[Created: 30 July, 2014]
[Updated: 18 January, 2017] |
A new edition of this journal has been published by the Institut Coppet, Paris in October 2014. Purchase and (soon) download here.
Jacques Bonhomme, (Paris: Imprimerie centrale de Napoléon Chaix et Cie, rue Bergère, 8, 11 June - 13 July, 1848). Manager/director: J. Lobet.
Authors (unsigned): Frédéric Bastiat, Gustave de Molinari, Charles Coquelin, Alcide Fonteyraud, and Joseph Garnier.
Contents of Issue 1:
Below are high resolution images of each article in the issue, with a transcription into French and an English translation. Those attributed to Bastiat by Pailloettet and Molinari will be checked against the version provided in his Oeuvres complètes.
Abbreviations used:
For further information, see the main Jacques Bonhomme page.
Quotations:
Publisher's details ca be found at the bottom of the right collumn on Page 2:
Le gerant, J. Lobet.
Imprimerie centrale de Napoléon Chaix et Cie, rue Bergère, 8.
French Transcription:
Sommaire
Histoire de Jacques Bonhomme. - Comment lui est venue l'idée d'écrire un journal. - Comment il entend la liberté. - Son opinion sur l'Assemblée nationale. - Comment il comprend l'État. - Son plan financier. - Comme quoi prendre cinq et rendre quatre, ce n'est pas donner. - Jacques Bonhomme dit son mot sur le recrutement, les élections, les bons du Trésor, les caisses d'épargne et les fonds secrets, les attroupements et les affaires étrangères.
English Translation:
Contents
The history (story) of Jacques Bonhomme. How he got the idea of writing a newspaper. How he understands (the word) Liberty. His opinion of the National Assembly. How he understands (the word) the State. His financial plan. It just goes to show that one does not give by taking away five and giving back four. Jacques Bonhomme gives his two cents worth on recruitment for the army, the elections, treasury bonds, savings banks and secret funds, trop movements and foreign affairs.
Title: Histoire de jacques Bonhomme (unknown author)
Location: Page 1, left and central and top right columns.
French transcription
Histoire de Jacques Bonhomme (unknown author)
Comment est venue à Jacques Bonhomme l'idée écrire un journal.
Et d'abord Jacques Bonhomme vous dira qui il est et pourquoi on l'a baptisé du nom de Jacques Bonhomme.
Il y a bien longtemps de cela - bien des centaines d'années - des seigneurs
grands et petits étaient les maîtres du pays. Comme ces gens-là passaient leur
vie à se chamailler entre eux, comme ils ne travaillaient aucunement ni de
la pioche, ni de la bêche, ni du marteau, leur nourriture et leur entretien
se trouvaient à la charge de ceux qui travaillaient. Et le fardeau était lourd,
croyez-moi! car on ne ménage pas son beurre quand on va le chercher dans le
garde-manger du voisin. Cependant, les gens de travail ne se plaignaient pas
trop; pourvu qu'on leur laissât de quoi vivre, eux, leurs femmes et leurs enfants,
ils payaient sans mot dire les redevances, et ils faisaient les corvées. C'était
un bon peuple, bien doux, bien inoffensif, et qui se consolait vite de ses
peines lorsqu'on lui disait le mot pour rire. Voyant cela, ceux qui le grugeaient
et qui le tondaient à ras lui avaient donné le nom de Jacques Bonhomme. Avaient-ils
envie de faire cadeau d'une parure à leurs femmes ou de doter leurs filles
- ils s'adressaient à Jacques Bonhomme. - Jacques, mon bon Jacques, lui disaient-ils,
donne-nous un peu plus de blé, un peu plus d'huile, un peu plus de vin sur
ta récolte; et si Jacques lui répondait : - Mais je vous en donne déjà pas
mal, de mon blé, de mon huile et de mon vin, - ils répliquaient: -Jacques,
mon ami Jacques, tu t'égares; c'est dans ton intérêt que nous te demandons
un supplément de blé, d'huile et de vin; cela fera aller le commerce, et tu
finiras toi-même par en profiter. *L'impôt est le meilleur des placements.*
Jacques Bonhomme, qui n'était pas un sot, quoiqu'en ce temps-là il sût à peine
lire, Jacques Bonhomme trouvait bien que le raisonnement louchait un peu; cependant
il payait tout de même. Il était si bien nommé Jacques Bonhomme!
D'autres, fois on lui disait: Jacques, mon ami Jacques, sais-tu bien ce qui
vient d'arriver '? Un étranger a osé dire que ton seigneur et maître, le roi
de France vit avec une c .... (concubine?); Jacques, il faut punir l'insolent:
donne-nous ta vache avec son veau et envoie ton fils aîné à la frontière. -
Et si Jacques s'avisait là-dessus de raisonner, et de demander qu'au moins
on lui laissât son veau,- on lui répondait encore: - Jacques, mon ami Jacques,
vous voulez donc laisser insulter impunément l'honneur national! Jacques, mon
ami Jacques, vous êtes un factieux! Mais prenez-y garde: si vous refusez au
roi l'impôt qui lui est dû, le roi vous enverra ramer sur ses galères.
Et comme Jacques Bonhomme se souciait peu d'aller ramer sur les galères du
roi, il vendait sa vache avec le veau, en donnait le prix au collecteur et
il envoyait son fils à la frontière. Puis, de grand matin, jusque bien [CC]
avant dans la soirée, il se remettait il piocher son coin de terre.
Un jour pourtant, Jacques Bonhomme se fatigua de piocher toujours sans pouvoir
rien garder dans sa pauvre escarcelle; il déposa sa pioche, prit un fusil,
et se mit à faire des révolutions.
Il en fit une, deux, trois, puis il déposa, son fusil et recommença à piocher.
Mais, après avoir fait ses trois révolutions, voici que Jacques Bonhomme s'aperçoit
que les choses, au lieu de tourner de mal en bien, vont de mal en pis, et Jacques
Bonhomme, dont la famille a grossi, et avec elle les soucis du joue, Jacques
Bonhomme est fort inquiet, Jacques Bonhomme se gratte l'oreille, Jacques Bonhomme
cherche un moyen honnête de se tirer d'affaire.
Comme bien vous pensez, Jacques Bonhomme ne manque pas d'amis; car, enfin,
Jacques, malgré les révolutions, a bien encore un peu de blé dans son grenier
et quelques litres de vin dans son cellier, et tous
ses amis lui donnent à l'envi des conseils. - Jacques, lui dit l'un, Jacques,
mon ami, vois-tu bien, tu as fait un pas de clerc : brise ton fusil, rappelle
ceux que tu as chassés, laisse-les te conduire comme ils l'entendront, et paie-leur
l'impôt sans mot dire ! Vois-tu bien, Jacques, ton rôle, à toi, c'est de payer.
- Tu as payé, tu paies et tu paieras. Remets donc les choses comme devant.
Tu payais beaucoup alors, c'est vrai; mais si les choses continuent à aller
comme elles vont, vois-tu bien, si peu qu'on te demande, Jacques, tu ne le
pourras donner, car tu n'auras plus rien.
- N'écoute pas, Jacques, lui crie un autre. Jacques, mon ami, tu n'as pas fait
trois révolutions pour n'en tirer aucun profit. Jacques, mon ami, reprends
ton fusil, et au besoin ta hache ou ta faux, et continue à faire la guerre
aux. aristocrates, jusqu'à ce qu'il n'en demeure plus un seul debout. Alors,
crois-moi, tu deviendras riche et tu seras heureux.
- Jacques, mon ami Jacques, que vas-tu faire ? N'écoute pas ces hommes à ceinture rouge. Ne fais point la guerre aux aristocrates, Jacques; il y a d'autres moyens de te tirer d'affaires. Il'y en a un surtout qui est infaillible... c'est moi qui l'ai inventé. Il ne te coûtera pas cher, Jacques, et il t'enrichira pour sûr...
Jacques, qui était bien décidé il ne pas revenir au temps passé, mais qui répugnait fort à reprendre son fusil, Jacques prêtait une oreille attentive aux paroles de son troisième ami, et il était sur le point de conclure le marché, lorsqu'on le tira par sa blouse pour lui offrir un autre remède non moins infaillible, - puis un second, - puis un troisième; si bien que Jacques ne savait plus auquel entendre.
Alors il poussa une idée à Jacques Bonhomme. Mes amis, pensa-t-il, s'occupent
beaucoup de mes affaires, si je m'en occupais aussi, moi ? Si je cherchais
où va mon argent; si je m'occupais de savoir pourquoi on ne me permet pas de
faire ceci ou cela à ma guise; pourquoi on m'oblige d'acheter cher ici mon
pain, ma viande, mon chauffage et mes outils, tandis que je pourrais les avoir
à bon marché un peu plus loin; pourquoi on me prend chaque année mes enfants
les plus robustes pour en faire des soldats, quand j'aurais plus de profit
à en faire des laboureurs ou des artisans; pourquoi on m'oblige à payer de
gros appointements par ci, de gros appointements par là, absolument comme sous
l'ancien régime; pourquoi, enfin, on me soutire autant et plus d'argent qu'on
m'en soutirait autrefois.
Ayant fait ces réflexions, Jacques Bonhomme se mit [RC] à étudier le budget
de la république et à lire des livres d'économie politique; de tout cela, il
retira grand fruit; il commença à voir jour dans les affaires, et voulant que
tout le monde y pût voir comme lui, il se mit à raconter ce qu'il avait appris.
Maintenant, mes chers amis, prêtez attention, je vous prie, aux discours de
Jacques Bonhomme. C'est un homme de bonne humeur et de bon esprit, un démocrate
de la vieille souche, et, grands et petits, vous aurez tous profit à l'écouter.
English Translation
[to come]
Title: La Liberté (Freedom/Liberty) et Laissez-faire (Laissez-Faire) [attributed to Bastiat by Paillottet]
Location: Page 1, right column.
Place of Publication:
French transcription
La liberté
J’ai beaucoup vécu, beaucoup vu, observé, comparé, étudié, et je sais arrivé à cette conclusion :
« Nos pères avaient raison de vouloir être LIBRES, et nous devons le vouloir aussi.»
Ce n’est pas que la liberté n’ait des inconvénients ; tout en a Arguer contre elle de ces inconvénients, c’est dire à un homme qui est dans le bourbier : N’en sortez pas, car vous ne le pouvez sans quelque effort.
Ainsi il serait à souhaiter qu’il n’y eût qu’une foi dans le monde, pourvu que ce fût la vraie. Mais où est l’autorité infaillible qui nous l’imposera ? En attendant qu’elle se montre, maintenons *la liberté d’examen et de conscience*.
Il serait heureux que le meilleur mode d’enseignement fût universellement adopté. Mais qui le possède, et où est son titre ? Réclamons donc la liberté d’enseignement.
On peut s’affliger de voir des écrivains se complaire à remuer toutes les mauvaises passions. Mais entraver la presse, c’est entraver la vérité aussi bien que le mensonge. Ne laissons donc jamais périr la liberté de la presse.
C’est une chose fâcheuse que l’homme soit réduit à gagner son pain à la sueur de son front. Il vaudrait mieux que l’État nourrît tout le monde ; mais c’est impossible. Ayons du moins la liberté du travail.
En s’associant, les hommes peuvent tirer un plus grand parti de leurs forces. Mais les formes de l’association sont infinies ; quelle est la meilleure ? Ne courons pas la chance que l’État nous impose la plus mauvaise, cherchons à tâtons la bonne et réclamons la liberté d’association.
Un peuple a deux manières de se procurer une chose : la première, c’est de la faire ; la seconde, c’est d’en faire une autre et de la troquer. Il vaut certainement mieux avoir l’option que de ne l’avoir pas. Exigeons donc la liberté de l’échange.
Je me mêle aux débats publics, je m’efforce de pénétrer dans la foule pour prêcher toutes les libertés dont l’ensemble forme la liberté.
Laissez faire ! — Je commence par dire, pour prévenir tonte équivoque, que laissez faire s’applique ici aux choses honnêtes, l’État étant institué précisément pour empêcher les choses déshonnêtes.
Cela posé, et quant aux choses innocentes par elles-mêmes, comme le travail, l’échange, l’enseignement, l’association, la banque, etc., il faut pourtant opter. Il faut que l’État laisse faire ou empêche de faire.
S’il laisse faire, nous serons libres et économiquement administrés, rien ne coûtant moins que de laisser faire.
S’il empêche de faire*, malheur à notre liberté et à notre bourse. À notre liberté, puisqu’empêcher c’est lier les bras : à notre bourse, car pour empêcher, il faut des agents, et pour avoir des agents, il faut de l’argent.
À cela les socialistes disent : Laissez faire ! mais c’est une horreur ! — Et pourquoi, s’il vous plaît? — Parce que, quand on les laisse faire, les hommes font mal et agissent contre leurs intérêts. Il est bon que l’État les dirige.
Voilà qui est plaisant. Quoi ! vous avez une telle foi dans la sagacité humaine que vous voulez le suffrage universel et le gouvernement de tous par tous ; et puis, ces mêmes hommes que vous jugez aptes à gouverner les autres, vous les proclamez inaptes à se gouverner eux-mêmes !
English Translation
Freedom
I have lived a long time, seen a great deal, observed much, compared and examined many things, and I have reached the following conclusion:
Our fathers were right to wish to be FREE, and we should also wish this.
[434]
It is not that freedom has no disadvantages, since everything has these. To use these disadvantages in argument against it is to say to a man trapped in the mire: Do not get out, as you cannot do this without some effort.
Thus, it is to be wished that there be just one faith in the world, provided that it is the true one. However, where is the infallible authority which will impose it on us? While waiting for it to manifest itself, let us maintain the freedom of discussion and conscience.
It would be fortunate if the best method of teaching were to be universally adopted. But who has it and on what authority? Let us therefore demand freedom of teaching.
We may be distressed to see writers delight in stirring up all forms of evil passion. However, to hobble the press is also to hobble truth as well as lies. Let us, therefore, take care never to allow the freedom of the press to die.
It is distressing that man should be reduced to earning his bread by the sweat of his brow. It would be better for the state to feed everyone, but this is impossible. Let us at least have the freedom to work.
By associating with one another, men can gain greater advantage from their strength. However, the forms of association are infinite; which is best? Let us not run the risk that the state imposes the worst of these on us; let us seek the right one by trial and error, and demand the freedom of association.
A people has two ways of procuring something. The first is to make it; the second is to make something else and trade it. It is certainly better to have the option than not to have it. Let us therefore demand the freedom to trade.
I am throwing myself into public debate; I am trying to get through to the crowd to preach all the freedoms, the total of which make up liberty.
Laissez-faire! I will begin by saying, in order to avoid any ambiguity, that laissez-faire is used here for honest things, with the state instituted precisely to prevent dishonest things.
This having been said, and with regard to things that are innocent in themselves, such as work, trade, teaching, association, banking, etc., a choice [435] must be made. It is necessary for the state to let things be done or prevent them from being done.
If it lets things be done, we will be free and optimally administered most economically, since nothing costs less than laissez-faire.
If it prevents things from being done, woe to our freedom and our purse. Woe to our freedom, since to prevent things is to tie our hands; woe to our purse, since to prevent things requires agents and to employ agents takes money.
In reply to this, socialists say: “Laissez-faire! What a disaster!” Why, if you please? “Because, when you leave men to act, they do wrong and act against their interests. It is right for the state to direct them.”
This is simply absurd. Do you seriously have such faith in human wisdom that you want universal suffrage and government of all by all and then you proclaim these very men whom you consider fit to govern others unfit to govern themselves?
Title: L'Assemblée Nationale [attributed to Bastiat by Paillottet]
Location: Page 1,bottom right column; Page 2, top left column.
Place of Publication: 1848.06.11-15 “L’Assemblée Nationale” (The National Assembly) [Jacques Bonhomme, 11-15 June 1848] [OC7.58, p. 237] [CW1, p. 451 <http://oll.libertyfund.org/titles/2393#lf1573-01_label_846>]
French transcription
L’Assemblée Nationale
— Maître Jacques, que pensez-vous de l’Assemblée nationale ?
— Je la crois excellente, bien intentionnée, passionnée pour le bien. Elle est peuple, elle aime le peuple, elle le voudrait heureux et libre. Elle fait honneur au *suffrage universel*.
— Cependant que d’hésitation ! que de lenteurs ! que [2] d’orages sans causes ! que de temps perdu ! Quels biens a-t-elle réalisés ? quels maux a-t-elle empêchés ? Le peuple souffre, l’industrie s’éteint, le travail s’arrête, le trésor se ruine, et l’Assemblée passe son temps à écouter d’ennuyeuses harangues.
— Que voulez-vous ? L’Assemblée ne peut changer la nature des choses. La nature des choses s’oppose à ce que neuf cents personnes gouvernent avec une volonté ferme, logique et rapide. Aussi voyez comme elle attend un pouvoir qui réfléchisse sa pensée, comme elle est prête à lui donner une majorité compacte de sept cents voix dans le sens des idées démocratiques. Mais ce pouvoir ne surgit pas, et ne peut guère surgir dans le provisoire où nous sommes.
— Que faut-il donc que fasse l’Assemblée ?
— Trois choses : pourvoir à l’urgence, faire la Constitution, et s’en aller.
English Translation
National Assembly
“Master Jacques, what do you think of the National Assembly?”
“I think it is excellent, well intentioned, and devoted to the good. It is a product of the people; it loves the people and wants them to be happy and free. It brings honor to universal suffrage.”
“But how hesitant it is! How slow! How many storms in a teacup there are! How much time wasted! What good has it done? What evils has it prevented? The people are suffering, production is failing, work is at a standstill, the treasury is ruining itself, and the Assembly spends its time listening to boring speeches.”
“What are you saying? The Assembly cannot change the nature of things. The nature of things is at variance with nine hundred people governing with a will at once determined, logical, and swift. This being so, you must see how the Assembly is waiting for a government that will reflect its thought, how it is ready to give it a compact majority of seven hundred votes in favor of democratic ideas. However, no such government is in the offing at present and could hardly be so in the interim situation in which we find ourselves.”
“What should the Assembly do?”
“Three things: deal with the emergency, draw up the constitution, and make itself scarce.”
Title: “L’État” (The State) [attributed to Bastiat by Paillottet]
Location: Page 2, left column.
Place of Publication: “L’État” (The State) [1er numéro du Jacques Bonhomme, du 11 au 15 juin 1848.] [OC, vol. 7, 59.] [CW, vol. 2, pp. 105-6]
"The State (draft)" in Frédéric Bastiat, The Collected Works of Frédéric Bastiat. Vol. 2: The Law, The State, and Other Political Writings, 1843-1850, Jacques de Guenin, General Editor. Translated from the French by Jane Willems and Michel Willems, with an introduction by Pascal Salin. Annotations and Glossaries by Jacques de Guenin, Jean-Claude Paul-Dejean, and David M. Hart. Translation Editor Dennis O’Keeffe. Academic Editor, David M. Hart (Indianapolis: Liberty Fund, 2012). <http://oll.libertyfund.org/titles/2450#lf1573-02_label_195>.
French transcription
L'Etat
Il y en a qui disent : C’est un homme de finances qui nous tirera de là, Thiers, Fould, Goudchaux, Girardin. Je crois qu’ils se trompent.
— Qui donc nous en tirera ?
— Le peuple.
— Quand ? — Quand il aura appris cette leçon : L’État, n’ayant rien qu’il ne l’ait pris au peuple, ne peut pas faire au peuple des largesses.
— Le peuple sait cela, car il ne cesse de demander des réductions de taxes.
— C’est vrai ; mais, en même temps, il ne cesse de demander à l’État, sous toutes les formes, des libéralités.
Il veut que l’État fonde des crèches, des salles d’asile et des écoles gratuites pour la jeunesse ; des ateliers nationaux pour l’âge mûr et de pensions de retraite pour la vieillesse.
Il veut que l’État aille guerroyer en Italie et en Pologne.
Il veut que l’État fonde des colonies agricoles.
Il veut que l’État fasse les chemins de fer.
Il veut que l’État défriche l’Algérie.
Il veut que l’État prête dix milliards aux propriétaires.
Il veut que l’État fournisse le capital aux travailleurs.
Il veut que l’État reboise les montagnes.
Il veut que l’État endigue les rivières.
Il veut que l’État paye des rentes sans en avoir.
Il veut que l’État fasse la loi à l’Europe.
Il veut que l’État favorise l’agriculture.
Il veut que l’État donne des primes à l’industrie.
Il veut que l’État protège le commerce.
Il veut que l’État ait une armée redoutable.
Il veut que l’État ait une marine imposante.Il veut que l’État…
— Avez-vous tout dit?
— J’en ai encore pour une bonne heure.
— Mais enfin, où en voulez-vous venir ?— À ceci : tant que le peuple voudra tout cela, il faudra qu’il le paye. Il n’y a pas d’homme de finances qui fasse quelque chose avec rien.
Jacques Bonhomme fonde un prix de cinquante mille francs à décerner à celui qui donnera une bonne définition de ce mot, l’ÉTATt ; car celui-là sera le sauveur des finances, de l’industrie, du commerce et du travail.
English Translation
“There are those who say, ‘A financial man, such as Thiers, Fould, Goudchaux, or Girardin, will get us out of this.’ I think they are mistaken.”
“Who, then, will get us out of this?”
“The people.”
“When?”
“When the people have learned this lesson: since the state has nothing it has not taken from the people, it cannot distribute largesse to the people.”
“The people know this, since they never cease to demand reductions in taxes.”
“That is true, but at the same time they never cease to demand handouts of every kind from the state.
They want the state to establish nursery schools, infant schools, and free schools for our youth, national workshops for those that are older, and retirement pensions for the elderly.
They want the state to go to war in Italy and Poland.
They want the state to found farming colonies.
They want the state to build railways.
They want the state to bring Algeria into cultivation.
They want the state to lend ten billion to landowners.
[106]
They want the state to supply capital to workers.
They want the state to replant the forests on mountains.
They want the state to build embankments along the rivers.
They want the state to make payments without receiving any.
They want the state to lay down the law in Europe.
They want the state to support agriculture.
They want the state to give subsidies to industry.
They want the state to protect trade.
They want the state to have a formidable army.
They want the state to have an impressive navy.
They want the state to . . .”
“Have you finished?”
“I could go on for another hour at least.”
“But what is the point you are trying to make?”
“This. As long as the people want all of this, they will have to pay for it. There is no financial man alive who can do something with nothing.”
Jacques Bonhomme is sponsoring a prize of fifty thousand francs to be given to anyone who provides a good definition of the word state, for that person will be the savior of finance, industry, trade, and work.
Title: Sur les plans financiers
Location: Page 2, bottom left and top central columns.
French transcription
Sur les plans financiers.
Depuis que la crise a commencé, les plans financiers pleuvent de toutes parts.
C'est à qui aura l'honneur de sauver le commerce, l'industrie, les finances,
de sauver, en un mot, la République. Chacun propose sa recette, toujours meilleure
et plus infaillible que les autres.
Bien entendu que les auteurs de ces belles découvertes réclament invariablement
l'intervention active de l'État; ils se chargeraient seulement d'administrer
leurs remèdes en son nom.
Quelques statisticiens ont essayé de faire le compte de ces plans sauveurs.
Ils en ont déjà trouvé, dit-on, 999,000, et ce n'est pas encore fini.
Quand on aura atteint le million, nous proposerons aussi notre plan; et celui-là,
s'il n'est plus merveilleux que les autres, s'en distinguera tout au moins
par sa simplicité.
Il consistera tout simplement à permettre à l'industrie de de sauver elle-même.
Il n'exigera du gouvernement autre chose qu'un projet de loi en trois articles,
conçu à peu près en ces termes:
Art. 1er. Les lois qui limitent le taux de l'intérêt de l'argent en matière
civile et en matière commerciale, sont abrogées.
Art. 2. La loi qui régit les sociétés commerciales est abrogée.
Les sociétés seront régies à l'avenir par les conventions librement consenties
entre les parties.
Les engagements contractés par elles envers les tiers seront soumis au droit
commun.
Art. 3. Le privilége exclusif de la Banque de France est aboli. En conséquence,
il est permis à tout particulier, ou à toute société, d'émettre des billets au porteur et à vue,
et de faire toute autre opération de banque, à la seule condition de remplir
fidèlement tous ses engagements envers le public.
---
[CC]
Si une loi semblable à celle qui précède était proposée et adoptée, il nous semble voir d'ici ce qui arriverait.
On verrait d'abord un peu de confusion, un peu de brouhaha.
Il y aurait sans doute, surtout dans les premiers moments, des emprunts ostensiblement
contractés à 15, à 20 , qui sait? peut-être même à 30 % l'an. Bien des gens
crieraient au scandale. Jacques Bonhomme s'en consolerait en pensant que cela
dispense peut-être les emprunteurs· de vendre leurs marchandises ou leurs propriétés
à 100 % de perte. Et puis, les affaires reprenant, et la confiance aussi, l'intérêt
baisserait peu à peu.
On verrait surgir de tous côtés des sociétés commerciales et des banques; avec
quelque difficulté d'abord, mais bientôt avec entraînement, avec fureur. De
ces sociétés et de ces banques, un certain nombre reposeraient sur des conceptions
hasardées ou folles: celles-là tomberaient. Mais plusieurs mieux conçues, survivraient,
et celles-là serviraient dans la suite de modèle à toutes les autres. L'expérience
serait en cela pour tout le monde un infaillible guide.
C'est alors que le principe de l'association, sur lequel on bâtit aujourd'hui
tant de chimères, recevrait une application juste et saine. Il produirait,
sans commotion pour l'État, sans perturbation pour l'industrie, tous les bons
effets dont il est susceptible.
C'est alors aussi que, par le canal des banques, le crédit se répandrait sans
effort dans le pays; les capitaux reprendraient leur circulation interrompue
; dans peu de temps on les verrait abonder partout. Les associations d'ouvriers,
quand elles se fonderaient sur des bases solides, avec des chances raisonnables
de succès, participeraient aux bienfaits du crédit comme toutes les autres.
English Translation
[to come]
Title: Chronique politique
Location: Page 2, central and right columns.
French transcription
CHRONIQUE POLITIQUE.
Intérieure.
De quoi se compose un attroupement?
De deux pour cent de filous attentifs aux poches qui s'entrouvrent ;
De trois pour cent de brouillons et d'agents de discordes civiles;
De vingt-cinq pour cent de gamins de tout âge, aimant le tapage, le grabuge et les niches que l'on peut faire à l'autorité;
De soixante-dix pour cent de niais de tout calibre, qui vont voir ce qu'il
y a; qui rentrent chez eux vexés d'avoir été bousculés, et qui mériteraient
le font, si on le donnait à tout âge.
Ceci posé, qu'y a-t-il à faire pour dissiper un attroupement?
Selon Jacques Bonhomme, rien.
Et en voici la raison. Supposons un rassemblement comme celui de la porte Saint-Denis.
A huit heures le jobard sort de chez lui pour digérer son dîner tout le long
du boulevard. Ordinairement il ne sait de quel côté tourner les talons; par
ce temps d'attroupement il se dit: Je vais voir ce qu'il y a du côté de l'émeute.
Le voilà arrivé, penchant son oreille à droite, à gauche, et n'entendant que
des balivernes. Si la troupe ou la mobile, ou la garde nationale ne viennent
pas, le plaisir du jobard varie peu, et au bout de dix heures il va se coucher
en bâillant. Cela ne l'empêche pas de dire à tous ceux qu'il rencontre, et
surtout à sa portière, qu'il aime à effrayer:
Je viens de l'échapper belle! on se bat à la porte Saint-Denis. - Toutefois,
comme il s'est ennuyé la veille, il se prive le lendemain du plaisir de l'émeute.
Comme tous les jobards se ressemblent, et qu'ils forment la majorité de l'attroupement,
leur nombre diminue par enchantement, et l'attroupement s'évanouit.
Supposez, au contraire, que la troupe, la mobile ou la garde nationale s'en
mêlent. Le gamin s'excite à la vue des uniformes; il pousse, il anime le jobard;
il crie des *lam-pions* ou vive Barbès! ou à bas Thiers! (Tabatière).
La bousculade commence, les troupes manœuvrent, le tambour fait des roulements,
il y a des accidents et des émotions de toute nature; le filou travaille, le
brouillon attise le feu, le gamin est aux anges, et le jobard cherche à se
dépétrer le mieux qu'il peut. Mais comme il a été au spectacle, et qu'il a
eu des émotions gratis, il revient le lendemain se plaindre que le commerce
ne va pas; que l'autorité devrait bien prendre des mesures pour dissiper les
attroupements.
De ces observations personnelles, Jacques Bonhomme conclut :
1° Que ceux qui vont voir ce qu'il y a sont des niais;
2° Que l'autorité aurait pu se tenir sur ses gardes; mais qu'elle n'avait
nullement besoin d'une nouvelle loi sur les attroupements.
Jacques Bonhomme pense que si la Chambre faisait la constitution tout de suite,
elle contribuerait beaucoup à dissiper les attroupements. Qu'on se le dise.
---
Le citoyen ministre de la guerre a annoncé, dans la séance du 9, qu'un projet
de décret serait incessamment présenté au sujet du recrutement. On abolira
le remplacement, et on réduira considérablement la durée du service militaire.
Jacques Bonhomme espérait qu'on abolirait la conscription, et qu'on la remplacerait
par des enrôlements volontaires. Mais on n'a pas consulté Jacques Bonhomme.
[RC]
Patience! Jacques Bonhomme finira par crier si haut, qU'il faudra bien qu'on
l'écoute.
---
Jacques Bonhomme n'est pas content du résultat des élections. Jacques Bonhomme
pense qu'avec du rouge et du blanc on ne fera jamais une république tricolore.
Jacques Bonhomme avait une liste de conciliation ; il n'a voté ni pour Thiers
ni pour Thoré. Maïs puisque sa liste ne l'a pas emporté, Jacques Bonhomme se
félicite de ce que l'avantage a été partagé entre les deux listes. L'égalité
des forces rend l'oppression impossible.
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Jacques Bonhomme avait fait une petite économie. En attendant un placement
avantageux ou des mauvais jours qui sont venus, hélas! il avait mis une partie
de son pécule à la caisse d'épargne, et avec l'autre partie il avait acheté
un bon du Trésor, c'est-à-dire un billet du gouvernement à échéance fixe.
Le 24 février arrivé, Jacques Bonhomme a compris qu'il devait faire contre
mauvaise fortune bon cœur, car il aime la République et son pays.
En ce moment, Jacques Bonhomme se contenterait d'avoir l'équivalent de son
pécule en rentes sur l'État avec le montant desquelles il ferait ses affaires.
Le comité des finances de la Chambre a proposé un projet de loi dans ce sens.
Le citoyen ministre des finances a supplié l'Assemblée d'ajourner la discussion
de ce projet jusqu'après celle de son projet de loi sur les chemins de fer.
L'Assemblée, à laquelle il a promis un grand secret qui doit relever nos finances,
a voté comme il le désirait.
Jacques Bonhomme déplore amèrement cette décision; il se voit forcé d'ajourner
encore quelques créanciers qu'il aurait payés en vendant tout ou partie des
rentes qu'on lui aurait données, en échange de son bon du Trésor et de son
dépôt à la caisse d'épargne.
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Title: Étranger
Location: Page 2, right column.
French transcription
Étranger.
Rien de bien intéressant parmi les nouvelles de l'étranger. - En Espagne, une
bande de carlistes qui se promenait en armes à la frontière a fini par être
dispersée. - En Lombardie, l'armée italienne, commandée par le roi Charles-Albert
s'apprêtait à livrer une seconde bataille aux Autrichiens. Charles-Albert peut
disposer de 40,000 hommes et de 80 pièces de canon. Les Autrichiens ont encore
environ 30,000 hommes et 100 pièces de canon. Mais l'ardeur patriotique des
soldats italiens est telle, que l'issue de la lutte ne saurait être douteuse;
avant peu l'Italie sera débarrassée de la présence de l'étranger et maîtresse
de gouverner elle-même.
Jacques Bonhomme est bien joyeux de la tournure que prennent les affaires d'Italie:
d'abord, parce qu'il aime beaucoup le peuple italien, et qu'il s'est bien souvent
indigné de voir ce brave peuple contraint à partager son pain avec des soldats
étrangers; ensuite, parce que si les Italiens avaient été battus, on aurait
été forcé d'envoyer une armée à leur secours. Or, Jacques Bonhomme aime mieux
voir les enfants du peuple tenir le manche d'une charrue que la crosse d'un
fusil, el il est d'avis que le sang français est trop précieux pour qu'on le
prodigue.
A Naples: l'amiral français,a refusé de saluer le drapeau napolitain le jour
de la fête du roi. Jacques Bonhomme envoie ses compliments au brave amiral.
On ne doit pas saluer les assassins, même quand ils portent une couronne.
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Title: Advertisement
Location: Page 2, bottom right column.
French transcription
GUIDE-CHAIX
Nouveau guide de l'étranger à Londres,
précédé
de l'itinéraire de Paris à Londres,
Par Boulogne, Calais, le Havre et Dieppe.
Prix: 1 fr. 50 c.
Se trouve ``a la Librairie de N. CHAIX et Cie, rue Bergère, 8.
Le gerant, J. LOBET.
IMPRIMERIE CENTRALE DE NAPOLÉON CHAIX ET Cie , RUE BERGÈRE, 8.
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