfaction générale ! Les avocats eux-mêmes n'en sont pas encore revenus et, sans doute, leurs clients en reviendront encore moins..., sauf un jour prochain, entre deux autres gendarmes, et, cette fois ayant grandi, ils n'auront pas raté leur coup ».

[FN: § 1148-1]

TACIT.; Germ., 14: lam vero infame in omnem vitam ac probrosum superstitem principi suo ex acie recessisse. Des sentiments analogues régnaient à Sparte, entre les citoyens. C'était une honte que de revenir seul vivant, quand ses compagnons avaient été tués. – HÉRODOTE, VII, 229, rapporte comment deux Spartiates, Euritos et Aristodémos, furent renvoyés par Léonidas, des Thermopyles à Sparte, parce que, gravement malades des yeux, ils s'arrêtèrent à Alpéné. La nouvelle étant parvenue que les Spartiates étaient entourés par les Perses, Euritos se fit conduire par son ilote au champ de bataille et mourut en combattant. Aristodémos resta à Alpéné. D'autres disent que tous les deux avaient été envoyés en mission, que l'un revint promptement et que l'autre s'attarda. « (231) Rentré à Lacédémone, Aristodémos fut noté d'infamie et d'ignominie ». – PLUTARCH. ; Lacaenarum apopht., 21 : « Un homme racontait à sa sœur comment le fils de celle-ci était mort glorieusement. Elle répondit : „ Je suis heureuse pour lui, autant que j'éprouve de douleur à cause de toi qui as abandonné cette vertueuse compagnie „ – Ibidem, 5 : « Un homme racontait à sa mère comment son frère à lui était mort glorieusement. „ N'as-tu pas honte –lui dit-elle – d'avoir abandonné une telle compagnie ? „ ». HÉRODOTE, V, 87, rapporte encore comment un seul homme, revenu d'une expédition des Athéniens, à Égine, arrivé à Athènes, fut tué par les femmes des morts, « indignées que seul d'entre tous, il se fût sauvé » : Que tout cela soit de l'histoire ou de la légende, peu importe, étant donné le but auquel nous visons : simplement mettre en lumière certains sentiments.

[FN: § 1152-1]

Ce terme, maintenant d'un usage courant, ne sera peut-être plus compris, dans quelques années. Il est donc bon de savoir qu'en France, M. Clemenceau ayant publié un journal intitulé : Le Bloc, dans lequel il prêchait à tous les « républicains » de se resserrer comme en un bloc, pour s'opposer aux réactionnaires, il fut singé, dans son pays et en Italie, par de braves gens qui s'associèrent pour grimper au gouvernement de la chose publique, et en cueillir les fruits savoureux.

[FN: § 1152-3]

A. FRADELETTO; Dogini ed illusioni della democrazia « (p. 35) Aujourd'hui, nous assistons aux palinodies imprévues qui – voyez quel singulier concours de circonstances ! – ne coïncident jamais avec un sacrifice ou un péril, mais toujours ou presque toujours avec une fortune ébouriffante. Tel qui poussait récemment des cris séditieux, pour pouvoir se lancer dans la vie publique aux applaudissements des révolutionnaires, donne des avis prudents, afin de réussir à la diriger par le vote des conservateurs... (p. 37) Mais plus stupéfiante encore pour les naïfs doit être la volte-face collective, le rayon de grâce qui illumine subitement une assemblée et la convertit. Ici, la documentation est proche, dans le temps et dans l'espace. Domestica facta. Avant le 6 avril 1911, combien étaient, au Parlement italien, les partisans du suffrage universel ? La réforme proposée par le ministre Luzzatti, fondée sur la preuve donnée qu'on sait lire et écrire, et qui aurait étendu le droit de vote à un peu plus d'un million de nouveaux électeurs, avait paru à un très grand nombre prématurée, intempestive, non souhaitée par le pays, fruit d'une concession dangereuse aux partis extrêmes. Après le 6 avril, après le coup de grâce de quelques phrases du chef du gouvernement, les dévots du suffrage universel deviennent légion (p. 38), et parmi les plus ardents néophytes, se trouvent ceux qui repoussaient la. réforme prudente de M. Luzzatti. Mais il y a plus. En été 1910, durant la discussion de la loi Daneo-Credaro, l'analphabétisme était solennellement proclamé notre pire plaie, notre honte, notre fléau [le lecteur prendra garde qu'il n'est pas du tout démontré que ceux qui exprimaient ces opinions eussent raison], notre titre permanent de discrédit, en présence des étrangers. Deux ans plus tard, durant la discussion de la nouvelle loi électorale, nous entendîmes, à certains moments, une espèce d'hymne idyllique à l'analphabétisme, considéré tout à fait par quelques-uns comme une présomption de bon sens instinctif, non entaché de culture fragmentaire [le lecteur prendra garde qu'il n'est pas du tout démontré que ceux qui exprimaient ces opinions eussent tort] ».

La raison de ce phénomène est très simple. Elle a été donnée par Sir Edward Grey, à propos d'un phénomène parfaitement semblable, qui est celui de la politique extérieure. Le 1er août 1918, il fut accablé de questions aux Communes, à propos des affaires balkaniques. On lui demanda s'il existait un principe quelconque du droit des gens, qui interdisait à la Turquie de dénoncer le traité de paix et de reprendre Andrinople et la Thrace. Le ministre répondit que non. On lui rappela qu'au début de la guerre balkanique, les puissances avaient très gravement déclaré que, quelle que fût l'issue de la guerre, le statu quo territorial devait absolument être maintenu dans les Balkans ; et on lui demanda si les puissances avaient d'autres raisons que celles des victoires des alliés, pour démentir leur déclaration solennelle. Le ministre répondit qu'effectivement il n'y avait pas d'autre motif. Suivirent beaucoup d'autres questions qu'il est inutile de rappeler ici. En fin de compte, Sir Edward Grey eut un moment de vraie franchise et dit : « Toutes ces questions paraissent dictées par la supposition que l'action des puissances est réglée par la logique et le droit des gens. Au contraire, chaque puissance suit la voie qui lui est conseillée par ses intérêts spéciaux ; et toutes, collectivement, sont unies par le désir de maintenir la paix en Europe ». Pourtant sa franchise n'alla pas jusqu'à rappeler les puissants intérêts financiers qui guidaient tous les États, unis ou séparés.

Cette longue note peut se résumer en peu de mots : BEAUMARCHAIS ; Le barbier de Séville, acte IV, scène VIII. Don Bartholo s'étonne que Bazile ait exécuté une volte-face tout à fait semblable à celles qui viennent d'être relevées « Bartholo. Comment, Bazile ! vous avez signé. – Bazile. Que voulez-vous ? Ce diable d'homme a toujours ses poches pleines d'arguments irrésistibles ».

[FN: § 1156-1]

Parmi un très grand nombre de faits où l'on voit des particularités insignifiantes donner de l'autorité et du respect, il suffira de citer le suivant: LANDOR ; Voyage... L'auteur fut fait prisonnier au Thibet et allait être tué, quand il fut sauvé par une disposition particulière des doigts de ses mains « (p. 228) Le Lama... examina mes mains et écarta mes doigts, en exprimant une grande surprise. En un instant tous les lamas et les soldats vinrent tour à tour examiner mes mains... Le Pombo lui-même, ayant été informé, vint regarder mes doigts, et toutes les opérations furent immédiatement suspendues. Lorsque je fus relâché, quelques semaines plus tard, je pus apprendre des Thibétains la raison de leur étonnement. J'ai les doigts liés plus haut que ce n'est le cas chez la plupart des gens. Cela est très considéré au Thibet ; un charme règne sur la vie d'un possesseur de doigts pareils ; quoi qu'on lui fasse, il ne lui arrivera aucun mal ».

[FN: § 1158-1]

MACHIAVEL ; La Mandragore, acte II, scène II – « Callimaque... Nam causae sterilitatis sunt, aut in semine, aut in matrice... aut in causa extrinseca ». « Nicias. Cet homme est le plus respectable qu'on puisse trouver ». Si Callimaque s'était exprimé en langage vulgaire, Messire Nicias, qui sait aussi le latin, n'aurait pas consenti avec une si vive admiration.

[FN: § 1158-2]

Les Gr. chr. de Fr., t. I, préface de PAULIN PARIS. Après avoir relevé que la chronique fabuleuse du pseudo-Turpin fut la première à être traduite en français, l'auteur observe que : « (p. XV)... nul ne s'avisa d'en contester l'authenticité. Il nous est aujourd'hui bien aisé de le faire ; comment, disons-nous, serait-elle sincère, quand les historiens précédents n'en parlent pas, quand les contemporains de Charlemagne racontent les faits d'une manière toute différente et tout autrement vraisemblable ? Mais personne alors, dans le monde, ne connaissait ces historiens contemporains ; on ne savait qu'une chose ; c'est que la chronique de Turpin était rédigée dans la langue latine, et cela suffisait pour justifier la confiance des plus scrupuleux ». Dans une autre dissertation, t. II, il dit : « (p. x)... quand le monument des Grandes Chroniques de Saint-Denis fut érigé, tout ce qui était écrit dans un latin de quelque antiquité avait, par cela seul, droit à la crédulité de tout le monde ». DAVIS ; La Chine, t. II : « La visite du dieu du foyer à Yu-Kong, trad. de ST. JULIEN ». Le dieu fait des reproches à Yu-Kong. qui disait avoir suivi avec respect les règles qui lui étaient tracées: (p. 370)... parmi ces préceptes, il en est un qui commande de respecter les caractères écrits, et cependant vos élèves et vos condisciples se servent souvent des feuillets de livres anciens pour revêtir les murs de leur chambre et faire des enveloppes. Il y en a même qui les emploient à essuyer leur table. Puis, ils s'excusent en disant que, s'ils salissent ce papier (p. 371), ils le brûlent immédiatement. Cela se passe tous les jours sous vos yeux, et cependant, vous ne leur adressez jamais une parole pour les en empêcher. Vous même, si vous trouvez dans la rue un morceau de papier écrit, vous le rapportez chez vous et vous le jetez au feu ».

[FN: § 1159-1]

BLACKSTONE ; 1. IV, c. 28.

[FN: § 1160-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR]. Le souci que l'individu a de sa réputation est un degré de ce sentiment. Il ne faut pas le confondre avec l'honneur, qui appartient à la Ve classe (intégrité de l'individu et de ses dépendances). Tandis que la réputation est l'opinion qu'autrui a de l'individu en question, l'honneur est l'opinion que cet individu a lui-même de sa propre personne. Il va sans dire que nous n'insistons pas sur la terminologie, qui n'a aucune importance, mais sur la distinction entre les deux sentiments.

[FN: § 1164-1]

MONTET : De l'ét. pr. et de l'av. de l'Islam : « (p. 59) On a observé que si le musulman qui aspire à devenir marabout cherche à se faire remarquer par son ascétisme, une fois proclamé saint, il se relâche assez aisément de ses actes de continence, qui n'ont eu qu'un but, lui servir d'échelle à la dignité de marabout. On cite pourtant des saints ayant pratiqué ou pratiquant l'ascétisme et la continence... (p. 60) Et comme la licence des mœurs a plus d'une fois servi de compagne à l'austérité la plus rigoureuse, ainsi qu'on en voit des exemples dans les religions les plus diverses... Il y a donc des saints obscènes, des saints impudiques, des saints débauchés. Des témoins authentiques ont raconté leurs frasques et leurs scandales publics... Il y a enfin... des degrés dans la sordidité (p. 61) et la saleté. Il n'est pas rare de rencontrer des marabouts mal vêtus ou malpropres ; il en est d'autres qui se font un mérite de leurs souillures. C'est à ce groupe que se rattachent les saints pouilleux, circulant à moitié nus, vêtus de loques sordides et affectant le plus grand mépris pour les biens de ce monde... Saints continents, saints ascètes, saints antinomiens forment, comme il est aisé de l'imaginer, une armée véritable dans l'Islam ». FRASER: Voyage dans les provinces persanes, dans Biblioth. univ. des voy., t. 35 : « (p. 355)... j'eus une autre visite. C'était un derviche encore que j'avais rencontré la veille dans la rue, et qui m'avait fait entendre qu'il me connaissait ; j'avais donc désiré le voir: il me (p. 356) raconta alors qu'il était né à Schiraz, mais que, paresseux de sa nature, il avait pris goût à une vie d'errante oisiveté pour éviter les misères du travail, et il se trouvait forcé de vivre de son esprit. Il avait beaucoup vu de monde, et ayant découvert qu'il était facile et profitable de le duper, il mettait en œuvre, dans la portée de ses talents, ce que l'expérience lui avait appris... Mon ami, le derviche, était donc devenu tout à fait communicatif quand Zeïn-el-Abedin et quelques autres personnes entrèrent par malheur, et il retomba tout à coup dans son jargon et ses grimaces : (p. 357) une conversation mystique s'ensuivit... » Les Pères de l'Église se plaignaient souvent de ce qu'il y eût des moines qui usurpaient l'apparence de l'ascétisme pour duper les gens. Cassien, qui vivait au IVe siècle, en forme tout un genre, qu'il appelle le quatrième genre des moines, et dit qu'il est apparu depuis peu. CASS. ; Collat., XVIII. 8. – Saint Nilus ; De monastica exercitatione, VIII, en parle aussi. Il dit qu'ils fuient la discipline des monastères, qu'ils ne peuvent supporter, et que, comme des parasites, ils assiègent les riches.

[FN: § 1166-1]

Il ne sera peut-être pas inutile de répéter, en ce cas particulier, une observation qui est de portée générale. Nous ne cherchons pas « ce qu'est l'ascétisme » (§ 118) ; nous cherchons s'il y a un genre de faits présentant certains caractères communs, et auquel nous donnerions ce nom uniquement par analogie ; car, parmi ces faits, il s'en trouve que le langage vulgaire appelle ascétisme. De même, le botaniste cherche, non pas « ce que sont les renonculacées », mais s'il y a un groupe de plantes présentant certains caractères communs, et auxquelles il donne le nom de renonculacées, parce que, parmi elles, se trouve la plante nommée vulgairement renoncule. Mais il pourrait tout aussi bien désigner le genre par un autre nom quelconque.

[FN: § 1168-1]

Dom J. M. BESSE: Les moines d'orient : « (p. 48) Il y eut en Orient un genre de vie monastique beaucoup plus extraordinaire encore... Ses adeptes, unis par un sentiment d'humilité (p. 49) profonde, contrefaisaient la folie. L'abbé Or semble inciter l'un de ces disciples à pousser jusque-là le mépris du monde. « Éloigne-toi par la fuite de la société des hommes, disait-il : moque-toi du monde et de ceux qui suivent ses maximes, en te montrant fou sur plusieurs points » Il y eut à Tabenne une moniale que tout le monde prenait pour une folle. Ses compagnes ne lui ménageaient guère les mauvais traitements. Jamais cependant elle ne laissa échapper une parole d'impatience, donnant à tous les plus beaux exemples d'humilité et de charité. Aussi arriva-t-elle à une éminente sainteté. Ce n'est là qu'un fait isolé. Mais dans le siècle suivant on vit en Palestine plusieurs moines qui contrefaisaient la folie. C'était en règle générale des hommes avancés en âge et d'une vertu consommée. Ils donnaient à l'oraison un temps considérable et aimaient à soigner les infirmes et les pèlerins. L'austérité de leur vie leur conciliait l'estime générale ». On remarquera que ceux-ci étaient ascètes pour eux-mêmes, tandis que nos dominicains de la vertu, non moins dépourvus de sens, veulent imposer leur folie à autrui, par l'amende et la prison.

[FN: § 1172-1]

En tout temps, on releva dans la littérature des contrastes semblables. Dorens, qui vivait sous Louis XIII, écrivit dans une satire :

Gardez-vous bien de lui les jours qu'il communie.

Tout le monde connaît les vers que Molière met dans la bouche d'Orgon, converti par Tartufe, acte I, sc. VI :

Il m'enseigne à n'avoir affection pour rien ;
De toutes amitiés il détache mon âme :
Et je verrois mourir frère, enfans, mère et femme,
Que je m'en soucierois autant que de cela.

De même, un grand nombre de femmes humanitaires contemporaines emploient leurs journées au relèvement des prostituées plus ou moins assagies, des voleurs plus ou moins corrigés, ou à d'autres œuvres semblables, tandis qu'elles ne se soucient pas de raccommoder le linge, ni de nettoyer les vêtements de leur mari et de leurs enfants, auxquels, par incurie, elles offrent, sur la table de famille, des mets dont les chiens même ne se contenteraient pas. – Sorberiana, s. r. Dévot : « (p. 96) Il n'y a rien plus à craindre qu'un dévot irrité ; c’est un animal fort colérique et vindicatif, parce qu'il estime que Dieu lui doit de retour, que la Religion est blessée en sa personne, et que ses fureurs sont divines ». On peut répéter exactement la même chose de notre humanitaire contemporain. Rien n'égale les fureurs de cet « animal », quand il croit qu'on a offensé en lui le Progrès, la Démocratie ou la Solidarité.

[FN: § 1177-1]

Des personnes qui connaissent bien certains cas particuliers peuvent pour ceux-ci nous donner au moins quelque idée de cette classification, ROMOLO MURRI, dans La Voce, 7 décembre 1911 : « Au point de vue du célibat, le clergé d'aujourd'hui peut être divisé en trois catégories. La première comprend les prêtres auxquels une vocation d'idéalisme intense, de lutte et de sacrifice rend impossible intérieurement la vie de famille, et fait taire ou dormir profondément les sentiments charnels. Ceux-là sont peu nombreux : ils se comptent sur les doigts, dans chaque génération. La seconde comprend ceux qui acceptent le célibat comme une condition nécessaire ou supposée telle, d'une vie de piété ou du sacerdoce professionnel. Mais chez eux la piété et les aspirations religieuses ont une force suffisante pour empêcher le regret des choses auxquelles ils ont renoncé, et les maintenir dans la chasteté. Je crois que le nombre de ces prêtres n'est pas inférieur au dix pour cent ni supérieur au vingt. Les autres sont ceux qui tombent ; chez lesquels et pour lesquels le sacerdoce devient donc, au moins pendant une certaine période de leur vie, une hypocrisie et un sacrilège... »

[FN: § 1177-2]

Le Mythe vertuiste.

[FN: § 1178-1]

On peut répéter ce que nous disons ici de l'ascétisme, pour un très grand nombre d'autres cas de phénomènes concrets, dépendant d'autres résidus.

[FN: § 1179-1]

DIOG. LAERT. : VI, c. 2, 26 : Foulant les tapis de Platon, un jour que celui-ci avait invité des amis de Denys, Diogène dit : « Je foule aux pieds la vanité de Platon ». À cela Platon répondit : « Combien, ô Diogène ! tu laisses entrevoir de fumée d'orgueil, en voulant te faire voir sans orgueil ». D'autres rapportent que Diogène dit : « Je foule le vain orgueil de Platon », et que Platon répondit : « Avec, un autre vain orgueil, Diogène ».

[FN: § 1180-1]

HEBER, dans Bibl., univ. des voy., t. 36 « (p. 38)... j'ai vu un jour un grand et beau vieillard presque nu, qui portait l'écharpe distinctive des prêtres de Brahma, se promener avec trois ou quatre autres personnes, et celles-ci s'arrêtant soudain, s'agenouiller l'une après l'autre pour lui baiser révérentieusement le pied. Le prêtre d'un air fort grave, suspendit sa marche pour les laisser faire, et ne prononça pas un seul mot. Une autre fois, dans la rue, près de moi passa un homme qui allait à cloche-pied, et je le perdis de vue avant qu'il eût posé à terre son second pied. J'appris que cet individu avait, quelques années auparavant, fait vœu de ne plus jamais se servir que du pied gauche ; et son autre jambe avait si bien pris le pli nécessaire qu'il ne pouvait plus l'étendre pour faire usage du pied droit. On me montra un (p. 39) dévot du même genre qui tenait ses mains au-dessus de sa tête, et qui avait ainsi perdu la possibilité de baisser les bras. Enfin, à la fête de Churruck-Poujah, les Hindous courent la ville en procession, précédés par une troupe de musiciens, couronnés de fleurs, leurs longs cheveux tombant sur les épaules, la langue et les bras transpercés de petites broches, surtout appuyant contre leurs flancs des barres de fer rouge. De temps en temps, lorsqu'ils passaient devant des chrétiens ou des musulmans, ils faisaient mine de vouloir danser ; mais en général leur démarche était lente, leurs visages exprimaient une patiente résignation à souffrir, et ils n'avaient aucunement l'air de gens qui fussent ivres ou privés de raison ». La cérémonie finit par un supplice volontaire que l'auteur décrit ainsi : « (p. 39) La victime, je parle du héros de la fête, fut conduite le sourire sur les lèvres au pied de l'arbre. Là des crocs suspendus au bout d'une corde qui se rattachait à une des extrémités de la poutre transversale, lui furent enfoncés dans les flancs, ce qu'il endura sans proférer la moindre plainte, et un large bandage fut noué (p. 40) autour de sa ceinture pour empêcher que la pesanteur de son corps n'en fît sortir les crocs. Puis, au moyen d'une seconde corde liée à l'autre extrémité de la poutre, et que saisirent deux hommes vigoureux, on l'éleva en l'air et on le fit tourner. Le mouvement fut d'abord lent, mais peu à peu il devint extrêmement rapide. Toutefois il cessa après quelques minutes, et les spectateurs se préparaient à détacher le patient lorsqu'il pria d'un signe qu'on le laissât continuer. Cette résolution fut accueillie par la foule avec de grands applaudissements, et après avoir bu quelques gouttes d'eau il recommença ses tours. Mais... ces cruelles absurdités sont moins fréquentes à Calcutta qu'on ne s'est plu à le dire ». Dom J. M. BESSE ; Les moines d'Orient : « (p. 496) Parmi les privations que s'imposaient quelques solitaires, saint Épiphane signale l'abstention des bains... Il y en eut qui allaient plus loin encore, en se refusant les soins de la propreté la plus élémentaire. De ce nombre furent saint Hilarion et le reclus Abraam, qui ne se lava jamais les pieds ni le visage ». Cet homme était peut-être un grand saint, mais c'était certainement aussi un grand saligaud. Dieu veuille qu'il ne vienne pas à l'esprit de quelque émule du sénateur Bérenger, de nous imposer aussi ce genre d'austérité ! « (p. 496) Saint Pakhôme permettait d'oindre le corps entier seulement en cas de maladie. Pour rendre ce service à un frère, il fallait y être autorisé soit par ses fonctions soit par l'obéissance... Saint Ephrem recommandait à ceux qui remplissaient ce devoir de veiller attentivement sur leurs yeux, sur leurs mains et sur leur langue... (p. 497) Il y eut des religieux qui se condamnèrent à ne jamais regarder autour d'eux, pas même le mobilier de leur cellule, à passer un certain nombre de nuits dans les épines, à vivre près d'une eau infecte, etc. Ils recouraient à ces moyens pour se débarrasser des tentations importunes. Ammon, toutes les fois qu'il ressentait l'aiguillon de la chair, traitait son corps avec une sévérité impitoyable. Un de ses traitements favoris consistait à se brûler avec un fer rouge. Pour chasser une tentation impure, Macaire d'Alexandrie se jeta tout nu dans un marais. L'eau stagnante y attirait quantité de moustiques. Il y en a, dit Pallade, de gros comme des guêpes, capables de percer la peau d'un sanglier. Le saint supporta ce cilice d'un nouveau genre six mois durant. On devine en quel état fut mis son corps ; il ressemblait à celui d'un lépreux. – Quelques-uns imaginèrent de se charger de chaînes ou de pièces de bois. C'était un excellent moyen d'accabler son corps ». En occident aussi, ce genre de pénitence fut fréquent. Parmi les très nombreux exemples qu'on pourrait citer, le suivant suffira : D. GREG. TUR. ; Hist. eccl., VI, 6 : « Il y avait en ce temps, dans la ville de Nice, un reclus du nom d'Hospitius, très abstinent, qui chargé de chaînes de fer sur son corps nu, et recouvert par dessus d'un cilice, ne se nourrissait de rien d'autre que de simple pain et de quelques dattes... » Les envahisseurs longobards en le voyant ainsi, au fond d'une tour, pensèrent que c'était un malfaiteur. L'un d'eux voulut le tuer ; mais son bras resta paralysé et ne guérit qu'après que le saint homme eut fait dessus le signe de la croix.

[FN: § 1180-2]

BURCKHARDT ; dans Bibl. des voy., t. 32. L'auteur parle des dévots hindous qui assiègent un mendiant, ceux qui font le pèlerinage de la Mecque (hadji) : « (p. 199) Les portes de la mosquée sont assiégées par eux, et chaque café ou chaque fontaine est leur station : un hadj ne peut rien acheter dans les marchés sans être importuné par les sollicitations des Indiens qui demandent leur part. Je vis parmi eux un de ces dévots si communs dans le nord de l'Inde et dans la Perse ; il tenait un de ses bras droit au-dessus de la tête, et la longue habitude l'avait fixé dans cette position au point qu'il ne pouvait en prendre une autre ». – LAFITAU ; Mœurs des sauvages, t. II : « (p. 274) Le supplice des Esclaves chez les Nations de l'Amérique Septentrionale, que nous connoissons, est de les brûler à petit feu. Mais cette scène se passe avec tant de circonstances d'une barbarie énorme, que la seule idée en fait frémir ». Suit la description des souffrances incroyables auxquelles sont soumis ces malheureux. « (p 280) Ainsi finit cette sanglante tragédie, pendant laquelle je ne sçais ce qu'on doit admirer davantage, ou l'excès de la brutale férocité de ces inhumains, qui traitent avec tant de cruauté de pauvres Esclaves... ou bien la constance de ces mêmes Esclaves, lesquels, au milieu des tourmens les plus affreux, conservent une grandeur d'âme et un héroïsme, qui a quelque chose d'inimaginable ». Tandis qu'ils sont brûlés, torturés de mille manières, les prisonniers « (p. 284) chantent leurs hauts-faits d'armes, et ceux de leur Nation ; ils vomissent mille imprécations contre leurs tyrans, ils tâchent de les intimider par leurs menaces : ils appellent leurs amis à leur secours pour les venger ; ils insultent ceux qui les tourmentent, comme s'ils ne sçavoient pas leur métier ; ils leur apprennent comment il faut brûler pour rendre la douleur plus sensible ; ils racontent ce qu'ils ont fait eux-mêmes à l'égard des prisonniers, qui ont passé par leurs mains ; et si par hazard il s'est trouvé entre ces prisonniers quelqu'un de ceux de la Nation qui les fait mourir, ils entrent dans le détail le plus exact de tout ce qu'ils leur ont fait souffrir, sans craindre les suites d'un discours, lequel ne peut qu'aigrir extrêmement ceux qui l'écoutent... (p. 285) Dans le fort des tourmens, lors même que (p. 286) l'excès de la douleur les fait écumer, et paroître comme des forcenés, il ne leur échappe pas une parole de lâcheté. Les femmes ont cet héroïsme aussi bien que les hommes. J'en ai vû une à qui on arracha deux ongles en ma présence... elle ne jetta pas un cri, ni un soupir, et je ne remarquai sur son visage qu'une légère marque d'ennui. Il s'en trouve qui ne font que rire pendant leur supplice ; qui s'y prêtent agréablement, et qui remercient de bonne grâce ceux qui leur ont fait le plus de mal ». « (p. 280) Les Sauvages... semblent se préparer à cet évenement [le supplice des prisonniers dès l'âge le plus tendre. On a vû des enfants accoller leurs bras nuds l'un contre l'autre, mettre entre deux des charbons ardents, se défiant à qui soûtiendroit la gageure avec plus de fermeté, et la soutenir avec constance. J'ai vû moi même un enfant de cinq à six ans, dont le corps avoit été brûlé par un accident funeste d'eau bouillante répandue sur lui, qui toutes les fois qu'on le pançoit, chantoit sa chanson de mort avec un courage incroyable, quoiqu'il souffrit alors de très-cuisantes douleurs ».

[FN: § 1181-1]

SONNERAT; Voyage... t. I : « (p. 256) Le Saniassi [ou Sanachi] est ou Brame ou Choutre : il se dévoue entièrement à la divinité ; les vœux qu'il fait sont d'être pauvre, chaste et sobre ; ne possédant rien, ne tenant à rien ; il erre de tous côtés, presque nud, la tête rasée, n'ayant qu'une simple toile jaune qui lui couvre le dos ; il ne vit que d'aumônes et ne mange que pour s'empêcher de mourir ». C'est là un type commun dans un grand nombre de sociétés. « (p. 256) Les Pandarons ne sont pas moins révérés que les Saniassis. Ils sont de la secte de Chiven, se barbouillent toute la figure, la poitrine et les bras avec des cendres de bouze de vache. Ils parcourent les rues, demandent l'aumône, et chantent les louanges de Chiven, en portant un paquet de plumes de paon à la main... (p. 257) Le Caré Patrépandaron est une espèce de Pandaron ; il fait vœu de ne plus parler [cfr. les Trappistes] ; il entre dans les maisons et demande l'aumône en frappant des mains sans rien dire... Son nom est significatif : Caré veut dire main, et Patré, assiette... (p. 258) Le Tadin va mendier de porte en porte en dansant et en chantant les louanges et les métamorphoses de Vichenou... (p. 260) Enfin les Indiens ont des religieux Pénitens... ils sont chez les Gentils, ce que les Fakirs sont chez les Mogols ; le fanatisme leur fait tout abandonner, biens, famille, etc., pour aller traîner une vie misérable... les seuls meubles qu'ils puissent avoir sont un Lingam, auquel ils offrent (p. 261) continuellement leurs adorations, et une peau de tigre sur laquelle ils se couchent. Ils exercent sur leur corps tout ce qu'une fureur fanatique peut leur faire imaginer : les uns se déchirent à coups de fouet [cfr. la discipline des catholiques], ou se font attacher au pied d'un arbre par une chaîne que la mort seule peut briser ; d'autres font vœu de rester toute la vie dans une posture génante, telle que de tenir les poings toujours fermés, et leurs ongles, qu'ils ne coupent jamais, leur percent les mains par succession de tems ; on en voit qui ont toujours les bras croisés sur la poitrine, ou bien les mains élevées au-dessus de la tête, de sorte qu'il ne leur est plus possible de les plier... Plusieurs s'enterrent et ne respirent que par une petite ouverture... quelques-uns moins fanatiques se contentent de s'enterrer seulement jusqu’au col. On en trouve qui ont fait vœu de rester toujours debout sans se coucher ; ils dorment appuyés contre une muraille ou contre un arbre, et pour s'ôter les moyens de dormir commodément, ils s'engagent le col dans de certaines machines qui ressemblent à une espèce de grille... D'autres se tiennent des heures entières sur un seul pied les yeux fixés sur le soleil... quelques-uns pour avoir plus de mérite se tiennent un pied en l'air, et ne s'appuient de l'autre que sur l'orteil, ayant de plus les deux bras élevés, ils sont placés au milieu de quatre vases pleins de feu, et contemplent le soleil avec des yeux immobiles. Il y en a qui paroissent tout (p. 262) nuds devant le peuple, et cela pour lui montrer qu'ils ne sont plus susceptibles d'aucune passion, qu'ils sont rentrés dans l'état d'innocence, depuis qu'ils ont abandonné leur corps à la Divinité. Le peuple persuadé de leur vertu, les regarde comme des saints [phénomène général chez un grand nombre de peuples], et pensent qu'ils obtiennent de Dieu tout ce qu'ils lui demandent : chacun croyant faire une œuvre très-pieuse, s'empresse de leur porter à manger [autre phénomène général], à mettre les morceaux dans la bouche de ceux qui se sont interdits l'usage de leurs mains, et à les nettoyer ; quelques femmes vont jusqu'à baiser leurs parties naturelles et à les adorer, tandis que le Pénitent est dans un état de contemplation... (p. 262) Le caractère de ces Pénitens est d'avoir un grand fond d'orgueil, d'être pleins d'estime d'eux-mêmes, et de se croire des saints. Ils évitent surtout d'être touchés par les gens de basse Caste et les Européens, de crainte d'être souillés ; ils ne laissent même pas toucher leurs meubles : si on s'approche d'eux ils s'éloignent aussitôt. Ils ont un souverain mépris pour tous ceux qui ne sont pas de leur état, et les regardent comme profanes ; ils n'ont rien sur eux qui ne passe pour renfermer quelque mystère, et qui ne soit digne d'une grande vénération ».

[FN: § 1182-1]

H. KERN ; Hist. du bouddh., t. II : « (p. 3) C'est un de ses devoirs les plus stricts de rester absolument chaste ; défense de toucher, de regarder une femme, s'il y a danger pour sa chasteté. Il doit s'efforcer sérieusement de dominer sans cesse sa langue, son estomac et ses mains. Le jeu, les travaux serviles, l'appropriation d'objets qui ne lui ont pas été offerts, les mauvais traitements infligés à des êtres vivants, les paroles blessantes, tout cela lui est absolument défendu ; de même, l'usage des liqueurs fortes et du vin, du moins s'il s'agit de brahmanes. Il doit s'abstenir de sel, de miel, de viande, d'épices ; il ne doit pas dormir pendant la (p. 11) journée, ni faire usage de parfumeries, ni s'orner ou se servir d'onguents : il doit éviter en général tout ce qui pourrait être favorable à la mollesse, de même la danse, le chant et la musique instrumentale... Un des devoirs les plus caractéristiques de l'étudiant, c'est qu'il doit mendier chaque jour sa subsistance ». L'étude de chaque Vedda doit durer douze ans ; mais il suffit d'en étudier un. Ensuite l'étudiant peut retourner parmi les laïques et se marier. Il peut aussi rester étudiant toute sa vie. Le moine mendiant ou bhikshu diffère de l'étudiant en ce qu'il n'obéit pas à un maître. « (p. 5) Les règles de conduite du bhikshu peuvent être résumées ainsi : il n'a ni maison ni biens meubles ; il mène une vie errante, sauf pendant la saison des pluies, pendant laquelle il doit avoir un séjour fixe ; il mendie sa nourriture dans les villages, une fois par jour ; il doit abandonner tout désir, dominer sa langue, ses yeux, ses actions ; et observer la continence la plus absolue ; il porte un vêtement pour couvrir sa nudité, ou bien des haillons abandonnés qu'il a lavés d'abord ; il doit se raser la tête et ne porter qu'une touffe au sommet... » Il diffère peu du Franciscain. « (p. 14) On ne doit pas confondre avec les moines mendiants proprement dits, Bhikshus..., les ermites qui mènent une vie de mortification dans la solitude, afin de s'habituer au renoncement du monde, et de se préparer au Ciel [comme les ermites chrétiens]. Quoiqu'il leur soit permis de mendier leur nourriture, ils ne le font que par exception... L'ermite vit dans la forêt, se nourrissant de racines et de fruits, et pratiquant l'ascétisme... (p. 15) Les Bouddhistes possèdent un ensemble complet de règles de la vie ascétique dans les Dhutângas, au nombre de treize chez les Bouddhistes du Sud, de douze chez ceux du Nord ». Kern les résume de la façon suivante : « (p. 16) I. Porter un habit composé de haillons ramassés sur un fumier ou un tas de sable. Les moines, en général, ne suivent nullement cette règle... II. La possession de trois vêtements... III. Ne prendre d'autre nourriture que celle qu'on a reçue comme aumône... IV. En mendiant sa nourriture aller régulièrement de maison en maison, chez les pauvres aussi bien que chez les riches, sans négliger personne... V. Rester assis, pendant le repas, à la même place... VI. Ne manger que dans une seule écuelle ou pot à aumône... VII. Défense de prendre un second repas après celui de la matinée... VIII. Vivre dans la solitude... IX. Vivre au pied d'un arbre... X. Coucher à la belle étoile... XI. Vivre dans un cimetière ... XII. Passer la nuit là où l'on a été conduit par le hasard... XIII. Dormir assis... Dans la liste septentrionale... on ne trouve pas les articles IV et VI ; par contre elle a un autre article... qui prescrit l'emploi du feutre... » .

[FN: § 1182-2]

PAUL SABATIER ; Vie de Saint François d'Assise « (p. 165) Un jour frère Jean... qui avait été chargé tout spécialement d'un lépreux, l’amena en se promenant à la Portioncule, comme s'il n'eût pas été atteint d'une maladie contagieuse. – Les reproches ne lui furent point épargnés ; le lépreux les entendit, et ne put cacher son trouble et sa tristesse... François n'eut pas de peine à remarquer tout cela et à sentir de cuisants remords : la pensée d'avoir contristé un malade du bon Dieu, lui était insupportable ; non seulement il lui demanda pardon, mais il fit servir à manger, s'assit à côté de lui et puisant dans la même écuelle partagea son repas ».

[FN: § 1183-1]

RUTIL. ; Itiner., I :

(439) Processu pelagi iain se Capraria tollit.
Squalet lucifugis insola plena viris.
Ipsi se monachos Graio cognomine dicunt,
Quod soli nullo vivere teste volunt
Munera fortunae metuunt, dum damna verentur.
Quisquam sponte miser, ne miser esse queat ?
Quaenam perversi rabies tam stulta cerebri,
Dum mala formides, nec bona posse pati ?

« Comme nous avancions, déjà Capraria surgit de la mer. Cette île est infestée d'hommes qui fuient la lumière. Eux-mêmes se donnent le nom grec de moines, parce qu'ils veulent vivre seuls, sans témoins. Ils craignent les dons de la fortune, et en craignent aussi les coups. Qui se rend volontairement misérable pour éviter de l'être ? Quelle rage insensée et perverse de l'esprit est-ce donc que craindre les maux et ne pouvoir supporter les biens ? »

[FN: § 1183-2]

Luc.; De morte Peregr. : « (1) Le misérable Peregrinos, ô Protée (ainsi voulait-il être appelé), a fait comme le Protée d'Homère : étant devenu toute chose pour acquérir de la renommée, et s'étant transformé de mille façons, il est finalement devenu feu : tant il avait la manie de faire parler de lui. Et maintenant, le voilà carbonisé, le pauvre,... (2) Il me semble déjà te voir rire de ce vieillard radoteur, et déjà je t'entends t'écrier, comme tu en as l'habitude : ô sottise ! ô vaine ostentation ! et d'autres ô que nous disons habituellement, dans ces cas. Tu les dis de loin et à l'abri ; mais moi je les disais près du feu, et au milieu d'une grande multitude d'auditeurs dont plusieurs me regardaient de travers, admirant la folie de ce vieillard. Il y en avait aussi qui en riaient, mais il s'en est peu fallu que je ne fusse mis en pièces par les cyniques, comme Actéon par les chiens... »

[FN: § 1184-1],

DIOG. LAERT. VI, 23.

[FN: § 1184-2]

JACOBI A VORAGINE ; Legenda aurea, c. CXLIX, de Sancto Francisco : (p. 666) Cernens autem hostis antiquus, quia sic non praevaluit, gravem carnis tentationem eidem immisit; quod vir Dei sentiens veste deposita cordula durissima se verberat dicens : eya, frater asine, sic te manere decet, sic subire ilagellum. Sed cum tentatio nequaquam discederet, foras exiens in magnam nivem se nudum demersit accipiensque nivem in modum pilae septem glebas compingit, quas sibi proponens coepit alloqui corpus : ecce, inquit, haec maior uxor tua, istae quatuor duo sunt filii et duae filiae tuae, reliquae duae sunt servus et ancilla, festina ergo omnes induere, quoniam frigore moriuntur, si autem earum multiplex sollicitudo te molestat, uni domino sollicitus servi. Illico dyabolus confusus abscessit et vir Dei Deum glorificans in cellam rediit.

[FN: § 1184-3]

On trouve déjà dans Épictète l'équivalent du dicton : l'habit ne fait pas le moine. Epict., Diss., IV, 8, 4. « Il n'est pas facile de juger les opinions, de l'extérieur... Celui-ci est philosophe. Pourquoi ? Parce qu'il porte un manteau grossier et une longue barbe. Et les prestidigitateurs, que portent-il ? (5) C'est pourquoi, si l'on voit l'un d'eux faire une chose honteuse, on dit aussitôt : Voilà ce que fait le philosophe ! Tandis qu'on devrait plutôt dire qu'il n'est pas un philosophe, puisqu'il fait une chose honteuse ». Dans la dissertation, III, 22, Épictète oppose le vrai au faux cynique, qu'il accuse de tous les vices. – On voyait encore des cyniques, au temps où vivait Saint Augustin. D. AUG. ; De civ. Dei, XIV, 20. Et nunc videmus adhuc esse philosophos Cynicos : hi enim sunt, qui non solum amiciuntur pallio, verum etiam clavam ferunt... – Lucien blâme vivement les soi-disant philosophes, et ses scoliastes les comparent aux moines. LUC. ; Pisc., 11, dit n'avoir pas trouvé la philosophie parmi ceux qui vont, enveloppés dans des manteaux et portent de longues barbes. Le scoliaste observe qu'on peut dire la même chose des moines de son temps. – Dans les Dialogues des morts (10, 7) Hermès oblige un philosophe à déposer son vêtement, puis s'écrie : « Ô Zeus ! quelle jactance il cache dessous, quelle ignorance, quelles disputes et quelle vanité !... Et cet autre ? Oui, il y a de l'or, de la paillardise, de l'impudence, de la colère, du luxe et de la mollesse. Ne cache rien, que je voie tout... » À l'exclamation sur la jactance, le scoliaste observe qu'elle convient aux moines de son temps. LUC.; Mort. dial., 10, 8 : – Ô Zeus ! quelle jactance tu portes ». Scoliaste : « Cela convient à nos moines ». Une épigramme de l'Anthologie de Planude (19) plaisante à propos du mot Irène, qui, en grec, signifie paix, et qui était le nom de la concubine d'un évêque. « Irène (la paix) soit avec vous, dit l'évêque en arrivant. Mais comment peut-elle être avec tout le monde, s'il l'a chez lui pour lui seul ? »

[FN: § 1186-1]

PLIN.; Nat. hist., V, 15, 17, (trad. LITTRÉ, t. I).

[FN: § 1186-2]

FLAV. Ios. ; Ant. iud., XVIII, 1, 5.

[FN: § 1187-1]

Théodoret dit avoir vu ce saint. Voir principalement TREODORETI Religiosa historia, XXVI, Symeones. THEOD. LECT.; Eccles. hist., H. VALESIUS, II, p. 565. EVAGR.; Eccl. hist., I, 13. ANTONIUS; Vita apud ROSWEI.

[FN: § 1187-2] THEODORET. ; Relig. hist., XXVI, Symeones, pp. 1277-1278. – « Je fus non seulement présent à ses miracles, mais aussi auditeur de ses prédictions de choses futures ; car il prédit deux ans à l'avance une grande sécheresse, ainsi qu'une stérilité intense, suivie de famine et d'épidémies... »

[FN: § 1187-3] THEODORET.; loc. cit. § 1187 2, p. 1273. – Migne 1556.

[FN: § 1187-4]

BARON. ; Annal. eccles., t. VIII, ann. 1160. Note de PAG. : Garnerius in Auctario Oper. Theodoreti Dissert. II, cap. 5, examinat celebrem quaestionem de anno quo Simeon Stylita in colamnam ascendit, et de tempore quo in ea stetit, observatque Baronium tria narrare de Simeone, quae non solum cum omnibus Vitae eius Scriptoribus, et cum Theodoreto, sed et cum ipsomet Baronio pugnant. Après une longue dissertation, l'auteur conclut que Saint Siméon doit être resté environ quarante ans sur sa colonne. Avant d'y monter, il s'était enfermé dans un étroit espace muré, une grosse chaîne au pied.

[FN: § 1187-5]

BARON. ; Annal. eccles., t. VIII, ann. 460, xx : At sicut Elias Elisaeum Spiritus reliquit haeredem et virtutum imitatorem; ita Simeon Danielem monachum, quem praedictionibus et divinis visionibus ad eiusmodi angelicum arripiendum vitae institutum, adhortatus est, sibi substituisse visus est spiritualis haereditatis legitimum successorem. Paulo enim ante eius obitum idem Daniel instar Elisaei, sicut ille pallium est conseculus Eliae, ipse cucullum Simeonis per Sergium discipulum ad Leonem Imperatorem missum, sed ab illo non acceptum, accipere meruit; ita plane Divino consilio factum est, utpote quod Simeonis haeres spiritus et virtutis in editione signorum esset : accidit autem in eodem die quo idem Simeon ex hac vita decessit. Ubi vero illum Daniel accepit a Sergio, eidem decessum Simeonis sibi revelatum patefecit; et magna fiducia, ceu paternam aditurus hoereditatem, constructam apud Ostia Ponti columnam ascendit : cum adversantem sibi mox expertus est inter alios S. Gennadium Constantinopolitanum Antistitem, rei novitate perculsum, subverentem quidem, ne inflatus homo superbia, aemulatione magni Simeonis impulsus, inde humanam captaret auram, et ea arte sibi gloriolam compararet : sed signis divinitus editis satis tandem persuasus est, Danielem Dei amicum, non humana id tentasse praesumptione, sed Dei consilio niti, eiusque imperio regi, Spiritu agi, et eius ope fulciri. Il resta de longues années sur sa colonne, y fit de grands et beaux miracles.

[FN: § 1187-6] BARON. ; Annal. eccles., t. XIII, ann. 806, V : Epistola Theodori Studitae ad Nicephorum imperatorent... ex praepositis, et ex stylitis, et ex inclusis...

[FN: § 1189-1]

LUCIAN.; De Syria Dea : « (28). L'atrium du temple est tourné au nord, grand d'environ cent coudées. Dans cet atrium se trouvent les phallus qui y ont été mis par Bacchus. Ils ont une hauteur de trois cents coudées. Un homme monte deux fois l'an, sur l'un de ces phallus, et reste au sommet du phallus pendant sept jours. On dit que la raison de cette ascension est la suivante. Le vulgaire croit qu'à cette hauteur, cet homme s'entretient avec les dieux, prie avec ferveur pour toute la Syrie, et que les dieux entendent les prières de tout près [première dérivation]. D'autres estiment qu'il le fait pour Deucalion, en mémoire de cette calamité dans laquelle les hommes montaient sur les montagnes et sur les arbres les plus hauts, épouvantés par les grandes eaux [seconde dérivation]. Je n'admets pas cela, et je crois qu'on le fait pour Bacchus. Je raisonne ainsi. Ceux qui dressent des phallus à Bacchus placent sur les phallus des hommes de bois, assis ; pourquoi ne le dirais-je pas : je crois donc qu'ils y montent pour imiter cet homme de bois [troisième dérivation] ». Ajoutons, maintenant, comme quatrième dérivation, que le stylite fait pénitence. Nous avons ainsi les nombreuses dérivations, qui constituent la partie variable et secondaire du phénomène, tandis que la partie constante et principale est le résidu qu'on tente d'expliquer par ces dérivations. L'auteur continue : « (29) Et la manière dont l'homme monte est la suivante. Il s'entoure lui-même et le phallus d'une grande chaîne ; puis il monte par des chevilles qui sont fichées dans le phallus, de sorte qu'on n'y puisse poser que la pointe des pieds ; et, en montant, il tire sur une chaîne, des deux côtés, comme s'il tenait deux rênes. Si quelqu'un n'a pas vu cela, il a vu du moins ceux qui montent sur le palmier, en Arabie, en Égypte ou ailleurs, et comprend ce que je dis [la description paraît bien être d'un témoin oculaire]. Quand il arrive au faîte, il jette en bas une autre petite chaîne qu'il apporte avec lui, très longue, et fait monter ce qu'il veut : du bois, des vêtements, des ustensiles, avec lesquels, formant un siège comme un nid, il s'y accommode, et y reste pendant les jours que j'ai dit. Les gens viennent et apportent de l'or et de l'argent, et aussi du cuivre. L'ayant déposé en un endroit où cet homme le voit, ils le laissent, après avoir dit chacun son nom. Un autre, qui se trouve présent, l'annonce à celui qui est en haut, et celui-ci ayant entendu le nom, fait la prière pour chacun. En priant, il frappe un certain objet de cuivre qui, en remuant, rend un son fort et dur [on notera la similitude suivante : de toute part, des hommes venaient à la colonne de Saint Siméon. L'empereur Léon fit édifier, près de la colonne de Daniel, un monastère pour les disciples du saint]. Il ne dort pas ; et s'il est parfois surpris par le sommeil, un scorpion monte et le réveille, en le mordant à l'endroit où cela lui fait le plus mal. C'est là sa peine, s'il s'endort. Le récit du scorpion est sacré et tient du miracle. Est-il vrai ? je ne saurais dire. Il me semble que c'est la peur de tomber qui l'empêche de dormir ».

[FN: § 1191-1]

S. REINACH ; Cult., myth. et rel., t. I.

[FN: § 1194-1]

G. CASATI ; Dix années en Equatoria : « (p. 48) Les danses s'ouvrent le premier jour par une cérémonie fort curieuse et fort typique. Les jeunes gens, filles d'un côté et garçons de l'autre, font entendre des chants de joie et d'amour, puis l'une des jeunes filles se lève et va présenter un fouet en cuir d'hippopotame à l'un des jeunes gens, qui l'accepte avec des remerciements. Celui-ci promène un regard autour de lui en disant : „ Qui désire être aimé et admiré ? “– „ Moi,“ répond l'un de ses compagnons qui s'avance les (épaules nues. Alors le premier lui cingle le dos de quinze coups de fouet consciencieusement appliqués, qui, pour obéir aux usages, doivent y laisser des traces bien marquées. Les deux acteurs recommencent l'opération, en intervertissant les rôles, et se retirent ensuite, fiers d'avoir étalé aux yeux des belles leur force physique et morale ». Comparez avec la description de Casati celle que Plutarque donne de la flagellation à Sparte. – PLUTARCH.; Inst. lac., 40. Lyc., 18. Cfr. LUC. ; Anach., 38. LACTANTII PLACIDI qui dicitur commentarios in STATII Thebaida, IV, 227: Eurotae cur dixerit, ipse enarravit. Iuxta hunc fluvium Lacones vapulando contendunt. Gloriosor tamen ille est, qui ultra praescriptum numerum plagarum animae non pepercit ; quod, cum devoverit spiritum, publice funeratus capite coronatur.

[FN: § 1196-1]

B. DAMIANI ; Epist., V, 8, Ad Clericos florenti os. Un peu plus loin : (p. 69) Optime poenitet, qui dum carnem verberibus mactat, lucrum, quod delectatione carnis amiserat, afflictionibus recompensat : et salubrem illi nunc amaritudinem ingerit, cuius olim noxia delectatione peccavit. Nihil differt quibus poenis caro poenitentis addicitur, dummodo voluptas praecedentis illecebrae vicaria repressi corporis afflictione mutetur. Quod si non facientibus nova, ac proinde reprehensibilis videtur disciplina virgarum, et ad lividae persuasionis ineptiam indicatur destructio canonum, abolitio decretorum : numquid venerabilis Beda redarguendus est videbitur, qui post antiquorum sententiam canonum, quosdam poenitentes ferreis asserit circulis astringendos ? Numquid sanctorum Patrum vita iure conspuitur quem alios per ogdoadas, et pentadecas in vepribus stando, alios de sole in solem rigidas ulnas in aëra suspendendo, alios in defossis specubus iugiter latitando, reatus sui poenitentiam peregisse testatur ? Numquid et beatus ille Macharius digne ridebitur, qui dum se minimum quid admisisse poenituit, acutissimis culicum rostris, quae videlicet apros transfigerent, per sex menses membra sua nudus exposuit ? Cfr. Opusc., LI, 9.

[FN: § 1197-1]

B. DAMIANI ; Opuse., LI, 8 : Centum autem annorum poenitentia, sicut ipso auctore didicimus, sic expletur. Porro cum tria scoparum millia unum poenitentiae annum apud nos regulariter expleant ; decem autem Psalmorum modulatio, ut saepe probatam est, mille scopas admittat ; dum centum quinquaginta Psalmis constare Psalterium non ambigitur, quinque annorum poenitentia in huius Psalterii disciplina recte supputantibus invenitur. Sed sive quinque vicies ducas, sive viginti quinquies, centum fiunt. Consequitur ergo, ut qui viginti Psalteria cum disciplina decantat, centum annorum poenitentiam se peregisse confidat. Cela ne fait pas un pli. – Ibidem, 9 : Memini quoque, quia cuiusdam Quadragesimae imminentis initio mille annos imponi sibi per nos ad poenitentiani petiit : quos certe omnes ferme antequam ieiunii tempus transigeretur, explevit.

[FN: § 1198-2]

Un certain monsieur Cannon, Américain, à l'occasion de Noël 1911, dépêcha à ses concitoyens quatre-vingt-dix-sept orateurs, pour leur persuader de s'abstenir de la femme et du vin. Aucune comparaison n'est possible entre ce monsieur Cannon et Saint Dominique. Le premier, après avoir gagné de belles sommes à la Bourse, lieu qui ne passe assurément pas pour être un temple de vertu, garde pour lui les plaisirs et attribue généreusement les pénitences aux autres gens. Le second vécut très pauvre, dans la misère, et s'imposait des pénitences pour compenser les plaisirs d'autrui. Mais la comparaison s'établit entre les admirateurs de chacun d'eux, parce qu'ils étaient mus également par le sens ascétique qui repousse les plaisirs de la vie et en recherche les douleurs.

[FN: § 1199-1]

MURATORI ; Ann, d'Italia, t. VII : « (p. 282) Célèbre fut encore l'année présente [1260], par une pieuse nouveauté, qui vit le jour à Pérouse, et vint, les uns disent d'un enfant, les autres d'un ermite, qui affirma en avoir eu la révélation de Dieu. Cet homme prêcha la pénitence aux gens du peuple, en leur représentant l'imminence d'un très grave fléau du Ciel, s'ils ne se repentaient pas et ne faisaient la paix entre eux. Aussi des hommes et des femmes de tout âge instituèrent-ils des processions où l'on administrait la discipline (p. 283) et où l'on invoquait la protection de la Vierge, mère de Dieu. De Pérouse, cette dévotion populaire passa à Spoleto, accompagnée d'une componction admirable, et de là vint en Romagne. Le peuple d'une ville se portait en procession à la ville voisine, parfois jusqu'au nombre de dix et de vingt mille personnes, et là, dans la cathédrale, s'administrait la discipline jusqu'au sang, criant miséricorde à Dieu et paix parmi les hommes [voilà le résidu de sociabilité mis à nu]. Ému, le peuple de cette autre ville allait ensuite en une autre, de manière qu'avant la fin de l'hiver, cette nouveauté se répandit même au delà des montagnes et arriva en Provence, en Allemagne et jusqu'en Pologne [tel est le cours habituel de ces épidémies; on a pu le voir de nos jours, dans les actes de l'Armée du Salut]. Le 10 octobre, les gens d'Imola la portèrent à Bologne, et vingt mille Bolonais vinrent successivement à Modène. Autant de Modénais allèrent à Reggio et à Parme ; et ainsi, de proche en proche, les autres portèrent le rite jusqu'à Gènes et par tout le Piémont [le Réveil du Pays de Galles s'est répandu de nos jours, dans des proportions beaucoup moindres, mais d'une façon semblable]. Mais le marquis Oberto Pelavicino et les Torriani ne permirent pas que ces gens entrassent dans les territoires de Crémone, de Milan, de Brescia et de Novare ; et le roi Manfred lui aussi leur interdit l'entrée de la Marche d'Ancône et de la Pouille ; car ils craignaient quelque piège politique sous le couvert de la dévotion ; ce dont le moine padouan se plaint amèrement. Les effets produits par cette pieuse émotion des peuples furent d'innombrables paix faites entre les citoyens en discorde, avec restitution de leur patrie aux bannis, les confessions et les communions, qui étaient si négligées en des temps si barbares, et les conversions, – durables, je ne sais – des courtisanes, des usuriers et d'autres malandrins et ribauds [effets habituels et éphémères de cette épidémie, comme on peut aussi le voir dans celle du Réveil du Pays de Galles] ». Le même Muratori, dans ses Dissert. sopra le Antichità italiane, LXXV, (cité au § 1192-2), dit : « (p. 363) Ce rite passait d'une ville à la voisine. C'est-à-dire que les gens d'une ville, deux par deux, vêtus de sacs et les pieds nus, l'image du Crucifié en avant, allaient en procession à une autre ville ; et de nouveau l'autre peuple à une autre ville, en semblable pénitence, implorant la paix et la rémission des offenses. Les Bolonais, par exemple, au nombre de plus de vingt mille personnes, vinrent à Modène, vers la fin d'octobre, avec leurs gonfalons, se frappant et chantant les louanges de Dieu et quelques chansons grossières. Les Modénais allèrent jusqu'à Castello-Leone pour les recevoir, et les introduisirent en ville. Dans la cathédrale, ils renouvelèrent leurs coups de discipline, leurs prières et leurs cris ; puis, ayant reçu un repas des citoyens, ils s'en retournèrent chez eux ». (MURATORI; Antiq. ital., t. VI, p. 469-470.

[FN: § 1199-2]

MURATORI ; Dissertazioni sopra le Antichità italiane, t. III, IIe partie, LXXV.

[FN: § 1200-1]

RAYN. ; Annal. eccles., t. III, anno 1260, VIII : Penetrasse flagellantium ritum in Germaniam tradit Henricus Stero se rem Perusii emersisse, cum monacho Patavino consentit, ac supplicationis obeundae modum ita describit : Erat modus ipsius poenitentiae ad patiendum durus, horribilis, et miserabilis ad videndum ; nam ab umbilico sursum corpora denudantes, quadam veste partem corporis inferiorem usque ad talos tegentem habebant, et ne quis eorum agnosceretur, cooperto capite et facie incedebant. Procedebant etiam bini, terni, tanquam clerici, vexillo praevio vel cruce, flagellis semetipsos bis in die per triginta tres dies, et deinde in memoriam temporis humanitatis Domini nostri Iesu Christi super terram apparenlis tamdiu cruciantes [ici, Jésus-Christ intervient, comme Artémis, dans la flagellation des Spartiates, parce que tout peuple croyant rapporte ses coutumes à ses dieux], quousque ad quasdam cantilenas, quas de passione ac morte Domini dictaverant, duobus, vel tribus praecinentibus circa ecclesiam vel in ecclesia compleverunt, nunc in terram corruentes, nunc ad coelum nuda brachia erigentes, non obstante luto vel nive, frigore vel colore. Miserabiles itaque gestus ipsorum, et dira verbera multos ad lacrymas et ad suscipiendam eandem poenitentiam provocabant.

[FN: § 1200-2]

RAYN.; Annal. eccles., t. VI, anno 1349, XVIII. L'auteur cite Albertus Argentinensis : Incipiente paulatim pestilentia in Alemannia, coeperunt se populi flagellare, transeuntes per terram : et venerunt ducenti de Suevia Spiram anno predicto quadragesimo nono [1349] in medio iunii, habentes inter se unum principalem, et duos alios magistros, quorum mandatis omnino parebant. Et cum hora prima Rhenum transissent, accurente populo fecerunt circulum in civitate Spira ante monasterium, latum valde, in cuius medio se exuentes, depositis vestibus et calceamentis, habentes in modum braccae camisias a femore ad talos praetensas, circumiverunt unusque post alium in circulo se in modum crucifixi prostravit, quilibetque eorum super quoslibet transeuntes passibus, et leniter prostratos flagellis tangentes. Ultimi, qui se primo straverunt, primo surgentes se flagellaverunt flagellis habentibus nodos cum quatuor aculeis ferreis transeuntes cantu vulgari invocationis dominicae, habente multas invocationes ; et steterunt tres in medio circuli sonori valde praecinentes flagellando se : post quos alii canebant. In quo diu immorantes, ad unum praecentum omnes genuflexi in modum crucifixi in facies suas corruerunt, cum singultu orantes ; transierunt iuxta circulum magistri monentes eos, ut orarent ad Dominum pro clementia super populum, item super omnes eoram. benefactores et malefactores, et omnes peccatores et in purgatorio existentes, et pluribus aliis. Le même Albert parle des lettres lues par ces gens : Cuius literae tenor similis in sententia esse dicebatur, in ecclesia S. Petri in lerusalem per angelum praesentatae, in qua narrat angelus, Christum offensum contra mundi pravitates, plurima exprimens crimina violationum diei dominicae, et quod non ieiunetur feria sexta, blasphemias, usuras, adulteria, Christumque rogatum per B. Verginem et angelos pro misericordia, respondisse quemlibet per triginta quatuor dies se debere exulando flagellare, ut misericordiam Dei consequantur.

[FN: § 1202-1]

PIERRE DE L'ESTOILE ; Régistre-journal de Henri III: « (p. 159) L'an présent 1583, en ce mois de mars, le Roy institua et erigea une nouvelle confrairie qu'il fist nommer des Penitents, de laquelle lui et ses deux mignons se firent confreres, et y fist entrer plusieurs seingneurs gentilshommes et autres de sa cour, y conviant les plus apparans de son parlement de Paris, chambre des Comptes, et autres Cours et jurisdictions, avec un bon nombre des plus notables bourgeois de la Ville. auquel jour [25 mars 1583, fête de l'Annonciation] fut faite la solennelle procession desdits Confrères Penitents, qui vindrent sur les quatre heures après midi au couvent des Augustins... deux à deux, vestus de leurs accoustremens tels que des Battus de Rome, Avignon, Thoulouze, et semblables. (p. 160) Le Jeudi Saint, 7 avril, sur les neuf heures du soir, la procession des Penitents, où le Roy estoit avec tous ses mignons, alla toute la nuit par les ruës et aux églises, en grande magnificence de luminaire et musique excellente, faux-bourdonnée. Et y en eust quelques uns, mesme des mignons à ce qu'on disoit, qui se fouettèrent en ceste procession, ausquels on voioit le pauvre dos tout rouge des coups qu'ils se donnoient ». Les gens riaient de ces bouffonneries et après la première procession, on fit le quatrin suivant (p. 160

Après avoir pillé la France,
Et tout son peuple despouillé,
Est-ce pas belle pénitence
De se couvrir d'un sac mouillé !

[FN: § 1203-1]

OVID.; Fast., II:

(425) Nupta, quid exspectas ? non tu pollentibus herbis,
Nec prece, nec magico carmins mater eris.
Excipe fecundae patienter verbera dextrae :
Iam socer optati nomen habebit avi.

Il raconte ensuite une légende et un oracle de Junon :

(441) Italidas matres, inquit, caper hirtus inito
Obstupuit dubio territa turba sono.
Augur erat : nomen longis intercidit annis ;
Nuper ab Etrusca venerat exsul humo.
Ille caprum mactat : iussae sua terga maritae.
Pellibus exsectis percutienda dabant.
Luna restimebat decimo nova cornua motu ;
Virque pater subito, nuptaque mater erat.

[FN: § 1204-1]

Pratica del Confessionale, t. III.

[FN: § 1205-1]

Num.; VI, 4, (Vulg.) Cunetis diebus quibus ex voto Domino consecrantur, quidquid ex vinea esse potest, ab uva passa usque ad acinum. non comedent.

[FN: § 1205-2]

SCHWAB ; Le Talmud de Jérusalem, t. IX « (p. 188) (Mishnâ) Trois objets essentiels sont interdits au Nazir : l'impureté, la taille des cheveux, et la consommation de ce qui provient de la vigne. Tout ce qui provient d'elle (p. ex. la peau, les pépins, les grains secs) sera joint pour constituer le minimum réglementaire, et l'on n'est coupable d'infraction à l'abstinence qu'en ayant mangé des raisins une quantité égale à une olive... ». Le commentaire contient de belles discussions. Il est défendu de manger la chair d'un animal dépecé. De là le problème : « (p. 141) La consommation d'une fourmi, que dans la bouche on a coupée en deux, puis mangée, fait aussi l'objet d'une discussion entre R. Yohanan et R. Simon b. Lakisch (le premier en fait l'objet d'une pénalité ; le second en dispense). R. Mescha demanda à R. Zeira : est-ce que la consommation d'un grain de raisin, qu'un Nazir a divisé en deux parts l'ayant déjà dans la bouche, puis l'a mangé, fait aussi l'objet d'une discussion entre R. Yohanan et R. Simon b. Lakisch ? ». Un de nos anti-alcooliques modernes s'abstient de manger du risotto, parce qu'il a appris qu'en le cuisant on y ajoute un verre de vin blanc. « (p. 143)... Celui qui mange cinq fourmis [quel beau plat !], même à la fois, et fût-ce dans le même état d'ignorance, sera condamné pour chaque insecte ainsi consommé, qui (malgré son exiguïté) constitue une individualité à part ; mais si après les avoir écrasées il les mange, il ne sera qu'une fois coupable, et encore faut-il que le total corresponde à l'équivalence d'une olive ». « (p. 146) (Mischnâ). Le naziréat indéterminé est de trente jours. L'acte de s'être rasé pendant ce temps (de plein gré), ou de l'avoir été par violence des brigands, renverse la période des trente jours (et il faut la reprendre). Dès qu'un Nazir s'est rasé soit avec des ciseaux, soit avec un rasoir, ou s'il a arraché des poils, si peu que ce soit, il est coupable. Il lui est permis de se frotter, même de se gratter, non de se peigner (de crainte d'arracher un cheveu) ». Qui n'observe pas les prescriptions du naziréat est puni. « (p. 148) R. Il a dit devant R. Yossé : on est passible des coups de lanières dès que l'on a coupé un cheveu pendant la période du Naziréat ». Aujourd'hui, on est plus indulgent. En plusieurs États d'Amérique, il n'y a que la prison, pour qui fait les yeux doux à une femme.

[FN: § 1206-1]

Le fait suivant est remarquable. Je connais un anti-alcoolique qui est athée et ne se préoccupe pas du tout de la Bible. Il pousse l'horreur des boissons alcooliques jusqu'à s'abstenir même de vinaigre ; il assaisonne sa salade avec du citron. Il ne mange pas de poisson qui ait été cuit au vin blanc, ni de civet de lièvre, parce qu'on met du vin rouge dans la sauce. Le résidu est le même ; les dérivations changent.

 


 

Notes du Chapitre VIII. – Les résidus (suite) (§1207 à §1396) Examen des Ve et VIe classes. pp. 649-784

[FN: § 1211-1]

CIC. ; De off ., I, 14, 42-43. Il ajoute : Quare L. Sullae et G. Caesaris pecuniarum translatio a iustis dominis ad alienos non debet liberalis videri.

[FN: § 1214-1]

Un exemple emprunté à la mécanique fera mieux comprendre la chose. Supposons un point matériel en équilibre, et admettons que, s'il s'écarte de la position d'équilibre, il naît une force proportionnelle à l'écart, laquelle agit de manière à ramener le point matériel à la position d'équilibre. Si le point est déplacé de peu, cette force sera petite aussi, et le point pourra s'éloigner beaucoup de la position d'équilibre. Supposons ensuite que, en plus de la force précédente, tout écart de la position d'équilibre fasse naître une force constante, quel que soit l'écart, et d'une intensité notable. En ce cas, le moindre écart est aussitôt contrarié par une force considérable ; il ne peut croître, et le point est ramené aussitôt à la position d'équilibre. Le lecteur prendra bien garde que c'est là une analogie et non une identité (§ 121).

[FN: § 1217-1]

De même, en 1913, en Angleterre les attentats des suffragettes provoquèrent des sentiments de vive opposition dans le peuple, qui sentait instinctivement qu'accorder le droit de troubler l'ordre social à quiconque veut employer la force mène tôt ou tard à la dissolution de la société. Les fanatiques et mystiques humanitaires qui gouvernaient le pays ne le comprenaient pas aussi bien, et cela ne doit pas surprendre, parce que c'est un caractère propre du fanatisme et du mysticisme que de faire sortir de la réalité. Le ministre lut à la Chambre des Communes une statistique dont il ressortait que les méfaits des suffragettes ne se comptaient que par dizaines, et il conclut que la répression pouvait continuer à être douce comme par le passé. Peu de jours après, on lisait deux nouvelles dans les journaux : la première était que l'une de ces mégères, condamnée à la prison pour ses méfaits, avait été mise en liberté, à la suite de son refus de se nourrir ; la seconde, qu'à Englefield-Green, près de Londres, les suffragettes avaient incendié, au moyen de la paraffine, la maison Treytom, qui avait été entièrement détruite. Cette maison était la propriété de lady White, veuve du général sir George White, défenseur de Ladysmith. Le dommage fut estimé 4000 livres sterling (100 000 francs). Près des ruines, on trouva des écriteaux portant l'inscription : « Cessez de tourmenter nos compagnes en prison, et donnez le droit de vote aux femmes ». On ne sait pas précisément pourquoi le distingué ministre a oublié de dire combien d'autres méfaits semblables sont nécessaires pour que l'arithmétique humanitaire permette de protéger les braves gens, en ôtant la faculté de mal faire aux mégères hystériques qui s'amusent à commettre des crimes. En attendant, le gouvernement s'occupe, non pas de mettre ces femmes en prison, mais de faire tenir les pompiers jour et nuit auprès des pompes, prêts à courir là où quelque nouvel incendie des suffragettes éclaterait.

[FN: § 1222-1]

Manuel, II.

[FN: §1223-12]

La Ragione, 16 juin 1911. Le député PIO VIAZZI écrit : « ... qui ne sait que tout tribunal a son avocat prince, habituellement le plus grand faiseur de dupes monopolisateur des clients les plus riches, plein de ressources en matière de témoignages de la dernière heure, ami de tous les juges, auquel on accorde les renvois refusés aux autres, dont les douteux traits d'esprit d'audience font volontiers sourire, envers les clients duquel on fait preuve de quelque bienveillante disposition, qui n'est pas inutile, si même elle n'est pas injuste et tout à fait inique ? »

[FN: § 1224-1]

En 1911, les États-Unis d'Amérique dénoncèrent le traité de commerce qu'ils avaient avec la Russie, parce que celle-ci voulait interdire l'entrée de son territoire aux Israélites porteurs d'un passeport américain ; ce qu'on tenait pour une offense à l'égalité. Mais les États-Unis repoussent de leur territoire beaucoup de sujets asiatiques de la Russie, et cela n'offense pas le moins du monde l'égalité.

[FN: § 1225-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] En Suisse, lorsqu'on a éliminé du peuple successivement les étrangers, les Suissesses, les Suisses mineurs, les citoyens non électeurs, on constate que le droit de prendre part aux votations populaires n'appartient qu'à un peu plus du quart de la population. Suivant l'Annuaire statistique de la Suisse, 1913, p. 8, la population totale de la Suisse, calculée pour le milieu de l'année 1912, s'élevait à 3 831 220 habitants. Pour la votation populaire du 4 mai 1913 sur la révision de deux articles de la constitution fédérale, le même Annuaire p. 322) donne 844 175 citoyens ayant droit de vote. On voit ainsi que le Peuple souverain, les Égaux, constituent une classe privilégiée, jouissant seule du droit d'exprimer ce qu'on appelle la volonté du suffrage universel ou volonté populaire. Cette volonté résultera du vote de la majorité des électeurs qui auront pris part au scrutin. Comme cette majorité est variable, mais toujours sensiblement inférieure au nombre des électeurs inscrits, ce ne sera jamais qu'une partie de la classe des électeurs qui révélera la volonté populaire. Ainsi, dans la votation citée plus haut, le 33 % des électeurs inscrits participa aux votes, et la révision fut acceptée par 169 012 votants contre 111 163. Autrement dit, la volonté populaire fut exprimée par le 61,3 % des suffrages valables contre le 39,7 % ; elle fut imposée à 3 831 220 individus par 169 012 d'entre eux. L'art. 4 de la Constitution fédérale proclame : « Tous les Suisses sont égaux devant la loi. Il n'y a en Suisse ni sujets, ni privilèges de lieu, de naissance, de personnes ou de famille ». or, le droit de vote constitue, à l'égard de l'étranger, un privilège de naissance, et à l'égard des Suisses non électeurs, en tout cas un privilège de sexe et d'âge. C'est là un fait évident ; mais à l'exprimer on courrait le risque d'offenser l'Égalité, le Peuple, le Suffrage universel, ou quelque autre divinité tout aussi susceptible. Par crainte de porter atteinte à leur intégrité, le fidèle use de fictions et de formules favorables.

[FN: § 1231-1]

L'Iliade, I, présente un fait légendaire qui est le type de beaucoup d'autres faits réels. C'est à propos de la peste qui avait frappé le camp grec « (313-314) Atride ordonna aux peuples de se purifier. Ceux-ci se purifient, et jettent les immondices dans la mer ». Eustathe note à propos de ce passage : – « Et la purification et le lavage par ablutions. Et cette expression était très opportune dans les purifications qui se faisaient avec les sacrifices ». Il continue : « Pourquoi dans la mer ? Est-ce parce que, de sa nature, l'eau de mer est apte à laver ? Ils jetèrent l'immondice dans la mer, où il n'y a pas d'immondice, comme on dit. C'est pourquoi le proverbe dit : La mer enlève tous les maux des hommes ». C'est là le vers 1193 de l'Iphigénie en Tauride d'EURIPIDE. – DIOG. LAERT. ; III, Plat., 6, dit que ce vers fait allusion au fait que Platon, étant tombé malade en Égypte où il était allé avec Euripide, fut guéri par les prêtres avec l'eau de la mer. Toute la scène de l'Iphigénie en Tauride est à lire pour voir comment des idées fantaisistes se mêlaient à des idées qui pourraient être de propreté ou de répugnance. Iphigénie dit (1171) que les deux étrangers venus vers elle sont souillés par un homicide domestique, et que (1177) elle porte la statue de la déesse dehors, pour la soustraire à la contagion de l'homicide. Elle ajoute (1191) qu'avant de les sacrifier, elle doit les purifier. « (1192) Dans l'eau de la fontaine ou dans celle de la mer ? » – demande le roi – et Iphigénie répond que « l'eau de la mer enlève [lave] tous les maux des hommes ». – En outre, « (1199) elle doit aussi purifier la statue de la déesse ». Le roi le confirme : « (1200) Effectivement, la souillure du matricide l'a atteinte ». Et cela ne suffit pas ; il faut encore voiler les deux prisonniers, pour ne pas souiller la lumière du soleil. Afin de n'être pas souillé, aucun citoyen ne doit les voir, et le roi doit mettre un voile devant ses yeux.

[FN: § 1242-1]

G. BRUNET ; Les propos de table de Martin Luther, « (p. 261) Maître Kinneck répondit [à Luther] : „ Si vous dites que l'Esprit saint est une certitude vis-à-vis de Dieu, alors tous les sectaires qui ont une persuasion certaine de leur religion ont l'Esprit saint „ Le docteur Luther répondit : „ Ils n'ont aucune certitude ; Mahomet, les papistes, les sacramentaires ne s'appuient pas sur la parole de Dieu, mais sur leur foi personnelle „ ». Tous les sectaires raisonnent de cette façon.

[FN: § 1242-2]

STURT; Voyage dans l'intérieur de l'Australie méridionale, dans Biblioth. univ. des voy., t. 43 : « (p. 299) Il n'y a que les vieillards qui jouissent du privilège (p. 300) de manger de l'ému, et les jeunes sont tellement soumis à cette interdiction que si, par suite d'une faim impérieuse, ou dans d'autres circonstances pressantes, un d'eux l'enfreint pendant son éloignement de la tribu, il y revient avec la conscience du crime, et le révèle par sa contenance, s'asseyant à part, et avouant au chef, dès la première occasion, la faute en expiation de laquelle il est obligé de subir une légère punition ».

[FN: § 1246-1]

D. AUG. De mor. eccl. cath. et de moribus Manich., 1, 34, 76 : Sed quicumque illorum bona voluntate Deique auxilio corriguntur, quod amiserant peccando, paenitendo recuperant.

[FN: § 1246-2]

OLDENBERG ; La relig. du Veda : « (270) D'une part... le péché est une transgression de la volonté des dieux, qui a provoqué leur colère : l'expiation dans cet ordre (p. 271) d'idées, s'adresse à eux, s'efforce de les satisfaire et de les apaiser ; le suppliant leur apporte ses dons, s'humilie devant eux. Mais, d'autre part, le péché est une sorte de fluide qui adhère au pécheur, à la façon d'une substance morbide : dès lors le culte expiatoire comporte des opérations magiques, propres à dissoudre ce fluide, à le détruire ou à le reléguer à une distance où il cesse d'être nocif, de telle sorte que le coupable redevienne libre et pur, „ comme l'homme couvert de sueur se défait de ses souillures en se baignant, comme l'oiseau ailé se dégage de son œuf...“ Ce dernier point de vue lui-même n'est pas entièrement inconciliable avec une action divine : il se peut que l'évacuation de la matière peccante soit conçue, non comme l'effet direct du charme, mais comme due à l'art et à la puissance du dieu dont on a imploré l'assistance ». Les faits sont bien décrits, et de légères modifications suffisent pour enlever le vernis habituel des actions logiques.

[FN: § 1246-3]

DUBOIS ; Mœurs... des peuples de l'Inde, t. II: « (p. 257) Comme ces solitaires [les vanaprasta], confondant les souillures de l'âme avec celles du corps, étaient persuadés que l'une communiquait les siennes à l'autre, et réciproquement, ils croyaient que les bains, en lavant le corps, avaient aussi la vertu de purifier l’âme, surtout lorsqu'ils étaient pris dans les eaux du Gange ou autres eaux réputées sacrées. Le feu complétait la purification ; et c'est pour cela qu'on brûlait le corps de ces pénitents, lorsqu'ils avaient cessé de vivre ».

[FN: § 1246-4]

D'abord, nous avons les eaux des fontaines, des fleuves, de la mer. Philon le Juif a écrit tout un livre pour expliquer quelles victimes on pouvait offrir suivant le rite judaïque, qui, pour lui, est un rite rationnel, et qui, à la vérité, concorde en beaucoup de points avec ceux des Gentils. – PHIL. IUD. ; De victimas offerentibus seu de sacrificantibus : « (p. 251 M, p. 848 P, § 1) La victime doit être irréprochable, absolument exempte de blâme, de qualité choisie, approuvée par le jugement incorruptible des prêtres et par leur regard sagace [ce sont aussi des règles pour les Gentils]. Cette règle n'est pas dépourvue de sens, mais conforme à l'intelligence et à la raison. Cependant on ne s'occupe pas seulement des victimes, mais aussi des sacrificateurs, afin qu'il [le sacrifice] ne soit vicié par aucun accident. Vraiment, comme je l'ai dit, on purifie le corps par des lavages et des aspersions, et l'on ne permet pas que celui qui s'est aspergé ou lavé une seule fois dépasse l'enceinte du temple : il est ordonné qu'il reste sept jours en dehors... (p. 252 M, § 2). Presque tous s'aspergent avec l'eau pure ; beaucoup avec de l'eau de mer ; quelques-uns avec de l'eau de fleuve ; d'autres avec de l'eau de fontaine, puisée dans des vases ». Chez les Gentils aussi, on pratiquait de semblables aspersions. POLL.; I, 1, 8. – HESYCH., s. r. . – D. EPIPH.; Ad haer., 1. I, t. II, haer. 30, p. 126. Il dit que les Ebionites sont semblables aux Juifs samaritains qui, «s'ils ont eu contact avec un étranger, et chaque fois qu'ils ont eu des rapports avec une femme et la quittent, se baptisent [se lavent] avec l'eau de mer ou d'une autre qualité, suivant la quantité qu'ils en ont. Mais ensuite si, après s'être plongés dans l'eau et baptisés [lavés], ils rencontrent quelque chose qui porte malheur, aussitôt ils retournent se baptiser à nouveau [se laver], souvent avec leurs vêtements ». – PLUTARCH, De solert. anim., XX, 4, dit des prêtres égyptiens : « Ils emploient, pour se purifier, de l'eau que boit l'Ibis, car il n'use jamais d'eau infecte ou autrement malsaine ». Les Romains se servaient beaucoup de l'eau des fleuves. VIRG. ; Aen., II, 719 : donec me flumine vivo abluero. SERVIUS note : Flumine vivo] Perenni... Est autem augurale verbum. – IV, 635: Dic corpus properet fluviali spargere lympha. SERVIUS note : Spargere lympha] Sacrificantes diis inferis aspergebantur aqua, ut VI, 230 : Spargens rore levi, et ramo felicis olivae : superis, abluebantur, ut II, 719. Donec me flumine vivo abluero. Modo autem inferis sacrificat, ut : Sacra Iovi Stygio. – VI, 635 : Occupat Aeneas aditum, corpusque recenti Spargit aqua. SERVIUS : Recenti] Semper fluenti... Spargit aqua] Purgat se, nam inquinatus fuerat, vel aspectu Tartari : vel auditu sceleram atque poenarum : et Spargit, quia se Inferis purgat. – OVID., Fast., IV, 778 : et in vivo perlue rore manus. Fast., V : (431) Ille memor veteris ritus. (435) Terque manus puras fontana perluit unda. « Celui qui observe les rites anciens... se purifie les mains trois fois dans l'eau pure et jaillissante ». – PROP., III, 10, dit à sa maîtresse : (12) Surge et poscentes iusta precare deos. || Ac primum pura somnum tibi discute lympha.... III, 3, 51 : Calliope asperge le poète avec de l'eau puisée à une fontaine. – TIBULLE, II, 1, parle de la lustration des camps, suivant l'ancien rite transmis par les ancêtres : « (11-14) Je vous ordonne aussi de vous en aller ; éloignez-vous des autels, vous qui, la nuit passée, avez joui des plaisirs de Vénus ; les gens chastes plaisent aux divinités d'en haut ; venez avec des vêtements propres, et plongez des mains pures dans l'eau des fontaines ». – APOLL. ; Argonaut., III, 1030 : Médée recommande à Jason de « se laver dans le courant d'un fleuve ». Les Grecs employaient aussi l'eau de mer. – ARISTOPH.; Plut., 656-657. Carios conduit Plutus à la mer, pour le purifier. Le scoliaste note : « Les anciens avaient coutume d'y [dans la mer] laver ceux qui devaient être purifiés... » – PAUSANIAS, IX, 20, dit que les femmes de Tanagre, Célébrant les mystères de Dionysos, se baignent dans la mer. – Quelquefois on ajoutait du sel à l'eau pure. Pour composer l'eau lustrale, on y éteignait des flambeaux. Scholia in Pacem, 959 : ... . (928)… « car le feu est apte à tout purifier, comme Euripide dans Héraclès, 928... ». – Outre le feu, on employait le soufre, le bitume, etc. – OVID. ; Metam. VII, 261 Terque senem flamma, ter aqua, ter sulfure lustrat. – Theocr., XXIV, 94-98 « Mais purifiez d'abord la maison par le feu, par le soufre pur : ensuite, mêlant l'eau de sel, selon l'usage, aspergez d'eau pure avec un rameau vert. Ensuite, sacrifiez à Zeus très haut un porc mâle ». Cfr. Odyss., XXII, 481-482 ; XXIII, 50. L'usage de la cendre mêlée à l'eau était aussi très répandu (1266). Le culte, si connu, des fontaines et des fleuves, peut avoir été en rapport avec la vertu purificatrice attribuée à leurs eaux, Il est remarquable qu'à une époque récente, comme celle de Néron, on croyait que les dieux punissaient celui qui manquait de respect aux fontaines. TACITE rapporte, Ann., XIV, 22, que Néron se baigna dans la fontaine Marcia, ce qui fut considéré comme une profanation, « et une maladie [qui frappa Néron] confirma la colère des dieux ».

[FN: § 1246-5]

SPENCERI de legibus hebraeorum ritualibus, t. II, lib. III, sec. II, (p. 783) Quod olim opinio illa passim obtinuerit, Diluvium. nempe magnum Mundi fuisse ; a Deo missum ut terram ipsam lustraret, et labem ab impuris incolarum moribus haustam elueret et expiaret. Haec enim opinio veterum Iudaeoram, Philosophorum, et Christianorum quorundam, animis inhaerebat. Hanc opinionem inter antiquos Iudaeos fautores invenisse, coniicere licet e Philonis verbis (quod deterior potior. insid. p. 186 A, Par.)... Quando igitur aqua terram purgare statuit SUMMUS opifex, etc. Eadem fide Christianos imbutos testatur Origenes (Contra Cels., 1. 4, p. 173), cum ait... Nescio autem cur Diluvio, quo terram purgatam Iudaei pariter et Christiani asserunt, Celsus putet turris deiectionem similem esse. Ea sententia Philosophos etiam fuisse, idem Origenes (ibidem, p. 316) testatum reddidit : ... Interitus autem hominum per diluvium terrae lustratio est; quemadmodum etiam tradunt Graecorum non contemnendi philosophi, his verbis : ...Quando vero Dii, terram (p. 784) aquis purgantes, inducunt diluvium [PLAT. ; Timae, p. 22].

[FN: § 1247-1]

D'une façon générale, on peut dire qu'il y a une classe étendue d'actions humaines non-logiques, qui ont rapport avec la propreté, semblables à celles des animaux, par exemple des pigeons qui se lavent tous les jours, du chat qui nettoie son pelage. Ces actions humaines ont revêtu parfois une forme fétichiste, comme il arrive d'habitude pour un grand nombre d'autres actions logiques. S'en rapprochent d'autres actions analogues dans la forme et dans l'apparence, ou provenant de dérivations diverses, et qui n'ont rien à voir avec la propreté. Les gens civilisés modernes ont l'habitude de se laver le matin ; c'est un simple acte de propreté. Chez les anciens, cet acte prend un caractère religieux. VIRG. ; Aen., VIII, 67-70. Énée s'éveille et prend de l'eau du fleuve dans le creux de ses mains (69)... Undam de flumine palmis || Sustulit. SERVIUS : Quia dicitur nox etiam solo somno polluere : unde est Et noctem flumine purgat [PERS. ; Sat., II, 16, mais il y a purgas, au lieu de purgat]. Or voici qu'à cette conception s'en ajoute une autre, où la propreté n'a plus aucune part, IV :

(6) Postera Phœbea lustrabat lampade terras.

SERVIUS : Lustrabat] ... id est purgabat : nam nox quodammodo polluit mundum. – Les Israélites croyaient que la nuit souillait l'eau dans les vases, SURHENHUSIUS ; Legum mischnicarum, t. II. Note de SHERINGAMIUS : (p. 224) Tradunt siquidem Hebraei aquam in vase sacro nocte pollui : ideoque machinam labro, quia vas sacrum erat, fecerunt, ne in ipso aquae pernoctarent. Maimonides in Hilcoth Beth Habbechira... Fecerunt ei machinam, in qua aquae iugiter inessent, et ea prophana erat, ne aquae eius nocte polluerentur ; quia labrum vas sacrum erat et sanctificabat, quicquid autem sanctificatur in vase sacro, si pernoctat polluitur. Manus quoque nocte pollui traditur in Gemara Sevachim, fol. 19... Et propterea aiunt Talmudici, quod licet Sacerdotes manus et pedes abluissent cum templo exissent, iisdem tamen postridie cum redissent opus erat lotione, tametsi insomnes fuissent... quia manus nocte polluuntur. L'auteur croit que les Israélites prirent cette superstition aux Gentils mais c'est l'erreur habituelle de vouloir considérer comme des imitations les productions d'un même sentiment (§ 733 et sv.) Les Israélites et les Gentils avaient d'autres genres d'impuretés qu'on peut, du moins en partie, mettre en rapport avec la propreté. L'impureté de la lèpre, chez les Israélites, peut être considérée comme semblable à celle des maladies contagieuses, chez les modernes. L'impureté contractée en touchant des corps morts peut, en partie, faire éviter le péril d'empoisonnement par les toxines, ou être une mesure de propreté ; mais en outre, elle a des fioritures absolument fantaisistes. L'impureté des accouchées peut aussi passer pour une mesure de propreté. Mais ensuite, quand la Bible (Lévit., 12, 2) assigne sept jours d'impureté à la femme, si elle a mis au monde un enfant mâle, et quatorze jours (ibid., 12, 5) si elle est accouchée d'une fille, tout motif rationnel de propreté pour expliquer cette différence disparaît. Suivent d'autres impuretés que nous nommerons en latin. Immundities menstruatae – concubitus coniugalis – somni, seminis fluxum procurantis – ex alvo aut vesica levata.

[FN: § 1249-1]

MARC. ; VII, 15 :

permet pas l'absolution d'un péché futur [FN: § 1252 note 3] ; mais elle rencontre des difficultés dans l'instinct qui pousse les croyants à attribuer de l'efficacité aux actes matériels du culte, indépendamment de l'élément moral.

[FN: § 1250-1]

DIOG. LAERT. ; VI, c. 2, 30. – PLUTARCH., De aud. poet., 4, rapporte le même fait avec une variante. Après avoir cité les vers de Sophocle : « Trois fois heureux, quand ils viendront dans l'Hadès, ces hommes auxquels il fut donné d'être initiés ; car, eux seulement vivront ; les autres souffriront toutes sortes de maux », il dit que Diogène observait à ce propos : « Que dis-tu ? Après sa mort et parce qu'il est initié, le brigand Patécion aura donc un sort meilleur qu'Épaminondas ? » – DIOG. LAERT., VI, c. 2, 42, raconte que Diogène, « voyant quelqu'un qui se purifiait avec de l'eau, dit : Malheureux ! Ne sais-tu pas que, comme tu ne pourrais effacer par la purification de l'eau les erreurs de grammaire, de même [tu ne pourrais effacer] non plus celles de la vie ? » – EURIPIDE, qui sentait le contraste existant entre l'ancienne religion formaliste et les nouvelles conceptions rationalistes, fait dire à Iphigénie parlant d'Artémis, dans le drame d'Iphigénie en Tauride : « (380-386) Je blâme les prescriptions artificieuses de la déesse, elle qui repousse de l'autel comme impur un mortel, s'il est souillé par un homicide ou même par un enfantement, ou si ses mains ont touché un cadavre, tandis qu'elle se réjouit de sacrifices humains. D'aucune façon, Latone, épouse de Zeus, ne peut avoir enfanté une si grande absurdité ». En effet, c'est absurde au point de vue logique; mais ce sentiment est postérieur à celui qui, sans raisonner, mettait ensemble des actions non-logiques, comme de simples fétichismes.

[FN: § 1252-1]

DE RIENZI ; Océanie, t. III. Dans l'île Tonga, « (p. 53) toute personne qui touche un chef supérieur devient tabouée, mais cette interdiction n'a pas de suites fâcheuses si elle a recours au moë-moë ». Elle doit le faire « (p. 53) avant de pouvoir se servir de ses mains pour (54) manger. Cette cérémonie consiste à appliquer d'abord la paume et ensuite le dos de la main à la plante des pieds d'un chef supérieur, et à se laver ensuite les mains dans de l'eau, ou à se les frotter avec des feuilles de bananier ou de plantain ; on peut alors manger en toute sûreté. Celui qui a eu le malheur de se servir de mains tabouées est obligé d'aller s'asseoir devant un chef, de prendre son pied et de se l'appliquer contre l'estomac pour que les aliments qu'il a pris ne lui fassent aucun mal, autrement son corps s'enflerait et il s'ensuivrait une mort certaine. On se taboue aussi en mangeant en présence d'un parent supérieur, à moins qu'on ne lui tourne le dos, et en prenant des aliments qu'un chef aura maniés. Si l'on est taboué pour avoir touché le corps où le vêtement du touï-tonga, lui seul peut en remettre la peine, parce qu'il n'existe pas de chef aussi grand que lui. Il a pour cet effet, à sa porte, un plat d'étain qui lui a été donné par le capitaine Cook, et qu'il suffit de toucher pour s'ôter le tabou ». Ici, l'on voit bien l'adjonction des résidus des combinaisons. Ce plat d'étain est arrivé aux îles Tonga, alors que le tabou existait depuis longtemps ; il ne peut donc avoir eu, à l'origine, aucun rapport avec ce tabou ; et c'est seulement parce que c'était une chose étrange et précieuse (§ 922) qu'il a eu part aux cérémonies du tabou. Notez que le vol aussi est considéré comme une transgression du tabou. « (p. 53) Si un homme commet un vol, on dit qu'il a rompu le tabou ; et comme on croit que les requins attaquent les voleurs de préférence aux honnêtes gens, on fait baigner les individus suspects dans un endroit fréquenté par ces animaux, et tous ceux qu'ils mordent ou dévorent sont réputés coupables ». Pour ces indigènes, on transgresse le tabou en mangeant certains aliments et en volant. Il faut y remédier par certains actes. Pour les catholiques, c'est un péché que de manger certains aliments, certains jours, et de voler. Il faut y remédier par certains actes. L'indigène des îles Tonga va chez l'un de ses chefs, le catholique chez un prêtre. Pour le premier, il y a des cas réservés au chef suprême; pour le second, il en est de réservés au pape.

[FN: § 1252-2]

OVID.; Fast., V :

(681) Ablue praeteriti periuria temporis, inquit.
Ablue praeterita perfida verba die. Sive ego te feci testem, faisove citavi
Non audituri numina magna Iovis
Sive Deum prudens alium Divamve fefelli ;
Abstulerint celeres improba dicta Noti.
Et pereant veaiente die periuria nobis :
Nec eurent Superi, si qua locutus ero.

[FN: § 1252-3]

Inferno, XXVII :

(118) Ch'assolver non si può chi non si pente,
Nè pentére e volere insieme puossi
Per la contradizion che nol consente.
(118) Sans repentir nus n'est assous dès or;
Voloir ensemble pecher et se pentir
Se contredit, au dam du pecheor.

(Trad. LITTRÉ.

[FN: § 1254-1] À la lettre : «le petit d'une truie dont les mamelles saillent encore du ventre qui a mis bas ». À propos de cette victime, le scoliaste note : « dit [l'auteur] „ ce qui purifie “. C'est un petit cochon. Ceux qui sacrifient pour purifier mouillent du sang de ce porc les mains de la personne qui se fait purifier ».

[FN: § 1255-1]

APOLL.; III, 13. 2. Pélée, purifié par Eurytion et croyant décocher une flèche au sanglier de Calidon, frappe Eurytion par mégarde et le tue. Il est purifié par Acaste. – DIOD. SIC. ; IV, 72. Dans un jeu, Pélée tue par mégarde un frère consanguin, puis est purifié par Actor.

[FN: § 1255-2]

PLUTARCH. ; Thes., 11, 4. . C'est ainsi que Thésée poursuivait, châtiant les méchants... » Continuant son chemin, il parvient près du Céphyse (12, 1), où il arrive chez les Phytalides, qui le saluent ; et il les prie de le purifier, ce qu'ils font avec les rites en usage.

[FN: § 1255-3]

PLUTARCH.; Quaest. graec., 12. On commémorait, à Delphes, le meurtre du serpent et la purification d'Apollon, conséquence du meurtre. Idem; De defect. orac., 15 : « Car il est absolument ridicule, mes amis, qu'après avoir tue la bête féroce, Apollon se soit enfui aux confins de Grèce, ayant besoin de purifications... »

[FN: § 1255-4]

SOPH. ; Ajax, 654-655.

[FN: § 1255-5]

ARRIAN.; De venat., 32, 3 : « Après une chasse fructueuse, on doit aussi sacrifier et offrir les prémices du gibier à la déesse, pour purifier les chiens et les chasseurs, suivant l'usage de la patrie ».

[FN: § 1255-6]

PAUS.; V, Eliac., 1, 27.

[FN: § 1256-1]

PAUS ; III, 17.

[FN: § 1257-1]

DIOG. LAERT. ; VIII, 43. – CLEMENT. ALEX. ; Strom., IV, p. 619 éd. Potter. –STOBAEUS ; Flor., LXXIV, 55. – THEODORIT.; Serm., XII.

[FN: § 1258-1]

HOVELACQUE ; Les nègres : « (p. 311) Durant la période du flux menstruel les femmes vivent généralement à part, parfois – comme en quelques contrées de la Côte de l'Or – dans des huttes destinées à cette relégation ». L'auteur cite BOSMAN, t. II, p. 371, qui dit : « On tient ici (à la Côte des Esclaves) les femmes qui ont leurs ordinaires pour si souillées, qu'elles n'oseraient pendant ce temps-là entrer dans la maison du roi ni de quelque grand, et on punit de mort, ou du moins par un esclavage éternel, celles qui contreviennent à ces ordres ». Et ailleurs encore : « Les femmes qui ont leurs ordinaires sont tenues pour si souillées, qu'il ne leur est pas permis d'entrer dans la maison de leur mari, ni de toucher la moindre chose, soit pour préparer à manger, soit pour nettoyer la maison (ibid., p. 475) ». LAFITAU ; Mœurs des sauvages, t. I : « (p. 262) Elles [les séparations des femmes et des filles, au temps de leurs ordinaires et de leurs purifications] sont très rigoureuses en Amérique, où on leur fait [aux femmes] des Cabanes à part, comme à ceux qui étaient attaqués de la lèpre parmi les Juifs. Elles passent alors pour être si immondes, qu'elles n'osent toucher à rien qui soit d'usage. La première fois que cela leur arrive, elles sont trente jours séparées du reste du peuple, et chaque fois on éteint le feu de la Cabane d'où elles sortent ; on en emporte les cendres, qu'on jette hors du Village, et on allume un feu nouveau, comme si le premier avait été souillé par leur présence. Chez les Peuples, qui (p. 268) habitent les bords de la Rivière de la Plata, on les coud dans leur Hamach, comme si elles étaient mortes, sans y laisser qu'une petite ouverture à la bouche pour ne pas leur ôter l'usage de la respiration. Elles restent dans cet état tandis que cela dure : après quoi elles entrent dans les épreuves par où doivent passer toutes celles qui ont atteint l'âge de puberté,... Chez les Gaures (TAVERNIER, Voyage de Perse, liv. 4, chap. 8) „ dès que les femmes ou filles sentent qu'elles ont leurs ordinaires, elles sortent promptement de leur logis, et vont demeurer seules à la campagne dans une petite hutte, faite de clayes avec une toile pendue au-devant, et qui sert de porte. Pendant le temps que cela dure, on leur porte tous les jours à boire, et à manger ; et quand elles en sont quittes, chacune, selon ses moyens, envoie au Prêtre un Chevreau, ou une Poule, ou un Pigeon pour offrande ; après quoi elles vont aux bains... “ ».

[FN: § 1258-2]

Levit., 15, 2. Vir, qui patitur fluxum seminis, immundus erit... (16) Vir de quo egreditur semen coitus, lavabit aqua omne corpus suum; et immundus erit usque ad vesperum... (18) Mulier, cum qua coierit, lavabitur aqua, et immunda erit usque ad vesperum. (19) Mulier, quae redeunte mense patitur fluxum sanguinis, septem diebus separabitur. (20) Omnis qui tetigerit eam, immundus erit usque ad vesperum... (23) Omne vas, super quo illa sederit, quisquis attigerit, lavabit vestimenta sua; et ipse lotus aqua, pollutus erit usque ad vesperum. (24) Si coierit cum ea vir tempore sanguinis menstrualis, immundus erit septem diebus, et omne stratum, in quo dormierit, polluetur. On a l'habitude de dire que ce sont des mesures de propreté ; mais si c'était le cas, l'impureté devrait cesser lorsqu'on a exécuté le lavage prescrit, tandis qu'au contraire, elle continue à exister (§ 1247-1).

[FN: § 1259-1]

POLLUC. ; VIII, 7, 65-66. –- HESYCH. ; s. r. . – SUID. ; s. r. . – EUSTATET. ; Ad. Il., VIII, v. 187.

[FN: § 1259-2]

VIRG. . Aen., VI. Enea,

(229) Idem ter socios pura circumtulit unda,
Spargens rore levi et ramo felicis olivae.

SERV. ; Ter sociosi] Aut saepius, aut re vera ter : licet enim a funere contraxerint pollutionem, tamen omnis purgatio ad superos pertinet : unde et ait imparem numerum : aut quia hoc ratio exigit lustrationis, Circumtulit] Purgavit. Antiquum verbum est. Plautus in fragm. Pro larvato te circumferam, id est, purgabo: nam lustratio a circumlatione dicta est vel taedae, vel victimae in quibusdam, vel sulphuris.

[FN: § 1260-1]

THEOPHR.; Charact., XVI. J'ai écrit d'une façon générale : s'il fait une rencontre réputée mauvaise, pour ne pas entrer dans la discussion suscitée par cette partie très altérée du texte. Coray veut qu'il s'agisse là du mauvais œil. – PLUTARCH. ; De superst., 3. Le superstitieux qui a fait un mauvais rêve va chez des charlatans qui lui disent : « Appelle la vieille qui purifie; baptise-toi toi-même dans la mer, et passe la journée, assis sur la terre » – – APUL. ; Métamorph., raconte une purification, XI. Iamque tempore, ut aiebat sacerdos, id postulante, stipatum me religiosa cohorte deducit ad proximas balneas : et prius sueto lavacro traditum, praefatus deum veniam, purissime circumrorans abluit…

[FN: § 1260-2]

PROP. ; IV, 8, 83-86 : « ... elle soumet à des fumigations tous les endroits que les filles avaient touchés, et lave le seuil de la porte avec de l'eau pure. Elle m'ordonne de changer entièrement de vêtements, et fait trois fois le tour de ma tête avec la flamme du soufre ». – Tibulle dit avoir fait les lustrations à sa maîtresse qui était infirme, portant trois fois le soufre autour d'elle. – TIBULL. ; I, 5

(11) Ipseque ter ciroum lustravi sulfure puro.

Le « soufre pur », , des Grecs, est le soufre qui purifie.

[FN: § 1260-3] IUVEN. ; VI :

(522) Hibernum fracta glacie descendet in amnem,
Ter matutino Tiberi mergetur et ipsis
Vorticibus timiduin caput abluet ;....

[FN: § 1261-1]

LOISELEUR DESLONGCHAMPS ; Lois de Manou, V : « (74) Telle est la règle de l'impureté causée par la mort d'un parent, lorsqu'on se trouve sur le lieu même ; mais en cas d'éloignement, voici quelle est la règle que doivent suivre les sapindas et les samânodakas. (75) Celui qui apprend, avant l'expiration des dix jours d'impureté, qu'un de ses parents est mort dans un pays éloigné, est impur pendant le reste des dix jours. (76) Mais si le dixième jour est passé, il est impur pendant trois nuits ; et s'il s'est écoulé une année, il se purifie en se baignant. (77) Si, lorsque les dix jours sont expirés, un homme apprend la mort d'un parent ou la naissance d'un enfant mâle, il devient pur en se plongeant dans l'eau avec ses vêtements ». Ce ne sont pas seulement des prescriptions théoriques ; elles sont mises aussi en pratique. – DUBOIS ; Mœurs... des peuples de l'Inde, t. I : « (p. 244) ...les Indiens se regardent comme souillés pour avoir simplement assisté à des funérailles ; ils vont se plonger dans l'eau immédiatement après la cérémonie funèbre, et personne n'oserait rentrer chez soi avant de s'être ainsi purifié. La seule nouvelle du décès d'un parent, fût-il mort à cent lieues de là, produit les mêmes effets, et oblige à la même purification tous les membres de sa famille qui en sont informés. Toutefois la souillure n'atteint point les amis et les simples connaissances du défunt ».

[FN: § 1262-1]

FARJENEL ; La morale chinoise : « (p. 243) ... la personnalité des individus [dans le droit chinois] y disparaît dans la puissance paternelle du chef de famille, du magistrat et du prince qui sont en théorie les frères aînés et le père de tous les sujets. Le terrible principe de la solidarité pénale était une (p. 244) preuve manifeste de cette notion, pour nous étrange, de la personnalité humaine. Certains grands crimes ne pouvaient être vengés que par la décapitation de tous les ascendants et descendants du coupable, bien que ceux-ci fussent ignorants du crime perpétré ou seulement préparé, parce que l'esprit de la loi chinoise est que la famille seule, considérée in globo, est le véritable individu. Jusqu'au 25 avril 1905, cette prescription a figuré dans les lois ».

[FN: § 1263-1]

LOISELEUR DESLONGCHAMPS; Lois de Manou, IX : « (45) Celui-là seul est un homme parfait qui se compose de trois personnes réunies, savoir : sa femme, lui-même et son fils ; et les Brahmanes ont déclaré cette maxime : „ Le mari ne fait qu'une même personne avec son épouse “. (48) Le propriétaire du mâle qui a engendré avec des vaches, des juments, des chameaux femelles, des filles esclaves, des buffles femelles, des chèvres et des brebis, n'a aucun droit sur la progéniture ; la même chose a lieu pour les femmes des autres hommes. (58) Le frère aîné qui connaît charnellement la femme de son jeune frère, et le jeune frère la femme de son aîné, sont dégradés, bien qu'ils y aient été invités par le mari ou par les parents, à moins que le mariage ne soit stérile. (59) Lorsqu'on n'a pas d'enfants, la progéniture que l'on désire peut être obtenue par l'union de l'épouse, convenablement autorisée, avec un frère ou un autre parent (sapinda). (60) Arrosé de beurre liquide et gardant le silence, que le parent chargé de cet office, en s'approchant, pendant la nuit, d'une veuve ou d'une femme sans enfants, engendre un seul fils, mais jamais un second. (61) Quelques-uns de ceux qui connaissent à fond cette question, se fondant sur ce que le but de cette disposition peut n'être pas parfaitement atteint par la naissance d'un seul enfant, sont d'avis que les femmes peuvent légalement engendrer de cette manière un second fils. (127) Celui qui n'a point d'enfant mâle peut charger sa fille, de la manière suivante, de lui élever un fils, en se disant : “ que l'enfant mâle qu'elle mettra au monde devienne le mien et accomplisse en mon honneur la cérémonie funèbre ”. (128) C'est de cette manière qu'autrefois le Pradjâpati Dakcha lui-même destina ses cinquante filles à lui donner des fils, pour l'accroissement de sa race ». Aussi a-t-on encore la prescription suivante, III « (11) Un homme de sens ne doit pas épouser une fille qui n'a pas de frère, ou dont le père n'est pas connu ; dans la crainte, pour le premier cas, qu'elle ne lui soit accordée par le père que dans l'intention d'adopter le fils qu'elle pourrait avoir, ou, pour le second cas, de contracter un mariage illicite ». Cfr. IX, 136.

[FN: § 1264-1] SURENHUSIUS ; Legum Mischnicarum liber qui inscribitur ordo puritatum, t. VI. Praefatio . (C 2) Caeterum immundities mortui novem continet immunditiei patres, et ipsius caro in copia olivae polluit immunditie mortui, ita quoque olivae copia de carne ipsius avulsa, et copia cochlearis de putredine, et tantundem de ossibus et sanguine ipsius; totum vero mortui cadaver est... avus immunditiei.

[FN: § 1264-2]

SURENHUSIUS, loc.. cit. : (D) Omnes vero patres immunditiei ex lege, sunt triginta duo, videlicet, reptile, cadaver animantis, cadaver humanum, homo cadaver humano pollutus, vasa quae hominem cadavere humano pollutum tetigerunt, vasa quae cadavere humano polluta surit, vasa quae tetigerunt alia vasa quae cadavere humano polluta sunt, tentorium, sepulchrum, eiectio seminis aqua expiatoria, vacca rufa, iuvenci, et hirci qui comburendi erant, hircus emissarius, vir gonorrhoea affectus, et foemina gonorrhoea affecta, menstruosa, puerpera, equitatio et sessio utriusque sexus, qui cum menstruosa corpus miscuit, sanguis foeminae immundae, saliva eius, urina, profluvium seminis, eiectio seminis illius, leprosus in diebus numerationis suae, leprosus in diebus leprae ipsius indabitate, vestis lepra affecta, et denique domiciliura lepra affectum ; hi inquam vocantur... patres immunditiei ex lege.

[FN: § 1264-3]

Levit., XI, 29-82.(Edit. Tischendorf):

(Vulgata) ; Haec quoque inter polluta reputabantur de his quae moventur in terra : mustella et mus et crocodilus, singula iuxta genus suum, mygale et chamaeleon, et stellio, et lacerta, et talpa. – SURENHUSIUS, loc. cit. : (C 2) Per ...reptilia, intelligenda sunt octo in lege memorata reptilium. genera, cuiusmodi sunt mustela, mus, testudo, attelabus, lacerta stellio, limax, et talpa. Sanguis vero reptilium, et ipsorum caro atque adeps eundem tenent immunditiei gradum. Quatuor reptiliurn pellis carni similis est ratione immunditiei, videlicet attelabi lacertae, stellionis atque limacis; ossa vero reptilib us adempta non poluunt. Caetera vero reptilia et abominabilia, scilicet rana, rubeta, vipera, serpens, atque id genus alia nun pollunt. (Trad. SEGOND) : « ... la taupe, la souris et le lézard, selon leurs espèces le hérisson, la grenouille, la tortue, le limaçon et le caméléon ». (Trad. CRAMPON) « ...la belette, la souris et toute espèce de lézards; la musaraigne, le caméléon, la salamandre, le lézard vert et la taupe ».

[FN: § 1264-4]

SURENHUSIUS ; loc. cit. : (D 2) Iam vero si omnes immunditiei patres ex institutis Sapientum recenseamus, comperiemus eos esse viginti novem, cuiusmodi sunt os cadaveris in copia grani hordeacei, sanguis conculcationis, terra gentilium, ager in quo cadaverum ossa latent, tentorium quod supra sanguine conculcationis exstructum est, homo qui hisce pollutus est, vasa quae haec tetigerunt, vel hisce polluta sunt, homo qui vasa tetigit, vasa quae hominem tetigerunt, vasa quae tetigerunt alia vasa hisce polluta, gentilis, foemina praepostere menstrualis, foemina quae maculam sanguinis praepostere vidit, foemina quae in accessu menstruali se non visitavit praepostere, puerpera quae aliquod foetus membrum peperit, ipsius accubitus, equitatio, saliva, urina, et immunditiei sanguis ; porro quoque vir qui cum foemina immunda rem habuit quae gonorrhoea laborabat, gentilis, idolatra, cultus idolatricus, quod a gentili mactatum est, et tandem cadaver avis mundae.

[FN: § 1264-5]

SURENHUSIUS ; loc. cit., § 1264 (E).

[FN: § 1266-1]

ARISTOPH. ; Ecclesiaz., 128.

[FN: § 1266-2]

Nombr., 19, 19-22. « Celui qui est pur fera l'aspersion sur celui qui est impur (immonde), le troisième ou le septième jour, et le purifiera le septième jour. Il lavera ses vêtements et se lavera dans l'eau ; le soir venu, il sera pur. Un homme qui est immonde et ne se purifiera pas sera retranché du peuple, parce qu'il a souillé le sanctuaire de l'Éternel; puisque l'eau de purification n'a pas été répandue sur lui, il est immonde. Ce sera pour eux [pour les Israélites] une loi perpétuelle. Celui qui fera l'aspersion de l'eau de purification lavera ses vêtements, et celui qui touchera l'eau de purification sera immonde jusqu'au soir. Tout ce qui touchera celui qui est immonde sera souillé, et la personne qui le touchera sera immonde jusqu'au soir ».

[FN: § 1266-3]

OVID. ; Fast., IV

(639) Igne cremat vitulos, quae natu maxima,Virgo ;
Luce Palis populos purget ut ille cinis.

[FN: § 1266-4]

FEST ; in PAUL. DIAC., s. r. October. October equus appellabatur, qui in campo Martio mense Octobri Marti immolabatur. De cuius capite magna erat contentio inter Suburanenses et Sacravienses, ut hi in regiae pariete, illi ad turrem Mamiliam id figerent. Coins cauda, ut ex ea sanguis in focum distillaret, magna celeritate perferebatur in regiam.

[FN: § 1266-5]

OVID. ; Fast., IV :

(728) Certe ego transilui positas ter in ordine flammas ;
Virgaque roratas laurea misit aquas
.........................................................
(731) I, pete virginea, populus, suffimen ab ara;
Vesta dabit : Vestae munere purus eris.
Sanguis equi suffimen erit, vitulique favilla ;
Tertia res, durae culmen inane fabae.
.........................................................
(739) Caerulei fiant vivo de sulphure fumi
(781) Moxque per ardentes stipulas crepitantis acervos
Traiicias celeri strenua membra pede.

[FN: § 1266-6]

Dict. encycl. de la théol. cath., s. r. Cendres (mercredi des) « (p. 159) La cendre qu'on répand sur la tête des fidèles est tirée de l'incinération des palmes de l'année précédente et elle est bénite, immédiatement avant la Messe du Mercredi des Cendres, d'après un rite particulier ».

[FN: § 1267-1]

Legum Mischnicarum... pars VI. Tract. de Vasis. C. 1, 2, (p. 16) commentaire de Bartenora. Voir aussi ce qui suit : C. 1, 1 : (p. 15) Patres impuritatum sunt reptile, semen concubitus, mortuo pollutus et leprosus in diebus numerationis ipsius, et aquae expiatoriae, in quibus non est quantum sufficit ad spargendum, haec omnia polluunt hominem et vasa tactu, et vasa testacea aëre, sed non onere. – Comm. de BART. : Et semen concubitus, duntaxat semen concubitus Israëlitae, et adulti viri, sed gentilis semen concubitus non polluit [on trouvera des distinctions analogues aux § 1278 et sv.], ne quidem ex institutis Sapientium, nam semen gentilis purum est omnino; nec adolescentuli semen concubitus polluit.., Sed vasa testacea, cibi et potus, quae tetigerint mortuum, non fiunt immunditiei patres. Sed Israëlita duntaxat fit immunditiei pater quando is mortuum tetigerit ; gentilis vero et abortus qui excidit post octo dies non recipiunt immunditiem, si tetigerint mortuum... Et aquae expiatoriae in quibus non est quantum sufficit ad spargendum, tum istae polluunt tactu, at si in illis fuerit quantum sufficit ad sparsionem, etiam onere polluunt, ad hominem et vasa polluenda, uti scriptum est Num., 19, 21. Doctores vero nostri docent purum esse, eum qui sparsit ; Legem duntaxat mensuram velle stattiere ei qui portat, nempe ut sit quantitas aquae sufficiens ad spargendum. Etenim Lex dividit inter aquas et aquas, scilicet inter aquas in quibus est quantum sufficit ad (p. 16) spargendum, quae polluunt hominem ad polluondum vestes, et inter aquas in quibus non est quanto sufficit ad spargendum, polluantes hominem ad polluendos cibos et potus, et non ad vestes polluendas. C. 1, 2 : (p. 16) His superius est cadaver, et aquae expiatoriae in quibus est quantum ad sparsionem sufficit, polluunt hominem onere, ut is denuo polluat vestes tactu, et subtractas veste tactu. – (MAIM.) : ... polluit portatione, eius sensus est quod si homo elevaverit pondus rei impurae pollutus sit, etsi is ipsum corpus non tetigerit quod pollutum erat... Sed huic simile est inclinatio, qua lignum aliquod summitate parietis paratum est, et immundities est in extremitate tigni, si quis ergo secundae extremitati innixus fuerit, et elevaverit istam extremitatem in qua immundities est, pollutus est inclinatione ligni istius. – (BARTEN.) : Et subtractas veste tactu... intelliguntur vestes immunditiei subtractae, et in his tactus obtinet absque portatione, qui enim attigerit cadaver vel menstruae aquas, easque non portaverit, non polluit, ne quidem vestes indutas...

[FN: § 1268-1]

Legum Mischnicarum... pars VI. De vasis, c. 8, 5 (p. 48).

[FN: § 1268-2]

Loc. cit ; De vasis, c. 8, 11 (p. 51).

[FN: § 1268-3]

Loc. cit ;. De puritatibus, c. 4, 2 (p. 327) c. 4, 3 (p. 327).

[FN: § 1268-4]

Loc. cit. ; De puritatibus, c. 4, 6 (p. 329) c. 5, 7 (p. 330) ; c. 5, 8 (p. 330).

[FN: § 1268-5]

Legum Mischnicarum.... pars. VI De lavacris, 8, 4 (p. 381) : Si gentilis eiecerit semen ab Israëlita immissum, immunda est. Si filia Israëlitae eiecerit semen a gentili iniectum, munda est. Si uxor domi coitum passa sit, et postea se laverit, sed puderida non purgaverit, perinde est ac si non lavisset se. Si is qui semen emisit, se immerserit, sed non prius minxerit, tum postquam urinam reddiderit, immundus est. R. Iose dicit aegrotus et senex immundus est, sed infans et sanus mundus est. (BART.) : In iuvene et sano mundus est, quia fortissimo emittunt semen, ita ut nihil remaneat... – Il y a pis encore, c. 8, 3 (p. 380). – On possède un traité entier : De fluxu menstruo, avec une casuistique très copieuse.

[FN: § 1268-6]

Legum Mischnicarum..., pars VI. De lavacris, c. 9, 1 (p. 382) : Haec in homine dividunt, fila lanae et lini, et corrigiae in capitibus filiarum. R. Ieuda dicit, fila e lana et e pilis non dividunt, quia ad illa perveniunt aquae. – Suivent des considérations peu propres, c. 9, 2; c. 9, 3 : Haec non dividunt, capilli, pili axillae, locus occultus in viro. R. Eliezer dicit, perinde se res habet in viro et in foemina, quidquid quis curat, id dividit, sin minus, non dividit. (BART.) : Et locus secretus in viro, nam vir istius loci non tam accuratam curam gerit, imo ne quidem foemina, nisi maritata sit, uti expositum est; si ergo quis talia loca non curat, ipsa nec dividunt, si nempe ea non sint in maxima corporis parte. – Suivent un grand nombre d'autres commentaires.

[FN: § 1272-1]

DUBOIS: Mœurs... des peuples de l'Inde, t. I « (p. 245) Le flux menstruel et celui qui accompagne l'enfantement impriment passagèrement aux femmes... un caractère immonde. L'accouchée vit entièrement séquestrée l'espace d'un mois... Les femmes sont soumises au même isolement pour tout le temps que durent leurs souillures périodiques... (p. 246). Lorsque les jours d'expiation des souillures de ce genre sont accomplis, on donne au blanchisseur les vêtements que la femme avait sur le corps. On évite avec grand soin que ces vêtements n'entrent dans la maison, et personne n'aurait même le courage de porter les yeux dessus... Cependant les femmes des linganistes, pour se purifier des mêmes souillures, se contentent de se frotter le front avec de la fiente de vache réduite en cendres ; et par cette simple cérémonie... elles sont censées purifiées... (p. 247) Les vases de terre sont de nature à contracter une souillure ineffaçable, qui ne s'attache pas aux vases de métal : il suffit de laver ces derniers pour les purifier ; mais les autres, devenus hors d'usage doivent être détruits... Il en est des vêtements comme des vases ; les uns sont susceptibles de souillures et les autres ne le sont pas... (p. 249) Un brahme scrupuleux doit encore bien regarder où il pose les pieds en marchant ; il serait souillé et obligé de se baigner, si par mégarde ses pieds venaient à toucher un os, un tesson, une guenille, une feuille sur laquelle on aurait mangé, un morceau de peau ou de cuir, des cheveux, et autres choses immondes. La place ou il veut s'asseoir demande aussi toute son attention... La manière de manger n'est pas non plus sans conséquence... (p. 250). Ils ont pour la salive une horreur insurmontable... pour un Indien, c'est moins l'idée de propreté qui le domine à cet égard, que son éternelle appréhension des souillures... (p. 252) L'attouchement de plusieurs espèces d'animaux, et surtout du chien, souille la personne des brahmes : il est curieux d'observer les mouvements qu'ils font, et les précautions qu'ils prennent, pour éviter les caresses familières d'un de ces fidèles compagnons de l'homme. Si, quoi qu'ils aient pu faire, le chien vient à les toucher, ils n'ont d'autre parti à prendre que d'aller en grande hâte se plonger tout habillés dans l'eau, afin d'effacer la souillure que l'attouchement de cet animal immonde a imprimée à leur personne et à leurs habits ».

[FN: § 1276-1]

MAÏMONIDE ; Le guide des égarés, t. III,.c. 48 : «(p. 396) Je dis donc que tous les aliments que la Loi nous a défendus forment une nourriture malsaine. Dans tout ce qui nous a été défendu, il n'y a que le porc et la graisse qui ne soient pas réputés nuisibles, mais il n'en est point ainsi, car le porc est (une nourriture) plus humide qu'il ne faut et d'une trop grande exubérance. La raison principale pourquoi la Loi l'a en abomination, c'est qu'il est très malpropre et qu'il se nourrit de choses malpropres... (p. 397) De même, les graisses des entrailles sont trop nourrissantes, nuisent à la digestion et produisent du sang froid et épais... Quant aux signes caractéristiques (d'un animal pur), à savoir, pour les quadrupèdes, de ruminer et d'avoir le sabot divisé, et, pour les poissons, d'avoir des nageoires et des écailles, il faut savoir que l'existence de ces signes n'est pas la raison pourquoi il est permis de s'en nourrir, ni le manque de ces signes la raison pourquoi ces animaux sont défendus. Ce sont simplement des signes qui servent à faire reconnaître la bonne espèce et à la distinguer de la mauvaise ». Cet auteur explique et justifie toutes les prescriptions de la Bible par des motifs tirés de l'expérience et de la logique. Pourtant, en des cas très rares, il avoue ne pas réussir à trouver ces motifs. « (p. 394) La raison pourquoi la purification se faisait avec du bois de cèdre, de l'hysope, de la laine cramoisie et deux oiseaux, a été indiquée dans les Midraschôt ; mais elle ne convient pas à notre but, et jusqu'à présent je n'ai su me rendre compte de rien de tout cela. Je ne sais pas non plus pour quelle raison on emploie dans la cérémonie de la vache rousse le bois de cèdre, l'hysope et la laine cramoisie, ni pourquoi on se sert d'un bouquet d'hysope pour faire l'aspersion avec le sang de l'agneau pascal ; je ne trouve rien par quoi justifier la préférence donnée à ces espèces ». Les explications logiques des prescriptions concernant les animaux impurs continuent jusqu'à notre époque. – CH. MILL. ; Hist. du Mahomét. : « (339) La nature du climat, dans les pays orientaux, (p. 340) contribue à rendre certains aliments nuisibles à la santé ; c'est pour cette raison que les législateurs, tantôt ont distingué les animaux en purs, ou impurs, c'est-à-dire, ceux qui offrent et ceux qui n'offrent point une nourriture salutaire, et tantôt, en ont spécialement interdit quelques-uns, en laissant l'usage du reste à la discrétion des peuples [tout cela est fantaisiste et provient de ce qu'on veut voir en toute chose des actions logiques]. Moïse appartient à la première, et Mahomet à la seconde classe de ces législateurs. C'est un fait généralement connu que la chair de l'animal immonde... engendre des maladies cutanées, et plus particulièrement dans les pays chauds. La malpropreté de ce quadrupède suffit pour en donner le dégoût, et nous voyons en effet que les Égyptiens, les Arabes et les autres peuples orientaux l'ont toujours abhorré : la nécessité des circonstances en dictait la prohibition... » S. Reinach montre fort bien la vanité de ces explications. S. REINACH ; Cultes, mythes et religions, t. I : « (p. 11) Très souvent la défense de tuer des (p. 12) animaux d'une ou de plusieurs espèces subsiste à l'état de tabou, c'est-à-dire d'interdiction non motivée, ou motivée après coup par des considérations d'un ordre tout différent (hygiéniques, par exemple) : c'est ce qui se constate encore chez les Musulmans et chez les Juifs ». Mais il a tort de voir dans ces prescriptions exclusivement des conséquences du totémisme. Lui-même fait voir qu'elles peuvent avoir diverses origines ; par exemple : « (p. 13, note) Aujourd'hui même, le paysan russe ne tue jamais une colombe, parce que c'est l'oiseau du Saint-Esprit, et l'on enseigne aux enfants, même en France, à ne pas écraser les insectes dits bêtes du bon Dieu ». Il n'y a pas la moindre preuve que ces insectes aient jamais été des totem. C'est ainsi qu'il dit encore : « (p. 91) Une des formes les plus anciennes et les plus répandues de la religion [en vérité, il faudrait dire des actions non-logiques] est le scrupule de tuer ou de manger un animal. Ces scrupules sont encore très répandus. Les Musulmans et les Juifs ne mangent pas de porc, les Russes ne mangent pas de pigeon, les Européens, du moins en général, ne mangent pas de chien et beaucoup éprouvent encore, pour la viande (p. 92) de cheval, une répugnance instinctive fondée sur une ancienne religion ». Cela peut être ; mais il y a d'autres faits semblables pour lesquels disparaît toute explication religieuse ou de totétisme, Tandis qu'en France et en Angleterre, le mouton passe pour une viande excellente, beaucoup de personnes de l'Italie centrale ne veulent en manger en aucune façon. Mais que le mouton ait vraiment été pour eux un totem, que ce soit là une prescription religieuse, par quels documents pourrait-on en donner la preuve ? Beaucoup d'Anglais s'étonnent de voir les Français manger des grenouilles. Dans tous les pays, il y a des personnes qui ont une répugnance absolue pour les huîtres. Les Arabes mangent les sauterelles. Essayez un peu (1) d'en faire manger à un Européen ! En tous ces faits ou en d'autres semblables manque le motif du totem, de la religion, ou, si l'on veut, le motif hygiénique. Ce sont simplement des actions non-logiques, comme on en voit tant dans la race humaine.

[FN: § 1277-1]

BURCKARDT, dans : Bibl. univ. des voy., t. 32. Voyage en Arabie... (1814-1817). On sait que le chien est aussi réputé impur chez les musulmans : « (p. 325) Il n'est pas indigne de remarque que Médine, autant que je puis le savoir, est la seule ville d'Orient d'où les chiens soient exclus. On ne leur permet jamais de passer la porte de l'intérieur, et ils doivent rester dans les faubourgs. La crainte qu'un chien n'entre dans la mosquée et n'en souille la sainteté les a probablement fait exclure. On les tolère cependant à la Mecque ». – CH. MILLS ; Hist. du Mahomét. : « (p. 510) La bienfaisance des Musulmans s'étend jusqu'à la création animale, et c'est un des articles établis de la foi musulmane que les animaux irrationnels seront jugés au dernier jour et seront mutuellement vengés des injures qu'ils se sont faites l'un à l'autre dans cette vie. Un sentiment de pitié a consacré, parmi les Turcs, une aversion prononcée pour la chasse, et les oiseaux sont rarement privés de leur liberté. Selon la tradition populaire, Mahomet affectionnait principalement le chat, parmi les (p. 511) animaux domestiques †. La gravité de sa démarche et son indifférence indépendante s'accordent bien avec la solennité sombre et l'orgueil du caractère des Turcs : et quoiqu'ils soient d'une propreté trop recherchée pour permettre qu'il touche leur personne, ils le reçoivent familièrement dans leurs maisons. Le chien n'est pas traité avec une attention aussi bienveillante. son attouchement est regardé comme contagieux, et son nom même est l'expression la plus énergique du mépris parmi les Turcs. ». Ces différences entre le chien et le chat ne sont pas explicables par le totémisme.

† [Note de Mill] : « LABAT ; Mémoires du chevalier d'Arvieux, t. III, p. 227. Les chats ne sont point des animaux impurs, et ils peuvent boire et manger des mêmes choses que les fidèles. Mais si un chien boit dans la coupe d'un croyant, elle doit être lavée sept fois. MISCHAT, vol. I, p. 108 p.

[FN: § 1277-2]

Lévit., XI, 12. (Vulgata) : Cuncta quae, non habent pinnulas et squamas in aquis, poiltita erunt . « (SEGOND) : Vous aurez en abomination tous ceux qui, dans les eaux, n'ont pas des nageoires et des écailles ».

[FN: § 1278-1]

RABBINOWICZ; Légis. crim., du Talmud, préface : « (p. XXXIII) Les Juifs ne les enterraient [les morts] jamais sur les routes publiques, en outre ils indiquaient les sépultures par une marque appelée tzijon. Les païens ne le faisaient pas. Il en résultait, à une époque où les Juifs étaient partout entourés de païens, que les premiers ne pouvaient pas observer les lois de la pureté concernant les morts païens, dont ils ne pouvaient pas reconnaître les tombeaux, et l'on a fini par croire que ces tombeaux ne rendaient pas impurs ». Lui-même nous donne un moyen de réfuter cette explication ; car il nous montre qu'elle concerne un cas particulier d'une théorie générale, à laquelle elle ne s'applique certainement pas. Il fait cela en voulant réfuter une autre théorie qu'il tient à juste titre pour erronée. « (p. XXXIII) On avait donc une tradition, qui s'est développée... d'après laquelle le tombeau d'un païen ne rendait pas impur. Cette tradition fut attachée, selon l'habitude talmudique, à un mot de la Bible. L'écriture dit qu'un adam, un homme, qui meurt rend impur... Ce mot adam, dit-on, s'applique seulement aux Juifs. Ce passage a été mal compris par certains commentateurs et incriminé par les ennemis du judaïsme encore dans le siècle passé [en note : „ On n'a pas remarqué que le mot ysch, homme, exclut aussi les païens à propos d'une autre impureté “]... (p. XXXIV) Ils ne savaient pas que le passage en question n'a été trouvé qu'après que les Juifs se furent habitués pendant des siècles à ne pas appliquer la loi de la pureté aux tombeaux païens. C'est ainsi que le passage du Cantique des Cantiques qui défendait aux Juifs de se révolter contre les païens... n'a été découvert qu'après la dernière révolution de Bar Khokhbah, quand toute insurrection était devenue impossible... » Le même auteur, dans la Législation civile du Talmud, t. V, p. 381, rappelle la disposition qui fait disparaître l'impureté du mort païen ; et il ajoute : «Rab dit : Si un mort doit, sous le rapport de certaines lois de l'impureté, être considéré comme un individu vivant, c'est pour éviter qu'on ne le considère pas comme un cadavre quand il n'y a qu'une mort apparente ». Comme d'habitude, les dérivations sont la partie variable du phénomène, dont les résidus sont la partie constante. Ajoutez-y les considérations du § 1279-2.

[FN: § 1279-1]

RABINOWICZ ; Législation civile du Talmud, t. V, p. 411.

[FN: § 1279-2]

Nous avons déjà indiqué l'un de ces problèmes à la note 1278-1. Ajoutons-y les suivants : Legum Mischnicarum..., pars VI. De puritatibus, c. 2, 8 : (p. 385) Si in urbe sit una stulta, vel peregrina, Ivel Cuthaea, tum omnia sputa in urbe inventa, sunt immunda... (MAIM.) : Iam exposuimus ab initio libri quod gentiles sint pro seminifluis habendi in omnibus rebus. Praeterea capite quarto codicis de Menstruis diximus quod foemina Cuthaea versetur in suspicione quod semper sit menstrua. Notum vero est quod foemina stulta non custodiat se, nec, observet menstrui sui tempora, secundum id quo in Lege definitum est. De fluxu Menstruo, c. 4, 3 : (p. 400) Sanguis peregrinae et sanguis puritatis leprosae, mundus est secundum scholam. Schammai, schola Hillelis dicit, est instar sputi et urinae... (BART.) : Sanguis foeminae gentilis, secundum scholam Schammai est mundus, licet respectu sputi et urinae conveniant inter se schola Schammai et Hillel... (MAIM.) : Iam exposuimus in praefatione huiusce libri, quod gentiles nullatenus polluant secundum Legem, sed Sapientes decreverunt cos pro seminifluis habendos esse in omnibus rebus. C. 7, 3 : (p. 415) Omnes maculae venientes a Racam, mundae sunt, at immundae secundum. R. Iehudam, quia proselyti sunt, et errant. Quae venerint a gentilibus, eae mandae sunt ; quae vero ab Israëlita et a Cuthaeis, eae secundum. R . Meir immundae sunt, et secundum Sapientes mundae, quia ii non suspecti sunt de maculis ipsorum. (BART.) : Qui veniunt a Racam, cuius loci incolae sunt peregrini, et eorum sanguis immundus est. (MAIM.) : Iam tibi aliquoties exposuimus quod gentes non polluant fluxu seminis vel sanguinis, nec fluxu menstruo, attamen Sapientes de illis decreverunt, sed de illorum maculis non decreverunt... (BART.) : ... E. Racam, nam in Targum illa verba, inter Cades et Sur, exponuntur per inter RacaM et inter Chagra. Quia proselyti sunt, quorum sanguis immundus est... errant, ac si dixisset, non sunt valde casti, neque contegunt maculas sanguineas eorum, proinde suspicamur eas forsan foeminae menstruae maculas esse. Qui veniunt a gentilibus, ii mundi sunt, quia Sapientes de ipsorum maculis nihil decreverunt, cum eorum sanguis omnino mundis sit ex Lege... C. 10, 4: (p. 424) Seminifluus, seminiflua, menstrua, puerpera, et leprosus qui obierunt, polluunt si ferantur, donec caro tabescat. Gentilis si obierit, mundus est a pollutione si is feratur.

[FN: § 1280-1]

Levit. XI, 43. (Tischendorf) :

(Vulgata) : Nolite contaminare animas vestras : nec tangatis quidquam eorum, ne immundi sitis. « (SEGOND) : Ne rendez point vos personnes abominables par tous ces reptiles qui rampent ; ne vous rendez point impurs par eux, ne vous souillez point par eux ».

[FN: § 1280-2]

Lévit., XV, 31. IX (SEGOND) : Vous éloignerez les enfants d'Israël de leurs impuretés, de peur qu'ils ne meurent à cause de leurs impuretés, s'ils souillent mon tabernacle qui est au milieu d'eux ».

[FN: § 1281-1]

De même dans l'Exode, 29, 18, on explique l'holocauste du bouc en disant : « Tu brûleras le bouc tout entier, sur l'autel; c'est un holocauste à l'Éternel et un sacrifice d'une odeur agréable à l'Éternel ». C'est, en gros, le motif des sacrifices païens.

[FN: § 1281-2]

SAINT PAUL, Ep. aux Héb., X, 5-14, dit que le sacrifice de Christ suffit à lui seul pour tous les péchés. Hébr., IX : « (12) Et il est entré une fois pour toutes dans le lieu très saint, non avec le sang des boucs et des veaux, mais avec son propre sang, ayant obtenu une rédemption éternelle. (18) Car si le sang des taureaux et des boucs, et la cendre d'une vache, répandue sur ceux qui sont souillés, sanctifient et procurent la pureté de la chair (14), combien plus le sang de Christ, qui, par un esprit éternel, s'est offert lui-même sans tache à Dieu, purifiera-t-il votre conscience des œuvres mortes, afin que vous serviez le Dieu vivant ».

[FN: § 1282-1]

Dict. encycl. de théol. cath., t. XX, s. r. Réconciliation des pénitents : « (p. 23) ...acte par lequel, au temps où régnait une (p. 24) sévère discipline dans l'Église, des pénitents publics, après avoir achevé leur pénitence, étaient officiellement réconciliés avec l'Église et solennellement admis dans son giron... Le pape Innocent Ier écrit à Décentius, évêque de Gubbio, que les pénitents de l'Église romaine reçoivent l'absolution le jeudi saint et sont admis à la communion de l'Église. Cette admission se faisait avec une solennité propre à remuer les cœurs... ». Ibidem, s. r. Réconciliation des églises et des cimetières : « (p. 25) Quand une église a une fois été destinée au culte divin et a été bénite... elle ne peut plus perdre le caractère d'une chose sacrée,... mais elle peut être profanée par des actes qui atteignent son caractère sacré ». Voilà bien l'altération de l'intégrité d'une chose. « (p. 25) Ni l'église ni le cimetière ne peuvent continuer à servir à leurs saints usages tant qu'ils restent profanés. Il faut, pour les remettre en état, l'intervention d'un acte religieux qu'on nomme la réconciliation [rétablissement de l'intégrité]. Cet acte a ses motifs profonds dans les exigences du sentiment religieux [très juste ; les résidus du genre que nous étudions maintenant agissent] et dans la conviction qu'il donne [dérivation] que Dieu se retire du lieu où il a été outragé, et qu'il faut qu'il y ait expiation pour que le Seigneur puisse être rappelé dans son sanctuaire... si l'homme qui a souillé par le péché son âme, temple consacré au Saint-Esprit, peut être réconcilié avec Dieu par la pénitence, l'église profanée peut également redevenir la résidence de Dieu par une cérémonie solennelle ».

[FN: § 1285-1]

BOUCHÉ-LECLERCQ ; Hist. de la div. dans l'ant., t. IV « (p. 80) Tout prodige, quel qu'il fût et le sens en restât-il impénétrable, exigeait des cérémonies expiatoires. Il est naturel que l'homme effrayé par le miracle mette entre lui et le malheur qu'il appréhende, les sacrifices et les prières [en général, des actes quelconques ; l'animal aussi s'effraie à la vue d'une chose insolite, et s'agite : le chien aboie, le cheval fait un écart, le lion se bat les flancs avec sa queue]. Les Grecs et les Romains n'allaient guère au-delà de cette procuration empirique, mise à la portée des plus ignorants. Au lieu de chercher à savoir quelle volonté avait produit le miracle et dans quel but elle l'avait fait [dérivation étendue], ils invoquaient les „ dieux qui détournent “ les maux ] (p. 81) – Dii Averrunci] et se rassuraient en pensant qu'ils avaient opposé à des ennemis inconnus des amis sûrs [dérivation plus restreinte que la précédente]. Quelque cérémonie, sacrifice, offrande, récitation de formules magiques, ou telle autre démonstration extérieure [voilà la manifestation simple du résidu] achevait l'œuvre d'apaisement commencée par la prière [il est au contraire probable que la prière est venue ensuite]. Les Romains avaient appris de Numa la procuration d'un certain nombre de prodiges pour ainsi dire usuels, et l'expérience leur avait permis d'ajouter à l'ancien rituel quelques recettes empiriques ; ainsi, ils savaient depuis le règne de Tullus Hostilius que les pluies de-pierres étaient suffisamment « procurées » par neuf jours de féries ». Au contraire, les aruspices s'attachaient davantage à la doctrine de la purification. « (p. 82) Ils considéraient, en général, les prodiges moins comme des avertissements regardant l'avenir que comme des réclamations concernant le passé. Le caractère anormal de ces signes indiquait à leurs yeux des exigences impérieuses, motivées d'ordinaire par quelque offense faite aux dieux et non réparée. Le prodige une fois attribué à ses véritables auteurs, il devenait plus aisé de savoir de quelle injure ceux-ci se plaignaient et à quel prix ils consentaient à l'oublier. Une enquête scrupuleuse manquait rarement de révéler quelque inadvertance ignorée ou mal réparée, cause première des accidents prodigieux. Si rien de semblable ne se découvrait, les devins pouvaient conclure à leur gré ou que l'enquête était insuffisante ou que le sens du prodige concernait l'avenir. Souvent les aruspices, pour plus de sûreté, cherchaient dans les deux sens et trouvaient des récriminations mêlées aux prophéties... ».

[FN: § 1286-1]

GELL. ; IV, 6.

[FN: § 1288-1]

Dict. DAREMB. SAGL., s. r. Orphici : « (p. 251) Les Orphiques croyaient à la nature divine de l'âme, et à une déchéance, à un péché originel. L'âme, créée par les dieux, avait d'abord vécu au ciel ; elle avait été exilée à la suite d'un péché, le dont parle Pindare, les auxquels fait allusion Jamblique. Nous ne savons en quoi consistait cette faute. D'après l'explication vulgaire, l'homme était né du sang des Titans, meurtriers de Zagreus ; de par sa naissance, il était l'ennemi des dieux ; mais, en même temps, il avait en lui quelque chose de divin, qu'il tenait des Titans. Outre la souillure commune à tout être humain, on admettait une souillure particulière et héréditaire dans certaines familles ».

[FN: § 1288-2]

PLAT.; De rep., II p. 364. Ils emploient les livres de Musée et d'Orphée, et font croire, non seulement aux particuliers, mais aussi aux cités, qu'ils peuvent laver et purifier les fautes des vivants et des morts.

[FN: § 1288-3]

OVID., Métam ., I, raconte comment Jupiter foudroya les Géants, et comment la Terre anima leur sang, et « le changea en hommes ; race méprisant les dieux, cruelle, très avide de sang et violente, montrant qu'elle est née du sang » (160-162).

[FN: § 1289-1]

Le fait est trop connu pour qu'il soit nécessaire d'en donner de nombreuses preuves. Les citations suivantes suffiront. Dans les œuvres authentiques de Saint Augustin, on trouve des affirmations de ce fait, en beaucoup d'endroits. Par exemple : D. AUG ; Sermo LVI, in Evangel., in Matth. (alias : de diversis, XLVIII), c. IX, 13 . Baptizandi estis,... Sic intrate, et certi estote, omnia prorsus vobis dimitti, quae contraxistis, et parentibus nascendo secundum Adam cum originali peccato, propter quod peccatum cum parvulis curritis ad gratiam Salvatoris, et quidquid vivendo, addidistis, dictis, factis, coffitationibus, omnia dimittuntur... Le saint voit dans le déluge l'image du baptême. Contra Faust. Manich., XII, 17 « il plut pendant quarante jours et quarante nuits, parce que toute souillure de péché est comprise dans les limites des dix commandements de la loi, au sein de l'univers qui compte quatre parties ; or, quatre multiplié par dix égalent quarante. Or, cette souillure qui résulte des jours prospères ou adverses en rapport avec les nuits, est effacée par le sacrement du baptême qui nous vient du ciel ». – I. GOUSSET ; Theol. dogm., t. II, p. 415 : « Cette grâce [du baptême] détruit le péché originel que les enfants apportent en naissant ; il [le baptême] efface en outre, dans les adultes, les péchés actuels qu'ils ont commis avant le baptême, et remet toutes les peines spirituelles dues au péché, quel qu'il soit... » – Canones et decreta conc. Trident., sessio V, decretum de peccato originali, 5 . Si quis per Iesu Christi Domini nostri gratiam, quae in baptismate confertur, reatum originalis peccati remitti negat, aut etiam asserit, non tolli totum id, quod veram et propriam peccati rationem habet, sed illud dicit, tantum radi aut non imputari : anatema sit. – Les derniers mots, suivant lesquels le baptême n'effacerait pas entièrement le péché, mais le raserait seulement de manière à ce qu'il ne soit pas imputé, font allusion à une hérésie que les pélagiens attribuaient aux catholiques. – D. AUG.; Contra duas epistolas Pelagianorum, I, 13; « (26) Dicunt etiam-inquit-baptisma non dare omnem indulgentiam peccatorum, nec auferre crimina, sed radere, ut omnium peccatoram radices in mala carne teneantur ». Quis hoc adversus Pelagianos, nisi infidelis affirmet ? – CALVIN ; Inst. de la relig. chrestienne, t. II, 1. IV, c. XV, p. 477 : « (1) ... il [le baptême] nous est envoyé de luy, [de Dieu] comme une lettre patente signée et scellée, par laquelle il nous mande conferme et asseure que tous nos péchez nous sont tellement remis, couverts, abolis et effacez, qu'ils ne viendrons jamais à estre regardez de luy, ne seront jamais remis en sa souvenance, et ne nous serons jamais de luy imputez... (2) ...le Baptesme nous promet autre purification que par l'aspersion du sang de Christ, lequel est figuré par l'eau, pour la similitude qu'il a avec icelle de laver et nettoyer... (3) Et ne devons estimer que le Baptesme nous soit donné seulement pour le temps passé, tellement que pour les péchez ausquels nous rechéons après le Baptesme, il nous fale chercher autre nouveau remède. Je sçay que de cest erreur est provenu qu'aucuns anciennement ne vouloyent estre baptisez, sinon en la fin de leur vie et à l'heure de leur mort : afin qu'ainsi ils obtinssent rémission plénière pour toute leur vie : laquelle folle fantasie est souvent reprinse des Evesques en leurs escrits. Mais il faut sçavoir qu'en quelque temps que nous soyons baptisez, nous sommes une fois lavez et purgez pour tout le temps de nostre vie ».

[FN: § 1289-2]

D. AUGUST. ; De symbolo. Ad catechumenos sermo alius, c. X. Le pape Eugène IV, dans le Décret pour les Arméniens, écrit : Baptismi sacramenti effectus est remissio omnis culpae originalis et actualis, omnis quoque poenae, quae pro ipsa culpa debetur. Propterea baptizatis nulla pro peccatis praeteritis iniungenda est satisfactio ; sed morientes, antequam culpam aliquam committant, statim ad regnum coelorum et Dei visionem perveniunt. – D. CYRILLI HIEROS ; Cathech., III, de baptismo, 15, nomme, parmi tous les péchés qui sont pardonnés, la fornication et l'adultère.

[FN: § 1290-1]

D. GREG. NAZ.; oratio 40, XX : « Mais quelqu'un dit : À quoi me sert d'être lié avant le baptême, et de me priver par cet empressement des plaisirs de la vie, tandis qu'il est possible d'en jouir et de recevoir la grâce à la fin ? Car ceux qui travaillèrent les premiers à la vigne n'eurent pas des conditions meilleures, en recevant un salaire égal à celui de ceux qui vinrent les derniers ». Le saint explique que l'on ne doit pas interpréter la parabole de cette façon. D'abord, elle ne traite pas du baptême ; ensuite, si les derniers venus ne travaillèrent pas autant que les premiers, leur bonne volonté ne fut pas moindre. On sait qu'on tire ce qu'on veut des paraboles.

[FN: § 1290-2]

D. EPIPH.: Panarii adversus haereses, 1. I, t. 1 : « (p. 37) Contre les hémérobaptistes. Quatrième hérésie des Juifs, dix-septième par ordre »... « Ce qui appartient surtout à cette hérésie c'est que l'on croit qu'au printemps, en automne, en hiver, en été, journellement, il faut se baptiser ; d'où le nom des hémérobaptistes. . « Car elle affirmait que l'homme ne pouvait vivre que s'il se baptisait chaque jour, dans l'eau, en se lavant et en se purifiant de tout péché ». Saint Épiphane l'admoneste et dit, en substance, que ni les eaux de l'Océan, ni celles de toutes les mers, des fleuves, des fontaines, de la pluie, réunies ensemble, ne peuvent laver les péchés des hommes, qui doivent se purifier par la pénitence. À cela les hérétiques auraient pu répondre : « Pourquoi donc employez-vous l'eau dans votre unique baptême ? ». En réalité, il y a une opération externe et une opération interne, et l'une ou l'autre prévaut, suivant la force des sentiments qui y correspondent. – DIONYSII PETAVII ; ...Appendix ad Epiphanianas animadversiones : (p. 19) Eos vero qui in aegritudine baptizati forent, a Sacerdotio reiectos esse, docet Canon ille Neocaesar. XII, et Cornelius Papa Epist. ad Fabium Antiochiae Episcopum, qui extat apud Eusebium lib. VI, cap. XXXV, ubi de Novato scribit... (p. 20) « Quoniam nefas erat eum, qui ob morbum in lectulo perfusus est, cuiusmodi fuerat iste, in Clerum cooptari ».

[FN: § 1292-1]

Dictionn. SAGLIO; s. r. Taurobolium : « (50) Nous avons vu que le premier taurobole daté est celui de l'an 134, non à la Mère des dieux, mais à la Vénus Céleste de Carthage. Vient ensuite, en ancienneté, un taurobole de Lyon, pour la conservation d'Antonin le Pieux et de ses enfants et pour le maintien de la colonie. Le plus récent est de l'an 390 ; il a été reçu pour lui-même, par un sénateur. Dans l'intervalle de nombreux tauroboles publics durent avoir lieu... Quant aux tauroboles particuliers, on en peut suivre la trace, dans les inscriptions, depuis le second siècle jusqu'au dernier temps du paganisme ; mais c'est surtout après le règne de Julien qu'ils se multiplièrent. Ainsi que l'a dit Marquardt, il semblerait que ce soit vers le taurobole qu'aient convergé finalement tous les cultes païens ».

[FN: § 1292-2]

ORELLI; 23,52 : ... Taurobolio criobolioque in aeternum renatus... 2355 ; ... iterato viginti annis ex perceptis tauroboliis VI aram constituit. On faisait le sacrifice du Taurobole. – ORELLI-HENZEN ; 6082 : Pro salute imp. L. Septimi Severi ... taurobolium fecerunt... – PRUDENT ; Peri stephanon liber. X, 1011-1050

(1016) Tabulis superne strata texunt pulpita,
Rimosa rari pegmatis compagibus.
Scindunt subinde vel terebrant aream,
Crebroque lignum perforant acumine,
Pateat minutis ut frequens hiatibus.

« Au-dessus [de la fosse], ils construisent un plancher de tables, puis ils écartent les nombreuses commissures du plancher ou en percent la surface, et font de nombreux trous dans le bois, afin qu'il présente de fréquentes petites ouvertures ». Ils amènent un taureau sur le plancher et lui ouvrent le poitrail avec le fer sacré. Le sang tombe sur le plancher sacré. « Alors, par les fréquentes et nombreuses fissures, le sang pleut comme une rosée infecte, et le prêtre qui est dans la fosse le reçoit, exposant à chaque goutte sa tête ignominieuse, son vêtement et son corps corrompu ». – Anth. vet. lat. epigr... , ed. BURMANN ; t. I, p. 83.

Quis tibi Taurobolus vestern inutare süasit,
Inflatus dives subito mendicus ut esses :
Obsitus et pannis modicis tepefactus****
Sub terra missus, pollutus sanguine tauri.
Sordidus, infectus, vestes servare cruentas,
Vivere cura speras viginti mundus in annos.

[FN: § 1292-3]

TERTULL. ; De praese.haer., 40.

[FN: § 1292-4]

TERTULL.; De Bapt., 5.

[FN: § 1294-1]

DIOG. LAERT.; 1, 110, Epim .

[FN: § 1294-2]

IUV.; VI, 511-568.

[FN: § 1295-1]

ZOZIM.; 11, 29.

[FN: § 1295-2]

SUET. ; Nero , 34 – DIO. CASS.(XPHIL.), LXIII, 14, dit que Néron n'alla pas à Athènes « à cause de la tradition des Érinyes »: .

[FN: § 1295-3]

EUSEB. ; De vita Const., I, 27...

« ... cherche attentivement quel dieu il lui convient d'appeler à son secours ».

[FN: § 1297-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] Le blasphème affecte l'intégrité de la divinité. L'exemple suivant appartient à l'espèce (V-γ 2), en ce que le sujet qui a souffert l'altération est imaginaire ou abstrait ; il se rattache au genre (V-δ), en ce que l'intégrité est rétablie par des opérations se rapportant à ceux qui l'ont altérée. Confession criminelle faicte par Jaquemaz Mestraux originelle de Hermenges balliage de Mouldon a present femme de Pierre Chuet residant rière la Chastelanie et mandement de Dompmartin, détenue es prisons... Chasteau de Lausanne...(Archives cantonales vaudoises. Pièce non classée. – Année 1637). L'accusée s'est rendue coupable de dire à des voisins qui négligeaient leurs moissons : « Que Dieu avoit faict péché de leur avoir envoyé tant de biens ». « Desquels propos par ladicte détenue comme dessus confessés icelle en est grandement pénitente, et repentante, dont elle en demande pardon a Dieu a Leurs Excellences etalhonnorable Justice, declarant voulloir vivre et mourir en sadicte confession. En vigueur de laquelle confession le prénommé seigneur chastelain a demandé que pour sestre ladicte détenue, de tant oubliée que d'avoir professé semblables parolles blasphematoires contre la deité, et parce commis acte exorbitant et digne de mort, icelle pourtant en vigueur de sadicte confession debvoir estre remise entre les mains de lexecuteur de la haute Justice, lequel lui ayant lié bras et mains, et mis la corde au col, la doibgt mener et conduire au lieu accoustumé supplicier semblables mal faicteurs, et delinquants, et icelle debvoir avoir la langue percée, et puis en apprès la teste couppée entant que son ame soit separée de son corps, et iceluy mis en terre, et ce pour chastiment de son malefice et forfaict, et pour estre en exemple atous autres semblables malfaicteurs et delinquants, Ses biens confisqués... » Leurs Excellences de Berne grâcièrent la malheureuse, et lui imposèrent une pénitence à l'église de son village.

[FN: § 1301-1]

Les « savants » parlent avec dédain de l'émotion éprouvée par le public à l'égard de ce crime, qui leur paraît être l'effet des « préjugés » et de l'ignorance où l'on serait de leurs sublimes théories. – RAYMOND HESSE ; Les criminels peints par eux-mêmes : « (p. 146) Crime subit et non prémédité, accompli par un homme que ses antécédents et ses vices prédisposaient à ces attentats, voilà ce que nous révèlent les mémoires de Soleilland. La débauche, les excès, l'alcoolisme et la violence naturelle ont été favorisés par de malheureuses circonstances. Combien d'actes immoraux et de meurtres d'enfants sont commis dans de semblables conditions et par des criminels analogues [ici, l'auteur va un peu au delà de la vérité ; la statistique ne révèle pas tant de meurtres de fillettes après viol]. L'affaire Soleilland, on ne sait trop pourquoi, a frappé davantage l'opinion publique. Peut-être la découverte dramatique de la victime à la consigne d'une gare ? Peut-être les recherches dirigées pendant plusieurs jours par le coupable lui-même ? (p. 147) Peut-être la période des vacances où se localisa ce crime qui remplit les colonnes vides des journaux ont contribué à cette célébrité. …Le portrait de Soleilland complète cette galerie d'anormaux, dont l'étude relève plus de la médecine mentale que de la criminologie ». Si l'auteur ne sait vraiment pas pourquoi « l'affaire Soleilland a frappé davantage l'opinion publique », cela signifie que la métaphysique de ses théories lui a ôté la compréhension des réalités de la vie. L'acte du public est instinctif, comme celui de la poule qui défend ses poussins, de la chienne ou de la lionne qui défendent leurs petits. Le public ne voulait pas que, protégés par les idéologies abstruses des médecins et de leurs alliés les jurisconsultes, les brutes semblables à Soleilland continuassent à violer et à tuer les fillettes. Notre auteur doit comprendre que les motifs pour lesquels ces criminels sont poussés à agir importent peu ou point ; tandis qu'il importe énormément de détruire ces criminels, comme on détruit les rats qui portent la peste, les vipères et les chiens enragés ; et pour porter au paroxysme sa sainte colère, nous lui dirons que les circonstances que lui et ses semblables estiment atténuantes, « la débauche, les excès, l'alcoolisme et la violence naturelle », auxquelles on peut ajouter aussi, pour lui faire plaisir, l'atavisme d'ascendants alcooliques ou aliénés, sont au contraire des circonstances aggravantes, au point de vue de la défense sociale ; car elles accroissent, elles ne diminuent pas la probabilité que les éminentes personnes chez lesquelles on observe ces caractères commettront des crimes. Le public comprit d'instinct que tous ces vains discours sur les « anormaux, dont l'étude relève plus de la médecine mentale que de la criminologie », avaient pour unique effet pratique de permettre aux dits « anormaux » de continuer à commettre des crimes aux dépens des « normaux » ; ce que ceux-ci ne veulent pas tolérer ; et ils tâchent de se défendre comme fait tout animal dont la vie est attaquée. Après cela, si la métaphysique des criminalistes en souffre, c'est vraiment fort dommage ; mais peut-être un peu moins que de laisser impunément violer et assassiner les fillettes.

[FN: § 1301-2]

« La Liberté, 6 mai 1912. – M. Herriot, maire de Lyon, a rejeté, lui aussi, l'humanitarisme, né vers 1898 et mort en 1912. Il écrit ce matin : “ Nous demandons qu'on en finisse avec cette fausse sentimentalité qui n'est que la caricature de la bonté virile. Nous demandons que la grâce ne soit plus, comme l'a écrit un magistrat courageux, une prime à l'assassinat. On abuse des circonstances atténuantes ; on abuse du sursis ; le délai de révocation devrait être porté de cinq à huit ans. Au lieu de couvrir de fleurs les tombes des policiers victimes du devoir, ne pourrait-on pas se montrer plus sévère pour les auteurs de coups et outrages aux agents ? “ Vous verrez que ces sentimentaux d'hier inaugureront demain, en France, le régime de la trique... »

[FN: § 1302-1]

N. COLAJANNI ; Rivista popolare, 31 décembre 1911 : « (p. 653) Dans le numéro précédent, nous avons signalé l'esprit nouveau dont les magistrats italiens sont animés, depuis que sévit le nationalisme... Pourtant, les optimistes objectaient que les cas alors mentionnés par nous pouvaient être considérés comme un effet accidentel de l'idiosyncrasie de magistrats particuliers. Aujourd'hui, l'objection demeure sans fondement, parce que arrêts, procès et condamnations continuent partout, pour délits de presse, pour excitation à la grève et à la haine des classes et à d'autres délits essentiellement politiques, essentiellement élastiques. On condamne pour ces chefs d'accusation à Ferrare ; on arrête De Ambris et Zocchi à Parme ; on arrête Giusquiano à Pise ; on lance un mandat d'arrêt contre Lori à Florence... Certains ont attribué cette soudaine fureur réactionnaire aux ordres partis du Ministre de Grâce et Justice. Nous ne le croyons pas, car nous connaissons le ministre Finocchiaro-Aprile, exempt de tout esprit réactionnaire. L'explication est autre. Les magistrats... se sont montrés larges, spécialement envers les socialistes, quand ils crurent que ceux-ci étaient omnipotents dans les hautes sphères. Aujourd'hui, ils croient que la direction du gouvernement est changée ; aujourd'hui, ils espèrent faire carrière en se mettant dans les bonnes grâces du nationalisme, du cléricalisme ; ils font des procès, arrêtent et condamnent... ». Soit ; mais pourquoi « la direction du gouvernement est-elle changée ? » Le professeur Colajanni nous le dit lui-même : « (p. 653) Les nationalistes qui, jusqu'à hier, se bornaient à écrire des hymnes patriotiques, ont à leur tour exalté le public [voilà la cause principale du phénomène], et leur police et leurs gendarmes recourent à la violence, en raison directe de la protection qu'ils accordent... Ils conspuèrent et bâtonnèrent le professeur Bonfigli ; ils insultèrent un magistrat qui crut avoir le droit de se lever quand bon lui semblait, dans un théâtre ; à la Scala, aidés de commissaires de police et de gendarmes, ils ont expulsé, en l'enlevant de son fauteuil, le critique de l'Avanti, qui ne voulut pas se lever au son de la marche royale... ».

[FN: § 1303-1]

PLAT. ; Timae, p. 90 : . Ceux des hommes créés qui furent efféminés et menèrent une vie injuste furent vraisemblablement transformés en femmes, dans la seconde existence ». Cet excellent homme continue et nous dit : « (p. 91) qu'alors, les dieux s'occupèrent de créer le désir de s'accoupler », ; et il nous raconte longuement comment cet accouplement a lieu. Il nous apprend aussi d'autres merveilles : (p. 91) que les oiseaux sont la transformation des hommes simples et innocents, parmi lesquels Platon range ceux qui ne se contentent pas de ses divagations métaphysiques. (p. 92) Les animaux qui marchent et les bêtes féroces sont la transformation des hommes étrangers à la philosophie. Les plus mauvais n'ont pas de pieds et rampent sur la terre. Les imbéciles et les sots sont transformés en poissons, parce que les dieux ne les estimèrent pas dignes de respirer un air plus pur.

[FN: § 1304-1]

Iliad., XXIII, 71-74 : «Ensevelis-moi promptement, afin que je puisse passer les portes de l'Hadès. Les âmes des morts me repoussent au loin et ne me permettent pas de me mêler à elles, sur le fleuve, et j'erre autour de l'Hadès ». Le scoliaste note, au vers 73, XXIII, Iliad. : « Il y a un signe critique, parce que les âmes des gens morts sans sépulture restent en dehors du fleuve, et ne se mêlent pas à celles qui sont dans l'Érèbe. Ce signe critique se rapporte aussi aux vers qui doivent être supprimés [Odyss. XI, 51 et sv.] ». Il semblerait donc que cette tradition ne serait pas homérique ; mais cela nous importe peu : il nous suffit qu'elle ait existé dans l'ancienne Grèce. – VIRGILE imite ces passages d'Homère, Aen., VI, 325 et sv., et y ajoute que les morts sans sépulture errent pendant cent ans, voltigeant sur les rives de l'Achéron :

(329) Centum errant annos, volitantque haec litora circum
Tura demum admissi stagna exoptata revisunt.

Plus haut :

(325) Haec omnis, quara cernis, inops inhumataque turba est ;

SERVIUS note : Duo dicit, id est, nec legitimam sepulturam habet, neque imaginariam. Inopem enim dicit sine pulveris iactu (nam ops terra est) id est, sine humatione. Vult autem ostendere tantum valere inanem, quantum plenam sepulturam... – Et DANTE ; Purg., III :

(136) Ver è che quale in contumacia more
Di santa Chiesa, ancor che alfLn si penta,
Star gli convien da questa ripa in fuore
Per ogni tempo ch'egli è stato, trenta,
In sua presunzion, se tal decreto
Più corto per buon preghi non diventa.

[FN: § 1304-2]

Odyss., XI, 51 et sv.

[FN: § 1305-1]

LUCIAN.; Philopseudes, 27.

[FN: § 1306-1]

PLIN. ; Epist., VII, 27. – SUET. ; Calig., 59 : « Son cadavre [de Caligula] fut transporté clandestinement dans les jardins de Lamia, brûlé à la hâte sur un bûcher, et recouvert de quelques mottes de terre ; puis exhumé, incinéré et enseveli par ses sœurs revenues de l'exil. Il est notoire qu'avant cette opération, le gardien des jardins était tourmenté par des fantômes... ».

[FN: § 1307-1]

DOM CALMET ; Diss. sur les appar., XLIII « (p. 129) On doit se défier des Revenans qui demandent des Prières. Pour l'ordinaire les défunts apparoissans demandent des prières, des Messes, des pèlerinages, des restitutions ou des payemens de quelques dettes, auxquels ils n'avoient pas satisfaits. Ce qui prouveroit qu'ils sont en purgatoire, et qu'ils ont besoin du secours des vivans pour être soulagés dans leurs souffrances... Mais on doit beaucoup se défier de ces apparitions et de ces demandes... (p. 130) Bodin dans sa Démonomanie (1. 3, c. 6, fol. 157), cite plus d'un exemple de Démons qui se sont apparus, demandant des prières, et se mettant même en posture de personnes qui prient sur la fosse d'un mort, pour faire croire que ce mort a besoin de prière ».

[FN: § 1307-2]

TERTULL.; De corona, (3) Oblationes pro defunctis, pro natiliciis annua die facimus. (4) Harum. et aliarum eiusmodi disciplinarum, si legem expotules scripturarum, nullam invenies. Traditio tibi praetendetur auctrix, consuetudo confirmatrix, et fides observatrix.

[FN: § 1308-1]

En Annam, on fait des cérémonies pour délivrer des peines les âmes des défunts. – E. DIGUET; Les Annamites : « (p. 192) Rites du „ Lam Chay ” ou jeûne solennel pour la délivrance des âmes en détresse. – Ces rites n'ont d'autre but que de faire sortir des Enfers des âmes qui, pour une cause quelconque, y sont retenues et peuvent, par suite de leur mécontentement, devenir malfaisantes pour leur ancienne famille. Lorsque le défunt est mort en un jour néfaste ou lorsque sa tombe est placée dans un lieu mal choisi, ou encore si une seule des mille règles rituelles auxquelles sont soumises les funérailles a été omise, les Annamites sont convaincus que c'est à cette fâcheuse circonstance qu'ils doivent tous les malheurs qui échoient à leur famille. ...Parmi les raisons qui peuvent mettre les âmes en détresse, il faut citer encore les péchés de toute nature, pour lesquels elles ont à purger un châtiment aux Enfers... (p. 193) Les rites du jeûne sont dirigés par le sorcier ou „ Thay phu thuy “... (maître-bois-eau), dont le nom vient de ce qu’il se sert pour officier d'un bâton et d'eau bénite. ...La délivrance des âmes prend quelquefois le caractère d'une grande fête funéraire à laquelle quelques centaines de personnes sont invitées ».

[FN: § 1308-2]

DOM CALMET ; Diss. sur les appar., LXXX, p. 239.

[FN: § 1309-1]

Can. et deer. Concil. Trid., sessio XXV : Decretum de Purgatorio. Cum catholica ecclesia... docuerit, purgatorium esse, animasque ibi detentas fidelium suffragiis, potissimum, vero acceptabili altaris sacrificio iuvari... – Sessio VI, de iustificatione, can. 30 : Si quis post acceptam iustificationis gratiam cuilibet peccatori poenitenti ita culpam remitti et reatum aeternae poenae deleri dixerit, ut nulius remaneat reatus poenae temporalis exsolvendae vel in hoc saeculo, vel in futuro in purgatorio, antequam ad regna coelorum aditus patere possit : anathema sit.

[FN: § 1311-1]

GREGORII M., Dialogi, II, 22. Deux religieuses étaient médisantes. On le rapporta à Benoît : (p. 970) Vir autem Dei haec de illis audiens sis protinus mandavit dicens : Corrigite linguam vestram : quia si non emendaveritis excommunico vos. Quam videlicet excommunicationis sententiam non proferendo intulit sed minando. Illae autem a pristinis moribus nihil mutatae, intra paucos dies defunctae sunt, atque in Ecclesia sepultae. Cumque in eadem Efflesia Missarum solennia celebrarentur, atque ex more diaconus clamaret. Si quis non communicat, det locum : nutrix earum quae pro eis oblationem Domino offerre consueverat, eas de sepulchris suis progredi, et exire videbat. Quod dum saepius cerneret, quia ad vocem diaconi clamantis exibant foras, atque intra Ecclesiam permanere non poterant, ad memoriam reduxit quae vir Dei illis adhuc viventibus mandavit. Ras quippe se communione privare dixerat, nisi mores suos et verba corrigerent. Tunc servo Dei cum gravi moerore indicatum est, qui manu sua protinus oblationem dedit dicens : Ite et hanc oblationem pro eis offerri Domino facite, et ulterius excommunicatae non erunt. Quae dum oblatio pro eis fuisset immolata, et a diacono iuxta morem clamatum est, ut non communicantes ab Ecclesia exirent, illae exire ab Ecclesia ulterius visas non sunt. – L'intégrité fut ensuite rétablie par l'oblation, et les corps ne durent plus sortir du sépulcre. – Dans la même œuvre, II, 24 (p. 971), se trouve l'histoire d'un petit moine qui mourut en état de désobéissance à l'abbé. Il fut enterré ; mais chaque fois qu'on le mettait sous terre, la terre le rejetait. Saint Benoît fit placer une hostie consacrée, sur la poitrine du cadavre, qui, ensuite, ne fut plus rejeté par la terre. – Les admirateurs de la « science » médiévale ne devraient pas oublier qu'en ce temps qui leur est cher, tout le monde croyait à ces historiettes. Aujourd'hui, le jugement qu'on leur applique est plus en accord avec les faits.

[FN: § 1311-2]

DOM CALMET ; Diss. sur les appar. Plus loin : « (p. 346) Ils [les Grecs modernes] racontent que sous le Patriarche de Constantinople, Manuël, ou Maxime, qui vivait au quinzième siècle, l'Empereur Turc de Constantinople voulut savoir la vérité de ce que les Grecs avançoient touchant l'incorruption des hommes morts dans l'excommunication. Le Patriarche fit ouvrir le tombeau d'une femme, qui avoit eu un commerce criminel avec un Archevêque de Constantinople. On trouva son corps entier, noir et très-enflé, les Turcs l'enfermèrent dans un coffre sous le sceau de l'Empereur, le Patriarche fit sa prière, donna l'absolution à la morte, et au bout de trois jours le coffre ayant été ouvert, l'on vit le corps réduit en poussière ». HUET, évêque d'Avranches, dit, à propos de ces croyances : « Je n'examine point ici si les faits que l'on rapporte sont véritables, ou si c'est une erreur populaire : mais il est certain qu’ils sont rapportés par tant d'Auteurs. habiles et dignes de foi, et par tant de témoins oculaires, qu'on ne doit prendre parti sans beaucoup d'attention ». Cité de LENGLET DUFRESNOY; Traité... sur les app., les visions, etc., t. II, p. 175.

[FN: § 1312-1] CUNNINGHAM ; Voyage à la Nouvelle-Galles du Sud ; dans Biblioth. univ. des voy., t. 43 : « (p. 93) La vengeance chez eux, comme chez la plupart des sauvages, n'est jamais assouvie tant qu'elle ne s'est pas éteinte dans le sang d'un adversaire. Ainsi que les Chinois, ils s'inquiètent peu de la personne, mais si un blanc les a offensés, ils passent généralement leur colère sur le premier individu de cette couleur qu'ils trouvent à leur portée ».

Note ajoutée à l’édition française par l’auteur: Les sentiments complexes auxquels on donne le nom de haine appartiennent en partie à ce genre. La crainte est très souvent l'origine de la haine, chez l'homme et chez l'animal. La haine, en de nombreux cas, se change en mépris lorsque la crainte disparaît. En général la haine naît du désir de repousser une atteinte à l'intégrité. Une foi vive fait partie de cette intégrité, et cela explique la violence des haines théologiques. Elles s'atténuent lorsque la foi diminue, ou lorsque l'individu ne la considère plus comme essentielle à sa propre personnalité. Pour un artiste, un littérateur, un poète, non seulement la vanité, mais aussi un sentiment profond de leur art, font voir dans toute manifestation contraire, parfois même dans le simple silence, une offense à l'intégrité. Souvent tout changement à l'état de choses existant est aussi estimé une offense, qui est repoussée par l'attachement à la tradition, la néophobie.

[FN: § 1317-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] Le droit fournit plusieurs exemples de ce sentiment. Ainsi, dans la notion de peine infamante, dans la notion d'infamie des Romains, dans la déclaration qu'un soldat est indigne de servir sa patrie. D'autre part, beaucoup de punitions infligées aux enfants affectent le même sentiment : le bonnet d'âne, qu'on met parfois encore aux petits écoliers, la mise au banc des ânes ou au coin, etc. Suivant le cas, le sentiment d'intégrité prend le nom d'honneur, d'amour-propre, de dignité, de fierté, de réputation, de crédit, etc.

[FN: § 1318-1]

CAES.; De bello gallico, VI, 13. Il dit des druides : Nam fere de omnibus controversiis publicis privatisque constituunt; et, si quod est admissum facinus, si caedes facta, si de hereditate, si de finibus controversia est, iidem decernunt : praemia poenasque constituunt : si qui aut privatus sait publicus eorum decreto, non stetit, sacrificiis interdicunt [ce fut aussi la seule arme du sacerdoce chrétien, quand la religion était persécutée, et n'avait pas encore gagné l'appui des pouvoirs publics]. Haec poena apud eos est gravissima. Quibus ita est interdictum, ii numero impiorum ac sceleratorum habentur [voilà l'effet principal de la déclaration ou sentence : l'altération de l'intégrité] iis omnes decedunt, aditum eorum sermonemque defugiunt, ne quid ex contagione incommodi accipiant : neque iis petentibus ius redditur, neque honos ullus communicatur [conséquences indirectes de l'altération de l'intégrité].

[FN: § 1318-2]

JHERING ; L'esp. du dr. rom., t. I « (p. 280) L'homo sacer, vivait dans un état de proscription religieuse et temporelle. Voué à la vengeance de la divinité qu'il avait outragée par son méfait (sacer), exclu, comme conséquence de toute communion humaine, privé de tous ses biens au profit des dieux, le coupable pouvait être mis à mort par le premier venu. Être sacer était-ce avoir encouru une peine ? Non, à mon avis. Certes, si l'on entend par peine un mal qui s'attache à la perpétration d'un délit, être devenu sacer était la peine la plus grave que l'on puisse imaginer, car il n'y a point de mal que cette situation ne renfermât ; elle constituait en fait le dernier degré de la persécution et de l'humiliation. L'ennemi aussi était privé de droit, mais ce qui aggravait la position de l'homo sacer, c'était l'élément psychologique ; c'était la conscience d'être pour les dieux et pour les hommes un objet d'horreur, de malédiction et d'exécration, d'être, comme un pestiféré [c'est-à-dire la très grave altération de l'intégrité], d'être fui et évité par (p. 281) tout le monde [conséquences de l'altération des intégrités]... (p. 282) Le sacer esse, une fois existant, pouvait être utilisé par la législation, mais il n'a pas été introduit par elle, pas plus que l'infamie qui se trouve dans le même cas [les résidus font naître la législation ; ils ne naissent pas de la législation, excepté en un petit nombre de cas particuliers]. Aucun législateur n'imagine des institutions telles que la peine du sacer et l'infamie, ou, s'il les essaie, comme dans la peine de la privation de la cocarde nationale, il manque complètement son but. De pareilles institutions n'émanent que du sein même du peuple : elles contiennent l'expression spontanée du sentiment moral de la généralité [juste, si l'on supprime ce moral] elles sont un jugement de condamnation prononcé et exécuté par le peuple lui-même ». Non ; elles sont l'expression du sentiment du plus grand nombre, et voilà tout.

[FN: § 1318-3]

SUMNER MAINE ; Early history of institutions, trad. DURIEU DE LEYRITZ : « (p. 57)... La force publique [en Irlande] fut-elle jamais mise en jeu systématiquement, suivant la volonté d'un ou de plusieurs gouvernants, par le mécanisme des cours de justice ? C'est tout au moins douteux. Au contraire, les institutions qui remplaçaient les corps judiciaires ne fonctionnaient, on peut le soutenir, que grâce à la soumission volontaire des plaideurs qui y recouraient ». C'est vrai, si nous traduisons en langue juridique moderne les faits anciens ; mais si nous voulons parler la langue de ce temps-là, nous dirons que les réponses des brehons (légistes irlandais) avaient autorité pour déclarer ce qu'était un homme, quelle était la nature de ses actions ; et c'est cette déclaration qui, grâce à l'aide de l'opinion publique, frappait plus ou moins gravement l'homme dont l'intégrité venait ainsi à être altérée. L'auteur dit des brehons : « (p. 68) Il est impossible de comparer une autorité quelconque de notre époque avec celles d'hommes qui, dans un temps de crédulité aveugle, disaient simplement d'une règle légale : „ Elle a été établie par les docteurs “, ou se servaient de la formule sans réplique : „ C'est écrit ! “ ». Mais les jurys d'honneur de notre époque agissent exactement de cette façon, et des règles qu'ils suivent ils peuvent dirent seulement : « On fait ainsi », ce qui vaut le motif : « C'est écrit ».

[FN: § 1320-1]

LETOURNEAU ; L'évol. relig. L'auteur note que morimo « (p. 70) est un terme général servant à désigner les esprits et les ombres... C'est aux morimos qu'on attribue toutes les calamités ; on a l'habitude de les accabler d'injures, aussi les missionnaires ne réussissaient-ils pas à persuader aux indigènes qu'il pouvait déplaire à Dieu, au Dieu chrétien, qu'on l'insultât. Pour les Cafres, les morimos sont simplement des hommes invisibles, et on les tuerait bien volontiers si la chose était possible : „ Que ne puis-je l'atteindre et le percer de ma lance ! “ (p. 71) disait un chef en parlant d'un morimo ». Notre auteur dit que les Cafres ont un autre nom, Thiko, qui, selon Moffat, « (p. 71) désigne un esprit malveillant, démoniaque, parfois la mort. C'est à lui que pensent les Hottentots quand, durant les orages, ils lancent vers le ciel leurs flèches empoisonnées ; et ils le font évidemment avec l'espérance de l'atteindre et de le tuer ».

[FN: § 1321-1]

LETOURNEAU ; L’évol. relig. :. « (p. 95) D'ailleurs, à moins qu'on ait peur de son fétiche, on le délaisse, dès qu'il tarde à vous satisfaire. Le nègre de Guinée traite son fétiche exactement comme un homme ; avant d'en changer, il le bat pour le forcer à obéir. Veut-il dérober à son fétiche la connaissance de ses actions ? Il le cache dans sa ceinture ».

[FN: § 1321-2]

Iliade, V, 383-402. Achille parle à Apollon comme un nègre à son fétiche, quand il dit (XXII, 20) : « Certes, je me serais vengé de toi, si j'en avais eu le pouvoir ».

[FN: § 1321-3]

Iliade, III, 399 et sv. Aphrodite veut amener auprès de Pâris Hélène récalcitrante, qui se fâche contre la déesse. Le scoliaste s'en scandalise ; il dit :

– « Et les paroles [d'Hélène] sont des blasphèmes contre la divinité : ,,Va t'asseoir auprès de lui [de Pàris] ; quitte le chemin des dieux et ne remets plus les pieds dans l'Olympe.“ Et [la réponse d'Aphrodite] est inconvenante „ Ne m'irrite pas, misérable ! “ »

[FN: § 1321-4]

NONN. ; Dionys., XLVIII, 690 et sv. La nymphe Aura, indignée d'avoir été violée par Dionysos, va dans le temple d'Aphrodite et fouette la statue de la déesse. Au chant XXX, 194 et sv., on raconte la mort d'Alkimakéia, qui avait osé flageller la statue de Héra.

[FN: § 1322-1]

PLAT ; De rep., 1. II, p. 378; 1. III, p. 389 et sv.

[FN: § 1322-2]

Bebel, mort en 1913, laissa un patrimoine atteignant presque le million. En tout cas, même en admettant les réductions des amis, il était certainement de plusieurs centaines de mille francs.

[FN: § 1323-1]

ARR.; De exp. Alex., VII, 14.

[FN: § 1323-2]

SUET. ; Calig., 5 : Quo defunctus est die, lapidata sunt templa, subversae Deum arae, Lares a quibusdam familiares in publicum abiecti, partus coniugum expositi.

[FN: § 1323-3]

Par exemple, le sentiment de la solidarité, dont quelques humanitaires ont imaginé l'existence entre Dieu et l'homme. On est allé plus loin. Un pasteur protestant fait rassurer Dieu par l'homme, qui lui dit de pas avoir peur ! W. MONOD ; Un athée. L'auteur exprime l'opinion que si le mal existe dans le monde, c'est parce que Dieu ne peut l'empêcher : « (p. 26) Eh bien ! ce Dieu vaincu est celui qui parle à mon cœur !... Dieu s'efforce [d'empêcher le mal] et ne réussit pas toujours... (p. 87) Et alors, devant les spectacles de l'iniquité, ou de la douleur inexplicable, notre foi pourrait s'exprimer de la sorte, en un sublime entretien avec le Père : „ Ne crains rien ! Je ne te soupçonne point. Je sais que tu n'as pas trempé là-dedans. Si je le croyais, je serais désespéré ! “ Prier Dieu quand même... c'est associer sa propre impuissance à l'impotence divine, c'est dire au Père : „ Si nous sommes vaincus, nous le serons ensemble ! Rien n'est perdu; je reste ton enfant! “ » Ceux qui croient à ces choses peuvent aussi croire sans autre que Diomède frappa Aphrodite.

[FN: § 1325-1]

DEMOSTH. (?); in Neeram, 122, p. 1386 :

[FN: § 1325-2]

MOMMSEN ; Le droit pénal rom., t. II : « (p. 414) La femme libre romaine est obligée par la loi morale de s'abstenir de tout commerce charnel avec un homme avant son mariage et de n'en avoir après son mariage qu'avec son mari ; par contre, l'homme n'est soumis à la même loi morale qu’autant qu'en portant atteinte à la chasteté d'une vierge ou de l'épouse d'autrui il se rend complice de celle-ci ». La République se préoccupa peu de légiférer sur ce point ; elle laissa le soin de réprimer ces délits aux tribunaux domestiques ; mais Auguste et ses successeurs firent en sorte que la répression fût l'œuvre de lois de L’État. « (p. 417) Le droit ne tient compte des manquements à la chasteté que s'ils sont commis par une femme libre soumise au devoir de (p. 418) l'honnêteté (matrona, materfamilias), mais ici la répression s'étend toujours au complice mâle. Les esclaves du sexe féminin ne tombent pas sous le coup de cette loi : il n'en est pas de même des femmes mariées ou non mariées dont on n'exige pas l'honnêteté à raison de leur condition de vie : ce sont les filles publiques aussi longtemps qu'elles persistent dans leur profession, les tenancières de maisons publiques, les actrices, les tenancières de locaux ouverts au public, les femmes vivant dans un concubinage indécent. Mais le simple fait de mener une vie dissolue ne soustrait pas la femme romaine libre aux conséquences juridiques de ses manquements à la chasteté ». En note : « L'impunité n'est assurée que par l'inscription sur la liste des filles publiques ou par le fait d'embrasser une profession qui donne la même liberté ». Ici l'on voit bien le caractère proprement civil de la législation. Et encore, vers la fin de l'Empire romain, Saint Augustin pouvait écrire que la fornication et l'ivrognerie n'étaient pas défendues par les lois humaines, mais seulement par les lois de Dieu. – D. AUG.; Serm., 158, c. 5, 6 : Invenis hominem concupiscentias suas carnales sectantem... aucupari undique, voluptates, fornicari, inebriari (non dico amplius) fornicari, inquam, inebriari. Haec dixi quae licite committuntur, sed non Dei legibus. Quis enim aliquando ad iudicem ductus est, quia meretricis lupanar intravit ? Quis aliquando in publicis tribunalibus accusatus est, quia per suas lyristrias lascivus immundusque defluxit ? Quis aliquando habens uxorem, quia ancillam suam vitiavit, crimen invenit ? Sed in foro, non in coelo ; in lege mundi, non in lege Creatoris mundi. Ici, le saint établit très bien une séparation, qui trop tôt fut supprimée, entre le droit et la morale. – En poursuivant notre étude, nous voyons ensuite que l'usage établissait diverses catégories entre les femmes publiques. – NONIUS MARCELLUS en mentionne deux, V, p. 423 : Inter Meretricem et Prostibulum hoc interest. Meretrix honestioris loci est et quaestus ; nam meretrices a merendo dictae sunt, quod copiam sui tantummodo noctu facerent ; prostibula, quod ante stabula stent, quaestus diurni et nocturni causa. – Le prix aussi donnait lieu à des différences. – FESTUS (P. DIAC.) : Diobolares meretrices dicuntur, quae duobus obolis ducuntur. – Celius appela Clodia quadrantaria, pour l'insulter comme une vile femme publique.

[FN: § 1325-3]

OVIDE a grand soin de dire et de répéter qu'il ne chante que des amours licites. Art. amat., I :

(31) Este procul vittae tenues, insigne pudoris ;
Quaeque tegis medios, instita longs, pedes.
Nos Venerem tutam, concessaque furta, canemus.

«Allez au loin, bandelettes [vittae], signe de pudeur, et vous, longs pans qui couvrez à demi les pieds. Nous chanterons une Vénus sûre et des larcins permis ». Les vittae étaient portées par les vestales, les matrones et les jeunes filles ingénues. – SERV. ; Ad Aen., VII, 403 : [Crinales vittas]. Quae solarum matronarum erant : nam meretricibus non dabantur. – OVID ; Trist., II, répète les vers 31, 32, et au lieu du 33, il écrit :

(249) Nil, nisi legitimum concessaque furta, canemus.

Cfr. Remed. amor.,385-386. – Pont., III, 8, 51. – TIBULL. ; 1, 6, 67. – PLAUT. Mil.

glor., 791 (788). – OVID. ; Art. amat.,III, répète :

(57) Dum facit ingenium; petite hinc praecepta, puellae,
Quas pudor, et leges, et sua iura sinunt.
(483) Sed quoniam, quamvis vittae careatis honore,
Est vobis vestros fallere cura viros ;
(613) Nupta virum timeat : rata sit custodia nuptae.
Hoc decet : hoc leges iusque pudorque lubent.
Te quoque servari, modo quara vindicta redemit,
Quis ferat ? ut fallas, ad mea sacra veni.

« Qu'une épouse craigne son mari ; que la garde de l'épouse soit regardée comme valable ; voilà qui est convenable ; voilà ce que les lois, le droit et la pudeur ordonnent ; mais qui pourrait tolérer que toi aussi, tu sois asservie, toi que la verge prétorienne a affranchie naguère ? Viens, par mes vers, apprendre à tromper ».

[FN: § 1325-4]

Corp., IV, 2689. Sur la pierre est représenté un voyageur qui tient un mulet par la bride et règle ses comptes avec une femme. – Copo, computemus – Habes vini (sextarium) unum, panem, assem unum ; pulmentarium, asses duos – Convenit – Puellam, asses octo – Et hoc convenit – Faenum malo, asses duos – Iste mulus me ad factum. – ULPIEN ; dans le Dig., XXIII, 2, 43 : Palam quaestum facere dicemus non tantum eam, quae in lupanario se prostituit, verum etiam si qua (ut adsolet) in taberna cauponia vel qua alia pudori suo non parcit. (1) Palam autem sic accipimus passim, hoc est sine dilectu : non si qua adulteris vel stupratoribus se committit, sed quae vicem prostitutae sustinet... (9) Si qua cauponam exercens in ea corpora quaestuaria habet (ut multae adsolent sub praetextu instramenti cauponii prostitutas mulieres habere), dicendum hanc quoque lenae appellatione contineri. – Cod. Iust., IV, 56, 3, Imp. Alexan der... Eam, qaae ita venit, ne corpore quaestum faceret, nec in caupona sub specie ministrandi prostitui, ne fraus legi dictae fiat, oportet. – Une loi de Constantin distingue la tenancière du cabaret, des femmes qui servent les clients. La première peut être accusée d'adultère ; non les dernières, à cause de leur condition ignoble. Cod. Iust., 1X, 9, 28. – Cfr. VIRG. ; Copa.–- PHILOSTR. ; Epist., 32 (25), 33 (24), 60 (23). – La distinction de la loi de Justinien est en opposition avec le tabou chrétien, qui est bien exprimé par SAINT CHRYSOSTOME : Homil. V in I ad Thessal. L'auteur ne veut aucune distinction. Il dit que suivant Saint Paul, non seulement il ne faut pas avoir de rapports avec la femme du frère chrétien « mais qu'il ne faut pas avoir non plus d'autres femmes, ni celles qui ne sont pas mariées ni les femmes publiques. Il faut s'abstenir de toute fornication ». – ULP.; dans le Dig., III, 2, 4 : ... lenocinium. facit qui quaestuaria mancipia habuerit : sed et qui in liberis hunc quaestum. exercet, in eadem causa est. Sive autem principaliter hoc negotium gerat sive alterius negotiationis accessione utatur (ut puta si caupo fuit vel stabalarius et mancipia talia habuit ministrantia et occassione ministerii quaestum facientia : sive balneator fuerit, velut in quibusdam provinciis fit, in balineis ad custodienda vestimenta conducta habens mancipia hoc genus observantia in officina), lenociDii poena tenebitur. – S'il y avait des prostituées en tous ces lieux, elles devaient abonder.

[FN: § 1325-5]

Dig., V, 3, 27, § 1. Sed et pensiones, quae ex locationibus praediorum urbanorum perceptae sunt, venient, licet a lupanario perceptae sint : nam et in multorum honestorum virorum praediis lupanaria exercentur.

[FN: § 1326-1]

Mgr GUERIN ; Les conciles, t. I. Concile d'Ancyre en Galatie, l'an 314 : « (p. 55) Le 14e [canon] ordonne aux prêtres et aux diacres, qui s'abstenaient de manger de la viande, de ne le pas faire par mépris, comme si la viande était immonde. Il leur enjoint ensuite de la toucher et de manger des herbes cuites avec elle pour montrer que, s'ils s'en abstiennent, ce n'est pas qu'ils l'aient en horreur ni qu'ils la regardent comme mauvaise... Cette ordonnance du Concile est une sage précaution contre les Ébionites, les Manichéens et quelques autres hérétiques qui condamnaient, comme mauvais, l'usage de la viande, de crainte que les fidèles ne fussent portés à croire que les prêtres et les diacres, dont il est parlé dans ce canon, voulussent favoriser les erreurs de ces hérétiques. L'usage de la viande n'est donc pas mauvais en soi, quoiqu'il y ait du mérite de s'en abstenir par un esprit de pénitence ou par devoir quand l’Église l'ordonne ». Si l'Église n'avait pas protégé de cette manière la liberté de nourriture, il y aurait peut-être aujourd'hui des vertuistes qui obtiendraient des gouvernements de faire mettre en prison ceux qui mangent de la viande.

[FN: § 1326-2]

FRA BARTOLOMMEO DI SAN CONCORDIO ; Ammaestramenti degli antichi, Dist. XXIV : « (c. 3) La bouche est une cause de luxure... (c. 4) Non seulement l'usage de la nourriture, mais aussi celui du vin doit être modéré... (c. 5) Auteur. Le vin, sans aucun doute, est une nourriture de luxure ».

[FN: § 1327-1]

RENAN; Marc-Aurèle: « (p. 570) Il est si doux de s'envisager comme une petite aristocratie de la vérité, de croire que l'on possède, avec un groupe de privilégiés, le trésor du bien ! L'orgueil y trouve sa part ; le juif, le métuali de Syrie, humiliés, honnis de tous, sont au fond impertinents, dédaigneux ; aucun affront ne les atteint ; ils sont si fiers entre eux d'être le peuple d'élite ! »

[FN: § 1329-1]

On a maintenant reconnu qu'il y a beaucoup de vrai dans les Mémoires de Casanova. On y peut voir que dans les pays par lui parcourus, il y avait, en fait de mauvaises mœurs, de grandes différences dans la forme, de légères dans le fond. – S. DI GIACOMO ; dans Giornale d'Italia, 11 février 1913 : « Giacomo Casanova a-t-il, oui ou non, été véridique, lorsque, durant sa solitude laborieuse, dans la bibliothèque que le bon comte de Waldstein avait confiée aux soins patients et savants de sa réorganisation, il a raconté, entre autres, les choses qu'il a vues à Naples ou qui lui sont arrivées, dans les séjours qu'il y a faits ? Les noms de ceux qu'il a connus là sont-ils bien ceux qu'il indique ? Et la société parthénopéenne de ces années, la plèbe, l'armée, le clergé, la noblesse extravagante, le tempérament léger et cette merveilleuse et presque inconcevable fluctuation de nobles idées, d'études économiques, de philosophie élevée et nouvelle, dont certains des justes et austères programmes éthiques paraissaient déjà être un signe des temps, à ceux qui y prêtaient attention, tout cela n'était-il peut-être pas tel que l'a décrit et illustré l'observateur aventurier ? Nous verrons. Si, en attendant, je puis émettre sur les grandes lignes le jugement que je me suis fait des récits parthénopéens du chevalier, je dirai sans autre qu'il m'a surpris, non seulement par le souvenir qui lui est resté de ces événements et de leurs moindres détails, après un si long espace de temps, mais aussi par l'exactitude de son récit, qui m'a poussé à poursuivre, non des ombres de sa fantaisie exercée, mais des personnes et des choses qui ont vraiment existé, qui sont presque encore vivantes ».

[FN: § 1330-1]

DUBOIS ; Mœurs... des peuples de l’Inde, t. I. Après avoir raconté l'incontinence des Brahmes, l'auteur ajoute : « (p. 440) Cependant, qui pourrait le croire après ce qu’on vient de lire ; il n'est aucun pays du monde où la décence extérieure, proprement dite, soit plus régulièrement observée. Ce que nous appelons galanterie leur est tout à fait inconnu : ces badinages un peu libres, ces fades quolibets, ces éloges sans fin, ces soins empressés et sans mesure dont nos petits maîtres sont si prodigues, (p. 441) paraîtraient des insultes aux dames indiennes, même les moins chastes, si elles en étaient publiquement l'objet. Un mari même qui se permettrait quelques familiarités avec son épouse légitime, passerait pour un homme ridicule et de mauvais ton ». On pourrait répéter à la lettre les observations de Dubois, pour nombre de pays d'Europe et d'Amérique, où les paroles sont hypocritement morales et les actions laissent beaucoup à désirer. Une autre observation de Dubois s'applique aussi à ces pays: « (p. 487) L'adultère de la part des femmes, quoique infamant et condamné par les règlements des brahmes, n'est cependant pas puni, dans leur caste, avec autant de rigueur que dans la plupart des autres. S'il est secret, ils n'y attachent qu'une légère importance : la publicité seule les inquiète ; et dans ce cas, les maris sont les premiers à contredire les bruits qui circulent sur (p. 438) l'honneur de leurs moitiés, afin de prévenir les suites d'un éclat ». Toutefois, il est un point sur lequel, aux Indes, l'hypocrisie qu'on observe en nos contrées fait défaut : « (p. 437) Tout commerce avec une courtisane, ou avec une personne non mariée, n'est pas une faute aux yeux des brahmes ; ces hommes, qui ont attaché l'idée de péché à la violation des pratiques les plus indifférentes, n'en voient aucun dans les derniers excès de la luxure. C'est principalement à leur usage que furent destinées, dans l'origine, les danseuses ou les prostituées attachées au service des temples ; on leur entend souvent réciter en chantant ce vers scandaleux : ... dont le sens est : „ Le commerce avec une prostituée est une vertu qui efface les péchés ” ».

[FN: § 1330-2]

Justement à propos des plaisirs de l'amour, OVIDE ; Amor., III, 4, 17 : Nitimur in vetitum semper cupimusque negata. « Nous désirons toujours ardemment ce qui est défendu, et nous avons envie de ce qu'on nous refuse ». Et plus haut : (9) Cui peccare licet, peccat minus (§ 17511). – Art. amat., III, 603 : Quae venit ex tuto, minus est accepta voluptas. « La volupté dont nous jouissons sans péril nous est moins agréable ».

[FN: § 1330-3]

La Liberté, 14 février 1912 : « Berlin, 12 février. – Il y a six ans, la veuve d'un capitaine prussien installait dans le voisinage de sa villa, à Teltow, une petite bergerie où vivaient en paix deux brebis, un poney, trois canards, quelques lapins, des poules et un coq. Pendant six années consécutives, bipèdes et quadrupèdes ne connurent que les agréments d'une existence facile et heureuse. Mais, l'autre jour, les foudres de la justice faillirent s'abattre sur eux. L'affaire vaut d'être contée. Près de la bergerie, se trouve une école primaire et, pendant la récréation, les petits Prussiens suivaient d'un œil amusé les ébats des poules, canards et brebis. Le maître d'école suivit un jour ses élèves jusqu'à l'enclos de la bergerie. Et ce qu'il vit l'indigna profondément. Il prit sa plus belle plume de magister, et voici ce qu'il écrivit au bourgmestre de Teltow : „ Le spectacle permanent des penchants inesthétiques et sexuels de la gent emplumée exerce la plus néfaste influence sur la morale des enfants “. Les ébats d'un coq entreprenant avaient froissé le digne homme dans sa pure esthétique ! Ce qu'il y a de plus drôle, c'est que le bourgmestre, à coup sûr un brave homme, avisa la veuve du capitaine, par ordonnance de police, d'enfermer le coq à huis clos. Mais la veuve n'entendit pas de cette oreille et porta le différend devant les tribunaux. Le procureur donna raison au maire et condamna en un réquisitoire sévère la dépravation croissante des mœurs. L'avocat qui défendait la veuve s'appliqua à faire ressortir le côté comique de la question et lorsqu'il demanda aux juges, „ de procéder à une visite de la bergerie et de convoquer le maître d'école afin que celui-ci fit une démonstration sur l'impudeur du coq ”, l'auditoire partit d'un vaste éclat de rire. Les juges eurent le bon esprit d'annuler l'ordonnance de police établie par le maire et mirent tous les frais à la charge de l'État ». La Gazette de Lausanne, 1er janvier 1913, rapporte un autre cas de pudeur absurde et hypocrite : « Peut-on embrasser sa femme dans un train, en Angleterre ? Le gouvernement bavarois a récemment condamné à l'amende un homme qui, dans un train, avait embrassé sa femme légitime. Justement ému, un grand journal anglais envoya un de ses meilleurs reporters consulter un des hauts fonctionnaires des chemins de fer britanniques, afin de savoir si les voyageurs pouvaient être en Angleterre exposés à de pareilles vexations. Voici la réponse, assez rassurante, de cet important personnage : „ Les voyageurs circulant sur les chemins de fer anglais n'ont rien à craindre. Un homme peut, dans la plupart des circonstances, sur le quai ou dans le train, embrasser sa femme ou toute autre dame dûment autorisée, lors d'une rencontre ou d'un départ ou pendant un voyage ; il lui est permis de tenir la main de sa compagne ou même de serrer cette dernière contre lui ; il a aussi le droit de permettre à sa femme de reposer la tête contre son épaule lorsqu'elle se sentira fatiguée “. Heureux Anglais, qui ont enfin la Charte des libertés nécessaires ! » On a l'habitude de prendre des anecdotes semblables pour de simples plaisanteries, mais elles n'en sont pas. Elles sont la manifestation extrême du résidu sexuel qui, en certains esprits, prend des proportions gigantesques, les fascine et leur enlève le sens du réel et du ridicule qui subsiste dans les esprits moins hantés. On observe ces phénomènes en tout temps. Ils sont habituels chez les ascètes chrétiens, et ne font pas défaut chez les Israëlites. On en peut citer un grand nombre du Talmud. Les suivants suffiront. SCHWAB ; Talm., t. VI, traité Taanith : «(p. 149)... lors de l'entrée de Noë dans l'arche, la cohabitation lui fut interdite, comme il est dit (Genèse VI, 18),... (p. 150) mais à la sortie elle lui fut permise, selon ces mots (ib., VIII, 16)... R. Hiya b. Aba dit : L'expression ils quittèrent l'arche selon leurs familles (ib.) signifie que, pour avoir conservé leur généalogie (sine coïtu), ils ont eu le bonheur d'échapper au déluge. Ce qui prouve qu'il faut l'entendre ainsi, c'est que les 3 qui ont agi contre nature dans l'arche, Cham, le chien, le corbeau, en ont été punis... » Un rabbin nous donne un renseignement plaisant au sujet de ce corbeau. SCHERZERI; Selecta rabinicophilologica ; comment. Rasche in cap. VIII, Gen., p. 196, VIII, 7 : Exeundo et redeundol] Ivit et volitavit cirea arcam, et non ivit in missione sua, quia eum (Noachum) suspectum habebat, propter consortem sua (ne coiret cum illa in absentia). Ce n'est déjà pas mal ; mais il y a mieux. Le même SCHERZERI traduit le commentaire d'un autre rabbin, sur la Genèse, où l'on dit : (p. 18) Docet (scriptura) quod Adam venerit ad omnia animantia et bestias, et non saciatus fuerit ipsius appetitus per illa. Il ajoute en note (p. 66) Reuchlinus, Cabbal., 1. I, fol. 626, ita Raschi citat verba... et ita reddit Venit Adam ad omne iumentum et animal, et non commovebatur sensus eitis, in illis, usque dum venisset ad uxorem. Quae ultima verba in meo exemplari (p. 67) non extant. Hic iam Capnio sub persona Simeonis Iudaei... ex his verbis, inquit, diaboli incarnati, larvaeque furiales potius, quam homines, seditionem Christianitatis adversum nos excitare parati... hoc dictum sic exposuerunt : quasi Adam tunc cum omnibus bestiis et animalibus foede coiverit. Nam, qui fieri, possit ut tantus Vir et tain magnus Adam cum cimice, pulice, musca et cicada feminaliter coivisse intelligatur ? – Il semble impossible que l’homme puisse atteindre un tel degré de sottise, et que cette race de niais ait survécu jusqu'à notre époque. – SCHWAB ; Talm. de Babyl., traité des Berakhoth : « (p. 260) En suçant le lait de sa mère, il [David] aperçoit ses seins, et il chante en ces termes [Ps. CIII, 2-3] : „ Bénis l'Éternel, mon âme, et n'oublie pas tous ses bienfaits. “ – „ Quels sont-ils ? “ – „ C'est, répondit R. Abahou, d'avoir placé les seins de la mère au siège de l'intelligence “. – „ Pourquoi ? “ – „ Pour que l'enfant, répondit R. Iuda, ne voie pas la nudité, “ (comme chez les femelles des animaux), ou, selon R. Matna, „ pour que l'allaitement n'ait pas lieu dans un endroit malpropre “ ». Attendons-nous à ce que nos honnêtes et intelligents vertuistes fassent des lois pour prescrire l'attitude des nourrissons, quand ils prennent le sein de leur mère. – La Liberté, 6 décembre 1912 : « La pudique Australie. – Sur l'initiative du gouvernement australien, les douanes fédérales d'Australie viennent de prohiber l'introduction des cartes postales illustrées indécentes. Jusque-là, rien de plus naturel. Mais les agents des douanes australiennes ont été invités à interpréter le mot indécent dans son sens le plus large, c'est-à-dire de l'étendre à tout ce qui peut présenter un caractère blasphématoire, indélicat, immodeste et grossier. Immodeste ! voilà un terme bien élastique et grâce auquel la reproduction en cartes postales du Baiser de Rodin, d'Enfin seuls !, de l'Amour et Psyché, pour ne citer que ces œuvres artistiques, sera interdite en Australie. On disait autrefois : „ la pudique Albion “. Quel qualificatif donner à l'Australie ? » On dit que dans ce pays si bien protégé fleurissent des amours qui ne sont pas naturelles. – Journal de Genève, 31 mars 1911 : « Une condamnation prononcée contre M. Robert Siévier, rédacteur en chef d'une feuille hebdomadaire londonienne, montre avec quelle énergie l'Angleterre entend poursuivre sa campagne contre la littérature pornographique. M. Muskett, au nom de la couronne, déclara au président du tribunal, M. Marsham, qu'un numéro de la feuille dirigée par M. Siévier contenait un paragraphe d'un caractère obscène. M. Marsham, après avoir très durement admonesté M. Siévier, le condamna à une amende de 250 francs et aux frais ». Mais les voleurs du continent trouvent un asile sûr en Angleterre, à cause des difficultés de la procédure.

[FN: § 1331-1]

RENAN; Marc-Aurèle « (p. 245) Un des mystères le plus profondément entrevus par les fondateurs du christianisme, c'est que la chasteté est une volupté et que la pudeur est une des formes de (p. 246) l'amour. Les gens qui craignent les femmes sont, en général, ceux qui les aiment le plus. Que de fois on peut dire avec justesse à l'ascète : Fallit te incautum pietas tua ». Là, il n'y a aucun mystère : c'est simplement la théorie dite des voiles. Renan décrit mieux qu'il n'interprète, quand il dit plus loin : « (p. 247) Ainsi s'explique ce mélange singulier de pudeur timide et de mol abandon qui caractérise le sentiment moral dans les Églises primitives ». C'est tout bonnement le résidu sexuel ; mais l'auteur estime de son devoir d'ajouter une déclamation : « Loin d'ici les vils soupçons de débauchés vulgaires, incapables de comprendre une telle innocence ! Tout était pur dans ces saintes libertés : mais aussi qu'il fallait être pur pour pouvoir en jouir ! » On dirait que notre auteur s'est trouvé présent et a vu que tout était pur. Il dit ensuite : « (p. 247) La légende nous montre les païens jaloux du privilège qu'a le prêtre d'apercevoir un moment dans sa nudité baptismale celle qui, par l'immersion sainte, va devenir sa sœur spirituelle. Que dire du saint baiser, qui fut (p, 247) l'ambroisie de ces générations chastes ? ... » Pourtant les chrétiens eux-mêmes s'aperçurent bientôt que le saint baiser, entre hommes et femmes, présentait quelque danger. – ATHENAG. ; Supplic. pro christ., 3-9, éd. Oxon, p. 128- p. 169-170, éd. Ienae. L'auteur cite d'un autre auteur que nous ne connaissons pas : « „ Si quelqu'un donne un second baiser, parce qu'il y trouve plaisir [il pèche] “ » et il ajoute : « „ Ainsi donc, il convient d'être prudent avec le baiser, et plus encore avec le salut, car si la pensée est tant soit peu entachée, nous sommes exclus de la vie éternelle “ ». – CLEM. ALEX. ; Paed., III, 11, p. 301 Pott., 257 Par. Il veut que le baiser ne soit pas impudique, mais mystique, et qu'il soit donné « d'une bouche pudique et fermée » : . Renan peut dire ce qu'il voudra : cette dernière observation n'est pas si pure ! Cf. § 1394.

[FN: § 1332-1]

H. BOIS; Le rév. au Pays de Gall. L'auteur transcrit un récit de Evan Roberts. Les personnes dont on y fait mention sont les suivantes : « (p. 437) Mary désigne une Miss Mary Davies de Gorseinon, qui n'est pas parente des deux demoiselles Davies plus connues (Annie et Maggie, les deux sœurs de Maesteg). Dan est le frère d'Evan Roberts ». Evan Roberts rapporte : « ... À ce moment une voix me dit : „Vous devez rester silencieux pendant sept jours “. Les soeurs venaient d'arriver à ce moment-là, et après que Mr. Mardy Davies fut parti, je leur demandai par écrit de chanter le cantique de Newmann (Lead, Kindly light). Le chant fut tendre et solennel : elles pleuraient en chantant ; „ Un seul pas, c'est assez pour moi ! ” Elles chantèrent ensuite le cantique : „ J'ai besoin de toi à chaque heure… “. L'une d'elles demanda : „ Qu'allons-nous faire ? “ La réponse fut : ,, Attendez jusqu'à ce que je reçoive un message explicite du ciel. Il a suggéré (ce mot était souligné par deux traits dans le cahier où Evan Roberts a écrit ses réponses) que l'une d'entre vous retournerait chez elle et que l'autre resterait avec moi “. Au bout d'un certain temps, et après beaucoup de prières, la réponse vint : ,, Annie doit demeurer ici pour me soigner, et Mary ira à la maison pour se reposer, ou bien rejoindra Maggie et Dan Il “. Miss Annie Davies reste et Evan Roberts lui donne ses instructions par écrit : « (p. 438) Il n'y a personne d'autre que vous qui doive me voir pendant la semaine prochaine, – pas même mon père et ma mère ». Et la jeune fille soigna le prophète pendant une semaine, sans entendre une parole de lui. L'auteur ajoute : « (p. 459) Un trait est de nature à étonner, voire même à choquer le lecteur français, c'est l'assurance avec laquelle Evan Roberts désigne comme un message explicite du ciel l'ordre prétendu de garder auprès de lui une jeune fille, une seule, Annie Davies, alors que les autres sont renvoyées et qu'il se refuse à voir personne pendant sept jours... Il est bien vrai que le Saint-Esprit défendait à Roberts de parler, mais non pas d'écouter et d'écrire et de lire. Et assurément d'autres qu'Evan Roberts auraient pu voir dans cette suggestion plutôt une tentation qu'un ordre divin ».

[FN: § 1333-1]

Journal des GONCOURT, t. III, p. 6 : « En France, la femme se perd bien plus par le romanesque que par l'obscénité de ce qu'elle lit ».

[FN: § 1334-1] La poésie de Carducci A proposito del processo Fadda, n'est pas seulement une production poétique c'est une description de faits sociaux qui sont communs.

[FN: § 1339-1]

Nous suivons l'énumération que fait MARQUARDT ; Le culte chez les Romains, t. I, p. 14 à 22.

[FN: § 1339-2]

MART. CAPELL. ; II, 149 (voir le commencement de la citation 1339-3) : Interducam et Domiducam, Unxiam, Cinxiam mortales puellae debent in nuptias convocare, ut earum et itinera protegas, et in optatas domos ducas, et cum postes ungant faustum omen affligas. – [Dans MARQUARDT on propose ; funestum omen affligas] et cingulum ponentes in thalamis non relinquas. – Les Romains, de même que les Grecs, attribuaient un sens religieux à l'acte de délier la ceinture de la vierge. P. FESTUS ; De verb. sign., s. r. Cinxiae Iunonis nomen sanctum habebatur in nuptiis, quod initio coniugii solutio erat cinguli, quo nova nupta erat cincta. SUID. ; s. r. : « Celle qui a commerce avec l'homme. Étant donné que les vierges approchant le moment de se marier dédiaient leurs ceintures virginales à Artémis ». Le scoliaste dit dans APOLL., Argonaut., 1, 288, qu'il y avait à Athènes, un temple à Arthémis qui délie la ceinture :

– Cfr. ORPH. ; Hymn., 35, 5. – CALLIMACH.; Hymn., in Iov., 21. – Odyss., XI, 245 (mais Zénodote n'admet pas le vers). – De là l'expression zonam solvere, , pour la femme qui a commerce avec l'homme. La femme qui s'était mariée une seule fois disait avoir délié sa ceinture pour un seul homme. Anth., ep. sepuler., 324 : . « Ayant délié sa ceinture pour un seul homme ». On le disait aussi des femmes qui accouchaient, THÉOCR. ; XVII, 60.

[FN: § 1339-3]

Principalement : Mutinus, Subigus, Prema, Pertunda, Perfica, Ianus consivus, Liber et libera, Fluonia, Nona, Decima, Partula, Vitumnus, Sentinus. Nous en avons d'amples notions grâce aux Pères de l'Église. – Au passage de Saint Augustin, déjà cité (§ 177-4), il faut ajouter les suivants. D. AUGUST.; De civ. Dei, VII, 2. L'auteur dit que les dieux choisis de Varron sont confondus avec d'autres auxquels sont assignées d'humbles fonctions : Nam ipse primum Ianus, cum puerperium concipitur, unde cuncta opera illa sumunt exordium, minutatim minutis distributa numinibus, aditum aperit recipiendo semini : ibi est et Saturnus propter ipsum semen : ibi Liber qui marem effuso semine liberat : ibi Libera, quam et Venerem volunt, quae hoc idem beneficium conferat feminae, ut etiam ipsa emisso semine liberetur. Omnes hi ex illis sunt, qui selecti appellantur. Sed ibi est et dea Mena, quae rnenstruis fluoribus praeest, quamvis Iovis filia, tamen ignobilis. Et hanc provinciam fluorum menstraorum in libro selectorum deorum ipsi Iunoni idem auctor assignat, quae in diis selectis etiam regina est : et hic tanquam Iuno Lucina cum eadem Mena, privigna sua, eidem cruori praesidet. Ibi sunt et duo, nescio qui obscurissimi, Vitumnus et Sentinus ; quorum alter vitam, alter sensus puerperio largiuntur. – Saint Augustin a raison ; ç'aurait été une grande sottise des Romains que d'assigner de si humbles fonctions à des dieux préexistants ; mais on ne descend pas des dieux aux actes : on monte des actes aux dieux. Il est induit en erreur, parce qu'il veut rendre logiques des actions essentiellement non-logiques : (VII, 3) Inter selectos itaque deos Vitumnus vivificator et Sentinus sensificator magis haberi debuerunt, quam Ilanus seminis admissor et Saturnus seminis dator vel sator, et Liber et Libera seminum commotores vel emissores; quae semina indignum est cogitare, nisi ad vitam sensumque pervenerint. – Idem, ibidem, IV, 11. L'auteur dit que Jupiter peut bien être tout ce qu'on veut, ... ipse sit postremo etiam in illa turba quasi plebeiorum deorum : ipse praesit nomine Liberi virorum seminibus; et nomine Liberae feminarum : ipse sit Diespater, qui parfum perducat ad diem ; ipse sit dea Mena, quam praefecerunt menstruis feminarani ; ipse Lucina, quae a parturientibus invocetur : ipse opem ferat nascentibus, excipiende eos sinu terrae, et vocetur Opis... de pavore infantum Paventia nuncupefur; de spe quae venit, Venilia ; de voluptate Volupia; de actu Agenoria; de stimulis, quibus ad nimium actum homo impellitur, dea Stimula nominetur; Strenia dea sit, strenuum faciendo, Numeria, quae numerare doceat; ... ipse in Iugatino deo coniuges iungat; et cum virgini uxori zona solvitur, ipse invocetur, et dea Virginiensis vocetur : ipse sit Mutunus vel Tutunus, qui est apud Graecos Priapus : si non pudet, haec omnia quae dixi, et quaecumque non dixi, non enim omnia dicenda arbitratus sum, hi omnes dii deaeque sit unus Iupiter : sive sint, ut quidam volunt, omnia ista partes eius, sive virtutes eius... On voit ici réunis les dieux entre lesquels les chrétiens firent ensuite l'hiatus. – TERTULL.; Ad. nat.,II, 11. L'auteur parle de ces dieux ... dividentes omnem statum hominis singulis potestatibus ab ipso quidem uteri conceptu, ut sit deus Consevius quidam, qui consationibus concubitalibus praesit, et Fluviona, quae infantem in utero retineat, hinc Vitumnus et Sentinus, per quem viviscat infans et sentiat primum, dehinc Diespiter, qui puerum perducat ad partum. Cum primum pariebant, et Candelifera, quoniam ad candelae lurnina pariebant, et quae aliae deae sunt ab officiis partus dictae. Perverse natos adiuvandi Postvertae, recte natos Prosae Carmentis esse provinciam voluerunt... Si de nuptialibus disseram, Afferenda est ab afferendis dotibus ordinata [on voit bien comment l'hiatus fait défaut] sed sunt, proh pudor! et Mutunus et Tutanus et dea Pertunda et Subigus et Prema dea et Perfica [maintenant, voilà que l'hiatus apparaît chez Tertullien]. Parcite dei impudentes ! Luctantibus sponsis nemo intervenit. – Idem ; de anima, 37 : ... superstitio Romana deam finxit Alemonam alendi in utero fetus, et Nonam et Decimam a sollicitioribus mensibus, et Partalam, quae parfum gubernet, et Lucinam quae producat in lucem. Nos officia divina angelos credimus. Remarquez cette dernière observation ; au fond, ce sont simplement deux théologies en opposition. – ARNOB.; Ad. gent., IV, 7 : ...Etiamne Perfica una est e populo numinum, quae obscoenas illas et luteas voluptates ad exituin perticit dulcedine inoffensa procedere ? Etiamne Pertunda, quae in cubiculis praesto est, virginalem scrobem effodientibus maritis ? Etiamne Tutunus, cuius immanibus pudendis, horrentique fascino, vestras inequitare matronas, et auspicabile ducitis, et optatis ? – Idem;III, 30 : ... Iam vero Iunonem opinatio nonne consimilis Deorum tollit et censu ? Nam si aer illa est, quemadmodum vos ludere ac dictitare consuestis, Graeci nominis praeposteritate repetita, nulla soror et coniux omnipotentis reperietur Iovis, nulla Fluonia, nulla Pomona, nulla Ossipagina, nulla Februtis, Populonia, Cinxia, Caprotina : atque ita reperietur inanissima esse istius nominis fictio, opinionis vacuae celebritate vulgata. – C'est l'erreur habituelle de considérer comme logiques les actions non-logiques. – P. FESTUS; De sign. verb. s. r. Fluoniam Iunonem : mulieres colebant, quod eam sanguinis fluorem in conceptu retinere putabant. – M. CAPELLAE de nupt. phil., II, 149: ... Iuno pulchra, licet aliud nomen tibi consortium coeleste tribuerit et nos a iuvando Iunonem... nam Fluoniam, Februalemque ac Februam mihi poscere non necesse est, cum nihil contagionis corporeae sexu intemerata pertulerim ; (voir la suite de la citation 1339-2). – LACT. ; De falsa relig.,XX, 36 : Colitur... et Cunina, quae infantes in cunis tuetur, ac fascinum submovet : et Sterculus, qui stercorandi agri rationem primus induxit, et Mutinus, in cuius sinu pudendo nubentes praesident [vel prius sedent. D. AUG. ; De civ. dei, VI, 9], ut illarum pudicitiam prior deus delibasse videatur... – Cfr. ARNOB. ; Ad gent., IV, 11. – TERTULL. ; Apol., 25. – P. FESTUS ; De verb. sign., s. r. Mutini Titini sacellum fuit Romae, cui mulieres velatae togis praetextatis solebant sacrificare.

[FN: § 1341-1]

PERRENS ; Les libertins en France au XVIIe siècle : « (p. 5) Le XVIe siècle donnait le nom de libertinage à l'esprit d'incrédulité, esprit très ancien en France... (p. 7) Dans les enfans de Genève le grand hérésiarque [Calvin] combattait tout ensemble la hardiesse des pensées, la licence des mœurs, le parti conservateur... Malheureusement l'opposition donnait au mot de liberté, en même temps que son sens politique, le sens voluptueux qui plait à la jeunesse... Les écarts étaient-ils graves ? C'est peu probable, puisqu'on s'en prenait aux doctrines pour allumer les bûchers ». De même aujourd'hui, les dominicains de la vertu substituent la prison et l'amende aux raisonnements qu'ils sont incapables de tirer de leur esprit chétif. « (p. 7) Désormais, aux imputations doctrinales il [Calvin] joignait les imputations morales : ses victimes désignées étaient des „ débauchés, chrétiens déchus, livrés au démon de la chair“, des anabaptistes, l'abomination de la désolation ». On croit entendre M. Bérenger ou quelque autre semblable bel esprit. « (p. 8) Dans son abondant vocabulaire d'injures, nous rencontrons l’appellation de libertins, dont il semble bien avoir, le premier, enrichi notre langue. Ce mot, on ne le trouve pour désigner ses ennemis, dans aucun manuscrit du XVIe siècle. Nos plus anciens lexiques, en effet, ne portent point ces deux vocables : libertins et libertinage... Le jésuite Philibert Monet se décide avant tout autre (1635) à faire jouir du droit de cité ces deux nouveaux venus du langage parlé... (p. 9) Au fond, c'est l'indépendance religieuse que l'hérésiarque [Calvin] flétrit du nom de libertinage : en user à son exemple, ce serait en mésuser ; derrière lui il a coupé les ponts. Mais, à la longue, les ponts détruits se reconstruisent. Les hommes du XVIIe siècle qui prétendent y passer forcent la main à leur temps... Pour la conduite de la vie, l'acception honorable est nouvelle ; mais les exemples abondent. ,, Je suis tellement libertine quand j'écris – lisons-nous dans Mme de Sévigné – que le premier tour que je prends règne tout du long de ma lettre... Furetière, qui reproduit les sens d'usage, déclare libertins l'écolier qui fripe ses classes, qui désobéit à son maître, la fille, la femme indocile... l'homme qui hait la contrainte, qui suit son inclination, sans pourtant s'écarter des règles de l'honnêteté et de la vertu. Il tient même, tout autant que Richelet... à cette restriction significative, car il ajoute qu'une femme peut dire de soi, dans un bon sens et dans une signification délicate, qu'elle est née libertine. Pour Voltaire aussi le libertin est un homme désireux d'indépendance”. (p. 10) Mais il était inévitable, dans un siècle croyant, que l'esprit d'indépendance fit scandale, s'il s'étendait aux matières de la foi. D'où une signification dérivée, qui devint aisément la principale ».

[FN: § 1343-1]

Une épigramme de l'Anthologie grecque nous présente un cas de fétichisme identique à ceux qu'on observe aujourd'hui chez les nègres. Epig. demonstrativa, 263 : « Quand la vieille Eubule avait quelque chose en l'esprit, elle prenait, comme oracle de Phoebus, le premier caillou qui se trouvait devant ses pieds, et le soupesait dans sa main. Elle le trouvait lourd, si elle ne voulait pas une certaine chose ; plus léger qu'une feuille, si elle voulait cette chose. Ainsi, faisant ce qui lui plaisait, si cela tournait mal, elle rejetait sur Phœbus la faute de l'œuvre de ses mains ». Les anciens héros juraient par leur lance. – IUST. ; Hist., XLIII, 3 : .. ab origine rerum, pro diis immortalibus veteres hastas coluere ob cuius religionis memoriam adhuc deorum simulacris hastae adduntur. –ESCH. ; Sept. advers. Theb., 514-515 (529-530). On dit d'un guerrier :

« Il jure par la lance qu'il possède, et qu'on doit vénérer plus qu'un dieu ». – Cfr. VIRG. ; Aen., XII, 95. – V. FLACC. ; Argonaut., III, 707-711. – Iliad., I, 233-234. – Les fétichismes dont Priape est l'objet sont exactement du même genre. La littérature et les inscriptions ne manquent pas d'exemples nombreux de ce culte, qui n'ont aucune signification obscène. – Corp., 3565 : Genio numin(i)s Pria(pi) poten(t)is polle(nti)s (invi)cti Iul(ius) Agathemerus Aug(usti) libertus a cura amicorum. somno monitus. – In parte postica : Salve sancte pater Priape rerum, Salve. Da mihi floridam iuventam, Da mihi... ut puellis Fascino placeam bonis procaci, Lusibusque frequentibus iocisque Dissipem curas animo nocentes, Nec gravem timeam nimis senectam, Angar haud (miser)ae pavore mortis, Quae ad domu(s) trahet invida(s Aver)n(i) Fabulas Manes ubi rex coercetd, Unde fata negant redire quemquam. Salve, sancte pater Priape, salve. – In latere : Convenite simul quot est(is om)nes, Quae sacrum colitis (ne)mus puellae, Quae sacras colitis a(q)uas puellaee,... – In allero latere : ... O Priape potens, amice, salve : Te vocant prece virgi(nes pudi)cae, Zonulam ut solvas diu ligatam. Teque nupta vocat... – DE RUGGIERO; Syll. epig., vol. II, p. 23-24: d) Intellige = quae mors trahet me ad perosas domus Averni, ubi rex i. e. Pluto cohibet vinclis poenisque castigat Manes fabulosos i. e. inanes... e) Puellae quae sacrum nemus et sacras colunt aquas, sunt Dryades et Naiades... – DESSAU ; 3581 : Faustus Versenni P. ser. Priapum et templum d. s. peculi f. c. 3582. Priepo Pantheo P. P. Aelii Ursio et Antonianus aediles col. Apul. dicaverunt Severo et (Q)uin(t)iano cos. – D. AUGUST. ; De civ. dei, VII, 24 : Iam quod in Liberi sacris honesta matrona pudenda virilia coronabat, spectante multitudine, ubi rubens et sudans, si est ulla frons in hominibus, adstabat forsitan et maritus ; et quod in celebratione nuptiarum, super Priapi scapum nova napta sedere iubebatur. – Tout cela n'est rien en comparaison des mystères indécents de la Grande Mère. – Ibidem., VII, 21. Les chastes matrones couronnaient publiquement un phallus pour obtenir de bonnes moissons. ...in Italiae compitis quaedam dicit sacra Liberi celebrata cum tanta licentia turpitudinis, ut in eius honorem pudenda virilia colerentur ; nam saltem aliquantum verecundiore secreto, sed in propatulo exsultante nequitia. Nam hoc turpe membrum per Liberi dies festos cum honore magno plostellis impositum, prius rure in compitis, et usque in urbem postea vectabatur. In oppido autem Lavinio unus Libero totus mensis tribuebatur, cuius diebus omnes verbis flagitiosissimis uterentur, donec illud membrum per forum transvectum esset, atque in loco suo quiesceret. Cui membro inhonesto matremfamilias honestissimam palam coronam necesse erat imponere. Sie videlicet Liber deus placandus fuerat proventibus seminum : sic ab agris fascinatio repellanda, ut matrona facere cogeretur in publico, quod nec meretrix, si matronae spectarent, permitti debuit in theatro. – Et pourtant, lorsqu'en des temps plus reculés encore, ces rites étaient en usage, Rome dominait le monde alors connu, tandis qu'au temps du mysticisme de Saint Augustin, Rome succombait sous les coups des Barbares. – LACT. ; De fat. relig., XXI, 25 : Apud Lampsacum Priapo litabilis victima est asellus... Et il en donne une raison obscène qui aura été probablement inventée pour expliquer le fait. – ARNOB. ; Adgent., IV, 11, dit : «Parce que nous ne nous prosternons pas en suppliants devant Mutunus et Tutunus, toute chose devrait-elle tomber en ruine, et le monde lui-même changer d'ordre et de lois ? » Il a raison ; et il est certain que le fait d'adorer ou de ne pas adorer ces divinités ou d'autres était parfaitement indifférent pour la prospérité de Rome. – Cf. PAUS. ; VI, 26; IX, 31. – DIODORE DE SICILE, IV, 6, dit que Priape est adoré non seulement dans les temples, mais aussi dans les campagnes, comme leur gardien ; et l'on croit aussi qu'il agit contre les maléfices. Le culte du Phallus dura longtemps. On en trouve encore des traces au VI, siècle. – EVAGRIUS; Eccl. hist., I, 11, parlant des Gentils, dit : Riserit etiam non immerito quispiam Phallos eorum, et Ithifallos, ac Phallagogia, et enormem Priapum, ac Panem, qui turpi colitur membro (Trad. Valesius). NICÉPHORE CALLISTHÈNE en traite aussi. Eccl. hist., XIV, 48. – Cf. SUID.; s. r. . – HESYCH. ; s.r. . – HARPOCR., s. r.

– DEMOSTH. ; c. Conon., 20, p. 1263. – ATH.; IV, c. 3, p. 129 d ; – XIV, c. 16, p. 622f. – EUSTATH. ; in Odyss., I, v. 226, 1413 r., p. 50-51 b. – Si nous voulons prêter attention à l'auteur des Philosophumena, Priape jouait un rôle important dans l'hérésie de Justin. Ce dieu aurait été ainsi nommé parce qu'il a été créé avant toute chose. « Aussi est-il placé dans tous les temples, honoré par toute la création, et porte-t-il sur lui, au bord des chemins, les fruits de la création, étant cause de la création » (Philosoph., V, 4, p. 237 Cruice). – On sait assez que Priape a été placé comme gardien des jardins. – VIRG. ; Georg., IV :

(110) Et custos furum atque avium cum falce saligna
Hellespontiaci servet tutela Priapi.

Eglog., VII :

(83) Sinum lactis, et haec te liba, Priape, quot annis
Exspectare sat est : custos es pauperis horti.
Nunc te marmoreum pro tempore fecimus ; at tu,
Si foetura gregem suppleverit, aureus esto.

OVID. ; Fast.,I :

(415) At ruber, hortorum decus et tutela Priapus...

Cfr. TIBULL. ; I, 1, v. 17-18. – COLUM. ; X, 29-34. – HORAT. ; Satur.,I, 8. – Anth.

gr. ; Appendix Planudea, 286 à 243. – Nous trouvons le culte de Priape là où il est impossible de lui donner une signification obscène, par exemple comme gardien des sépulcres. – DESSAU ; 3585 : Romae rep. ad viam Appiam inter sepulcrorum rudera, nunc Parisiis) custos sepulcri pene destricto deus Priapus ego sum. Mortis et vitai locus. – 3586: (Veronae) dis manibus... Locus adsignatus monimento in quo est aedicla Priapi. – Anth. palat. ; Epigr. dedicatoria, 33. Priape est désigné comme protecteur de la plage. – Cfr. ibid. ; 89, 198; Epigr. exhortatoria, 1, 2. Cette dernière épigramme contient une exhortation à naviguer, et se termine ainsi :

« Je vous le dis, moi Priape fils de Bromios, qui suis dans le port ». – Sur les monnaies de Lampsaque, on voyait l'effigie de Priape. – STRABON ; VIII, c. 6, 24 p. 587, (p. 382) parle d'une ville qui s'appelle Priape parce qu'on y adore ce dieu. F. LAJARD ; Rech. sur le culte... de Vénus : « (p. 52) La présence de l'organe même du pouvoir générateur femelle parmi les attributs placés autour de la figure androgyne que je prends pour la Vénus assyrienne ou Mylitta, est un fait important... Un autre cône, ..., nous offre même la représentation d'un prêtre revêtu d'un costume asiatique et accomplissant un acte d'adoration devant un autel sur lequel on voit un et l'étoile de Vénus ou le soleil. Ici le ctéis semble devenir l'emblème de la déesse elle-même... Sur les uns comme sur les autres de ces divers monuments, un pareil attribut me semble caractériser le culte de la Vénus orientale avec cette énergie, cette naïve grossièreté, dont, sans doute, furent empreintes, (p. 53) à leur origine, les doctrines religieuses qui avaient cours chez les Assyriens et les Phéniciens. Ces doctrines, à travers une longue série de siècles et de révolutions religieuses ou civiles, ont laissé sur le sol de l'Asie occidentale des traces si profondes, qu'en étudiant les coutumes et les mœurs des populations actuelles, on acquiert la triste conviction que, malgré les efforts successifs du christianisme et de l'islamisme, l'adoration du ctéis n'a pas cessé d'être en usage chez certaines sectes religieuses de l'orient, et notamment dans une localité célèbre autrefois par le culte dont Vénus y était honorée. De nos jours, en effet, les Druzes du Liban, dans leurs vêpres secrètes, rendent un véritable culte aux parties sexuelles de la femme, et le leur rendent chaque vendredi soir, c'est-à-dire le jour qui fut consacré à Vénus, le jour auquel, de leur côté, les musulmans trouvent dans le code de Mahomet la double obligation d'aller à la mosquée et d'accomplir le devoir conjugal... Nous lisons même, au sujet de ces vêpres. que chaque (p. 54) initié,. est obligé de faire une confession générale, et que le plus grand de tous les péchés est la fornication avec les sœurs ou les initiées. Mais chez les Nozaïriens, qui ont aussi conservé la cérémonie de l'adoration du ctéis, la cohabitation charnelle est considérée comme le seul moyen par lequel puisse s'accomplir parfaitement l'union spirituelle ». – ATHEN. ; XIV, 56, p. 647. – . HERACLIDES SYRACUSIUS, in libro De Ritibus, ait : Syracusis praecipuo Thesmophoriorum die confici ex sesamo et melle pudenda muliebria, quae tota Sicilia mylli adpellentur ; eaque in honorem Dearum circumferri (trad. SCHWEIGHAEUSER). – Cfr. MART.; IX, 3, V. 3 ; XIV, 69.

[FN: § 1343-2]

Voir, par exemple, Doct. CABANÈS ; mœurs intimes du passé, 3e série. La faune monstrueuse des cathédrales : « (p. 20) Les représentations dites indécentes ont... subsisté très tard même sur nos monuments religieux, et en maints endroits on en a signalé, plus ou moins mutilées, mais suffisamment visibles, pour qu'on ne puisse mettre en doute leur existence antérieure. La preuve qu'elles existent encore en nombre respectable, c'est qu'en 1901, le pape envoyait à son clergé des instructions, pour que celui-ci procédât à une sévère inspection des églises, à seule fin de „ détruire ou de corriger toutes les peintures dévêtues ou trop peu vêtues, “. Les peintures, le Souverain Pontife aurait pu ajouter les sculptures ; mais il est juste de bien préciser... que les édifices du culte ne sont pas les seuls qui reflètent dans leurs figurations obscènes les mœurs du temps. Sans parler des priapes ailés des arènes de Nîmes, du monolithe de grès, à forme phallique, de la place publique de Préciamont (Oise), on a relevé un peu (p. 23) partout, des naturalia d'un art doublement inférieur. (p. 110) Le pinceau des enlumineurs ne fut ni plus chaste, ni plus réservé que l'ébauchoir des sculpteurs. (p. 111) Il existe une Bible, dont les peintures, assez habilement exécutées, furent longtemps attribuées au célèbre Jean de Bruges, et où est représenté, sans le moindre fard, l'épisode biblique de Loth et ses filles ». Et passim. – Cfr. § 1380. Ce ne sont pas des faits rares et bizarres, mais au contraire nombreux et habituels. Le Dr WITKOWSKI a pu en faire l'objet de trois gros volumes: L’art profane à l'Église... France; L’art profane à l'Église... Étranger ; L’art Chrétien, ses licences.

[FN: § 1344-1]

Voulant rétablir la discipline dans son camp, en Espagne, P. C. Scipion en chassa les trafiquants et les prostituées, au nombre de deux mille. – VAL. MAX.; II 7, 1 : ... nam constat, tum maximum inde institorum et lixarum numerum cum duobus millibus scortorium abisse. – Un fait semblable eut lieu, quand les Dix mille de Xénophon voulurent se défaire des bouches inutiles. XENOPH ; Cyr. exp., IV, 1, 14.

[FN: § 1344-2]

SUET. ; Iulius. (65) Militem neque a moribus, neque a fortuna probabat, sed tantuM a viribus ; tractabatque pari severitate atque indulgentia. « Il n'estimait les soldats ni d'après leurs mœurs ni d'après les hasards de la guerre, mais seulement d'après leur énergie, et il les traitait avec une sévérité et une indulgence égales ». (67) ... sed desertorum ac seditiosorum et inquisitor et punitor acerrimus, connivebat in ceteris. Ac nonnumquam post magnam pugnam atque victoriam, remisso officiorum. munere, licentiam omnem passim lasciviendi permittebat ; iactare solitus, milites suos etiam unguentatos bene pugnare posse. « ... mais il recherchait et punissait très durement les déserteurs et les séditieux ; il fermait les yeux sur le reste. Parfois, après un grand combat et une grande victoire, ayant déchargé les soldats de leurs travaux, il leur permettait toute licence, car il avait coutume de dire que, même parfumés, ses soldats étaient capables de bien se battre. » – Cfr. Dio. CASS.; XLII, 55.

[FN: § 1344-3]

HORAT.; Epod., VIII, 18 : Minusve languet fascinum ? Ubi Porphyrio : aeque pro virili parte posuit, quoniam prae fascinandis rebus haec membri defor mitas adponi solet. – PLIN.; Nat. hist., XXVIII, 7: (4) ... extranei interventu, aut si dormiens spectetur infans, a nutrice terna. adapui : quamquam illos religions tutatur et Fascinus, imperatorum quoque, non solum infantium custos, qui deus inter sacra romana a vestalibus colitur, et currus triumphantium, sub his pendens, defendit medicus invidiae... « Un étranger survenait-il ou regardait-on dormir un enfant, la nourrice crachait trois fois, bien qu'il soit déjà protégé par le dieu Fascinus, protecteur non seulement des enfants, mais aussi des généraux. Ce dieu est vénéré par les Vestales, parmi les dieux romains, et suspendu au char des triomphateurs, il les défend comme un médecin de l'envie... ». VARR.; De ling. lat., VII, 97 : « Il se pourrait encore qu'on les appelle ainsi [les choses obscènes], à cause des figurines indécentes qu'on suspend au cou des petits enfants, pour les garder du mauvais œil... ». – Dict. DAREMB. SAGL.; s. r. Fascinum, Fascinus : « (p. 986) On le sculptait [le Phallus] en bas-relief sur les murs des villes et sur toute espèce d'édifices publics et privés ; un exemplaire trouvé à Pompéi est accompagné de l'inscription : hie habitat Félicitas, affirmation de bon augure destinée surtout à empêcher le malheur d'entrer. Enfin le phallus était un des éléments les plus ordinaires des amulettes que l'on portait sur sa personne; les objets de cette (p. 987) catégorie où on l'a représenté sont innombrables, il n'est point de collection d'antiques qui n'en possède. Quelquefois, pour augmenter l'efficacité de l'amulette, on y a réuni l'image de plusieurs phallus en les groupant de façon à en former une espèce de corps monstrueux ; ou bien on a ajouté au phallus des ailes et des pattes ; de là des compositions grotesques, où la fantaisie licencieuse des anciens s'est donné libre carrière. (p. 985 Lorsqu'on se trouvait en danger immédiat [du mauvais œil], on pouvait se défendre en faisant promptement le geste qui est aujourd'hui connu en Italie et dans d'autres contrées sous le nom de la figue. Ce geste simulait l'union des organes génitaux des deux sexes, qui, représenté chacun à part, passaient pour de puissants prophylactiques ». – PLIN. ; Nat. hist., XI, 109 (49), dit des parties génitales : Nec non aliqua gentium quoque in hoc discrimina, et sacrorum etiam. D. AUG. De civ. dei, VII, 21 : ... Cui membro inhonesto matremfamilias honestissimam palam coronam necesse erat imponere. Et il dit de ce culte : ista sacrilegia sacra nominaret. – THEODORETI graecarum, affectionum curatio, p. 783-784. Migne, t. IV, p. 890: et parvum illud animal, Priapum dico, cum ingenti et exporrecto membro honoratum, phallumque Liberi patris in Phallagogiae festo ab iis qui orgia célébrant adoratum. Nec minus et muliebrem pectinem (sic enim mulieris pudenda vocant), in Thesmophoriis ab initiatis mulierculis divino honore affectum.

[FN: § 1345-1]

La Liberté, 9 janvier 1913 : « Depuis l'été de 1905 jusqu'au mois de février 1912 dernier, où l'on procéda à des arrestations en masse, les dynamiteurs trade-unionistes cherchèrent en effet, par une tactique pulvérisante, à décourager les patrons hostiles aux syndicats. De l'État de New-York à la Californie, leurs opérations jetèrent l'alarme dans les chantiers. L'hôtel du Los Angeles Times ayant sauté le 1er octobre 1910, en causant la mort de vingt-deux linotypistes non syndiqués, il fallut se décider enfin à une action énergique. C'est alors que l'on découvrit que l'International Association of Bridge and Structural Ironworkers ordonnait cette destruction systématique des ateliers, des usines, des manufactures où l'on méconnaissait les décisions du syndicalisme. Il est amplement démontré – par les quarante mille pièces qui figurent au procès aussi bien que par les dépositions des témoins – que l'International Association of Bridge and Structural Ironworkers avait organisé une agence de chambardement qui fonctionnait avec une rare discipline. Un budget secret de cinq mille francs par mois servait à l’achat de la dynamite. Dans tous les grands centres industriels existait un service de renseignements qui fournissait au comité directeur les indications nécessaires pour une prompte et directe action. Quand une société refusait d'augmenter les salaires ou bien acceptait la main-d'œuvre des jaunes, quand un patron prétendait garantir l'indépendance de ses employés, ou quand il fallait ruiner une entreprise dont la concurrence eût été susceptible de déprécier le travail des syndiqués, les dynamiteurs entraient en scène. Un de leurs délégués était envoyé sur les lieux et une bombe éclatait. L'un de ces audacieux terroristes, Ortie Mac Manigal, a raconté ses expéditions aux juges avec force détails. Il participa à plus de cinquante complots (dont la plupart réussirent) depuis cinq ans qu'il commença la propagande par le fait. Mais laissons-lui la parole : „ En 1907 – a-t-il dit – Herbert S. Hockin, secrétaire-trésorier de l'Association des Constructeurs de ponts, vint me trouver à Détroit : Vous êtes habitué à travailler dans les carrières, me dit-il, par conséquent vous savez vous servir des explosifs. Désormais, vous serez payé par le syndicat qui a besoin de vous. J'essayai de protester, mais il me fit comprendre que si je refusais, le Comité exécutif me boycotterait et que je serais pris par la famine. Finalement j'obéis “. Dès lors, commença pour Mac Manigal une vie fort mouvementée. Dans l'Ohio, l'Illinois, le Massachusetts, le New-York, il se mit à la besogne. Les dépenses lui étaient largement payées par les chefs syndicalistes. Cependant, à plusieurs reprises ses bombes n'ayant point éclaté ou la mèche ayant été découverte avant l'explosion, il ne toucha que ses frais de route. Il ne correspondait avec les leaders que par des dépêches en apparence insignifiantes, et quand le coup avait réussi, il envoyait en haut lieu le compte-rendu qu'en donnaient les journaux... Ortie Mac Manigal conte ces anecdotes avec beaucoup de flegme. Sa confession – un véritable roman-feuilleton – ne comprend pas moins de sept cents pages. En voici encore un échantillon : „ En juin 1908, j'étais occupé à Evanston, dans l'Illinois, lorsque Hockin me rejoignit. Il m'annonça qu'il était en possession d'une nouvelle invention qui ferait merveille. C'était une espèce de bombe à horloge, chargée de nitro-glycérine, qui éclatait à volonté, une heure, cinq heures, dix heures même après qu'on l'avait allumée. Elle était d'un fonctionnement simple et, grâce à ce système, on avait le temps de s'éloigner suffisamment pour prouver un alibi. Il m'engageait à l'utiliser tout de suite. Je refusai. Mais nous l'avons essayée à Stenbenville, à Cincinnati, à Indianapolis, insista-t-il ; ça marche à ravir ! “ ». Innombrables sont les faits qui démontrent la corruption de la police – pour ne parler que de cette autorité – et qui nous transportent bien loin de la morale idéale. L'un des faits les plus récents est ainsi raconté par le Journal de Genève, 1er mars 1913 : « M. Gaynor, maire de New-York, déposant devant la commission d'enquête sur les actes de corruption de la police, a déclaré : „Quand je suis arrivé aux affaires, les chefs de police se retiraient millionnaires. Quelques-uns ont des maisons en ville, des maisons de campagne, des yachts et des automobiles. La police percevait par an quinze millions de francs de pots-de-vin, extorqués aux maisons mal famées. Il n'en est plus de même aujourd'hui, sauf peut-être pour un ou deux cas isolés. Mais De croyez pas que la presse ait en rien à faire avec les pots-de-vin. Voilà vingt-cinq ans qu'elle y est jusqu'au cou “. À Albany, devant la Commission parlementaire d'enquête, un homme d'affaires a déclaré avoir reçu une provision de cent vingt-cinq mille francs pour le cas où il ferait sortir le millionnaire Harry Taw de l'asile d'aliénés où il est détenu depuis l'assassinat de M. Stanford White. Il a ajouté que le directeur de l'asile a refusé de faciliter quoi que ce fût dans ce sens, si on ne lui donnait pas un pot-de-vin ».

[FN: § 1345-2]

La dérivation par laquelle on veut revêtir d'utilités pratiques des prescriptions religieuses, est habituelle. C'est ainsi qu'on a voulu prendre pour une prescription hygiénique l'interdiction de la viande de porc aux Israëlites. De même, on veut nous faire croire que la propagande malthusienne est condamnée uniquement comme antipatriotique, parce qu'elle diminue le nombre des défenseurs de la patrie. Si c'était vrai, ces quatre cent soixante-onze députés qui ont condamné la propagande malthusienne auraient dû a fortiori condamner la propagande en vue d'enlever à l'armée le moyen de résister à l'ennemi. Il est quelque peu comique de vouloir faire naître des défenseurs de la patrie pour les faire tuer par leurs soldats, s'ils deviennent officiers. Les femmes allemandes qui, plagiant Lysistrata, prêchent « la grève des mères », pour enlever de futurs ouvriers aux « bourgeois » et des soldats à l'empire, sont beaucoup plus logiques. Il est certain que les causes de semblables votations aux Chambres sont complexes, et qu'il ne faut pas y chercher la logique. C'est pourquoi, si ce fait était isolé, il ne prouverait rien ; mais il acquiert de la valeur, parce qu'il fait partie d'une classe très nombreuse.

[FN: § 1352-1]

DUBOIS ; Mœurs... des peuples de l'Inde, t. I.

[FN: § 1352-2]

Les Cathares se donnaient le baiser de paix ; mais leurs Parfaits ne devaient pas toucher les femmes ; aussi le leur transmettaient-ils par le moyen de l'Évangile. – I. GUIRAUD ; Cartulaire de Notre-Dame de Prouille, t. I : « (p. CXCIX) Les Parfaits baisaient sur les deux joues chacun des Croyants... C’était de la plus grande simplicité quand la cérémonie ne se passait qu'entre hommes ; mais elle se compliquait lorsqu'il y avait des femmes dans l'assistance. En aucun cas, un Parfait ne pouvait toucher ni même effleurer du doigt une femme ; à plus forte raison lui était-il absolument interdit de l'embrasser. On était si rigoureux sur ce point que, dans le rite de l'imposition des mains pendant lequel le parfait devait poser les mains sur la tête du néophyte, il était bien recommandé que s'il s'agissait d'une femme, les mains devaient être tenues au-dessus de sa tête, sans la toucher, tenendo manum super caput infirmi, non tamen tangendo si sit mulier. On dut tourner la même difficulté dans le rite du baiser, et pour cela on employa ce que la liturgie catholique appelle un instrument de paix. Sur un objet particulièrement vénérable on dépose le baiser que vient y chercher, en le baisant à son tour la personne que, pour n'importe quelle raison, on ne peut directement embrasser... le Parfait qui présidait la cérémonie, baisait le livre des Évangiles et le donnait aussitôt à baiser aux femmes... puis celles-ci s'embrassaient les unes les autres ». Nos vertuistes contemporains, quelque peu niais, diffèrent des Cathares dans leurs dogmes, mais non dans le résidu sexuel.

[FN: § 1353-1]

[NOTE DU TRADUCTEUR.] On ne s'attendrait guère à voir la pudeur proscrire des mots français courants d'un « dictionnaire encyclopédique ». Le Petit Larousse illustré, présenté en première page comme étant « à la fois le plus complet, le mieux informé et le plus attrayant des dictionnaires manuels », peut affronter les censures vertuistes les plus rigoureuses. Pourtant il accepte avec une étonnante facilité beaucoup de néologismes empruntés à l'argot le plus vulgaire.

[FN: § 1355-1]

Ad. Corinth., I, 5, 12 et sv.. Pour les vertuistes chrétiens, on peut avoir des doutes, en séparant le résidu sexuel du résidu simplement religieux ; mais ce dernier fait défaut chez les vertuistes libres penseurs. L'excellent Saint Ambroise dit : Castitas enim angelos fecit. Qui eam servavit angelus est, qui perdidit diabolus (t. V, De virginibus, I, p. 536 c). Cet argument manque aux libres penseurs qui n'ont – ou disent n'avoir – ni anges ni diables.

[FN: § 1355-2]

La plaisanterie d'une légende est, comme il arrive souvent, une description pittoresque du fait. Sorberiana : « (p. 175) Un certain moine ayant quité le froc, demandoit quelque assistance au feu Prince Maurice [on raconte la même histoire avec d'autres noms ; elle est d'ailleurs probablement inventée], qui lui dit Cuius causa hue venisti ? Le Moine répondit Religionis. Le Prince ajouta Religio cuius generis ? À quoi le Moine répartit Foeminini.– Ergo, conclut le Prince d'Orange, tu huC venisti propter genere foemininum ». – Un ami du Père Hyacinthe raconte, dans le Journal de Genève, 17 septembre 1913, un entretien entre ce Père et le prince Balthasar Odescalchi. Celui-ci dit : « Mais, mon Père, puisque vous continuez à vous dire prêtre catholique, pourquoi ne reviendriez-vous pas au catholicisme romain ? – Mais, prince, repartit M. Loyson (je tiens tous ces détails à la fois de M. Loyson lui-même et du prince Odescalchi), vous oubliez qu'il y a à cela certaines difficultés. – Lesquelles ? – D'abord la question de l'infaillibilité. – Oh ! l'infaillibilité, répondit le prince Odescalchi, il y a manière de s'entendre et de l'interpréter, ce ne serait pas là un obstacle insurmontable. – Mais il y a aussi mon mariage, répliqua M. Loyson. – Votre mariage, oui sans doute, répondit le prince, présente quelques difficultés, mais elles ne sont pas non plus insolubles, vous savez aussi bien que moi que les prêtres catholiques de rite oriental sont mariés. On pourrait vous faire passer dans un rite oriental ». Léon XIII délégua le Père capucin Vives pour traiter cette affaire, mais l'on ne parvint à aucune conclusion. « M. Loyson a affirmé à mainte reprise que ce fut surtout l'impossibilité de sa part d'admettre le dogme de l'infaillibilité qui fit échouer les négociations, mais la question de son mariage constituait une difficulté plus sérieuse que ne se l'imaginait le prince Odescalchi ».

[FN: § 1356-1]

BAYLE ; Dict. hist., t. II, s. r. Junon . « (p. 894) J'oserois dire que les excès où les Chrétiens se sont portez envers la Vierge Marie, excès qui surpassent tout ce que les Paiens ont pu inventer en l'honneur de Junon [parce qu'ils avaient dans leur religion, plus que les chrétiens, d'autres manières différentes de manifester les résidus sexuels] sont sortis de la même source, je veux dire de l'habitude que l'on a d'honorer les femmes, et de leur faire la cour avec beaucoup plus d'attachement et de respect qu'à l'autre sexe [c'est-à-dire en réalité aux résidus sexuels]. On ne sauroit se passer de femmes, ni dans la vie civile, ni dans la vie religieuse. Qui auroit ôté à la Communion de Rome ses dévotions pour les Saintes, et sur tout pour celle qu'on y qualifie la Reine du Ciel, la Reine des Anges, on y verroit des vides affreux ; le reste s'en iroit en pièces, et seroit arena sine calce, scopae dissolutae ».

[FN: § 1357-1]

ATHEN., XIII, p. 557 : « Quelqu'un disant à Sophocle qu'Euripide était misogyne : Dans les tragédies certes, dit Sophocle, mais au lit, il est philogyne ».

[FN: § 1359-1]

FRA BARTOLOMMEO DI SAN CONCORDIO ; Ammaestramenti degli Antichi, dist. XXV, c. 10 : « S'entretenir avec des femmes, c'est s'exposer à des dangers de luxure. – Ecclés., 42. Ne demeure pas au milieu des femmes, car de même que la teigne provient des vêtements, l'iniquité de l'homme provient de la femme. Hierony mus ad Oceanum. Je t'avertis surtout d'y regarder attentivement : les clercs ont la tentation d'aller souvent avec des femmes... – Hieronymus, ibidem. Conversation de femme : porte du démon, voie d'iniquité, piqûre de scorpion. – Hieronymus, ibidem. La femme attaque d'un feu brûlant la conscience de celui qui habite avec elle. – Hieronymus, ibidem. Or, crois-moi, celui qui s'entretient avec une femme ne peut marcher avec Dieu de tout son cœur... es-tu chaste ? Tu dis un grand mensonge si tu cherches la chasteté, pourquoi avec des femmes ? La femme que tu vois si bien parler, rend malade par l'esprit et non par des rapports charnels. Gregorius 3, dialog. Que ceux qui veulent que leur corps soit continent n'aient pas la présomption d'habiter avec des femmes. – Gregorius, in registro. On lit que le bienheureux Augustin ne consentit pas à demeurer même avec sa sœur, et disait : celles qui sont avec ma sœur ne sont pas mes sœurs. Donc la prudence d'un homme si docte doit nous être un grand enseignement. – Sanct. Isidorus in synonym., lib., 2. Si tu veux être à l'abri de la fornication, tiens ton corps et tes regards éloignés de la femme ; car, près du serpent, tu ne vivras pas longtemps séparé de lui ; en te tenant au devant du feu, étant près du danger, tu ne seras pas longtemps en sûreté ; bien que tu sois de fer, tu fondras à la chaleur. – IOAN. PLANTAVITII.. florilegium rabbinicum : « (p. 458) Sapiens alius conspicatus mulierem parvam, sed formosam, dixit, Parva quidem, pulchritudo, malum autem magnum ; et le commentaire ajoute : Malum magnum, imo quovis malo peius si fuerit improba, ut praeclare notavit Chrysost. apud Anton. in Melissa, p. 2, cap. 84, et nos alibi monuimus : « O malum – inquit – quovis malo peius mulierem improbam! Asperi sunt dracones, aspides maleficae; sed mulieris asperitas acerbior, quam ferarum. Improba mulier nunquam mansuefiet : si durius tractetur, furit; si blandius, tollitur et elata est. Ferrum coquere, quam mulierem castigare facilius. Qui habet uxorem malam, suorum se peccatorum mercedem accepisse intelligat. Nulla in Mundo bellua est, quae cum muliere improba conferatur. Quid leone inter quadrupedes ferocius ? Nihil quam mulier improba. Quid crudelius dracone inter serpentia ? Nihil quam mulier improba ». Cfr. ATH. ; XIII, p. 558-559. – Ce sont là les déclamations habituelles de ceux qui médisent des femmes, parce qu'ils les aiment trop.

[FN: § 1362-1]

L'erreur provenait du fait que, dans leur lutte contre la religion chrétienne, les libres-penseurs faisaient alors appel aux sentiments sexuels, toujours vifs. Lorsqu'ils eurent remporté la victoire, ils firent plus et pis que leurs adversaires de jadis. Même un auteur d'une très grande valeur, comme Buckle, n'est pas exempt de cette erreur. BUCKLE ; Hist. de la civ. en Angl., t. V. Après avoir observé, très judicieusement que : « (p. 117) Le bonheur qui provient de la satisfaction des sens, s'étendant sur un plus large espace et contentant, à un moment donné, un nombre d'êtres plus grand que ne pourrait le faire l'autre forme de bonheur, possède, à ce compte, une importance que force gens qui s'intitulent philosophes ne veulent pas reconnaître. Trop souvent, par leurs absurdes déclamations contre ces plaisirs, les penseurs philosophes et spéculatifs ont fait tout en leur pouvoir pour amoindrir la somme de bonheur dont l'humanité est susceptible », il observe que « (p. 118) les notions ascétiques des philosophes, telles, par exemple, que la doctrine des stoïciens et autres théories semblables de mortification n'ont pas entraîné le mal auquel on eût pu s'attendre et ne sont pas parvenues à amoindrir, d'une manière sensible tout au moins, le bonheur substantiel du genre humain... Cependant, si les philosophes ont échoué à diminuer les plaisirs du genre humain, il y a une autre classe d'hommes dont les tentatives au même effet ont eu plus de succès. J'entends naturellement les théologiens qui, à les prendre en corps, en tous pays et en tous siècles, se sont opposés de propos délibéré aux jouissances qui sont essentielles au bonheur d'une immense majorité de la race humaine. Créant un dieu à leur fantaisie [cela exclut les libres-penseurs], qu'ils représentent comme entiché de pénitence [cela exclut au moins en partie les païens], de sacrifice et de mortification, ils interdisent (p. 119) sous ce prétexte des jouissances non seulement innocentes mais encore dignes de louange. Car toute jouissance qui ne fait de tort à personne est innocente, et partant louable... Les théologiens, toutefois, pour des raisons que j'ai déjà établies, cultivent l'esprit contraire ; et chaque fois qu'ils ont joui du pouvoir, ils n'ont jamais manqué de prohiber une foule d'actions agréables, parce que, disent-ils, elles offensent la divinité ». Ce n'est pas la cause logique de leurs actions, qui sont non-logiques, mais bien la dérivation par laquelle ils veulent les justifier. Cela est démontré par le fait que les libre-penseurs, qui n'ont pas de divinité qu'ils puissent considérer comme offensée, agissent pourtant de la même façon, et emploient des dérivations différentes, en parlant d' « offenses à la pudeur, à la morale » ou à quelque autre de leurs fétiches. Les observations de Buckle s'écartent donc de la réalité, si, par « théologiens » on entend ceux de la religion chrétienne ou d'une autre semblable ; elles s'accordent entièrement avec la réalité, si par « théologiens » on entend les fanatiques de toutes sortes, qui trouvent plaisir à ennuyer leur prochain.

[FN: § 1365-1]

Enf. XXX, v. 64 et sv. :

Li ruscelletti, che dei verdi colli
Del Casentin discendon giuso in Arno,
Facendo i lor canali freddi e molli,
Sempre mi stanno innanzi, e non indarno ;
Chè l'imagine lor vie più m'ascinga
Che il male ond'io nel volto mi discarno.

[FN: § 1366-1]

I Corinth. : 7 (1)

« Pour ce qui concerne les choses dont vous m'avez écrit, je pense qu'il est bon pour l'homme de ne point toucher de femme. (2) Toutefois, pour éviter l'impudicité, que chaque homme ait sa femme, et que chaque femme ait son mari ». Ce passage a donné beaucoup à faire aux chrétiens. Les uns voulurent l'entendre dans ce sens, manifestement faux, qu'il s'appliquait aux prêtres seuls ; d'autres l'atténuèrent en expliquant que si la virginité avait la première place, l'état conjugal obtenait la seconde ; d'autres encore l'expliquèrent en observant que la loi ancienne imposait de croître et de multiplier, quand la terre n'était pas encore peuplée, mais que depuis qu'elle avait été peuplée, cela n'était plus nécessaire. Au fond, le passage est très clair : c'est l'élan d'un vertuiste qui a la phobie de l'acte charnel, et qui permet le mariage comme un moindre mal. À propos de ce passage, Saint Jérôme remarque (Comm. in epist. I ad Cor., t. VIII, p. 199) : « Bonum fuerat illud quod vobis in primordio praedicavi, hoc est sectindum coniugii usum, non tangere mulierem. Sed quoniam multos incontinentes huic doctrinae scripsistis refragari concedatur remedium, ne fornicando moriantur. Ergo hoc Apostoli exemplo, in primis virginitas et continentia praedicatur. Et si quis se incontinentem non erubuerit confiteri, in languorem incontinentiae reclamanti, non denegetur remedium nuptiarum. Quomodo si peritus medicus inquieto aegro, et neganti se posse a pomis omnibus abstinere, concedat aliquantum, ne ille peniosa praesumat... Sed obiicere amatores luxuriae solent. Ut quid ergo prima Dei benedictio, crescere et multiplicare concessit ? Ut terra scilicet repleretur : quia iam impleta debemus ab incontinentia temperare. – D. ANSELM., t. II, Comm in Epist. I ad Cor. L'auteur assimile la femme au feu qui brûle à peine on l'a touché : ... (p. 139) animadvertenda est Apostoli prudentia; non dixit, Bonum est uxorem non habere : sed, Bonum est mulierem non tangere : quasi in tactu periculum sit, quasi qui illam tetigerit, non evadat. Quemadmodum enim qui ignem tetigerit statim aduritur, ita viri tactus et foeminae sentit naturam suam et diversitatem sexus intelligit. Bonum est non tangere. Sed propter fornicationem vitandam unusquisque suam uxorem legitimam habeat, non concubinam, et unaquaeque virum suum habeat. Solus fornicationis metus facit haec concedi. – Canones et decreta CONCILII TRIDENTINI ; sessio XXIV, can. X : Si quis dixerit, statum coniugalem anteponendum esse statui virginitatis vel caelibatus, et non esse melius ac beatius manere in virginitate aut caelibatu, quam iungi matrimonio : anathema sit.

[FN: § 1367-1]

D. CYPRIANI De disciplina et habitu virginum... Nunc nobis ad virgines sermo est, quarum quo sublimior gloria est, maior et cura est. Flos est ille Ecclesiastici germinis, decus atque ornamentum gratiae spiritalis, laeta indoles, laudis et honoris opus integrum atque incorruptum, Dei imago respondens ad sanctimoniam Domini, illustrior portio gregis Christi. Gaudet per illas atque in illis largiter floret Ecclesiae matris gloriosa fecunditas : quantoque plus copiosa virginitas numero suo addit, tanto plus gaudium matris augescit. – SAINT AUGUSTIN, De docirina christiania, IV, c. 21, 47, cite ce passage de Saint Cyprien comme exemple de style. On trouve, chez les Pères de l'Église, beaucoup d'autres expressions très vives du même genre ; à les lire, une épigramme de l'Anthologie grecque vient à l'esprit ; et l'idée surgit que ces sentiments seraient moins vifs chez des écrivains qui auraient goûté les plaisirs de l'amour. – Ant. V, 77 : . Si la femme avait cette grâce après le lit de Cypris, l'homme ne serait certainement pas rassasié de rapports avec sa femme : car toutes les femmes déplaisent après Cypris ». Cfr. Ach. Tatius, IV, 8.

[FN: § 1368-1]

D. AUG. ; Soliloq., I 17. La Raison s'entretient avec le saint : R. Quid uxor? Nonne te delectat interdum pulchra, pudica, morigera, litterata.... ? – A. Q uantumlibet velis eam pingere atque cumulare bonis omnibus, nihil mihi tam fugiendum quam concubitum esse decrevi : nihil esse sentio quod magis ex arce deiiciat animum virilem, quam blandimenta feminea, corporumque ille contactus, sine quo uxor haberi non potest. – D. AUG. : Contra Iulianum, 1. III, c, 21, 42 : Concupiscientiae carnalis qui modum tenet, malo bene utitur ; qui modum non tenet, malo male utitur; qui autem etiam ipsum modum sanctae virginitatis amore contemserit, malo melius non utitur...

[FN: § 1369-1]

D. HIERONYM. ; Pro libris adversus Iovinianum. Apologia ad Pammachium, II. p. 390, g : Sed eo loco, ubi de Apocalipsi testimonium posuimus, nonne manifestum est, quid de virginibus, et viduis, et coniugibus senserimus : Hi sunt qui cantant canticum novum : quod nemo potest cantare, nisi qui virgo est... Hi sunt primitiae Dei, et agni, et sine macula. Si virgines primitiae Dei sunt : ergo viduae, et in matrimonio continentes, erunt post primitias, hoc est, in secundo et tertio gradu. In secundo et tertio gradu viduas ponimus et maritatas : et haeretico furore dicimus damnare nuptias. – Plus loin, il fait appel à l'indulgence du lecteur et invoque les circonstances atténuantes. (p. 391, b) ... debuerat prudens et benignus lector, etiam ea, quae videntur dura, aestimare de caeteris, et non, in uno atque eodem libro, criminari, me diversas sententias protulisse. Quis enim tain hebes, et sic in scribendo rudis est, ut idem laudet et damnet ? Le saint oublie précisément ce que fait celui qui a une idée et ne peut la manifester entièrement parce qu'il est contraint à certains égards.

[FN: § 1370-1]

D. HIERONYM. ; Ad Eustochium de custodia virginitatis. ep. XXII, t. I, p. 140, c : ... ner enumeraturum molestias nuptiarum, quomodo uterus intumescat, infans vagiat, cruciet pellex, domus cura solicitet, et omnia quae putantur bona, mors extrema praecidat. Adversus Helvidium, de perpetua virginitate B. Mariae, t. II, p. 816. – Il fait voir comment les femmes mariées sont distraites des préoccupations religieuses par les devoirs de famille. – (e) Idem tu putas esse diebus et noctibus vacare orationi, vacare ieiuniis, et ad adventum mariti expolire faciem, gressum frangere, simulare blanditias ? ... Inde infantes garriunt, familia perstrepit : liberi ab osculis et ab ore dependent : (f) computantur sumptus : impendia praeparantur, hinc cocorum accinta manus carnes terit : hinc textricum turba commurmurat: nunciatur interim vir venire cum sociis. Illa ad hirundinis modum lustrat universa penetralia, si torus rigeat, si pavimenta verrerint, si ornata sint pocula, si prandium praeparatum. Responde, quaeso, inter ista ubi sit Dei cogitatio : Et hae felices domus. Remarquez le contraste entre cette civilisation et celle de la Rome antique. Tout ce que le saint méprise était à l'honneur et à la louange de la matrone des beaux temps de Rome.

[FN: § 1370-2]

D. HIERONYM.; Ad Laetam de institutione filiae, Epist. VII, t. I, p. 51 f-g: « Sur l'ordre de son mari, Imettius, qui fut le grand-père de la vierge Eustochia, Praetestata, femme très noble, changeait le costume et les ornements, et tressait selon l'usage mondain la chevelure négligée [de la jeune fille], désireuse de déjouer les desseins de la vierge et le désir de la mère. Et voici que, la même nuit, elle voit venir à elle un ange, dont la voix terrible la menaçait de châtiments et l'atterrait par ces paroles : „ As-tu l'audace de préférer l'autorité de ton mari à celle du Christ ? et de toucher la tête de la vierge de Dieu avec tes mains sacrilèges ? Celles-ci sécheront bientôt, afin qu'elles subissent la peine de ce qu'elles ont fait. Dans cinq mois, tu iras en Enfer. Si tu persévères dans ta faute, tu perdras à la fois ton mari et tes fils “. Tout cela eut lieu ponctuellement, et la mort de la pauvre femme manifesta le trop peu d'empressement de sa pénitence ».

[FN: § 1371-1]

D. HIERON. ; De custodia virginitatis, Ep. XXII, t. I, p. 141, e.

[FN: § 1371-2]

Un exemple pris au hasard suffira, parmi tant d'autres qu'on pourrait citer. D. HIERONYM. ; Vita sancti Hilarionis, t. I, p. 248 d ; Multae sunt tentationes eius, et die noctuque variae daemonum insidiae : quas si omnes narrare velim, modum excédam voluminis. Quoties illi nudae mulieres cubanti, quoties esurienti largissimae appartiere dapes? – Une jeune femme et un peu de bonne nourriture auraient suffi à mettre en fuite tous ces démons. – Un très grand nombre de saints, pour ne pas parler de Saint Antoine, dont l'exemple est trop connu, furent tentés d'une manière analogue ou identique. Il arriva aussi à Saint François de souffrir de ces tentations (§ 1184-2), et ses disciples n'en furent pas exempts. Sur l'une de ces tentations, les protestants, ennemis de Saint François, font une observation pleine de bon sens, bien que recouverte d'une des dérivations habituelles. – L'Alcoran des Cordeliers, t. II, p. 186: Apud Spoletum dum esset frater Aegidius, audiens vocem unius mulieris tantum sensit tentationem (a), quantam nunquam fuerat passus : quam orationibus, verberibus (b) et operibus divinis a se expulit, et sic fuit plenarie liberatus.

Notes de l'éditeur de l'Alcoran :

(a) « Se faut-il esbahir si ces presomptueux caphars bruslent journellement au dedans par des flammes secretes de paillardise, veu qu'ils ont méprisé le sainct mariage, donné de Dieu pour remede à telles tentations ! »

(b) « Ces batures sont de l'invention de Satan, et nulle part approuvees de Dieu ».

[FN: § 1371-3]

D. HIERONYM. ; Hieronymus Asellae, Epist. XCIX, t. II, p. 657, g-h.

[FN: § 1372-1]

D. HIERONYM. ; Ad Eustochium de custodia virginitatis, Epist. XXII, t. I, p. 143, h. Voir plus loin, p. 146, b-g, une longue comparaison entre l'époux céleste et l'époux terrestre, avec des citations du Cantique des Cantiques. (146, b) Semper te cubiculi fui secreta custodiant : Semper tecum sponsus laudat intrinsecus. Oras, loqueris ad sponsum : legis, et ille tibi loquitur : et cum te somnus oppresserit, veniet post parietem, et mittet manum suam per foramen, et tanget ventrem tuum [remarquez toutes ces images matérielles d'actes spirituels] ; Et expergefacta consurges, et dices : Vulnerata caritate ego sum. Et rursus ab eo audies : Hortus conclusus, soror mea sponsa hortus conclusus, fons signatus. (Cant. 4)... (d) Zelotypus est Iesus, non vult ab aliis videri faciem tuam.

[FN: § 1374-1]

D. AUG. ; De haeresibus ad Quodvultdeus. Relevons succinctement les accusations du saint : Les Simoniens. Ils enseignaient cette détestable turpitude, qu'il est indifférent d'avoir commerce avec des femmes. – Les Saturniens. Ils imitaient les turpitudes des Simoniens. – Les Nicolaïtes. Leur chef, Nicolas, blâmé de son amour pour sa femme, qui était fort belle, et voulant se laver de cette accusation, permit, dit-on, à n'importe qui d'avoir commerce avec elle. – Les Gnostiques, dits Borborites, à cause de leur grande immoralité. – Les Carpocratiens. Ils enseignaient toutes sortes d'œuvres perverses. – Les Cérinthiens. Ils enseignaient qu'après la résurrection, on devait passer mille ans sous le règne terrestre de Christ, au milieu de la volupté charnelle du ventre et de toutes sortes de luxure. Les Sécondiens. Ils ne diffèrent des Valentiniens que par les turpitudes. – Les Caïaniens. Ils honorent Caïn et les habitants de Sodome. – Les Tatiens. Ils condamnent le mariage et l'assimilent aux fornications et aux autres corruptions, et ne reçoivent parmi eux personne qui se marie, ni homme, ni femme. – Les Cataphryges. Ils tiennent les secondes noces pour des fornications. On dit qu'ils ont des mystères coupables. Les Pépuziens ou Quintiliens. Ils donnent un grand pouvoir aux femmes. – Les Adamiens, ainsi nommés d'Adam, dont ils imitent la nudité dans le Paradis, avant le péché. Aussi condamnent-ils le mariage, parce qu'Adam ne connut charnellement sa femme ni avant de pécher ni avant d'être chassé du Paradis. Ils croient donc qu'il n'y aurait pas eu de mariage si personne n'avait péché. C'est pourquoi hommes et femmes se réunissent nus, écoutent nus les prêches, célèbrent nus les sacrements, et c'est pourquoi ils considèrent leur Église comme le Paradis. – Les Elcéséens ou Sampséens. Ils adoraient deux femmes. – Les Valésiens. Ils se castraient. – Les Cathares. Ils condamnent les secondes noces. – Les Apostoliciens. Ils repoussent ceux qui se marient. – Les Origéniens. Ils s'adonnent à d'infâmes corruptions. – Les Manichéens ou Cathares. Voir § 1374-2 – Les Riéracites. Ils ne reçoivent que des célibataires. – Les Antidicomarites. Ils sont contraires à la virginité de Marie, qui, disent-ils, après avoir enfanté le Christ, eut commerce avec son mari. – Les Priscillianistes. Ils ne mangent pas de viande et séparent le mari et la femme, parce qu'ils disent que la chair fut créée par les mauvais anges et non par Dieu. – Les Paterniens. « Ils estiment que les parties inférieures du corps de l'homme ne furent pas créées par Dieu, mais par le diable ; et, permettant à ces parties toute licence perverse, ils vivent très impurement ». – Les Abéloïtes. Saint Augustin en parle comme les ayant vus. « Ils n'avaient pas commerce avec leurs femmes, et cependant les dogmes de leur secte ne leur permettaient pas de vivre sans leur femme. Homme et femme habitaient ensemble, sous condition de continence ; ils adoptaient un garçon et une fille, qui devaient leur succéder, suivant le pacte de leur union ».

[FN: § 1374-2]

J. GUIRAUD ; Cartulaire de Notre-Dame de Prouille, t. I : « (p. CII) Les prescriptions de la morale manichéenne étaient fort austères ; par la loi absolue du célibat et les rigueurs de ses abstinences, elle dépassait les plus sévères des règles monastiques. On s'explique que ceux qui les observaient n'aient par tardé à se faire, au milieu des mœurs faciles du Midi, une réputation de sainteté... (p. CIII) Ne pouvant pas en nier les effets étonnants, les prédicateurs catholiques en étaient réduits à déclarer que ce puritanisme n'était qu'hypocrisie et que sous ces dehors austères se cachaient les vices les plus honteux. Certains écrivains catholiques de nos jours ont repris cette thèse, et, sans prouver le moins du monde leurs affirmations, ils ont déclaré, eux aussi, que la vertu des Cathares était toute d'emprunt et faite pour en imposer aux simples... Point n'est besoin, pour expliquer l'austérité cathare, de recourir à ces suppositions aussi gratuites que faciles. Il suffit de remarquer qu'au lieu de s'imposer aux foules, sans acception de personnes et de conditions, la morale manichéenne n'était pratiquée que par une élite restreinte, bien préparée pour la recevoir et l'appliquer... ». Remarquez que Guiraud est favorable aux catholiques et adversaire des Cathares.

[FN: § 1374-3]

D. AUG. ; loc. cit. (1374-1). 1° Ascétisme des Manichéens (Cathares) : Nam his duabus professionibus, hoc est Electorum et Auditorum, ecclesiam suam, constare voluerunt. In caeteris autem hominibus, etiam in ipsis Auditoribus suis, hanc partem bonae divinaeque substantiae quae mixta et colligata in escis et potibus detinetur, maximeque in eis qui generant filios, artius et inquinatius colligare putant... Nec vescuntur tamen carnibus... Nec ova saltem sumunt... Sed nec alimonia lactis utuntur... Nam et vinum non bibunt, dicentes fel esse principum tenebrarum ; cum vescantur uvis : nec musti aliquid, vel recentissimi, sorbent... Herbas enim atque arbores sic putant vivere, ut vitam quae illis inet, et sentire credant, et dolere, cum laeduntur... Propter quod, agrum etiam spinis purgare, nefas habent... Unde nuptias sine dubitatione condemnant, et quantum in ipsis est, prohibent, quando generare prohibent, propter quod coniugia copulanda sunt. – 2° Corruption des Manichéens (Cathares) : Qua occasione, vel potius execrabilis superstitionis quadam necessitate, coguntur Electi eorum velut eucharistiam conspersam cum semine humano sumere, ut etiam inde, sicut de aliis cibis quos accipiunt, substantia illa divina purgetur. Sed hoc se facere negant, et alios nescio quos sub nomine Manichaeorum facere affirmant. – Mais le saint oppose que deux jeunes filles avouèrent avoir pris part à cette cérémonie obscène, et il ajoute : Et recenti tempore nonnulli eorum reperti, et ad ecclesiam ducti, sicut Gesta episcopalia quae nobis misistis ostendunt, hoc non sacramentum, sed execramentum, sub diligenti interrogatione confessi sunt.

[FN: § 1375-1]

D. IREN. ; Advers. haereses, 1. I, 12 : Quidam autem et carnis voluptatibus insatiabiliter inservientes, carnalia carnalibus, spiritalia spiritalibus reddi dicunt. Et quidam quidem ex ipsis clam eas mulieres, quae discunt ab eis doctrinam hanc corrumpunt : quemadmodum multae saepe ab iis suasae, post conversae mulieres ad Ecclesiam Dei, cum reliquo errore et hoc confessae sunt. Alii vero et manifeste, ne quidem erubescentes, quascunque adamaverint mulieres, has a viris suis abstrahentes, suas nuptas fecerunt. Alii vero valde modeste initio, quasi cum sororibus fingentes habitare, procedente tempore manifestati sunt, gravida sorore a fratre facta.

[FN: § 1379-1] Pourtant le même TACITE raconte, Germ., 15, que les Germains, quand ils ne sont pas en guerre, passent beaucoup de temps à la chasse, « mais davantage dans l'oisiveté, adonnés au sommeil et aux repas ». Dans les Annales, XII, 27, il raconte comment les Romains surprirent les Gaulois somnolant après avoir employé, le butin en bombances.

[FN: § 1379-2]

SALV. ; De gubernatione Dei et de iusto Dei praesentique iudicio, III : Iubet Deus ut omnis qui Christianus est, etiam oculos castos habeat quotas quisque est qui non se luto fornicationis involvat ? Et quid plura ? Grave et luctuosum est quod dicturus sum. Ipsa Ecclesia, quae in omnibus esse debet placatrix Dei, quid est aliud cum exacerbatrix Dei ? aut praeter paucissimos quosdam, qui mala fugiunt, quid est aliud pene omnis coetus Christianorum, quam sentina vitiorum ? Quotum enim quemque invenies in Ecelesia non aut ebriosum, aut helluonem, aut adulterum, sui fornicatorem, aut raptorem, aut ganeonem, aut latronem, aut homicidam? – Ces vices ne sont pas le propre des esclaves, des gens du peuple, des militaires, mais aussi des nobles : Videamus si vel a duobus illis quasi capitalibus malis ullus immunis est; id est, vol ab homicidio, vel a stupro. Quis enim est aut humano sanguine non cruentus, aut coenosa impuritate non sordidus? – IV. Quotus enim quisque est divitum connubii sacramenta conservans, quem non libidinis furor rapiat in praeceps, cui non domus ac familia sua scortum sit, et qui non, in quamcumque personam cupiditatis improbae calor traxerit, mentis sequatur insaniam. ? Secundum illud scilicet quod de talibus dicit sermo divinus : Equi insanientes in foeminas facti sunt (Jerem., V, 8). Quid enim aliud quam de se dictum hoc probat qui totum pervadere vult concubitu quicquid concupierit aspectu ? Nam de concubinis quippiam dici forsitan etiam. iniustum esse videatur : quia hoc in comparatione supradictorum flagitiorum quasi genus est castitatis, uxoribus paucis esse contentum, et intra certum coniugum numerum fraenos libidinum continere. Coniugum dixi ; quia ad tantum res imprudentiam venit, ut ancillas suas multi uxores putent. Atque utinam sicut putantur esse quasi coniuges, ita solae haberentur uxores! – Comme d'habitude, il cherche des contrastes et les trouve en opposant les mœurs des maîtres et celles des esclaves : Ecce enim ab hoc scelere vel maximo prope omnis servorum numerus immunis est. Numquid enim aliquis ex servis turbas concabinarum habet ? nuinquid multarum uxorum labe polluitur, et canum vel suum more tantas putat coniuges suas esse, quantas potuerit libidini subiugare ? – Salvien compare les Romains aux Barbares : IV. Duo enim genera in omni gente omnium barbarorum sunt, id est, aut haereticorum, aut paganorum. His ergo omnibus, quantum ad legem divinam pertinet, dico nos sine comparatione meliores ; quantum autein ad vitam et vitae acta, doleo ac plango esse peiores. Quamvis id ipsum tamen, ut ante iam diximus, non de omni penitus Romani populi universitate dicamus. Excipio enim primum omnes religiosos, deinde nonnullos etiam seculares religiosis pares. Caeteros vero aut omnes, aut pene omnes, magis reos esse quam barbaros. – Pourtant il admet que les Barbares ne valaient pas grand'chose non plus. Iniusti saut barbari, et nos hoc sumus ; avari sunt barbari, et nos hoc sumus : infideles sunt barbari, et nos hoc sumus ; cupidi sunt barbari, et nos hoc sumus ; impudici saut barbari, et nos hoc sumus ; omnium denique improbitatem atque impuritatem pleni sunt barbari, et nos hoc sumus. – Puis, sans s'inquiéter de la contradiction, il dit que ses concitoyens sont pires que les Barbares. Il commence par porter des accusations acerbes contre les Aquitains. VII. Minoris quippe esse criminis etiam lupanar puto. Meretrices enim quae illic sunt, foedus connubiale non norunt. Ac per hoc, non maculant quod ignorent. Impudicitiae quidem piaculo saut obnoxiae ; sed reatu tamen adulterii non tenentur, Adde huc, quod et pauca ferma sunt lupanaria, et paucae quae in his vitam infelicissimam damnavere meretrices. Apud Aquitanicos vero, quae civitas in locupletissima ac nobilissima sui parte non quasi lupanar fuit. Quis potentum ac divitum non in luto libidinis vixit ? Quis non se barathro sordissimae colluvionis immersit ? Quis coniugi fidem reddidit ? – Il accuse les maîtres de corrompre les femmes esclaves : Ex quo intelligi potest quantum coenum impudicarum sordium fuerit, ubi sub impurissimis dominis castas esse, etiamsi voluissent, foeminas non licebat. – À ce qu'il paraît, c'est en raison de ces offenses à la chasteté, que le Seigneur soumit les Romains aux Barbares. Cumque ob impurissimam vitam traditi a Deo barbaris fuerint, impuritates tamen ipsas etiam inter barbaros non relinquunt. – Poussé par la manie déclamatoire, il attribue toutes les vertus aux Barbares : Inter pudicos barbaros impudici sumus. Plus adhuc dico. Offenduntur barbari ipsi impuritatibus nostris. – On dirait vraiment un visionnaire comme le sénateur Bérenger : Esse inter Gothos non licet scortatorem Gothum ; soli inter eos praeiudicio nationis ne nominis permittuntur impuri esse Romani. Et quae nobis, rogo, spes ante Deum est ? Impudicitiam nos diligimus, Gothi execrantur. Puritatem nos fugimus, illi amant. Fornicatio apud illos crimen nique discrimen est, apud nos decus. – En résumé, Salvien vivait en un temps où les mœurs n'étaient pas pires que dans le passé, quand Rome avait vaincu les Barbares ; et sans y prendre garde, il se figure que c'est à cause de leurs mauvaises moeurs que les Romains ont été vaincus.

[FN: § 1379-3]

La vie dissolue des rois francs, racontée par SAINT GRÉGOIRE, dans son histoire, est trop connue pour qu'il soit nécessaire de la rappeler. Contentons-nous de glaner quelques faits dans cette histoire et dans sa suite, connue sous le nom de FRÉDÉGAIRE. S. GREG. ; Hist. eccl. franc., II, 12 : Childerieus vero cum esset nimia in luxuria dissolutus, et regnaret super Francorum gentem, coepit filias eorum stuprose detrahere. – II, 20. On dit du duc Victor : Romam aufugit, ibique similem tentans exercere luxuriam, lapidibus est obrutus. – II, 42 : Erat autem tunc Ragnacharius rex apud Camaracum, tam effrenis in luxuria, ut vix vel propinquis quidem parentibus indulgeret. Is habebat Farronem consiliarium, simili spurcitia lutulentum ;... – III, 21 à 26. Théodebert s'unit à une certaine Deuteria, qui se trouvait au château de Capraria : (22) Deuteria vero ad occursum eius venit ; at ille speciosam eam cernens, amore eius capitur, suoque eam copulavit stratui. – Quelque temps après, il l'épouse. Elle, craignant que son mari n'abusât d'une fille qu'elle avait, la fit tuer : (26) Deuteria vero cernens filiam suam adultam valde esse, timens ne eam concapiscens rex sibi adsumeret, in basterna positam, indomitis bobus coniunctis, eam de ponte praecipitavit... – IV, 13 : Chramnus vero his diebus apud Arvernum residebat : multae enim causae tunc per eum inrationabiliter gerebantur... Nullum autem hominem diligebat, a quo consilium bonum utileque posset accipere ; nisi collectis vilibus personis aetate iuvenili fluctuantibus, eosdem tantummodo diligebat, eorumque consilium audiens, ils, ut filias senatorum, datis praeceptionibus, eisdem vi detrahi iuberet. – V, 21. Il dit de deux évêques que, parvenus à l'épiscopat, coeperunt in pervasionibus, caedibus, homicidiis, adulteriis,... et ajoute : (21) Sed nec mulieres deerant cum quibus polluerentur. – VI, 36 : Clericus quidam exstitit ex Cenomannica urbe, luxuriosus nimis amatorque mulierum, et gulae ac fornicationis, omnique immunditiae valde deditus. Hic mulieri cuiusdam. saepius scorto commixtus,... – VI, 46. Il dit de Chilpéric : Iam de libidine atque luxuria non potest reperiri in cogitatione, quod non perpetrasset in opere... – VIII, 19 : Cum autem saepius Dagulfus abbas pro celeribus suis argueretur, quia furta et homicidia plerumque faciebat, sed et in adulteriis nimium dissolutus erat ; quodam tempore cum, uxorem vicini sui concupiscens, misceretur cum ea, requirens occasiones diversas, qualiter virum adulterae intra monasterii huius saepta deberet obprimere, ad extremum contestatus est ei dicens, quod si uxorem suam accederet, puniretur. – IX, 13 –. Uxor quoque ipsius Wiliulfi tertio copulatur viro, filio seilicet Beppoleni ducis ; qui et ipse duas iam, ut celebre fertur uxores vivas reliquerat. Erat enim levis atque luxuriosus ; et dum nimio ardore fornicationis artarétur, ac, relicta coniuge, cura famulabus accubaret, exhorrens legitimum connubium, aliud expetebat. – IX, 20. Le roi convoque un grand nombre d'évêques ; on lui demande pourquoi ; il répond : Sunt multa, quae debeant discerni, quae iniuste gesta sunt, tam de incestis,... – IX, 27: Amalo quoque dux dum coniugem in aliam villam pro exercenda utilitate dirigit, in amorem puellulae cuiusdam ingenuae ruit. Et facta nocte, crapulatus a vino, misit pueros, ut detrahentes puellulam, eam thoro eius adscirent... – IX, 33. Un homme dit à un évêque : Abstulisti uxorem meam cum famulis eius. Et ecce, quod sacerdotem non decet, tu cum ancillis meis, et illa cum famulis tuis, dedecus adulterii perpetrasti. – FREDEG.; Chron., 36. Le roi Théodéric [Thierry] va rendre visite à Saint Colomban – Ad quem saepissime cum veniret, coepit vir Dei eum increpare, cur concubinarum adulteriis misceretur, et non potius legitimi coniugii solaminibus frueretur. – 42. On dit du roi Clotaire : Venatione ferarum nimia assiduitate utens, et postremum mulierum et puellarum suggestionibus nimium annuens... – 48 : Chuni ad hiemandum annis singulis in Sclavos veniebant; uxores Sclavorum et filias eorum stratu sumebant. Voilà donc les vertus et la chasteté des Barbares ! – 60. On dit du roi Dagobert : Luxuriae supra modum deditus tres habebat ad instar Salomonis reginas, maxime et plurimas concubinas. Reginae vero hae erant... Nomina concubinarum eo quod plures fuissent, increvit huic Chronicae inseri. – Qui croira que, le roi ayant de pareilles mœurs, celles de ses sujets étaient très chastes ? – 70. On dit du roi Chrotaire : Chrotarius per concubinas debacchabatur assidue.

[FN: § 1380-1]

Par exemple, dans le Malleus maleficarum, il y a des descriptions obscènes ; mais, au fond, elles ne le sont pas, dans l'intention de l'auteur. Les termes des vers 12 386-12 486 du Roman du Renart (édit. MÉON) sont aussi obscènes. On peut encore tout au plus admettre l'excuse qui place l'obscénité surtout dans l'expression. Mais cela est impossible pour beaucoup de fabliaux.

[FN: § 1381-1]

Anno 305. Ex concilio Eliberitano : 12. Mater vel parentes vel quaelibet fidelis, si lenocinium exercuerit, placuit, eos nec in fine accipere communionem. – 71. Stupratoribus puerorum nec in fine dandam esse communionem. – Anno 314. Ex concilio Ancyrano : 15. Masculorum et pecorum concubitores... – 16. Masculorum vel pecorum concubitores inter hyemantes, seu daemoniacos tantum orent. – 20. Feminae, quae partus suos ex fornicatione necant, decennio poeniteant. – Anno 693. Ex concilio Toletano XVII : 3 Quicumque sodomiticae actionis patratores extiterint, quique in his turpitudinibus saepe implicari permiserint, si quidem Episcopus, presbyter, aut diaconus fuerit... – Anno 742. Ex concilio Ratisbonensi 1 : 13. Quisquis servorurn Dei vel ancillarum Christi in crimen fornicationis lapsus fuerit,... – Anno 813. Ex concilio Turonensi III : 41. Incestuosi, parricidae, homicidae multi apud nos reperiuntur, quorum aliquos iam excommunicavimus ; sed illi hoc parvipendentes in eisdem perdurant criminibus, quamobrem vestra decernat mansuetudo, quid de talibus deinceps agendurn sit. – Anno 895. Ex concilio Triburiensi – 43. Si quis cum qualibet fornicatus fuerit, et eo nesciente, filius eius vel frater eiusdem. rei inscius cum. eadem se polluerit... – Anno 1565. Ex concilio Mediolanensi. Parte II : 66. Ut meretrices ab honestis mulieribus omnino internoscantur, curent Episcopi ut aliquem. amictum. palam indutae sint....

[FN: § 1381-2]

PERTILE ; storia del dir. ital., IIe vol, Ie part., p. 435 ... Bandi Lucchesi, n. 313, où il y a un contrat de location du lupanar, pour 120 florins d'or par année, de 1351. – Parfois on cherchait à pallier l'immoralité de ces revenus, en leur donnant un but d'utilité publique. – 1404. Catherine, duchesse de Milan, régente pour son fils : sentimus quod denarii intrate datiorum baratarie et postribuli cornunis Mediolani, que intrata est specialiter deputata ad solutionem expensarum occurrentium pro reparatione fortititiorum ipsius civitatis, etiam pro consignationibus luporum et vulpium (c'est-à-dire pour prime à ceux qui les tuaient), expenduntur in alias diversas causas ; et elle veut qu'ils soient de nouveau destinés à leur but primitif. Osio, I, 257. – Pour que le lupanar rendît davantage, le Stat. iud. dacior. Com. Mant., c. 143, ordonnait quod emptores dicti dacii non habeant a comuni precium limitatum quod exigere debent pro eorum, mercibus, sed per comune concessum est eis posse vendere merces suas pro maiore precio quo possunt, et secundum quod clientulos et aventores invenerint ».

[FN: § 1381-3]

Laissons de côté ce que disent les musulmans, car la source est suspecte. Par exemple : Rec. des hist. des crois. : Hist. orientaux, t. IV : « (p. 433) Un bâtiment avait amené (chez les Francs) [devant Saint Jean d'Acre ; an 585 de l'hégire, 1189-1190 de notre ère] trois cents femmes remarquables par leur beauté. Recueillies dans les îles (de la Méditerranée), elles s'étaient enrôlées pour ces hontes, exilées pour la consolation des exilés ; elles étaient parties afin de s'offrir à ces misérables. Loin de refuser leurs faveurs aux célibataires, elles se donnaient spontanément comme la plus méritoire offrande et croyaient que nul sacrifice ne surpassait le leur, surtout si celui à qui elles s'abandonnaient réunissait la double condition d'étranger et de célibataire [c'est évidemment inventé]. Plusieurs mamlouks pervertis désertèrent notre camp [c'est plus croyable] ; ces êtres misérables et ignorants, aiguillonnés par le désir charnel, suivirent cette voie de perdition ». Mais on ne peut également rejeter les témoignages des auteurs chrétiens. – MICHAUD ; Biblioth. des Croisades, Ire partie. Histoire des guerres d’Antioche par Gauthier le Chancelier (de 1115 à 1119). L'auteur parle des chrétiens en Syrie : « (p. 104) Les uns, ennemis du jeûne et courant après les plaisirs de la table, s'appliquaient à imiter la vie et les mœurs, non point de ceux qui vivent bien, mais de ceux qui paissent bien. Les autres, par amour pour l'inceste, fréquentaient les tavernes des impudiques, et dépassaient les bornes de toute pudeur... Ils employaient l'or de l'Arabie et les pierres précieuses à parer et à couvrir avec art les parties sexuelles de leurs épouses ; et ils agissaient ainsi non point pour dérober aux yeux les parties honteuses, ni pour éteindre la flamme de la débauche, mais afin que quibus (p. 105) ingratum. erat quod licebat, eos acrius ureret quod non licebat, qui cum hoc modo suam vellent imitare libidinem, mulieres dealbare et eis satisfacere, putarent, ut praelibaremus, augebant crimina criminibus. Les femmes, dans leur manière de jouir des plaisirs de la chair, n'avaient rien de saint, rien de prudent. Méprisant la couche de leur mari, elles allaient dans les lieux de prostitution pour y commettre des incestes. Elles passaient la nuit et le jour au milieu des plaisirs, des divertissements et des banquets... » Il est impossible que le temps où l'on écrivait ces choses, fussent-elles inventées en partie, ait été un temps d'innocence telle qu'on ne savourait pas le sel des figures et des récits obscènes. ROBERT LE MOINE ; Collection GUIZOT : Hist. de la première Croisade. L'auteur raconte comment Jésus-Christ apparut, en songe, a un prêtre, et se plaignit des mauvaises mœurs des chrétiens. «(p. 407)... j'ai consenti à toutes les tribulations et les obstacles qu'ils ont à subir, parce qu'il s'est fait, avec les femmes chrétiennes et païennes, beaucoup de choses criminelles qui me blessent grandement les yeux ». – FOULCHER DE CHARTRES ; ibidem. Il raconte qu'au siège d'Antioche, les croisés souffrirent beaucoup, en punition des mauvaises mœurs. « (p. 40) ... grand nombre, en effet, se livraient lâchement et sans pudeur à l'orgueil, à la luxure et au brigandage. On tint donc un conseil et l'on renvoya de l'armée toutes les femmes, tant les épouses légitimes que les concubines, afin d'éviter que nos gens, corrompus par les souillures de la débauche, n'attirassent sur eux la colère du Seigneur ». – Ce récit se trouve aussi dans Ghibert de Novigent. – GUIBERTI Abb. St. Variae de Novigento, Gesta dei per Francos, 1. V, c. III (XVII). – JACQUES DE VITRY : Collection GUIZOT, I. II « De la corruption des contrées de l'Occident et des péchés des Occidentaux... (p. 271) La continence, chérie des demeures célestes et agréable à Dieu, était méprisée comme une chose vile. Les hommes se livraient indistinctement et sans honte à la luxure, tels que le cochon dans la boue, trouvaient des délices dans cette puanteur... (p. 272) Les liens du mariage n'avaient aucune sûreté entre les parens et les alliés, et la licence effrénée n'était pas même arrêtée par la différence des sexes ». – Chronique d'Ernoul et de Bernard le trésorier (années 1180-1184) : « (p. 86) Or vous dirai de sa vie [du Patriarche de Jérusalem]. Quant il fu venus de Rome, si ama le femme à un merchier, qui manoit à Naples, à XII lieues de Jherusalem. Et il le mandoit souvent ; et celle i aloit, et il li donnoit assés de sen avoir pour estre bien de sen baron. Ne demoura gaires apriès que ses barons fu mors. Apriès vint li patriarches, si le fist venir manoir aveuques lui en Jherusalem, et li acata bonne maison de piere ». Les mœurs des Grecs n'étaient pas meilleures : « (p. 91) Or vous dirons d'Androine, qui empereres fu de Constantinople. Il ne demouroit biele nonne en toute le tiere, ne fille à chevalier, ne fille à bourgeois, ne femme... por que elle li seist bele, que il ne le presist et gisoit à li à force... ». Quand Jérusalem est assiégée par Saladin, les habitants prient ; mais « (p. 216) Nostres sires Dame Diex ne pooit oïr lor clamour ne proiiere c'on li fesist en la cité, car l'orde puans luxure et l'avoltere qui en le cité estoit ne laissoit monter orison ne proiiere c'on (p. 217) fesist devant Diu, et li puans peciés contre nature ». Aussi comprend-on que les gens aient trouvé qu'on revenait des croisades pire que quand on y était allé, Rutebeuf a écrit, au temps de Saint Louis, un dialogue entre un individu qui veut aller et un autre, qui ne veut pas aller à la croisade ; il y juge sévèrement les croisés. – RUTEBEUF : Œuv. comp., recueillies par A. JUBINAL, t. I, La desputizons dou Croisié et dou Descroisié : « p. 156) (186) Mult vont outre meir gent menue (187) Sage large, de grant aroi,... (191) Si ne valent ne ce ne quoi (192) Quant ce vient à la revenue ». – Chronique de GUILLAUME DE NANGIS, GUIZOT, année 1120 : « (p. 7) ... Guillaume et Richard, fils de Henri, roi des Anglais, la fille et la nièce de ce roi, et beaucoup de grands et de nobles d'Angleterre, ayant voulu quitter la Normandie pour passer en Angleterre, furent submergés dans la mer, quoiqu'aucun vent n'en troublât le calme. On disait, et c'était avec vérité, qu'ils étaient presque tous souillés du crime de sodomie ». Vie de GUIBERT DE NOGENT, dans GUIZOT, 1. III, c. 5 : « (p. 5) Il y avait en effet un certain homme... Enguerrand de Boves... Libéral, prodigue et dépensier sans mesure, cet homme affectait pour les églises un respect et une munificence sans bornes, choses dans lesquelles seulement il avait appris à faire consister la religion ; mais d'un autre côté il était tellement adonné à l'amour du sexe, qu'il avait toujours autour de sa personne quelques femmes achetées ou empruntées, et ne faisait généralement rien que ce à quoi (p. 6) le poussait leur effronterie. Ayant toujours échoué dans ses projets pour se marier, il se mit à courir les femmes d'autrui, parvint à séduire furtivement l'épouse d'un certain comte de Namur son parent, et, a près l'avoir sollicitée secrètement au crime, finit par vivre publiquement avec elle comme avec une légitime épouse... Cette femme était la fille de Roger, comte de Portian... (p. 7) Tous ceux... qui l'ont connue sont d'opinion que nous aurions trop à rougir, non seulement de détailler le cours de ses déportemens, mais même de les rappeler dans notre mémoire ». – RIGORD : Vie de Philippe-Auguste, GUIZOT: « (p. 139) L'an du Seigneur 1198, ce Foulques s'associa, pour l'aider dans ses prédications, un prêtre... Tous les jours, en accompagnant les diverses prédications, il retirait quelques âmes du péché d'usure, et plus encore des fureurs de la luxure. Il sut même ramener à la continence conjugale des femmes qui vivaient dans des lieux de prostitution, et s'y livraient, à vil prix et sans pudeur, à tous les passans ; car elles ne choisissaient pas même leurs complices ». – MATHIEU PARIS; t. III, année 1229; p. 400-402. On raconte une rébellion des étudiants de Paris, qui accusaient la reine Blanche d'avoir des relations charnelles avec le légat du pape ; et les gens chantaient (p. 402): Heu ! morimur strati, vincti, mersi, spoliati Mentula legati nos facit ista pati. – MURATORI ; Ant. ital., t. II, diss. 20 : (p. 141) Et Saeculo quidem vulgaris Ærae Decimo, quo nullum corruptius Italia Christiana vidit, tam enormiter libidini frena laxata sunt, ut ipsae principes feminae palam in omne intemperantiae genus sese effunderent. Prae ceteris vero circiter Annum DCCCCXXV ex huiusmodi licentia famam sibi grandem conquisiere apud Longobardos Ermengardis Adelberti Eporediae Marchionis uxor, et apud Romanos, Marozia Johannis XI Papae mater, et Alberici Marchionis senioris conjux, ejusque mater Theodora, ac soror altera Theodora : quarum vitia ad posteros transmisit liberiore stilo Liutprandus illorum temporum Historicus Eodemque Saeculo,... coepit ipse Clerus observatam in Occidente ab exordio Ecclesiae continentiam contemnere, eoque tamdem evasit malesanus ardor, ut Presbyteri, nedum Diaconi et Subdiaconi, feminas sub omnium oculis loco uxoris haberent, illud caussati, cur non sibi liceret, quod apud Graecos minime nefas erat ? Longe utique facilius pullulant Vitia, quam Virtutes : quare pestilentia haec universas fere Italiae Civitates, ipsamque Urbem, sensim invasit. Connivebant mali Praesules, obsistebant boni ;... In margine vetustissimi Sacramentarii MSti apud Canonicos Mutinenses haec deprehendi : Ego Andrea Presbiter promitto coram Deo et omnibus Sanctis, et tibi Guarino Episcopo, quod carnalem, comistionem non faciam ; et si fecero, et onoris mei et beneficio Ecelesiae perdam... Succedit alterum simile jusjurandum : Ab hac ora in antea promitto ego Johannes Archipresbiter tibi Warino Episcopo, quod diebus vitae meae cum muliere alierius adulterium non faciam, neque cum inlicita meretrice fornicationem. Et si fecero, me ipsum confirmo in periculum...

[FN: § 1382-1]

Il suffit de rappeler que les courtisanes avaient part au culte romain, pourtant très sévère en général. Dans les Fastes de Préneste, on lit : Robigalia. Feriae Robigo via Claudia ad milliarum (quintum), ne robigo frumentis noceat. Sacrificium et ludi cursoribus maioribus minoribusq(ue) fiunt. Festus et puerorum lenoniorum, quia proximus superior meretricum est. – La fête Vinalia était célébrée par les courtisanes. OVID. ; Fast., IV :

(865) Numina vulgares Veneris celebrate puellae :
Multa professarum quaestibus apta Venus.
Poscite ture dato formam, populique favorem ;
Poscite blanditias, dignaque verba ioco ;
…………………………………………………..

Pour les fêtes de Flora, 1. V :

(331) Quaerere cônabar, quare lascivia maior
His foret in ludis, liberiorque iocus :
Sed mihi succurrit, numen non esse severum
Aptaque deliciis munera ferre Deam
……………………………..…………...
(349) Turba quidem cur hos celebret meretricia ludes
Non ex difficili causa petenda subest.

On sait assez qu'à Corinthe les courtisanes priaient Aphrodite pour la cité, et lui adressèrent des supplications, au temps de l'invasion perse. Une scolie de PINDARE, nous raconte l'histoire d'un individu qui, heureux d'avoir vu ses vœux accomplis, conduit cent jeunes courtisanes dans le bois sacré de la déesse. –ATHEN. : L. XIII, c. 33, p. 573-574. – Dans le même livre, p. 573, on rappelle les temples et les fêtes qui empruntaient leurs noms aux hétaïres.

[FN: § 1382-2]

D'un côté, le Deut., XXIII, 17, défend clairement la prostitution ; d'un autre côté, il ne manque pas d'allusions dans la Bible, qui en montrent l'existence chez le peuple d'Israël. Pour concilier la loi et le fait, on a supposé que la première défendait seulement la prostitution sacrée, et que le fait se rapportait à la prostitution vulgaire. – I. SPENCER a défendu vaillamment cette opinion. De legibus Hebraeorum, ritualibus, II 35. Après avoir cité le passage du Deut., il observe : (p. 561) Quibus verbis, non scorta vulgaria, quaestus aut voluptatis solius cupidine corporum suorum copiam facientia prohibentur ; sed scorta (quae vocant) sacra, foedo alicui gentium Numini dicata, et turpitudinem omnem in illius honorem exercentia. – Il se peut bien qu'il en fût ainsi ; mais il se peut aussi qu'à l'instar de ce qui a lieu dans ce domaine chez tous les peuples, il y eût divergence entre la prohibition théorique de la loi et la tolérance pratique, dans les faits. En tout cas, il y avait des courtisanes dans le peuple d'Israël : autrement, la défense faite au prêtre de se marier avec une courtisane (Levit.. XXI, 7) n'aurait aucun sens. Dans Jug., 11, 1, il est fait allusion a un Israëlite qui était fils d'une prostituée. Le célèbre jugement de Salomon (I Rois, III, 16) fut rendu sur le conflit de deux prostituées. Le cas de Tamar est très connu (Genèse XXXVIII) et n'aurait pu être écrit là où n 'existait pas de prostituées. L'auteur raconte, sans ajouter aucune parole de blâme, que « (15) Juda la vit, la prit pour une prostituée, parce qu'elle avait couvert son visage », et qu'il eut commerce avec, elle. Dans les Prov.,VI, 26, il est dit que « pour la femme prostituée on se réduit à un morceau de pain ». Samson (Jug., XVI, l) se rendit à Gaza chez une prostituée, et n'en est blâmé en aucune façon par l'Écriture Sainte. De nombreux passages du Talmud montrent l'écart entre la théorie et la pratique de la chasteté. – M. SCHWAB ; Traité des Berakhoth. Talmud de Jérusalem, c. III. On traite de la thébila, soit du bain de purification après l'acte charnel : « (p. 65) Comment la thébila nous empêche-t-elle de pécher ? En voici un exemple : Il est arrivé qu'un surveillant de jardins était prêt à commettre un péché avec, une femme mariée ; mais ils voulaient d'abord s'assurer de pouvoir se purifier immédiatement après [remarquez la purification mécanique, § 1257] ; pendant ce temps, des étrangers arrivèrent et ils furent empêchés de commettre le péché. Un autre, ayant voulu séduire une esclave du Rabba, reçut d'elle cette réponse et ce refus : .„ Je ne puis prendre la thébila que quand ma maîtresse en prend “.– „ Toi (esclave) tu n'es considérée que comme une bête “, lui dit le séducteur ; „ donc tu n'as pas besoin de thébila “. – „ As-tu oublié “ (répondit celle-ci) „ qu'il est écrit : celui qui pèche avec une bête doit être mis à mort (lapidé) ? “ (Et ils ne péchèrent point) ». – Plus loin, nous avons une anecdote à propos des phylactères que portaient les Israëlites. Talmud de Babylone, c. III : « (p. 313) Les rabbins ont enseigné que, avant d'entrer aux cabinets, on retire ses phylactères à la distance de quatre coudées... il faut les tenir à la main ainsi enveloppés, puis les placer dans des trous à proximité des cabinets, mais ne donnant pas sur la rue, de crainte que les passants ne les prennent et ne donnent lieu à de faux soupçons ; car il arriva ceci à un étudiant : ayant laissé ses phylactères dans des trous situés sur la rue, une femme de mauvaise vie vint les prendre et les apporter à la salle d'étude, en disant que cet étudiant les lui avait donnés pour récompense (de son libertinage). Le jeune homme, en entendant ces mots, monta sur le toit et se jeta en bas par désespoir ».

[FN: § 1382-3]

La tradition voulait que Solon eût institué les lupanars, à Athènes,

« à cause de la vigueur des jeunes gens ». – ATH. ; XIII, p. 569. Horat. Sat, I, 2

(31) Quidam notus homo, cum exiret fornice, « macte
Virtute esto » , inquit, sententia dia Catonis.
Nam simul ac venas inflavit tetra libido,
Huc iuvenes aequum est descendere ; non alienas
Permolere uxores.

PSEUDACRONIS Scholia in Horat. : Catone transeunte quidam exiit de fornice ; quem, cum fugeret, revocavit et laudavit. Postea cum frequentius eum exeuntem de eodem lupanari vidisset, dixisse fertur : adulescens, ego te laudavi, tamquam huc intervenires, non tamquam hic habitares. – L'anecdote montre que les Romains excusaient l'usage et réprouvaient l'abus.– P. PORPHYRIONIS Commentarii in Horat : Marcus Cato ille Censorius cum vidisset hommeni honestum e fornice exeuntem, laudavit existimans libidinem compescendam esse sine crimine. – Cfr. ATH. : XIII, p. 568-569, où le poète Xénarque s'en prend à des jeunes gens qui poursuivent de leurs assiduités les femmes mariées, au lieu de se contenter des prostituées :

« Indignes, indignes et intolérables sont les choses que les plus jeunes font dans la cité, où il y a, dans les lupanars, de fort belles filles qu'on peut voir se chauffant au soleil, la poitrine découverte, nues et disposées en ordre par file » : et il s'étonne qu'ils puissent oublier les lois de Dracon contre l'adultère. –CICÉRON, Pro M. Coelio, 20, 48, excuse son client d'avoir eu commerce avec des courtisanes. Verum si quis est, qui etiam meretriciis amoribus interdictum iuventuti putet, est ille quidem valde severus ; negare non possum : sed abhorret non modo ab huius saeculi licentia, verum etiam a maiorum consuetudine [notez cela], atque concessis. Quando enim hoc factum non est ? quando reprehensum ? quando non permissum ? quando denique fuit, ut, quod licet, non liceret ? – A. SÉNÈQUE. Controv., II, 12, 10, excuse aussi un jeune homme d'avoir aimé des courtisanes : Nihil - inquit - peccaverat ; amat meretricem ; solet fieri : adulescens est, expecta, emendabitur, ducet uxorem. – Cfr. TERENT.; Adelph., 102-103. – PRUD. : Contra Simmach., I, 134-138. – La loi protégeait la dignité des matrones romaines, mais laissait toute liberté aux courtisanes et à ceux qui avaient commerce avec elles. – SUET. – Tib., 35 : Feminae famosae ut ad evitandas legum poenas iure ac dignitate matronali exsolverentur, lenocinium profitrri coeperant ;... « Des femmes déshonnêtes, afin d'être exemptées du droit et de la dignité des matrones, pour éviter les peines des lois, se faisaient inscrire parmi les courtisanes... » – TACIT.; Ann., II, 85 : « Le sénat fit cette année des règlements sévères pour réprimer les dissolutions des femmes. On interdit le métier de courtisane à celles qui auraient un aïeul, un père, ou un mari chevalier romain ; car Vistilia, d'une famille prétorienne, pour avoir toute licence, avait été chez les édiles se faire inscrire sur le rôle des prostituées, d'après un ancien usage de nos pères, qui pensaient qu'une femme serait assez punie par la seule déclaration de son impudicité. » (Trad. NISARD). – PAPINIEN ; Dig., XLVIII, 5, 10 : Mulier, quae evitandae poenae adulterii gratia lenocinium fecerit aut operas suas in scaenam locavit, adulterii acusari damnarique ex senatus consulto potest. – TITE-LIVE, XXXIX, 9, rapporte comment les Bacchanales furent découvertes : Une célèbre courtisane, l'affranchie Ispala Fecenia, digne d'un meilleur sort, continuait pour s'entretenir, même après avoir été affranchie, le métier auquel elle était habituée quand elle était esclave. Elle entra en relations, à cause du voisinage, avec Aebutius, sans que cela nuisit ni à la fortune, ni à la réputation de celui-ci. Spontanément, elle l'avait aimé et recherché ; et comme l'avarice des parents d'Aebutius le laissait dans le besoin, la générosité de la courtisane l'aidait ». Même des Pères de l'Église reconnurent la prostitution comme un mal nécessaire. – D. AUG. ; De ordine, II 4, 12. Le saint remarque qu'il y a des maux nécessaires, comme les femmes publiques et les entremetteurs : Quid sordidius, quid inanius decoris et turpidinis plenius meretrieibus, lenonibus, caeterisque hoc genus pestibus dici potest ? Aufer meretrices de rebus humanis, turbaveris omnia libidinibus. Constitue matronarum loco, labe ac dedecore dehonestaveris. Sic igitur hoc genus hominum per suos mores impurissimum vita, per ordinis leges conditions vilissimum. – D. THOM.; Summa theol., IIa, IIae, q. 10, a. 11. De même que Dieu permet certains maux pour en éviter de pires, sic ergo et in regimine humano illi qui praesunt, recte aliqua mala tolerant, ne aliqua bona impediantur, vel etiam ne aliqua mala peiora incurrantur; sicut Augustinus dicit, et il cite le passage rapporté plus haut. – Des empereurs païens instituèrent, à Rome, un tribut sur les prostituées, et des empereurs chrétiens les imitèrent, à Constantinople. SUET., Calig., 110 : Vectigalia nova atque inaudita, primum per publicanos, deinde... per centuriones tribunosque praetorianos exercuit. Il exigeait ex capturis prostitutarum, quantum quaeque uno concubitu mereret. Additumque ad caput legis, ut tenerentur publico, et quae meretricium, et qui lenocinium fecissent... HIST. AUG. –LAMP. – A. Severus, 24 : Lenonum vectigal et meretricum et exoletorum in sacrum aerarium inferri vetuit, sed sumptibus publicis ad instaurationem theatri, circi, amphitheatri, et aerarii deputavit. – ZONABA, XIV, 8, D. III, p. 259; P. II, p. 54, dit du Chrysargyre, imposé par Anastase, qu'il était payé « par tous les mendiants, les pauvres, et par toutes les courtisanes... ». – La Novelle XIV de Justinien, De lenonibus, déplore que de toutes les parties de l'empire on amenât des prostituées à Constantinople, et que « maintenant elle [la ville de Constantinople] et tous les lieux circonvoisins sont pleins de pareils maux [de maisons de prostitution] –

L'empereur veut apporter un remède à une si grande perversité ; c'est pourquoi il commande à ses sujets que « tous, suivant leur pouvoir, se conduisent chastement ». –

.– Qu'il était bien placé pour prêcher la Vertu !

[FN: § 1382-4]

Lex Wisigothorum, 1. III, 4, 17, De meretricibus ingenuis vel ancillis, aut si earum scelus iudices perquirere vel corrigere noluerint. Si aliqua puella ingenua sive mulier, in civitate publice fornicationem exercens, meretrix agnoscatur, et frequenter deprehensa in adulterio, nullo modo erubescens, iugiter multos viros perturpem suam consuetudinem adtrahere, cognoscitur, huiusmodi a Comite civitatis comprehensa...

[FN: § 1382-5]

Capitulare de ministerialibus Palatinis, 1 : Ut unusquisque ministerialis palatintis diligentissima inquisitione discutiat primo homines suos, et postea pares suos, si aliquem inter eos vel apud nos ignotum hominem vel meretricem latitantem invenire possit...

[FN: § 1382-6]

Capitularium, lib. VII, 143 : ... Sed quia, Deo auxiliante, per merita et intercessionem sanctorum servorumque Dei, quos sublimare et honorare curavimus atque curamus, hactenus nos et successores nostri regna et regiones adquisivimus, et victorias multas habuimus, deinceps summopere omnibus nobis providendum est, ne pro dictis inlicitis et spurcissimis luxuriis, his, quod absit, careamus. Nam multae regiones, quae rerum Ecclesiarum invasiones, vastationes, alienationes, vexationesque, et sacerdotum reliquorumque servorum Dei oppressiones vel quascunque iniurias, quae iamdicta inlicita et adulteria vel sodomiticam luxuriam vel commixtionem meretricum sectalae fuerunt, nec in bello seculari fortes, nec in fide stabiles perstiterunt. Et qualiter Dominus talium criminum patratoribus ultrices poenas per Sarracenos et alios populos venire et servire permisit, cunctis earum esta legentibus liquet. Et nisi nos ab his caveamus similia nobis supervenire non dubitamus ; quia vindex est Deus de his omnibus. – Capitularium, additio quarta, 160. On répète à peu près les mêmes choses et l'on ajoute : ...Quia dum illae meretrices, sive monasteriales, sive seculares, male conceptas soboles in peccatis genuerunt, saepe maxima ex parte occidunt ; non implentes Christi Ecclesias filiis adoptivis, sed tumulos corporibus, et inferos miseris animabus satiant. Absit enim ut pro talibus pereatis (Leg. forte peccatis) et nos simul cum regno cadamus... – Comme nous le verrons (1391-3), Charlemagne observe que le haut et le bas clergé péchaient même avec les femmes en compagnie desquelles les Canons leur permettaient d'habiter, parce qu'on ne les croyait pas dangereuses. Les mœurs du reste du peuple n'étaient pas meilleures. – Capitularium, lib. VII, 336 : De concubinis non habendis. Qui uxorem habet, eo tempore concubinam habere non potest, ne ab uxore eum dilectio separet concubinae. – 356 : De his qui cum pecoribus coitu mixti sunt, aut more pecorum usque affinitatis lineam cum consanguineis incestum commiserunt, sive cum masculis concubuerunt. – Capitularium, lib., VI, 27.

[FN: § 1382-7]

Constitutiones Regni Siculi, 1. I, tit. XX. De violentia meretricibus illata, 1. Rex Guilielmus : Miserabiles itaque mulieres, quae turpi quaestu prostitutae cernuntur, nostro gaudeant beneficio, gratalantes, ut nullus eas compellat invitas suae satisfacere voluntati... – 1 III, t. LIII. De poena matris filiam publicae prostituentis – Imp. Frider. – Matres quae publice prostituunt filias, poenae nasi truncati a divo Rege Rogerio statutae subiacere sancimus : alias etiam consentientes, et filias, quas forte propter inopiam, nedum maritare, sed etiam nutrire non possunt, alicuius voluptatibus exponentes, a quo et sustentationem vitae, et gratiam praestolantur, poenae subiacere non tam iniustum credimus, quam severum.

[FN: § 1383-1]

JOINVILLE « (171) Li communs peuples se prist aus foles femmes ; dont il avint que li roys donna congié à tout plein de ses gens, quant nous revenimes de prison. Et je li demandai pourquoi il avoit ce fait ; et il me dist que il avoit trouvei de certein que au giet d'une pierre menue, entour son paveillon, tenoient cil lour bordiaus à cui il avoit donnei congié, et ou temps don plus grant meschief que li os eust onques estei ».

[FN: § 1383-2]

L. PICHON ; Le roy des ribauds. Dissertations de plusieurs auteurs. – CLAUDE FAUCHET « (p. 25) ... l'on dit que les filles de joyes qui suivoient la Cour estoient tenuës en May, venir faire le fief du Prevost de l'Hostel : et lesquelles pour leur hardiesse impudente et impudique estoient renommees Ribaudes... » – PIERRE DE MIRAUMONT cite Bouteiller, qui écrivait vers l'année 1459, et qui dit que le roy des Ribauds « (p. 37) sur tous les logis des bourdeauz et des femmes bordelieres doit avoir deux sols la sepmaine ». Plus loin, il est fait mention d'une ordonnance du 13 juillet 1558 « (p. 41) par laquelle il est très-expressement enjoint et commandé à toutes filles de joye et autres non estans sur le roolle de la Dame desdictes filles, vuider la Cour incontinent apres la publication de la presente, avec deffenses à celles estans sur le roolle de ladicte Dame, d'aller par les villages : et aux chartiers, muletiers, et autres les mener, retirer, ni loger, jurer et blasphemer le nom de Dieu... » – ESTIENNE PASQUIER cite Du TILLET qui dit du roy des Ribauds : « (p. 48) Les filles de joye suyvantes la Court, sont sous sa charge, et tout le mois de May sont sujettes d'aller faire sa chambre ». – Du CANGE . « (p. 78)... Ce sont les droits du Roy des ribauds en Cambray : 1° ledit Roy doit avoir, prendre, cueillir et recepvoir sur chascune femme, qui s'accompagne de homme carnelement, en wagnant son argent, pour tant qu'elle ait tenu ou tiengne maison à lowage en le cité cinq solz Parisis pour une fois. Item sur toutes femmes qui viennent en le cité, qui sont de l'ordonnance pour la premiere fois deux solz Tournois. Item sur chascune femme de le dite ordonnance qui se remue et va demourer de maisons ou de estuves en aultre, ou qui va hors de le ville et demeure une nuit, douze deniers... ». – GOUYE DE LONGUEMARE, faisant des observations sur le passage déjà cité de Bouteiller, confirme d’autre part l'existence des prostituées «(p. 96) À l'égard de ce que Boutellier dit de la Jurisdiction sur les Bourdeaux et femmes bordelières, on doit aussi entendre que sa fonction se réduisoit à des visites en ces endroits-là, pour y faire observer une certaine police... que ces (p. 97) Maisons de débauche, et les personnes qui les habitoient, lui devoient payer une rétribution de deux sols par semaine... ». L'auteur observe qu'il semblerait « (p. 97) que la débauche étoit alors permise à la suite (p. 98) de nos Rois ; il est cependant à remarquer qu'elle n'étoit que tolérée, de même que l'étoient à Paris les mauvais lieux... Il paroît même que cette tolérance n’avoit pour but que d'éviter de plus grands désordres... » Quelles que soient les causes du fait, cela n'exclut pas son existence. – P. L. JACOB : « (p. 163) La royauté des ribauds étant tombée en (p. 164) quenouille après la mort du bon seigneur de Grignaux, „ ce fut une dame, et une grande dame quelquefois, dit M. Rabataux dans son curieux mémoire sur la Prostitution en Europe au moyen âge, qui resta chargée de la police des femmes de la cour “. En 1535, elle se nommait Olive Sainte, et recevait de François 1er un don de quatre-vingt-dix livres, „ pour lui aider, et aux susdites filles, à vivre et supporter les despenses qu'il leur convient faire à suivre ordinairement la Cour... “. On a conservé plusieurs ordonnances du même genre, rendues entre les années 1539 et 1546, et ces ordonnances font foi que, chaque année, au mois de mai, toutes les filles suivant la cour étaient admises à l'honneur de présenter au roi le bouquet du renouveau ou du valentin, qui annonçait le retour du printemps et des plaisirs de l'amour ».

[FN: § 1383-3]

DELAMARE ; Traité de la Police, t. I, 1. III, titre V, c. 6 : « (p. 521) Saint Louis voulut entreprendre de les chasser [les prostituées] ; c'est par cette réforme que commence son Ordonnance de l'an 1254. Elle porte que toutes les femmes et filles qui se prostituent seront chassées : tant des Villes que des Villages... (p. 522) Une longue et triste experience fit enfin connoître qu'il était impossible d'abolir totalement le vice des prostitutions, sans tomber dans d'autres desordres incomparablement plus dangereux à la Religion, aux mœurs et à l'Etat... L'on prit donc le party de tolerer ces malheureuses victimes de l'impureté... Ordonnance du Prevôt de Paris du dixhuitième Septembre 1367 qui enjoint à toutes les femmes de vie dissoluë, d'aller demeurer dans les bordeaux et lieux publics qui leur sont destinés, sçavoir... Fait défense à toutes personnes de leur loüer des maisons en aucun autre endroit, à peine de perdre le loyer ; et à ces sortes de femmes d'acheter des maisons ailleurs, à peine de les perdre ».

[FN: § 1387-1]

Il n'y a aucun juste motif pour douter que Ninzatti (Ligorio) ne soit de bonne foi, quand il manifeste de la répugnance à s'occuper des péchés contre le sixième et le neuvième commandements du Décalogue. – NINZATTI (S. ALPH. MAR. DE LIGORIO) ; Theologia moralis, t. I: (p. 228) Tractatus de sexto et nono decalogi praeeepto. Nunc aegre materiam illam tractandam aggredimur, cuius vel solum nomen hominum mentes inficit. Utinam brevius aut obscurius explicare me potuissem ! Sed cum sit frequentior ac abundantior eonfessionum materia, et propter quam maior animarum numerus ad infernum delabitur, imo non dubito asserere ob hoc unum impudicitiae vitium, aut saltem non sine eo, omnes damnari quicumque damnantur, hinc opus mihi fuit, ad instructionem eorum qui moralem scientiam cupiunt addiscere, ut clare (licet quo castissime fieri potuit) me explicarem, et plurima particularia discuterem.

[FN: § 1390-1]

AMM. MARCEL. ; XXVII,4 – D. HIERONY.; Ad Pammachium adversus errores Ioan.. Hierosoly., t. II : (p. 454 e) Miserabilis Praetextatus, qui designatus consul est mortuus. Homo sacrilegus, et idolorum cultor, solebat ludens B. Papae Damaso dicere : Facite me Romanae urbis Episcopum, et ero protinus Christianus.

[FN: § 1391-1]

THEOD. COD. ; XVI, 2, 20 : Imppp. Valentinianus, valens et Gratianus AAA. ad Damasum Episcopum urbis Romae, Ecclesiastici aut ex ecclesiasticis vel qui continentium se volunt nomine nuncupari, viduarum ac pupillarum domos non adeant, sed publicis exterminentur iudiciis, si posthac eos affines earum vel propinqui putaverint deferendos. Censemus etiam, ut memorati nihil de eius mulieris, cui se privatim sub praetexta religionis adiunxerint, liberalitate quacunque vel extremo iudicio possint adipisci, et omne in tantum inefficax sit, quod alicui horum ab his fuerit derelictum, ut nec per subiectam personam valeant aliquid vel donatione vel testamento percipere. – Godefroy observe : Continentes igitur dicti, qui privato perfectioris vitae studio ducti, veto severioris vitae suscipiendae, legitimis connubii solatiis seiuncti, coelibem vitam affectabant, id est Temperantes.

[FN: § 1391-2]

THEOD. COD., XVI, 2, 44, ann. 420 : Eum, qui probabilem saeculo disciplinam agit, decolorari consortio Sororiae appellationis non decet. Quicunque igitur, cuiuscumque gradus Sacerdotio fulciuntur vel clericatus honore censentur, extranearum sibi mulierum interdicta consortia cognoscant... Interpretatio. Quicunque clericatus utuntur officio extranearum mulierum familiaritatem habere prohibentur ; matrum, sororum vel filiarum sibi solatia intra domum suam noverint tantura esse concessa, quia nihil turpe in talibus personis fieri vel cogitari lex liaturae permittit. Illae vero mulieres sunt in solatio retinendae, quae in coniugio fuerunt ante officium clericatus. – Voir la longue note de GODEFROY.

[FN: § 1391-3]

Capitularium. lib. VII, 376 : Quod feminae cum Presbyteris vel reliquis Clericis non debeant habitare, nec eis ministrare, nec intra cancellos stare, neque ad altare accedere. – Il défend d'habiter même avec celles qui étaient permises par les anciens canons, quia, instigante diabolo, etiam in illis scelus frequenter perpetratum reperitur. – Idem, 452. – Additio tertia, 117: De subintroductis mulieribus. Omnibus igitur Clericis feminam secum in domibus suis habere ultra licentiam canonum firmiter sit contradictum.

[FN: § 1392-1]

D. C PR.; Ad Pomponium, de virginibus.

[FN: § 1392-2]

Je laisse le reste en latin. – C. CYPR. ; Ad Pomnponium, de virginibus : ..:Nec aliqua putet se hac excusatione defendi, quod inspici, et probari possit ; an virgo sit ; cum et manus obstetricum et oculus saepe fallatur. Et si incorrupta inventa fuerit virgo ea parte sui, qua mulier potest esse : potuerit tamen ex alia corporis parte peccasse, quae violari potest, et tamen inspici non potest. Certe ipse coucubitus, ipse complexus ; ipsa confabulatio et osculatio, et coniacentium duorum turpis et foeda dormitio quantum dedecoris et criminis eonfitetur? (1394-6). – La matrone romaine était beaucoup plus chaste que ces femmes, nonobstant les images qui préservaient ses enfants du fascinum, et aucun paterfamilias des beaux temps de Rome n'aurait permis ces obscènes inspections sur ses filles. – Le saint ajoute l'argument de la jalousie divine : Superveniens maritus sposam suam iacentem cum altero videat nonne indignatur et fremit ? Et per zeli livorem fortassis et gladium in marinai sumi t? Quid ? Christus Dominus et index noster, cum virginem suam sibi dicatam, et sanctitati suite destinatam facere cum altero cernit, quam indignatur et irascitur ? Et quas poenas incestis eiusmodi coniunctionibus coniminatur ?

[FN: § 1392-3]

D. HYERONYM : Ad Eustochium de custodia virginitatis, Epist. XXII. I. p. 1143 f. L'auteur parle de veuves qui affectent la chasteté : Plena adulatoribus domus, plena convivis. Clerici ipsi. quos et Magisterio esse oportuerat pariter et timori, osculantur capita matronarum, et extenta manu, ut benedicere eos putes velle, si nescias, pretia accipiunt salutandi. Illae interim quae sacerdotes suo viderint indigere praesidio, eriguntur in superbiam : et quia maritorum expertae dominatum, viduitatis praeferunt libertatem ; castae vocantur, et Nonnae, et, post caenam dubiam, apostolos somniant.

[FN: § 1393-1]

Ce cardinal dénonça au pape les mauvaises mœurs et les vices de quelques religieux. BEATI PETRI DAMIANI, opera, omnia, t. III, Liber Gomorrhianus, ad Leonem IX Rom. Pont. – Argumentum. – Nefandum et detestabile crimen, in quod Deo dicati sui temporis prolabebantur, deplorat : cosque utpote indignos a sacris Ordinibus removendos esse contendit : Leonemque Pontificem Romanum implorat, ut tam foede peccantes sua auctoritate coerceat (p. 63-77). – BURCHARD.; Diarium, t. II, mai 1493 : (p. 79) Alexander consuetudinem jam ceptam per Innocentium de maritanda prole feminina prosequutus est et ampliavit. Incumbit igitur clerus omnis, et quidem cum diligentia, circa sobolem procreandam. Itaque a majore usque ad minimum concubinas in figura matrimonii, et quidem publice, attinent. Quod nisi a Deo provideatur, transibit hec corruptio usque ad monachos et religiosos, quamvis monasteria Urbis quasi omnia jam facta sint lupanaria, nemine contradicente. – L'éditeur THUASNE note : « Cette assimilation des lupanars aux couvents de jeunes filles revient souvent sous la plume des écrivains du XVe siècle » ; et il en cite plusieurs exemples. – INFESSURA ; Diario : (p. 259) Inter alla quoque quae istis temporibus [ann. 1490] ascribi possunt est quod reverendus pater vicarius papae in Urbe et eius districtu volens, ut decet bonum virum, custodire oves gregis sibi commissi, fecit unum edictum probibitorium laycis et clericis cuiuscumque conditionis existentibus, ut de coetero sub excomunicationis poena et suspensionis ac privationis beneficiorum etc. non auderent retinere concubinas nec publice nec secrete ; cum diceret id verti in praeiudicium divinae legis et contra honestatem sacerdotalem : cum multi et quasi infiniti eam retinerent, tam magni praelati, quam etiam semplices clerici, propter quod bene vivendi modus in his non iudicabatur, minuebantque laicis fidem et devotionem. Quod cum S. D. N. audivit, accito ad se dicto episcopo eodemque vicario, eum de praemisso interdicto acriter momordit fecitque incontinenti illud removeri, cum diceret id prohibitum non esse ; propter quod talis effecta est vita sacerdotum et curialium, quod vix reperitur qui concubinam non retineat, vel saltem meretricem, ad laudem Dei et fidei christianae. E t ea forte de causa numeratae sunt meretrices, quae (p. 260) tunc publice Romae sunt, ut ex vero testimonio habetur, ad numerum, sex millium et octingentarum meretricum ; exceptis illis quae in concubinatu sunt et illis quae non publice sed secreto cum quinque vel sex earum exercent artificium, et unaquaeque earum, vel unum vel plures habent lenones. – BURCHARD. ; Diarium, t. II. Il décrit une cérémonie du mois d'août 11197 : (400) ... meretrices et alie viles persone steterunt ab omni parte, inter altare et cardinales. – Tout le monde connait le banquet des cinquante courtisanes donné par le pape Borgia ; t. III : (p. 167) In sero fecerunt cenam cum duce Valentinense in camera sua, in palatio apostolico, quinquaginta meretrices honeste, cortegiane nuncupate, que post cenam coreaverunt cum servitoribus et aliis ibidem existentibus, primo in vestibus suis; deinde nude. Post cenam posita fuerunt candelabra communia mense in candelis ardentibus per terram, et proiecta ante candelabra per terram castanee quas meretrices ipse super manibus et pedibus, nude, candelabra pertranseuntes, colligebant, Papa, duce et D. Lucretia sorore sua presentibus et aspicientibus. Tandem exposita dona ultima, diploides de serico, paria caligarum, bireta et alia pro illis qui pluries dictas meretriees carnaliter agnoscerent; que fuerunt ibidem in aula publice carnaliter tractate arbitrio presentium, dona distributa victoribus. – Note de THUASNE : « Le banquet des cinquante courtisanes est confirmé, par Matarazzo qui substitue des dames et des seigneurs de la cour aux courtisanes et aux valets du récit de Burchard (Arch. Stor. Ital., t. XVI, p. 189), par la lettre de Silvio Savelli reproduite plus loin... et insérée par Sanuto dans son journal, enfin par l'orateur florentin Francesco Pepi... Au commencement du XVIIIe siècle, le régent de France donnait au petit Luxembourg douze bals, où danseurs et danseuses complètement nus, renouvelaient les fêtes galantes du Vatican... » – MACHIAVELLI ; Vita di Castruccio Castracani. Après la défaite que Castruccio infligea aux Florentins : « (p. 249) ... il se plaça avec ses gens sur le plateau de Peretola... où il passa plusieurs jours à partager le butin et à fêter la victoire, faisant battre monnaie, au mépris des Florentins, courir le palium à des chevaux, à des hommes et à des courtisanes ». BURCHARD.; Diarium. t. III, 19 juin 1501 : (p. 146) Deputatus fuit locus apud Aquam Traversam, ...pro alloggiamento gentium regis Francorum euntium ad regnum Neapolitanum. Ibidem fact fuerunt presepia. ordinata provisio panis, carnium, ovorum, casei, fructuum et omnium aliorum necessariorum, et ordine sexdecim meretrices, que necessitati illorum providerent. – Il est bien connu qu'au moyen âge, le concubinage des prêtres était très répandu, et que souvent les autorités laïques ou religieuses vendaient pour une certaine somme la permission d'avoir des concubines. Le mal est ancien et il en est fait mention dans un grand nombre de chroniques. On lit, par exemple, dans celle de MATHIEU PARIS, t. I, année 1129 : « (p. 293) Cette même année, le roi Henri tint un grand concile à Londres aux calendes d'Août, pour interdire le concubinage aux prêtres. Guillaume, archevêque de Cantorbéry, Turstan, archevêque d'York et leurs suffragants, étaient présents à ce concile. Henri trompa tous les prélats, grâce à l'imprévoyance malhabile de l'archevêque de Cantorbéry. En effet, le roi obtint haute justice sur les concubines des prêtres : mais cette affaire devait se terminer par un grand scandale, car le roi gagna beaucoup d'argent en vendant aux prêtres le droit de garder leurs concubines ». – Aujourd'hui, là où les vertuistes ont fait passer dans la loi la prohibition du concubinage, de semblables gains reviennent à la police qui sait pratiquement le tolérer. – On lit, dans la même chronique: « (p. 286.) L'an du Seigneur 1125, Jean de Crème, cardinal du Saint-Siège apostolique, vint en Angleterre avec la permission du roi, et alla d'évêchés en évêchés, d'abbayes en abbayes, non sans recueillir partout de grands présents. Il tint un concile solennel à Londres le jour de la Nativité de la (p. 287) bienheureuse Marie. Là il s'éleva avec force contre le concubinage des prêtres, disant que c'était un crime abominable de coucher côte à côte avec une courtisane, puis de se lever et de prendre le corps de Jésus-Christ : mais lui-même, après avoir communié ce jour-là, fut surpris le soir avec une courtisane ». – Cette aventure aussi est semblable à d'autres qui, chaque jour, arrivent à nos vertuistes. Les siècles passent, mais la nature de l'homme demeure. CORNELIUS AGRIPPA a un passage dans lequel il va certainement au delà de la vérité, mais qui, non moins certainement, est en partie conforme aux faits. Ce passage se trouve dans l'édition d'Anvers de 1530, et fut supprimé dans l'édition des œuvres de cet auteur, faite à Lyon. Voir à ce propos BAYLE ; Dict. hist., s. v. Agrippa, p. 111. L'exemplaire que nous possédons porte, au commencement : Splendidae nobilitatis viri et armatae militiae Equitis aurati... Henrici Cornelij Agrippae ab Nettesheym De Incertitudine et Vanitate Scientiarum et Artium atque excellentia Verbi Dei Declamatio. A la fin : IOAN. GRAPHEVS excudebat anno Christo nato MDXXX, mense Septemb. Antuerpiae. Les pages ne sont pas numérotées; il y a seulement un registre des feuilles d'imprimerie. Au chapitre De arte lenonia. l'auteur déclame vertement contre les mauvaises mœurs de son temps : (feuille Z. recto, dernière page) Auro placatur zelotipus maritus, auro mollitur inexorabilis riualis, auro acuratissimi vincantur custodes, auro quaeque ianua panditur, aure, omnis thalamus conscenditur, auro vectes et saxa, et insolubilia matrimonii vincula franguritur. Quid mirum quod auro virgines, puellae, matronae, viduae, vestales vaeneunt si auro Christus ipse venditur. Denique hac lenociniorum duce, plurimi ab infima sorte ad summum prope nobilitatis gradum conscenderunt. Prostituit hic uxorem factus est Senator, Prostituit ille filiam creatus est comes, hic aliam quamuis matronam in adulteri Principis sollicitauit amplexum, mox amplo stipendio dignus fit regius cubicularius : (verso) Alii ob desponsata regia scorta spectabiles facti sunt, publicisque muneribus praefecti, eisdem artibus abs Cardinalibus et pontificibus multi multa perpinguia venantur beneficia, nec est via ulla compendiosior. – L'auteur rapporte des exemples anciens de maquerelages sous le couvert de la religion, et ajoute : ... nec desunt mihi si referre velim eognita recentia exempla, habent enim Sacerdotes, monachi, fraterculi, moniales, et quas vocant sorores, specialem lenociniorum praerogatiuam, quum illis religionis praetextu liberuni sit quocumque peruolare, et quibuscunque quantum et quoties libet sub specie visitationis et consolationis, aut confessionis secreto sine testibus loqui tam pie personata sunt illorum lenocinia, et sunt ex illis quibus pecuniam tetigisse piaculum est, et nihil illos mouent verba Pauli dicentis: Bonum est mulierem non tangere, quas illi non raro impudicis contrectant manibus, et clanculum confluunt ad lupanaria, stuprant sacras virgines, viciant viduas et hospitum suorum adulterantes vxores... – Vient ensuite (feuille a, première page, recto) le passage mentionné par BAYLE : Iam vero etiam Lonociniis militant leges atque canones, cum in potentum fauoreni pro iniquis nuptiis pugnant, et itista matrimonia dirimunt. Sacerdotesque sublatis honestis nuptiis turpiter scortari compellunt, malueruntque illi legislatores Sacerdotes sues cum infamia habere concubinas, quam cum honesta fama uxores, forte quia ex concubinis prouentus illis est amplior : De quo legimus gloriatum in conuiuio quendam Episcopum habere se vndecini milia Sacerdotum concubinariorum, qui in singulos annos illi aureum pendant. – Dans une traduction française, publiée en 1603, sans nom de lieu, le passage est traduit : « (p. 394) Les loix et canons sont aussi enroolles en cette gendarmerie, et servent au maquerelages lors qu'en faveur des grands seigneurs ils valident et approuvent les iniques mariages, et rompent et separent ceux qui sont iustes et legitimes, et contraignent les prestres à paillarder vilainement, leur defendant de se marier honnestement. Ces legislateurs ont estimé meilleur que les gens d'Eglise menassent une vie infame avec des concubines, que de vivre en honneur et bonne reputation avec (les femmes espousees, possible pour ce que le proffit et commodité qui leur vient des concubines est plus grand : dont nous lisons qu'un certain Evesque se glorifloit en un banquet, disant qu'il avoit onze mille prestres en son diocese concubinaires qui lui payoyent à raison de ce tous les ans un escu chacun ».

[FN: § 1394-1]

EUSEB. ; Eccles. hist., VII, 30 12. L'auteur parle contre Paul de Samosate :

« Quant à ses sœurs spirituelles (sous- introduites), comme les appellent les habitants d'Antioche, à celles des prêtres et des diacres qui sont autour de lui... »,...

,… « ... et nous n'ignorons pas combien [de clercs] tombèrent pour avoir introduit des femmes auprès d'eux... » – NICEPHORI CALLISTI eccl. hist., VI, 30. – D. HIERON. ; Ad Eustochium de custodia virginitatis, Epist. XXII, c. 5; t. I, p. 143, b. Pudet dicere, pro nefas : triste, sed verum est : Unde in ecclesias Agapetarum pestis introiit ? unde sine nuptiis aliud nomen uxorum ? Immo unde concubinarum genus ? Plus inferam. Unde meretrices univirae ? Eadem domo, uno cubiculo, saepe une, tenentur et lectulo : et suspiciosos nos vocant, si aliquid extimenus. Frater sororem virginem deserit, coelibem spernit virgo germanum, fratrem quaerit extraneum ; et cum in eodem proposito esse se simulent, quaerunt alienorum spiritale solatium, ut demi habeant carnale commercium.

[FN: § 1394-2]

D. IOANN. CHRYSOST. ; . L'interprète paraphrase : adversus eos qui apud se fovent sorores adoptivas, quas subintroductas vocant.

[FN: § 1394-3]

[FN: § 1394-4]

[FN: § 1394-5]

. – Adversus eas qui vires introductitios habent (Savil.).

[FN: § 1394-6]

Il suffira de donner la traduction latine de ce passage : (3) Obstetricis enim ars et sapientia hoc solum potest videre, an congressum viri corpus tulerit : an liberum, et adulterium ex osculis et corruptionum amplexibus effugerit, dies illa tunc declarabit, quando verus Dei sermo, qui occulta hominis in medium adducit, et praesens nunc his quae clam fiunt, omnia et exuta ante omnium oculos ponet : tunc sciemus bene an ab his sit purum, et undequaque incorruptum corpus (§ 1392-2].

[FN: § 1395-1]

Voir DU CANGE ; Gloss. ad. scrip. m. et inf. latinitatis, s. v. Subintroductae. – Du CANGE ; Gloss. ad scrip, m. et inf. graecitatis, s. v. .

[FN: § 1395-2]

En plusieurs pays, la moralité du clergé est aujourd'hui meilleure qu'elle ne l'a jamais été par le passé ; mais cela est dû au choix que l'on fait, en refusant les candidats qui ne donnent pas de sérieuses garanties de leur vocation.